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21 juin 2022 2 21 /06 /juin /2022 06:29
Victoire historique en Colombie ! Pour la première fois, le pays aura un président de gauche !

Victoire historique en Colombie ! Pour la première fois, le pays aura un président de gauche !

La gauche écrit l’histoire en Colombie

Présidentielle Gustavo Petro et sa colistière Francia Marquez obtiennent 50,44 % des voix face au millionnaire Rodolfo Hernandez. Un séisme politique qui dépasse largement les frontières du pays caporalisé par Washington.

Publié le Mardi 21 Juin 2022 - L'Humanité

Et soudain, l’explosion de joie. Sous la pluie, des milliers de Colombiens ont déferlé dans les rues de Bogota au son des tambours afin de célébrer la victoire historique de la gauche à la présidentielle. Une première depuis l’indépendance, un basculement pour ce pays de 50 millions d’habitants parmi les plus inégalitaires au monde. Sur la tour Colpatria, haute de 196 mètres, siège de la banque du même nom, le visage du vainqueur : Gustavo Petro. D’aucuns y verront un symbole.

Le séisme politique dépasse largement les frontières du pays, jusqu’alors caporalisé par les États-Unis et acteur des tentatives de déstabilisation des gauches du sous-continent, notamment de son plus proche voisin, le Venezuela. L’ex-guérillero et sénateur, qui représente la coalition du Pacte historique, devance de peu (50,44 %) le millionnaire outrancier, officiellement sans parti, mais main dans la main avec l’extrême droite, Rodolfo Hernandez (47,31 %), les 2,3 % restants étant des bulletins blancs. Le magnat de l’immobilier, qui a mené l’essentiel de sa campagne sur les thèmes du « dégagisme » à partir du réseau social favori des jeunes, TikTok, a immédiatement reconnu sa défaite sur Facebook. Le score – serré – laisse néanmoins entrevoir une société fortement bipolarisée, prétexte à une opposition parlementaire systématique.

une campagne électorale sous vives tensions

Le président sortant, Iván Duque (Centre démocratique), qui a plongé la droite dans une déroute sans précédent, la privant de second tour, a lui aussi joué la carte de la démocratie, en appelant Gustavo Petro pour le féliciter : « Nous sommes convenus de nous rencontrer dans les prochains jours pour entamer une transition harmonieuse, institutionnelle et transparente. » Sa déclaration, toutefois, ne lève pas totalement l’hypothèse de la violence armée et d’une agitation provoquée dans la rue par les pans les plus extrémistes. Pour mémoire, la campagne électorale s’est déroulée sous vives tensions : Gustavo Petro et sa colistière afro-colombienne, Francia Márquez (lire son portrait ci-contre), ont fait face à des menaces de mort des groupes paramilitaires, les empêchant de mener campagne dans certaines régions ou les obligeant à prendre la parole derrière des boucliers balistiques.

La participation qui s’établit à 58 % est, quant à elle, la plus haute enregistrée depuis le début du millénaire. « Le gouvernement qui entrera en fonction le 7 août sera celui de la vie, de la paix, de la justice sociale et de la justice environnementale ! » a lancé Gustavo Petro à la foule de ses partisans. Candidat pour la troisième fois, le sénateur est loin d’être un novice. Il a patiemment construit son image de premier opposant aux présidents de droite successifs, théorisant la « parapolitique », c’est-à-dire les relations entre les conservateurs et les milices chargées de liquider adversaires politiques et syndicaux.

Porté par le mouvement social de 2021, Gustavo Petro a pour lui la construction d’une dynamique sociale et l’agrégation d’un pan de la jeunesse qui, pour l’heure, tournait le dos aux urnes. Ils étaient nombreux à se joindre à la liesse, dimanche soir, dans les rues de la capitale. L’écologiste Francia Marquez n’y est pas étrangère. Dans un pays où le racisme est exacerbé, où la transition née des accords de paix de 2016 avec les Farc a été torpillée par le pouvoir, la candidate à la vice-présidence est parvenue à lier ces questions à celles de justice sociale, climatique et d’égalité de genre. « Nous avons franchi un pas important. Nous avons un gouvernement du peuple, un gouvernement des gens qui vont à pied, un gouvernement pour ceux qui ne sont rien. (…) Ensemble, nous allons réconcilier cette nation, dans la joie et la paix. Je suis la première femme afro-descendante vice-présidente de Colombie », a-t-elle insisté, dimanche soir. Ils pourront compter sur le deuxième groupe politique à la Chambre des représentants et une position dominante au Sénat, à égalité de sièges toutefois avec le parti conservateur.

