RAPPEL DES FAITS Après la publication dans le Monde de la tribune de Zeev Sternhell, l'historien spécialiste du fascisme, membre de l'Académie israélienne des sciences et lettres, le débat fait rage.
Beaucoup de lecteurs auront été surpris de découvrir, sous la plume de l'historien Zeev Sternhell, spécialiste éminent du fascisme, une comparaison entre son pays, Israël, et l'Allemagne des débuts du nazisme (le Monde, 18 février 2018). C'est que la plupart des grands médias ont peu couvert la radicalisation des actuels dirigeants israéliens, y compris ceux qui aspirent à succéder à Benyamin Netanyahou.
Ainsi, le chef du Foyer juif, Naftali Bennett, ministre de l'Éducation et de la Diaspora, prône-t-il l'annexion de la Cisjordanie. Il a déjà fait voter une loi en ce sens par la Knesset, le 6 février 2017. Netanyahou prépare un nouveau texte étendant la souveraineté d'Israël aux cinq blocs de colonies situés à l'est de Jérusalem.
En attendant d'en débattre, Bennett a fait adopter un amendement à la loi sur Jérusalem de 1980, rendant plus difficile la cession de zones de la ville à un éventuel État palestinien et plus facile l'exclusion de quartiers palestiniens situés à l'extérieur du mur.
Autrement dit, ces gens ont décidé, violant ouvertement le droit international, d'enterrer la solution dite « des deux États » au profit d'un seul : un État d'apartheid, où les Palestiniens annexés ne voteraient pas. Il faut dire que le « Grand Israël » compte autant d'Arabes que de Juifs : 6,58 millions...
Ministre de la Justice, Ayelet Shaked a été plus loin : pendant la dernière guerre de Gaza, elle a posté sur sa page Facebook un texte qualifiant « l'ensemble du peuple palestinien (d')ennemi d'Israël » et justifiant ainsi « sa destruction, y compris ses vieillards, ses femmes, ses villes et ses villages », comme l'a rapporté le Parisien le 12 mai 2015.
Qui se ressemble s'assemble : Netanyahou recrute ses meilleurs amis parmi les pires populistes. Comme Viktor Orban, le premier ministre hongrois, grand défenseur du régent Horthy, qui a livré 600 000 juifs hongrois à Adolf Eichmann. Et Jaroslaw Kaczynski, inspirateur d'une récente loi interdisant d'évoquer les nombreux Polonais qui ont collaboré à l'extermination des juifs. Sans oublier les partis d'extrême droite, qui ont presque tous leurs entrées à Tel-Aviv, sous couvert de lutte contre l'islam.
Cette fuite en avant, Netanyahou et ses alliés-rivaux le savent, ne pourra qu'accentuer leur isolement. Déjà, l'État de Palestine est entré à l'Unesco (2011), aux Nations unies (2012) et à la Cour pénale internationale (2015). Et l'Assemblée générale a voté, fin 2017, en faveur du droit du peuple palestinien à l'autodétermination et à un État, par 176 voix contre 7 (dont les îles Marshall, la Micronésie, Nauru et Palaos). Dans les enquêtes d'opinion internationales, Israël arrive dans le peloton de queue, devant la Corée du Nord, l'Iran et le Pakistan.
Voilà pourquoi le gouvernement israélien s'efforce de faire taire les critiques de sa politique. D'où sa volonté de criminaliser la campagne Boycott, désinvestissement, sanctions (BDS), qualifiée par Netanyahou de « menace stratégique majeure ». À défaut de loi interdisant le boycott, les inconditionnels français d'Israël s'appuient sur une circulaire ministérielle, que très peu de parquets ont appliquée, et sur un avis de la Cour de cassation, que la Cour européenne des droits de l'homme pourrait retoquer.
Autre tentative : l'interdiction de l'antisionisme, absurdement assimilé à l'antisémitisme. S'appuyant sur une petite phrase d'Emmanuel Macron lors de la commémoration de la rafle du Vél d'Hiv, le président du Conseil représentatif des institutions juives de France (Crif) exige une loi en ce sens.
