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10 juin 2016 5 10 /06 /juin /2016 05:44
Arnaud Mimran et Netanyahou à Monaco (Médiapart)

Arnaud Mimran et Netanyahou à Monaco (Médiapart)

Mafia du CO2: les nouvelles connexions d'Arnaud Mimran avec le clan Netanyahou

9 JUIN 2016 | PAR FABRICE ARFI

Des documents officiels montrent que le sulfureux millionnaire Arnaud Mimran a créé en Israël une société avec le député français Meyer Habib, homme de confiance de longue date de Benyamin Netanyahou. L'entreprise a été constituée juridiquement et domiciliée par le cabinet de l'avocat et confident du premier ministre israélien.

Ce n’est plus une relation, c’est un système. Des documents obtenus par Mediapart et Haaretz mettent en lumière des connexions nouvelles entre Arnaud Mimran et le clan du premier ministre israélien Benyamin Netanyahou, embourbé depuis plusieurs semaines dans le scandale de ses liens financiers et amicaux avec le millionnaire français.

Mimran est notamment soupçonné par la justice française d’être l’un des organisateurs du “casse du siècle”, la fraude aux quotas carbone, qui porte sur 283 millions d’euros le concernant avec ses complices présumés – le montant total de l’escroquerie s’élève à 1,7 milliard d’euros (au bas mot) détournés en moins de huit mois au nez et à la barbe de l’État.

Arnaud Mimran, contre lequel le procureur de la République a requis fin mai dix ans de prison ferme lors du procès du CO2 – jugement le 7 juillet –, est par ailleurs mis en examen à Paris dans un dossier criminel d’enlèvement, séquestration et extorsion de fonds en bande organisée ; et son nom est également cité dans plusieurs affaires de meurtre liées directement ou non au CO2, sans aucune mise en cause judiciaire à ce jour.

Depuis les premières révélations de Mediapart et Haaretz au mois de mars sur les liens entre Mimran et Netanyahou, le chef du gouvernement israélien a changé à trois reprises de version, montrant une extrême fébrilité sur le sujet. Ainsi, après avoir d’abord démenti bien connaître l’escroc présumé (malgré la publication de photos dévoilant leur proximité en vacances à Monaco), puis après avoir démenti la moindre relation d’argent entre eux, Netanyahou a fini par reconnaître avoir perçu 40 000 dollars de sa part au début des années 2000.

Mimran, qui a lui aussi varié dans ses déclarations au fil du temps, a d’abord parlé d’un versement d’un million d’euros puis, à la suite des démentis gênés de Netanyahou, a évoqué la somme de 170 000 euros et le paiement de voyages et vacances en France, à hauteur de 150 000 euros supplémentaires.

Une chose, en revanche, est certaine : Mimran apparaissait sous son seul prénom, dès 2002, dans le carnet secret des grands donateurs internationaux de Netanyahou, rédigé par l’actuel premier ministre en personne.

Mais les liens entre Mimran et la galaxie Netanyahou ne s’arrêtent en réalité pas là : Arnaud Mimran a créé en 2006, en Israël, une société baptisée Track Performance Ltd, dont il est l’unique dirigeant. Or des documents issus du registre israélien des sociétés concernant Track Performance dévoilent de nouvelles ramifications embarrassantes pour le premier ministre d’Israël, qui viennent confirmer et amplifier de premières informations diffusées en Israël par le quotidien économique Globes.

Au capital de cette société figure en effet le député français Meyer Habib (25 % des parts), à la fois ami d’Arnaud Mimran et intime du chef du gouvernement israélien dont il est, en France, le représentant personnel.

La société Track Performance Ltd, dont l’objet social est très flou (« agir dans toute activité légale »), a par ailleurs été montée juridiquement par le cabinet de l’avocat David Shimron, conseil et confident de longue date de Netanyahou. C’est d’ailleurs à son cabinet de Tel Aviv que l’entreprise est domiciliée. Interrogé, l’avocat affirme, sans autre forme de précision, qu’« il est possible qu’un ancien partenaire de notre cabinet ait fourni à Mimran des services juridiques ». « Mais cela n’a rien à voir avec M. Netanyahou », assure-t-il.

Parmi la liste des actionnaires de cette mystérieuse société se trouve également un certain Pierre Denain (10 % des parts), un autre ami d’Arnaud Mimran, dont le nom a, lui aussi, été cité dans la monumentale escroquerie au CO2. D’après les éléments bancaires découverts par la douane judiciaire française, Denain avait en effet versé depuis son compte HSBC aux États-Unis, le 9 janvier 2009, 350 000 dollars à Mimran, sur un compte ouvert à la Safra Bank.

Cette somme avait ensuite été investie directement par Mimran dans la fraude au CO2, d’après plusieurs documents judiciaires. Denain, qui a échappé à des poursuites, avait assuré aux enquêteurs avoir prêté de l’argent à Mimran pour le « dépanner », « à l’amitié », sans contrat ni garantie. Sollicité à plusieurs reprises, il n’a pas retourné nos appels.

