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13 mars 2017 1 13 /03 /mars /2017 19:02
Macron : Un programme éducatif peu cohérent 

 

Préféré des enseignants, Emmanuel Macron a présenté le 2 mars son programme. Difficile de  dégager une logique dans un programme où les préconisations peuvent s'opposer. Le meilleur point, la baisse réelle du nombre d'élèves en éducation prioritaire au cycle 2, s'opposant a ce qui semble être le pire, la mise en concurrence ouverte des établissements et des écoles.  E Macron promet de défaire en partie la politique menée depuis 2012. L'Ecole a-t-elle vraiment besoin d'un nouveau "stop and go" ?

Le préféré des profs

 

Chouchou des enseignants, Emmanuel Macron est crédité, selon le Cevipof, de 29% des intentions de vote au premier tour, ce qui est davantage que dans les autres catégories de la société. Cela le met devant B Hamon (25%), JL Mélenchon (16%), Fillon (15%) et Le Pen (8%).

Peut-être est ce pour cela que l'éducation tient une place à part dans le programme d'E Macron : " Le premier chantier sera celui de l’éducation et de la culture", dit-il, mettant en avant le souci de cohésion nationale.

 

Autonomie des établissements

 

La mesure phare du programme d'E Macron c'est l'autonomie des écoles et établissements. "Aujourd’hui : les chefs d’établissement et les équipes pédagogiques bénéficient de peu de latitude pour individualiser les parcours et s’adapter au contexte local... Demain : les chefs d’établissements et leurs équipes auront davantage de liberté dans l’élaboration de leur projet pédagogique, en contrepartie d’une responsabilisation accrue et d’une évaluation plus régulière", dit-il. Jusqu'où irait l'autonomie ? Peut être jusqu'au recrutement des enseignants et des élèves et l'organisation des enseignements. Come les "équipes pédagogiques" n'ont pas d'existence légale, l'autonomie sera-t-elle surtout celle des chefs d'établissements et directeurs ?

Selon le programme, les communes pourront organiser librement le temps scolaire, ce qui leur donnera la latitude de revenir sur la réforme des rythmes et sans doute sur le nombre de jours de classe.

 

12 élèves par classe en cycle 2

E Macron annonce la limitation  à 12 élèves par classe des effectifs élèves dans les 12 000 classes de CP et CE1. Cela représente 6 000 postes qu'ils souhaite prélever sur les 54 000 créés sous Hollande, c'est à dire probablement au lycée. E Macron embaucherait 4 à 5000 enseignants supplémentaires sur le quinquennat, sans que le fléchage soit justifié.

Dans l'éducation prioritaire, les enseignants bénéficieraient d'une indemnité revalorisée à hauteur de 3000 euros par an. L'objectif c'est d'avoir des enseignants plus expérimentés (au moins 3 ans dit le programme).

 

Des avancées annulées par d'autres mesures

 

Ce soutien aux établissements difficiles est malheureusement annulé par d'autres mesures comme la mise en concurrence généralisée des écoles et établissements. En effet chacun devra publier ses résultats et chacun aura "une autonomie pédagogique et une autonomie de recrutement". On pourrait voir s'accentuer la ségrégation entre établissement.

La réforme du bac, réduit à 4 épreuves, devrait accentuer les inégalités de réussite, si l'on en croit une étude du Cnesco.

De la même façon, l'avantage accordé  aux enseignants de l'éducation prioritaire, pourrait être annulé par une autre mesure du programme Macron : la mise en place d'un seul système de retraite. Si les enseignants passaient, avec les autres fonctionnaires, au régime général, cela se traduirait par une hausse des prélèvements.