Comme si les autorités françaises pouvaient créer et le Conseil constitutionnel valider un délit d'opinion !
Paradoxalement, l'extrême droite israélienne s'inquiète aussi des réactions de sa propre opinion. Si l'absence d'alternative à gauche a poussé les Israéliens vers la droite, cette évolution a des limites : seul un tiers des électeurs accepte l'idée d'annexion. C'est pourquoi, à titre préventif, la Knesset a adopté une dizaine de lois liberticides : elles interdisent notamment le boycott et la commémoration de la Nakba (1), étranglent financièrement les ONG et permettent de refouler les partisans de BDS. La plus incroyable permet à 90 députés d'exclure du Parlement... les 30 autres !
Et voilà ce qu'on appelle « la seule démocratie du ProcheOrient ».
(1) Nom donné par les Palestiniens à l'expulsion des deux tiers d'entre eux, en 1947-1949.
« EN ISRAËL POUSSE UN RACISME PROCHE DU NAZISME À SES DÉBUTS. » ZEEV STERNHELL
Tokyo, fin juin 1950. Interdit en 1935 mais reparu en 1945, Akahata fut à nouveau censuré de 1950 à 1952 par le général MacArthur, pendant la guerre de Corée. AP Photo/Sipa
Le journal communiste japonais célèbre son 90e anniversaire. Plusieurs fois interdit par les militaristes japonais et américains, Akahata a toujours revendiqué l'indépendance dans le cadre de la construction de son identité révolutionnaire.
Être antimilitariste dans le Japon des années 1930 pouvait aboutir au choix à la prison, la torture ou la mort.
À cette époque, la guerre était «seisen», une croisade sacrée, prétendument destinée à conduire le reste de l'Asie vers le développement, sous la houlette de l'empereur. Dans ce contexte, il fallait une certaine audace pour imaginer sortir, à partir du 1er février 1928, un journal communiste alors même que le parti était interdit depuis sa création, en 1922. Akahata (le drapeau rouge), alors appelé Sekki, consacre ainsi l'une de ses éditions datées de février 1933 à la mort de l'écrivain communiste Takiji Kobayashi, lors de son interrogatoire par la Tokko, la police politique.
Selon Hiroshi Yonezawa, responsable du secteur international du Parti communiste japonais (PCJ), « ce drapeau rouge est celui de la souveraineté nationale et de la paix, un drapeau visant la libération de l'humanité ». Le journal paraît alors bien isolé.
Lorsque le reste de la presse célèbre l'invasion de la Mandchourie, Akahata prend fermement position contre la guerre. À la même époque, pour servir la propagande impériale, le Tokyo Nichi Nichi Shimbun, depuis renommé Mainichi Shimbun, dépeint des «soldats chinois diaboliques et brutaux».
Akahata demande, lui, l'arrêt d'envoi de soldats au front. Il va même plus loin en plaidant pour l'abolition de la monarchie, pour la liberté d'expression, de publication, de réunion et d'association mais aussi pour l'indépendance des nations colonisées par le Japon. En 1935, le journal est interdit. Sa publication ne reprendra qu'après la guerre mais il est désormais identifié comme à la pointe du combat démocratique dans le camp progressiste.
LES ÉDITIONS QUOTIDIENNES ET DOMINICALES SONT DIFFUSÉES À 1,13 MILLION D'EXEMPLAIRES
Aujourd'hui, les militants communistes estiment que cette ligne de conduite a été validée par l'histoire. Dans sa Constitution de 1947, le Japon stipule qu'il « renonce à jamais à la guerre ». Le fait est inédit. Dans l'éditorial du numéro célébrant le 90e anniversaire, le journal souligne que « de plus en plus de citoyens dirigent leur attention la diffusion année après année ». Akahata possède des correspondants à Pékin, Hanoi, Le Caire, Berlin et Washington.
