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18 novembre 2020 3 18 /11 /novembre /2020 16:45
Ne laissons pas la culture en berne - Lettre ouverte de Pierre Dharréville à Roselyne BACHELOT, Ministre de la Culture

Ne laissons pas la culture en berne

Lettre ouverte à Madame Roselyne BACHELOT, Ministre de la Culture

 

Le 2 novembre 2020

Madame la Ministre,

Comment prendre soin de nous sans se préoccuper de culture ?A chaque étape, à chaque prise de parole, à chaque décision de l’exécutif elle semble être le cadet de tous les soucis alors qu’elle nous est absolument vitale, et en période de crise peut-être plus encore.

Les choix opérés par le gouvernement ont provoqué de vives réactions parmi l’ensemble de ses acteurs. En effet, depuis quelques mois, le monde de la culture, particulièrement négligé par les mesures d’accompagnement, avait recommencé à imaginer des formes de représentation,d’expression et de rencontres. Et c’était la possibilité à nouveau de goûter à cette nourriture essentielle, de se retrouver et de se projeter.L’annonce du reconfinement a provoqué un profond désarroi dans tout le pays. Et l’absence criante de la culture dans le discours du Président de la République a été vécue comme une violence. Une violence symbolique qui s’est traduite dans les mesures annoncées contre elle par le Premier ministre. Cela donne le sentiment qu’au ministère de la culture, on a mis la clef sous le paillasson.

Beaucoup de femmes et d’hommes ont eu l’impression de recevoir un nouveau coup sur la têteau moment où ils commençaient à la sortir de l’eau. La fermeture des théâtres et des cinémas pendant le couvre-feu avait déjà donné le ton : la culture est tenue pour quantité négligeable.

Et dans les dernières annonces, le symbole le plus consternant a été le sort fait aux librairies,contraintes à la fermeture, alors même que le risque sanitaire n’y est pas plus élevé que dans une grande surface. Seuls les commerces décrétés essentiels pouvaient demeurer ouverts et les librairies n’en faisaient pas partie. Les bibliothèques elles-mêmes étaient appelées à se contenter d’un système de guichet.Comment est-il possible que les livres ne soient pas considérés comme relevant de l’essentiel ?Devant la levée de boucliers, la solution a été d’interdire toute vente directe de livres et de produits culturels dans les grandes surfaces...

De mieux en mieux ! Ainsi, on peut se procurer des fournitures de bureau et des ordinateurs(avec les contenus des GAFAM qui vont bien dedans), mais pas des livres, dont on peut souligner, pour s’en tenir là qu’ils sont tout aussi indispensables que la technique pour le travail.Cet acharnement contre le livre est vertigineux. Il laisse par ailleurs un boulevard à Amazon et consorts. Mais cela n’a pas l’air de poser tellement problème puisque vous vous contentez d’un vague appel à ne pas y avoir recours.

 

Dans tous les domaines de l’art, de la création et de la culture, on est meurtri de voir mis sous l’éteignoir tout ce qui nous fait humain, tout ce qui peut nous permettre de résister aux monstruosités des temps présents, tout ce qui peut nous permettre de nous placer en situation de mobilisation plutôt que de passivité.Même l’école, dans ce contexte, est privée de ses liens avec les lieux d’expression, de création et de médiation. Les figures imposées aux professeurs nient la vitalité de la rencontre qui se joue dans l’acte d’enseigner. Au point de transmettre un texte arrangé de Jean Jaurès. Quel exemple !

Reconnaissez que la mise en perspective de ces choix prête à interprétation : le gouvernement donne le sentiment depuis longtemps que la culture est à ses yeux plutôt un obstacle à la construction d’une société obéissante et aseptisée. Elle ne saurait être réduite ni à l’état de divertissement plaisant, ni à un objet de la marchandisation.Le tissu culturel de notre pays est malmené depuis des années, et cela n’est pas sans conséquences sur l’ensemble de la société.Nous appelons à trouver d’urgence les formes adaptées, dans ce moment de rétractation et de repli qui abîme toute la société, d’une activité culturelle continuée.

Les acteurs du monde des arts, de la culture et de l’éducation populaire ont des propositions à faire pour ne pas sacrifier cette dimension essentielle de nos vies.C’est pourquoi vous devez leur donner la parole, agir avec elles et avec eux afin d’éviter l’aplasie qui fragiliserait encore notre société face à l’adversité.

En rester là serait un signal terrible, affaiblirait notre capacité de réaction individuelle et collective, et produirait immanquablement un étouffement de l’imaginaire. Et par conséquent un possible recul de civilisation.

Nous continuons d’en appeler à la culture pour penser nos vies dans l’épreuve et après l’épreuve, pour guérir ensemble, imaginer l’avenir et réinventer la liberté.Madame la Ministre, face à l’ampleur de la question posée, le gouvernement ne peut ni se dérober ni faire semblant : le monde de la culture attend des paroles et des actes en rapport avec ses exigences vitales.

 Pierre Dharréville, député communiste des Bouches-du-Rhône

Délégué national à la culture du PCF

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