E Macron est peu convaincant sur la réussite des élèves. Il veut l'améliorer  par la mise en place d'évaluations nationales depuis la grande section de maternelle jusqu'en 3ème. L'évaluation généralisée devrait conduire à un pilotage plus étroit en opposition avec la volonté d'autonomie. On se rappelle la volonté de N Sarkozy d'évaluer l'efficacité de chaque enseignant à travers ces évaluations nationales. L'autre mesure, la multiplication de l'accompagnement scolaire en faisant appel à des volontaires bénévoles, semble aussi un peu légère par rapport à un enjeu aussi fondamental.

 

Des mesures déjà existantes

 

D'autres mesures ont davantage retenu l'attention des médias. Ainsi E Macron veut "interdire l'usage du téléphone portable à l'école et au collège". L'article L511-5 du Code de l'éducation établit pourtant déjà que "dans les écoles maternelles, les écoles élémentaires et les collèges, l'utilisation durant toute activité d'enseignement et dans les lieux prévus par le règlement intérieur, par un élève, d'un téléphone mobile est interdite". Difficile d'aller plus loin sans se mettre les parents à dos.

E Macron veut aussi "un enseignement du fait religieux".  Celui-ci est déjà au programme, notamment dans les cours d'histoire. Introduire une nouvelle discipline "fait religieux" à l'école semble bien difficile et pas très productif.

Si l'éducation est "la priorité" d'une éventuelle présidence Macron, la partie éducation de son programme semble encore à travailler.

 

François Jarraud

 

Le programme Education

 

 

 

***

Quelques jours après la manifestation du 5 mars soutenue notamment par des organisations proches des écoles hors contrat réactionnaires, François Fillon annonce le 9 mars à Besançon qu'il veut que l'Etat les finance. C'est un élément du nouveau programme éducatif de François Fillon en nette rupture avec les politiques menées depuis plusieurs quinquennats. Un programme qui se présente comme traditionaliste mais qui en fait applique les recettes du New Public Management : paye au mérite, autonomie, responsabilisation allant jusqu'au tri précoce des élèves.

 

Stop and go

 

"Les programmes de l’enseignement obligatoire ont été « allégés » et leur simple lecture est incompréhensible pour les parents, et même parfois pour les professeurs. Les nouveaux programmes d’histoire négligent la chronologie et font l’impasse sur le « récit national »... Professeurs, chefs d’établissement, inspecteurs qui ont choisi leur métier parce qu’il incarnait une haute idée du savoir sont découragés. Découragés de recevoir des instructions fabriquées par une caste de pédagogues déconnectés. Découragés de voir que les objectifs de mérite et d’excellence sont bannis de l’école".

A Besançon le 9 mars, le candidat des Républicains n'a eu de mots assez durs sur les réformes menées depuis 2012. Réformes pour lesquelles il veut le grand soir : l'abrogation des rythmes scolaires, chaque collectivité territoriale décidant du temps scolaire ,et abrogation de la réforme du collège, chaque établissement devenant autonome.  

 

Financement du privé hors contrat

 

F Fillon annonce un large financement du privé. Il veut "faire commencer la scolarité obligatoire à cinq ans au lieu de six". Cette mesure vise surtout à faire financer par l'Etat une année de maternelle du privé sous contrat. Le candidat veut même aller plus loin et gommer encore davantage la séparation entre public et privé en prenant en compte les écoles hors contrat ,proches il est vrai de ses soutiens. " Dans les zones de revitalisation rurale et les zones urbaines sensibles, l’Etat soutiendra la création d’établissements publics ou privés indépendants et innovants". Evoquant les écoles Espérances banlieue, proches de la droite extrême, F Fillon annonce qu'il subventionnera les écoles hors contrat. " L’Etat ne devra plus s’opposer à cette nouvelle offre éducative issue de la société civile ; il devra leur faciliter la tâche et les aider".  

 

Autonomie des établissements

 

Au primaire,  Filon déroule un programme traditionaliste tout en confiant l'organisation du temps scolaire à chaque commune. "Je veux concentrer les trois quarts du temps de l’enseignement élémentaire sur le socle de connaissances : lecture, calcul, écriture, grandes dates et grands personnages de l’histoire de la Nation, géographie de la France et de ses régions.. Je veux laisser aux collectivités territoriales la liberté de décider de l’organisation du temps scolaire."