vers Akahata » du fait des tentatives actuelles de révision de la constitution pacifiste. Les éditions quotidiennes et dominicales sont diffusées à 1,13 million d'exemplaires, un record alors que le journal n'est pas vendu en kiosques. « La vente et la diffusion d'Akahata aux abonnés sont une activité difficile. Les militants qui s'en occupent au quotidien sont respectés au même niveau que des héros. Ce n'est pas obligatoire mais le Parti attache beaucoup d'importance à cette activité et il s'efforce d'augmenter
Au Japon, où la remise en cause de la parole des dirigeants n'est pas naturelle, le journal assume une mission originale et presque jaurésienne : « Certains géants médiatiques diffusent les assertions du gouvernement Abe comme s'ils étaient l'organe du régime, ils ne remplissent plus leur rôle de surveillance. A contrario, Akahata s'engage dans une confrontation frontale avec le plan Abe et assume une mission décisive dans la divulgation de la vérité, sans crainte de couvrir des sujets tabous. » Après la catastrophe de Fukushima, en 2011, le journal est l'un des premiers à révéler les mensonges de Tepco, l'opérateur de la centrale accidentée concernant le respect des normes de sécurité. Un rôle apprécié audelà des rangs communistes.
L'ancien diplomate Magosaki Ukeru expliquait ainsi : « Alors que la plupart des médias traditionnels se compromettent, Akahata est le seul média qui essaie de révéler la vérité et, pour de nombreux citoyens, c'est le journal qui garantit leur droit d'avoir accès à cette vérité. »
Dans le contexte de la guerre froide, Akahata mène déjà bataille contre la présence américaine, alors que les bases de l'Oncle Sam disséminées sur l'archipel servent de porteavions pour les expéditions militaires de Washington. De 1950 à 1952, alors que la guerre de Corée bat son plein, le général MacArthur, en tant qu'administrateur du Japon, prend de nouveau l'initiative d'interdire Akahata. La démocratie a ses limites. À cette époque, l'armée américaine teste à une douzaine de reprises ses armes biologiques dans les rizières d'Okinawa et stocke également ses défoliants destinés à être déversés sur le maquis vietnamien. Les campus japonais sont alors en ébullition et les anciens étudiants se souviennent encore du rôle alors joué par le journal. Plus récemment, en 2003, Akahata mène une grande campagne contre l'expédition militaire en Irak et appelle à la prudence contre les prétendues armes de destruction massives de Saddam Hussein. Cet effort pour préserver la paix est consubstantiel de la lutte pour préserver une politique étrangère et nationale indépendante. Le journal ouvre également le débat sur l'identité du courant communiste japonais. «Akahata joue un rôle indispensable, alors que l'URSS et la Chine tentent toutes deux de créer des fractions au sein du Parti afin de l'influencer, analyse encore Hiroshi Yonezawa. Le journal affirme que les Japonais doivent décider seuls du cours qu'ils souhaitent donner au mouvement révolutionnaire. »
A l'assemblée nationale : Questions en séance publique sur l'évolution de la situation au Moyen-Orient et la reconnaissance de l'État palestinien http://videos.assemblee-nationale.fr/index.php
Et en pièce jointe 3 contributions parue dans l'Huma papier de lundi : Taoufiq, Elsa Faucillon et Gilles Manceron
Pourquoi la France doit-elle reconnaître l’État palestinien ?
La question de la paix et du droit international.
LUNDI, 19 FÉVRIER, 2018
L'HUM
Avec Taoufiq Tahani, président d’honneur de l’Association France Palestine Solidarité (AFPS), Elsa Faucillon, députée PCF des Hauts- de-Seine et Gilles Manceron, historien.
Rappel des faits. Jeudi 22 février, les évolutions du Moyen-Orient, avec au cœur la reconnaissance de l’État palestinien, seront débattues à l’Assemblée nationale.