Netanyahou dénonce une « persécution politique »

L’ex-femme d’Arnaud Mimran, Anna Dray, dont le père milliardaire, Claude, a été mystérieusement assassiné en octobre 2011 dans sa villa ultrasécurisée de Neuilly-sur-Seine, apparaît également dans le pacte d’actionnaires de Track Performance Ltd, à hauteur de 10 %.

Contactée, elle affirme pourtant n’avoir aucun lien avec cette société. « C’est très grave ! Je n’ai jamais rien signé. Je ne sais rien de cette entreprise », s’étouffe-t-elle à la découverte des documents. Anna Dray affirme réfléchir à d’éventuelles poursuites en Israël pour comprendre comment son nom a pu atterrir dans les statuts de Track Performance. Détail surprenant : d’après les éléments déposés au registre du commerce israélien, Anna Dray serait domiciliée au… Chili. « C’est bien simple : je n’y ai jamais mis les pieds », jure-t-elle.

Également interrogé au sujet de Track Performance, le député français Meyer Habib affirme qu’Arnaud Mimran« souhaitait [le] faire figurer dans cette société parce qu’[il] connaissait bien Israël ». « Mais, à ma connaissance, cette société n’a jamais eu la moindre activité, n’a jamais fait le moindre chiffre d’affaires, n’a jamais eu de compte en banque et, en toute certitude, ne m’a jamais rapporté le moindre centime », ajoute-t-il. Pas d’activité, pas d’objet social, pas de compte en banque, pas de chiffre d’affaires et encore moins de dividendes : c’est à se demander pourquoi Track Performance, qui n’a plus déposé aucun rapport d’activité depuis 2009 et n’a pas payé sa taxe annuelle, a été créée…

« Arnaud Mimran, qui, comme vous le savez était un ami, est issu d’une très honorable famille dont le père a été décoré en 2006 par le ministre du budget en personne à Bercy [Jean-François Copé – ndlr] », ajoute encore le député UDI. Le parlementaire franco-israélien oublie seulement de préciser que le père en question, Jacques Mimran, ancien numéro 3 du groupe Vinci, avait été le principal condamné en 2002 d’une affaire de corruption concernant le chantier du TGV Nord et qu’il a été, de ce fait, déchu en 2009 de l’ordre de la Légion d’honneur, reçue en effet des mains de Jean-François Copé trois ans plus tôt sous les ors de la République.

Proche de Mimran, qu’il a côtoyé de près pendant des années, Meyer Habib est depuis de longues années indissociable de Benyamin Netanyahou (voir ci-dessous la vidéo de soutien du second pour la campagne législative de 2013 du premier). Il est, pour la France, son double, son ambassadeur personnel. Et aussi l’un de ses généreux financeurs. Dans le carnet secret de ses donateurs, révélé dès 2011 par le journaliste israélien Raviv Drucker, Netanyahou avait également fait figurer aux côtés du nom d’Arnaud Mimran celui de Meyer Habib, bijoutier de profession. D’après ce document et des factures retrouvées par la presse israélienne, la société du député, le groupe Vendôme, avait même pris à sa charge au début des années 2000 d’onéreux déplacements et séjours de Benyamin Netanyhaou et sa famille en France. Ce que Habib dément.

Il ne dément pas en revanche être un point de contact important entre Mimran et Netanyahou. Selon des déclarations faites par Arnaud Mimran lui-même lors du procès du CO2 à Paris, puis à la télévision israélienne, l’organisateur présumé du “casse du siècle” avait ainsi fêté en 2009, dans un hôtel, avec Meyer Habib et Benyamin Netanyahou l’accession à la tête de l’État de ce dernier. Ni l’un ni l’autre n’ont infirmé à ce jour ces informations.

D’après des témoignages recueillis ces derniers jours par Mediapart, Mimran et Netanyahou se seraient à nouveau croisés en 2010 à Jérusalem à l’occasion de la bar-mitsva d’un fils de Meyer Habib. Interrogé sur ce point, le député français n’a pas souhaité répondre.

L’affaire Mimran est devenue en Israël un poison pour le chef du gouvernement, déjà très affaibli politiquement. Elle fait l’ouverture des journaux télévisés et des radios, elle est à la une de toute la presse. Sous la pression de députés d’opposition, le procureur général d’Israël a également décidé d’examiner le dossier pour voir s’il y a lieu d’ouvrir une enquête criminelle.

Lors d’un déplacement en Russie le 7 juin, Benyamin Netanyahou a été interrogé sur l’affaire, sous le regard presque amusé de Vladimir Poutine. Le premier ministre israélien a qualifié les révélations de la presse, en premier lieu de Mediapart et deHaaretz, de « persécution politique systématique ». « La montagne accouche d’une souris », a voulu convaincre Netanyahou qui, cerné par les affaires, ressemble de plus en plus à un Berlusconi ou un Sarkozy israélien.

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