Une victoire qui intéresse toute l’amérique latine

L’ensemble du spectre de la gauche latino-américaine a mesuré le bouleversement que constituait la victoire du Pacte historique pour le sous-continent. Ainsi en va-t-il du président vénézuélien Nicolas Maduro : « Des temps nouveaux se profilent à l’horizon pour ce pays frère », a-t-il apprécié. Si le président péruvien Pedro Castillo a assuré le « soutien » de son pays à son « frère Gustavo », le président chilien Gabriel Boric a, quant à lui, mis l’accent sur les possibilités offertes en termes d’intégration régionale : « Je suis heureux pour l’Amérique latine ! Nous travaillerons ensemble pour l’unité de notre continent face aux défis d’un monde qui change rapidement. En avant ! » Même tonalité du côté de l’Argentine, où le président Alberto Fernández, qui, dans le sillage de la guerre russo-ukrainienne, a effectué dans l’urgence une tournée européenne, a insisté sur les « temps qui exigent la solidarité maximale entre les peuples frères » alors que, d’avril 2021 à avril 2022, l’inflation a dépassé 58 % dans le pays. Tous ont désormais les yeux tournés vers le Brésil, qui pourrait, à la faveur de la présidentielle de cet automne, lui aussi consacrer le retour de la gauche. 

Francia Marquez, le visage du progrès social

Figure de la lutte antiraciste, l’écologiste et féministe a accédé à la vice-présidence. Francia Marquez est la première femme afro-colombienne à parvenir à ce poste.

Publié le Mardi 21 Juin 2022 - L'Humanité

Devant la foule venue célébrer la victoire de la gauche, dimanche à Bogota, Francia Marquez arborait son habituel sourire. Son énergie débordante ne l’a jamais quittée au fil d’une campagne pourtant jonchée de menaces de mort. Il faut dire qu’elle y est habituée. Ses engagements pour les droits des femmes, des Afros-Colombiens et son activisme environnemental ont toujours été accompagnés de violentes oppositions.

militante dès ses 13 ans

Francia Marquez, 40 ans, est originaire de la région de Cauca, dans le sud-ouest du pays. Un territoire où vivent près de 250 000 descendants d’esclaves venus d’Afrique qui ont été forcés à travailler dans les mines et les haciendas. La population actuelle voit ses richesses pillées par des multinationales et subit de plein fouet le racisme systémique. Dès l’âge de 13 ans, Francia Marquez porte la voix de sa communauté pour s’opposer à un projet de barrage. Un militantisme qui s’accompagne rapidement de responsabilités familiales. À 16 ans, elle accouche de son premier enfant et l’élève seule. Pour subvenir à ses besoins, elle travaille tour à tour dans une mine d’or, puis en tant que femme de ménage. Ce qui ne l’empêche pas, en parallèle, de contribuer à repousser les incursions de multinationales minières dans sa région d’origine. En outre, Francia Marquez défend les femmes noires victimes de racisme et de violences sexuelles. « Il faut tout un processus pour s’accepter, c’est difficile avec tous ces clichés sur les femmes afros : qu’elles sont des prostituées, obsédées par le sexe… » confiait-elle à Jeune Afrique, en 2018.

« Je vis dans la peur »

Son combat pour l’écologie lui a valu d’obtenir, en 2018, le prix Goldman pour l’environnement. Cette distinction récompense la marche de plus de 560 kilomètres qu’elle a lancée en 2014 et qui a abouti au retrait des mineurs illégaux dans la région de Cauca. À l’époque, Francia Marquez était harcelée, méprisée et menacée. Pour des raisons de sécurité, elle a même été obligée de déménager. Mais son engagement n’a pas faibli. Et les violences non plus. Le 4 mai 2019, la militante réchappe à une attaque armée alors qu’elle préparait une réunion avec d’autres activistes. « Je vis dans la peur constamment, je me retourne toujours dans la rue pour voir si on me suit », déclarait-elle, déjà, en 2018.

Le 15 août 2020, l’afro-descendante se consacre entièrement à la vie politique. « Je veux être candidate de ce pays », écrivait-elle dans un tweet. Deux années suffiront pour qu’elle obtienne la troisième place à la primaire présidentielle du Pacte historique et qu’elle soit désignée comme colistière par Gustavo Petro. Pendant la campagne, Francia Marquez navigue entre les injures racistes, affronte de nouvelles menaces de mort, mais continue de défendre les plus précaires. Jusqu’à la victoire. Francia Marquez s’apprête à diriger un nouveau ministère de l’Égalité en charge des droits des femmes, des jeunes et des minorités ethniques ou sexuelles. La voix de ceux que l’on n’entendait pas résonne désormais dans tout le pays. 

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