Une grande responsabilité pour éviter que la région ne sombre dans le chaos par Taoufiq Tahani, président d’honneur de l’Association France Palestine Solidarité (AFPS)
En novembre 2014, Laurent Fabius était le premier responsable politique français à dissocier la reconnaissance de l’État de Palestine et les négociations entre Israéliens et Palestiniens. L’ancien ministre des Affaires étrangères considérait que « jusqu’à présent, l’idée qui a prévalu, c’est que la reconnaissance devait être liée à la négociation… Mais, à partir du moment où la négociation serait impossible ou n’aurait pas de conclusion, il faudrait évidemment que la France prenne ses responsabilités ». Et pour ceux qui n’avaient pas bien saisi ce message, Fabius a apporté une autre précision : « La reconnaissance de l’État de Palestine n’est pas une faveur ni un passe-droit, c’est un droit. » Déclarations de bon sens mais qui n’ont malheureusement jamais été suivies d’effet.
Pourtant, la France, qui a organisé une initiative de paix en 2016 avec la participation de plus de 70 pays, sait parfaitement à qui incombe l’échec de ses efforts et pourquoi la négociation n’était plus possible. Alors que les Palestiniens avaient soutenu l’initiative de Paris sans aucune condition, les dirigeants israéliens l’ont qualifiée de « procès Dreyfus moderne » et boycottée avec l’arrogance et le mépris qui les a toujours caractérisés.
Pourquoi donc la France a-t-elle renoncé à son engagement vis-à-vis des Palestiniens ? Pourquoi laisse-t-elle les mains libres au pyromane Trump, dont le seul but est de liquider la question palestinienne en adoptant toutes les positions de l’extrême droite israélienne ? Que reste-t-il à négocier si Jérusalem et les réfugiés ne sont plus mis à l’ordre du jour et si la colonisation n’est plus considérée comme un obstacle majeur à la paix ?
Oui ou non la « solution à deux États » est-elle le passage obligé pour le règlement du conflit ? Oui ou non l’impressionnant corpus des diverses résolutions de l’ONU depuis le plan de partage de 1947 constitue-t-il la seule base possible pour ce règlement ?
Si la réponse est oui, et aucun responsable politique français n’osera prétendre le contraire, alors l’action politique et diplomatique à mettre en œuvre est claire. À commencer par la reconnaissance de l’État palestinien dans les frontières de 1967 avec Jérusalem-Est comme capitale.
« Si la France reconnaissait la Palestine, d’autres États la suivraient, y compris le Luxembourg », vient de déclarer Jean Asselborn, le ministre luxembourgeois des Affaires étrangères. Plusieurs autres pays européens suivraient l’exemple de la France, qui sait maintenant qu’elle a une grande responsabilité pour éviter que la région ne sombre dans le chaos. Les dirigeants israéliens et leurs parrains américains se trouveraient alors entre choisir le droit pour aboutir à la paix ou bien leur isolement sur la scène internationale. Les votes au Conseil de sécurité et à l’Assemblée générale des Nations unies contre la décision américaine de reconnaître en Jérusalem la capitale d’Israël constituent les premiers signes de cet isolement.
Un peu de courage, est-ce trop demander ? par Elsa Faucillon, députée PCF des Hauts- de-Seine
Il y a urgence. D’abord parce que le sort imposé par Israël au peuple palestinien est humainement et politiquement intolérable. La violence permanente de l’occupant, l’écrasement des droits nationaux de tout un peuple que l’on dépossède de sa terre par la force brutale créent une situation d’exception et d’apartheid au-delà de tout ce qui peut être toléré sur les plans de l’éthique et des principes qui doivent régenter les rapports humains et les relations internationales. Il faut en finir.
Il y a urgence parce que le processus de colonisation comme la politique agressive des dirigeants de Tel-Aviv nourrissent de vives tensions dans une région où les conflits ne cessent de s’exacerber. Les dangers de guerre montent de façon préoccupante. Il y a aussi les Israéliens qui souffrent du gouvernement d’extrême droite de Netanyahou, qui a brimé le camp progressiste de la paix. La société israélienne est aussi fatiguée de la chape de plomb sécuritaire imposée par le camp de la droite israélienne. Un nouveau chapitre peut s’écrire avec toutes les forces progressistes.
