On le sentait, Jean-Luc Mélenchon ne pensait qu'à ça depuis 2012, se remettre en selle pour les fièvres narcissiques d'une nouvelle campagne présidentielle où le candidat de la gauche de gauche de toute façon ne pouvait être que lui, selon lui.
C'est désormais chose faite, Jean-Luc Mélenchon a annoncé sa candidature aux Présidentielles sur TF1 hier soir, refusant "la petite scène des (hypothétiques) primaires de la gauche", sans qu'elle fasse l'objet de discussions ou d'une validation collective impliquant les différentes composantes et les militants au niveau du Front de Gauche.
C'est Mélenchon, très gaullien, au-dessus des partis, face aux Français.
Comme souvent avec lui, on est agacé par la politique du fait accompli, les accents mégalos et le fait césariste qui prime, à rebours de tous les discours sur la VI ème République et la lutte contre les excès du présidentialisme, le projet et le collectif avant l'égo.
Jean-Luc Mélenchon, qui est brillant, plutôt constant dans ses discours depuis des années, bien connu maintenant et qui utilise aussi assez bien les médias, du moins pour y être invité car il sait y créer l'événement et la sensation, même si ça se retourne parfois contre sa crédibilité, a bien sûr des arguments à faire valoir pour faire un score correct au premier tour des présidentielles (les sondages à 15 mois des présidentielles lui donnent 10% d'intentions de vote, mais cela ne veut pas dire grand chose) mais il sera sans doute en deçà de 2012 car depuis, Jean-Luc Mélenchon a déçu et énervé plus d'un de ses électeurs de 2012 par ses foucades, ses excès, son discours pas toujours respectueux et manquant de mesure, certaines saillies populistes.
Nous ne nierons pas sa contribution très forte, décisive, à la réussite de la campagne du Front de Gauche en 2012, qui, même sans être à la hauteur des espérances qu'elle avait fait naître à un moment au niveau du résultat numérique, a permis de mettre l'accent sur les questions sociales et démocratiques dans cette présidentielle, et de remettre la rupture au goût du jour.
Bien sûr, le fond des idées qu'il défend contre le libéralisme, l'austérité, le pouvoir de l'oligarchie reste juste, mais il aurait été intéressant de pouvoir décider de manière collective des moyens de leur donner le plus efficacement possible un débouché dans le réel en faisant en sorte de ne pas multiplier les candidatures à la gauche de Hollande ou Valls, sous peine d'être tous condamnés à la marginalité et à un second tour droite-extrême-droite qui ne peut contenter personne à gauche.
Croire à son étoile est une condition pour réussir le pari de convaincre mais cela ne suffit pas.
Surtout, ce sera difficile pour Mélenchon de rassembler et de faire campagne en comptant sur les seules forces d'un Parti, le Parti de Gauche, qui ne compte plus que quelques milliers d'adhérents (moins de 10 000) et peu de ressources. Il y a bien sûr tous les militants, tous les électeurs du Front de Gauche et de ses composantes, mais ils vont probablement être très partagés.
D'où l'appel au peuple, au "nouveau parti des internautes", mais quand on se met a priori en marge de toute construction unitaire dans la gauche de gauche en mettant tout le monde devant le fait accompli, quand on met sa personne, pensée comme le sauveur suprême, avant la construction collective du projet, c'est plus difficile d'élargir.
Pour nous, le projet, le programme, et la construction politique, importent bien plus que le casting, que le bonhomme: nous n'excluons pas de voter et d'appeler à voter pour Jean-Luc Mélenchon, si c'est le mieux à même en 2017 d'être utile pour mobiliser autour des idées de rupture avec l'austérité, le libéralisme, et de donner quelques chances à la victoire d'une gauche différente du néo-libéralisme et du néo-conservatisme de Valls et Hollande, mais nous sommes échaudés par l'expérience du partenariat compliqué au niveau du Front de Gauche avec Jean-Luc Mélenchon, et actuellement fort sceptiques et agacés par ces pratiques individualistes dont on peut discuter le sens des responsabilités.
Déclarer sa candidature à la présidentielle sur la chaîne de télévision de Bouygues avant de le faire dans sa camp politique et face aux militants du Parti de Gauche ou du Front de Gauche, c'est tout un symbole.
Ismaël Dupont
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Sur Public Sénat:
La "proposition" de candidature à la présidentielle du porte-voix du Parti de gauche Jean-Luc Mélenchon n'a été "ni discutée ni décidée" avec le Parti Communiste.
La "proposition" de candidature à la présidentielle du porte-voix du Parti de gauche Jean-Luc Mélenchon n'a été "ni discutée ni décidée" avec le Parti communiste, a assuré mercredi soir à l'AFP Olivier Dartigolles, porte-parole du PCF.
"Cette proposition n'a été ni discutée ni décidée dans le cadre du Front de gauche", composé du Parti de gauche, du PCF et d'Ensemble de Clémentine Autain, a-t-il déclaré, assurant l'avoir apprise "en regardant TF1".
"On se s'explique toujours pas pourquoi il n'est pas possible de discuter avec Jean-Luc Mélenchon", a-t-il ajouté, alors que le Parti communiste participe au processus d'une primaire de la gauche et des écologistes, totalement refusé par le député européen.
Selon M. Dartigolles, "le peuple de gauche est très inquiet de la tournure que prennent les événements, très inquiet de la manière dont 2017 se présente". "Le peuple de gauche n'a pas besoin d'une candidature en solo, il n'est pas préoccupé par le casting, ce qu'il attend c'est une nouvelle espérance", a-t-il observé.
Jean-Luc Mélenchon a annoncé sur le plateau du 20 heures de TF1 mercredi qu'il proposait sa candidature à la présidentielle de 2017.
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