Dans le secondaire c'est l'autonomie des établissements qu'il revendique en précisant que c'est le rôle du chef d'établissement et le statut des enseignants qui doivent changer. " Je revaloriserai les traitements des enseignants en tenant compte de leur mérite et en leur demandant d’être plus présents dans l’établissement. Je confierai progressivement aux chefs d’établissement du second degré le choix de  leurs personnels... Pour le collège, je veux abroger la réforme de Mme Vallaud-Belkacem ".

 

Suppressions de postes

 

Les suppressions massives de postes de fonctionnaires passeraient par le lycée. F Fillon envisage de réduire à 4 disciplines l'enseignement qui y sera donné. " Il faut permettre à chaque élève de première et de terminale de se concentrer davantage sur les matières qui le prépareront le mieux à la suite de son parcours. Je veux revaloriser le baccalauréat en réduisant à 4 le nombre d’épreuves". Pou r le post bac il instaurerait la sélection à l'entrée dans le supérieur. "Les universités devront faire connaître aux lycéens, pour leurs différents parcours de licence, les épreuves qu’elles recommandent de choisir au baccalauréat". Les suppressions de postes passeront aussi par l'enseignement professionnel qui passera aux régions. Le personnel deviendrait fonctionnaires territoriaux.

 

Tri des élèves

 

Reste la pédagogie. F Filon veut rétablir l'uniforme. Mais il a surtout la solution aux difficultés des élèves en créant une filière poubelle. "Je veux que les élèves qui sont exclus définitivement par le conseil de discipline, soient inscrits dans des établissements adaptés afin qu’ils modifient leur comportement et se remettent sur la voie des apprentissages scolaires fondamentaux". Leurs parents seront sanctionnés par la suppression des allocations de rentrée, des allocations familiales et des bourses.

Petite touche finale, F Fillon supprimera "le Conseil supérieur des programmes créé par la gauche, parce que ses choix et son idéologie ont contribué à l’affaiblissement de notre système éducatif". Et surtout parce que dans des établissements autonomes, voire ouvertement anti républicains, il n'est plus besoin de programmes nationaux

 

Le discours

L'échec du New Public Management

F Fillon etle grand changement

Hors contrat : Un rapport inquiétant

 

***

 

Le Front national construit l'école de la revanche 

Pour Marine Le Pen le projet du Front national pour l'Ecole c'est "l'école du mérite". Présentant le 22 septembre les "100 propositions" des Collectifs Racine, le mouvement lancé par le Front pour pénétrer le monde enseignant, la présidente du Front national n'a eu de cesse de fustiger  "les dogmes pédagogistes qui ont miné toute autorité et tout mérite personnel". Une condamnation qui soude des troupes  assez disparates où se cotoient des partisans du retour "au bon vieux temps", des corporatistes pointilleux et des obsédés de "l'assimilation". Cela donne des propositions écrites au négatif et à l'encre rouge. Alors que l'Ecole française joue au détriment des enfants de son électorat populaire, le Front échoue à proposer un projet éducatif qui porte ses ambitions.

 

Folies pédagogistes et foutaises...

 

 Nous avions croisé une première fois le Collectif Racine, un mouvement lancé par le Front national pour regrouper les enseignants, en 2014. A quelques mois d'une élection que le Front national est en mesure d'emporter, aller voir où en est le mouvement et ce qu'il propose pour l'Ecole s'impose.

 

En 2014, nous avions croisé très peu d'enseignants du primaire et du secondaire dans une réunion parisienne du Collectif. En juin 2016, selon une étude du Cevipof, 9% des enseignants déclarent vouloir voter pour Marine Le Pen au 1er tour des présidentielles. Mais le 22 septembre, la rencontre nationale des collectifs n'a pas fait le plein. Elle réunit environ 200 militants, dont beaucoup d'étudiants.