La France ne peut pas rester sans réagir dans une situation si dangereuse qui atteint aujourd’hui des sommets dans l’inacceptable… et dans les risques. Elle doit s’engager pour réunir les conditions permettant de stopper cette descente aux enfers. C’est l’exigence de la responsabilité collective, du droit et de l’application des résolutions de l’ONU qui doit s’imposer.
Reconnaître l’État palestinien, à côté de l’État d’Israël, serait dans ce grave contexte un acte majeur montrant que la France, comme tout État qui compte dans le monde d’aujourd’hui, peut créer une dynamique en Europe et, au-delà, jouer un rôle favorable à un règlement juste de la question de la Palestine, donc à la paix et à la sécurité de tous les peuples et pays de la région. Il n’y aura de sécurité pour personne tant que cette question de la Palestine ne trouvera pas de solution politique juste : un État souverain de plein droit, avec toutes les prérogatives qui s’y rattachent, avec Jérusalem-Est pour capitale, et vivant en coopération avec ses voisins.
On attend de la France qu’elle décide de jouer vraiment ce rôle qui la grandirait. Ce rôle devant lequel trop de gouvernements démissionnent par peur et par lâcheté. Il faut en finir avec l’hypocrisie des engagements non tenus et les belles déclarations qui masquent si mal la trahison des valeurs humaines et des grands principes. Il faut un peu de courage. C’est cela l’esprit qui devrait animer la France.
Cet esprit existe dans notre pays. De nombreux élus, des municipalités comme celles de Gennevilliers, Bezons ou Allonnes ont pris la décision de reconnaître symboliquement la Palestine pour impulser une dynamique de soutien et de solidarité. Voilà ce qu’il est possible de faire alors que tant de citoyens de notre pays sont choqués par la démission de ce qu’on appelle (à tort) la « communauté internationale », par la décision illégale et illégitime de Trump de faire de Jérusalem la capitale d’Israël, par la violence meurtrière qui s’abat quotidiennement sur les Palestiniens. Dans notre pays, les plus hautes autorités de l’État peuvent contribuer à renverser cette spirale de l’injustice et de l’impunité. Il ne faut plus attendre !
La Palestine existe. Il faut agir pour que nul ne puisse empêcher qu’elle devienne enfin, malgré les colons, malgré l’extrême droite, malgré Donald Trump… un État, un acteur indépendant et libre de notre monde. Le peuple palestinien est vivant. Il est résistant, digne… et patient ! Mais il faut maintenant, d’urgence, prendre les initiatives nécessaires pour la réalisation de ses droits nationaux. De tous ses droits. Un peu de courage… est-ce trop demander ?
La nécessaire reconnaissance par Gilles Manceron, historien
Les différents processus internationaux des trois dernières décennies qui ont fait miroiter la perspective d’un État palestinien sous l’égide d’un prétendu arbitrage des États-Unis ont été une supercherie. La situation en Palestine est plus dramatique que jamais. Mais la proclamation et la reconnaissance internationale d’un État de Palestine restent le seul objectif possible pour soutenir la lutte nationale des Palestiniens.
On se souvient des images de la poignée de main de 1993 entre le dirigeant palestinien Yasser Arafat et le premier ministre israélien Yitzhak Rabin avec, entre eux, le président américain Clinton posant d’un geste bienveillant ses mains sur leurs épaules. Tout cela n’était qu’illusion et a conduit à une impasse. Les espoirs suscités par ce qu’on a appelé le processus d’Oslo ont été réduits à néant. L’assassinat de Yitzhak Rabin, en 1995, préparé par une campagne déclenchée contre lui par Benyamin Netanyahou et l’extrême droite, la provocation d’Ariel Sharon en 2000 sur l’esplanade des Mosquées à Jérusalem, puis l’intervention, en 2001, d’Israël à Ramallah et sa récupération de territoires qui devaient revenir aux Palestiniens, l’ont sapé progressivement. L’accession de Mahmoud Abbas à la tête de l’Autorité palestinienne, après la mort, en 2004, de Yasser Arafat, a été l’occasion de nouvelles manœuvres et tergiversations qui ont donné la possibilité aux gouvernants israéliens de gagner du temps en poursuivant la colonisation de toute la Palestine. Le coup de grâce a été donné à cette fausse perspective de paix par la victoire du parti de Benyamin Netanyahou aux élections de mars 2015, qui a désormais encouragé ouvertement les colons les plus extrémistes.
C’est dans ce contexte qu’un sentiment de doute se développe parmi les défenseurs des droits des Palestiniens quant à la possibilité même d’un État de Palestine. Certains seraient prêts à accepter l’idée d’un État unique, de la Méditerranée au Jourdain. Ils voudraient, bien entendu, que celui-ci ne soit pas un État confessionnel et qu’il accorde une égalité réelle à tous ses habitants. Si un tel objectif est, bien sûr, celui qui conviendrait le mieux à nos valeurs, il faut bien voir que, dans la situation actuelle, c’est un leurre absolu. Malgré l’existence dans la population juive d’Israël de forces laïques courageuses opposées à la colonisation, il n’y a pas la moindre possibilité que prenne le dessus dans ce pays un courant d’opinion en faveur du renoncement à l’idée d’un État juif et de son remplacement par un État laïque et binational. L’opinion israélienne, qui s’apprête très majoritairement à fêter, en mai 2018, le 70e anniversaire de l’État d’Israël, est très majoritairement indifférente et aveugle au sort des Palestiniens.
Dans ces conditions, écarter l’objectif d’un État palestinien, renoncer à l’élémentaire reconnaissance de l’existence de la nation palestinienne, de sa dignité et de son droit à traiter de l’avenir de la Palestine dans une pleine égalité juridique avec l’État d’Israël, revient à un renoncement. Même si cette idée se donne l’apparence d’une démarche intransigeante et radicale, elle convient finalement assez bien à Netanyahou, au parti colonial en Israël, qui ne veut plus entendre parler d’un État palestinien et verrait d’un bon œil qu’il puisse étendre leurs frontières et soumettre tous les Palestiniens à un apartheid encore accru.
La reconnaissance internationale d’un État palestinien est plus que jamais d’actualité.
Le redoublement des tensions et des guerres au Moyen-Orient, l’instabilité mondiale, la récurrence des violentes crises économiques et la main mise des marchés financiers sur la marche du monde s’accompagnent d’une aggravation des crises internationales et d’une folle course aux armements. La menace nucléaire que nous espérions conjurée depuis la fin de la guerre froide, se manifeste à nouveau.
Alors que les Etats-Unis réalisent à eux seuls plus de 40 % des dépenses militaires mondiales, M. Trump vient d’annoncer une hausse historique du budget de la défense de son pays, la faisant progresser de 7 % pour atteindre 716 milliards de dollars pour l’année 2019. Une somme astronomique quand 267 milliards de dollars suffiraient pour éradiquer la faim dans le monde… Au même moment, D. Trump annonce un tournant de la doctrine nucléaire et la fabrication d’armes létales miniaturisées, dont la vocation est d’éliminer des vies humaines.
Ce saut qualitatif, au cœur des mutations mondiales du capitalisme financier où la concurrence est érigée en doctrine, doit alerter les citoyens du monde entier. Jusqu’ici, la doctrine nucléaire globalement partagée par les grandes puissances reposait sur l’existence de bombes si puissantes qu’elles se révélaient inutilisables sous peine d’un cataclysme mondial. C’est ce que l’on appelle la dissuasion : un « équilibre de la terreur » qui s’est accompagné d’un accroissement du volume d’armement jusqu’à ce que les deux principales puissances nucléaires, Etats-Unis et Russie, s’engagent à baisser leur arsenal gigantesque constitué pendant la guerre froide.