Marine Le Pen fustige les réformes réalisées dans l'Ecole qui sont "des bombes à retardement". "Le temps des folies pédagogistes a trop duré", dit -elle."Sui on veut reconstruire l'école il faut en finir avec les dogmes pédagogistes qui ont miné toute autorité et tout le mérite personnel". La présidente du FN retient 3 points : consacrer la moitié du temps d'école au primaire à l'apprentissage du français, supprimer le collège unique, rétablir la sélection à l'entrée de l'université. C'est au nom du "mérite" que sont présentées les 100 propositions du Collectif Racine.

 

Le retour aux années 1960...

 

Les 100 propositions du Collectif Racine additionnent des mesures à visée assimilationnistes, une nébuleuse d'intérêts corporatistes jusqu'au détail, avec des mesures qui ramènent l'école aux années 1960.

Dans les 100 mesures c'est le retour au passé qui domine. "Il faut mettre le savoir au centre. Le professeur n'est pas l'égal de l'élève. La notation est le meilleur système d'évaluation". Valérie Laupies, directrice d'école et conseillère régionale FN, se fait applaudir sur des propositions qui sentent la naphtaline.

On appréciera ainsi la proposition 43 qui veut "instaurer le cours magistral à tous les niveaux dans toutes les disciplines", ce qui changerait un peu les maternelles... La proposition 3 proscrit "les pseudos enseignements ludiques". La suivante fait de la méthode syllabique la seule méthode autorisée. La 44 instaure partout la note. Le Collectif veut aussi supprimer la réforme des rythmes et remplacer les TAP par des études surveillées, instaurer l'uniforme, supprimer le collège unique en rétablissant l'orientation en fin de 5ème vers le professionnel.

 

Une addition de corporatismes

 

Mais les propositions portent aussi les corporatismes les plus recuits, que l'on sent préparés dans les détails depuis des lustres.  Pierre Miscevic, professeur de lettres en Cpge plaide pour créer un corps de "professeurs d'excellence" enseignant... en CPGE. Marc Chapuis, professeur de maths en CPGE présente une refonte de la filière S : on élimine 30 000 élèves indignes d'être là, puis on crée 3 sous filières de façon à dégager un noyau de mathématiciens limité à 15 000 élèves... Daniel Philippot, directeur d'école retraité, demande la création d'un corps de directeurs d'école qui auraient toute autorité sur les professeurs. Le écoles deviendraient des établissements publics. Ces points se retrouvent dans les 100 propositions.

D'autres lobbys ont su aussi se faire écouter. Le Collectif demande la création d'un corps de "professeurs d'informatique" avec un enseignement en lycée et en série scientifique. Un autre enseignement civisme et droit serait créé ce qui permettrait aussi de supprimer l'enseignement de la philosophie en série technologique.

 

Rien pour les milieux populaires ?

 

Un troisième courant se lit dans les propositions. Le collectif veut "l'assimilation" des éléments hétérogènes. C'est le but de l'enseignement Civisme et droit. Il veut interdire tout signe religieux dans le supérieur et mettre fin aux repas de substitution et même à l'enseignement de langues étrangères  jugées communautaires.

Au final, les milieux populaires qui votent pour le Front n'y trouveront pas leur compte. Le Collectif promet de rétablir l'ordre dans les établissements prioritaires grâce à des super profs volontaires, une mesure qui ne colle pas avec une proposition plus sérieuse : abaisser le nombre d'élèves par classe en REP.  Si le Collectif veut rapprocher les séries technologiques et professionnelles (proposition 41) c'est bien parce que, vu des Cpge et des filières d'élite, tout ça c'est un peu  la même chose...

 

François Jarraud

 

2014 le collectif Racine

Etude Cevipof

(source Café Pédagogique)

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