Dans un récent document prospectif, les Etats-Unis annoncent s’engager dans une voie extrêmement dangereuse qui vise à développer des armes nucléaires adaptées à des théâtres d’opération spécifiques. Prétextant de nouvelles menaces venues d’Iran, de Corée du Nord, et anticipant des conflits avec la Russie et la Chine, les dirigeants Nord-Américains développent des armes nucléaires de petites tailles qui auraient vocation non plus à dissuader mais à être utilisées au combat. Outre que la dissuasion reste une doctrine contestable puisque qu’elle débouche sur la prolifération, celle qui accompagne les déclarations incendiaires du nouveau président est proprement criminelle. On se souvient que, juste après l’accession de M. Trump au pouvoir, les Etats-Unis n’avaient pas hésité à utiliser la « mère de toutes les bombes », l’arme non nucléaire la plus puissante au monde, contre des djihadistes en Afghanistan. Il s’agissait d’une première mondiale qui laissait augurer une relance de la course à des armements particulièrement meurtriers. De fait, les budgets militaires risquent fort d’augmenter partout, alors qu’aujourd’hui, ceux de la Russie et de la Chine sont très inférieurs à celui des Etats Unis. Une fuite en avant militaire mondiale risque fort de s’engager, à laquelle, outre l’arme nucléaire, il convient d’en ajouter d’autres, de plus en plus sophistiquées et destructrices de vies humaines, comme celles à base de substances chimiques. Le caractère imprévisible de la présidence de Trump pousse de nombreux pays, notamment en Asie, à consolider leur défense. Et les responsables des institutions européennes ne trouvent rien de mieux que de proposer comme nouvel horizon la création de ce qu’ils appellent une « Défense européenne ». Ainsi l’ultralibéralisme s’accompagne partout d’une dangereuse militarisation. L’alerte est aussi sérieuse qu’inquiétante !
Des forces existent pour freiner cette course de l’humanité à l’abime. L’adoption par l’Organisation des Nations unies du traité d’interdiction des armes nucléaires en juillet dernier, avec la signature de 122 pays est un évènement considérable, conforté par l’attribution du prix Nobel de la paix aux Organisations non gouvernementales engagées dans la campagne internationale pour l’abolition des armes nucléaires. Evidemment, les puissances nucléaires, et en premier lieu la France, refusent de s’engager dans un processus de diminution croissante de leur arsenal, prétextant d’un contexte international instable… que ces mêmes puissances contribuent à entretenir par des offensives impérialistes, commerciales et militaires. La loi de programmation militaire française dévoilée la semaine dernière pour les années 2019- 2025 prévoit de consacrer sur ces six ans 300 milliards à la défense nationale. Une hausse considérable qui vise, entre autre, à développer l’armement nucléaire. M. Macron refuse tout débat sur la défense nationale, préférant enfoncer le clou de la dissuasion en engageant le pays dans la modernisation de son armement nucléaire jusqu’en… 2080 !
La France devrait pourtant prendre appui sur le mouvement mondial pour le désarmement pour reconnaître le caractère barbare de l’arme nucléaire et engager un dialogue au sein des Nations Unies pour tendre vers une abolition mondiale. La dissuasion nucléaire n’est qu’un concept qui, en plus d’être très coûteux promettait la non utilisation. Aujourd’hui il peut vite glisser vers une réalité meurtrière. L’avenir de l’humanité passe par le désarmement nucléaire et la France s’honorerait à s’y engager. L’argent doit aller aux œuvres de vie. Pas à la préparation du cataclysme !
"L’ancienne coprésidente du principal parti démocratique de gauche HDP, Serpil Kemalbay, a été arrêtée mardi pour avoir critiqué l’opération menée par Ankara dans le nord de la Syrie, selon une responsable de sa formation". Les deux anciens présidents du HDP Selahattin Demirtas et Figen Yüksekdag, tous deux députées, cette dernière que Serpil Kemalbay, avait remplacé, sont déjà emprisonnés depuis des mois. Pierre Laurent et une délégation du PCF étaient présents au congrès du HDP devant 32 000 militants ce week-end à Ankara, et c'est sans doute les propos libres et vrais de Serpil Kemalbay à ce congrès qui ont conduit à son incarcération. Tout ce qui sonne vrai, tout ce qui reste libre, humain, démocratique en Turquie actuellement est réprimé, et l'Etat français ne trouve rien de mieux à faire que d'interdire une manifestation dénonçant les agressions du peuple kurde et la suppression des libertés par la dictature d'Erdogan!
Libération, avec l'AFP:
L’ancienne coprésidente du principal parti prokurde turc HDP, Serpil Kemalbay, a été arrêtée mardi pour avoir critiqué l’opération menée par Ankara dans le nord de la Syrie, selon une responsable de sa formation.
Mme Kemalbay, qui a été remplacée à la coprésidence du Parti démocratique des peuples (HDP) par Pervin Buldan lors d’un congrès dimanche, a été arrêtée mardi à Ankara, devant son domicile, a annoncé à l’AFP une responsable de sa formation politique.
Elle avait été nommée en mai à la coprésidence du HDP pour remplacer Figen Yüksekdag, elle-même incarcérée et déchue de son mandat de députée.
Elle partageait la direction du parti avec Selahattin Demirtas, incarcéré depuis novembre 2016, et remplacé dimanche par Sezai Temelli.
Un mandat d’arrêt avait été émis contre Mme Kemalbay vendredi dernier, en raison d’appels à manifester contre l’opération militaire en Syrie, selon l’agence étatique Anadolu.
Le HDP critique l’offensive militaire turque dans l’enclave syrienne d’Afrine, accusant Ankara de viser «les Kurdes en tant que peuple».
Mais le gouvernement turc affirme mener cette opération pour éliminer les Unités de protection du peuple (YPG), une milice kurde considérée comme une organisation «terroriste» par Ankara, mais alliée des Etats-Unis.
Les autorités turques considèrent les YPG comme une émanation du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), une organisation classée «terroriste» par la Turquie et ses alliées occidentaux, et qui mène une insurrection armée contre le pouvoir central turc depuis 1984.
Depuis le lancement de l’opération, baptisée «Rameau d’olivier», 666 personnes ont ainsi été arrêtées en Turquie pour s’y être opposées, selon un communiqué du ministère de l’Intérieur publié lundi.
Le président Recep Tayyip Erdogan avait en effet appelé à l’unité nationale autour de cette offensive, mettant en garde ceux qui s’y opposeraient.
Le parquet d’Ankara a par ailleurs ouvert une enquête lundi contre la nouvelle co-présidente du HDP, Mme Buldan, en raison de déclarations à propos de l’offensive faites lors du congrès de dimanche.
On a rarement vu cela, voire jamais en dehors du contexte de la guerre d'Algérie ou des interdictions de manifs pro-palestiniennes à Paris.
La préfecture du Finistère qui interdit pour le week-end mais sur des arguments qui n'auraient pas qu'une portée circonstancielle et limitée une manifestation de solidarité internationale avec les Kurdes d'Afrin et de Turquie ciblés par le pouvoir islamo-fasciste d'Erdogan.
Alors, il suffit que des nervis viennent tabasser des manifestants venus dénoncer les bombardements et agressions sur la population kurde du nord syrien, c'était samedi dernier à Brest, pour que, sous prétexte de ne pas vouloir encourager des tensions communautaires sur le sol français, toute manifestation avec le peuple kurde soit interdite? C'est aberrant. La France n'est-elle plus un pays de liberté où on peut dénoncer l'agression de l'armée d'une dictature contre un autre peuple dans un Etat voisin? Est-ce la loi d'Erdogan qui va s'appliquer chez nous?
Le communiqué de la préfecture est aussi très menaçant vis-à-vis des organisateurs et participants éventuels de cette manifestation de solidarité, qui aurait été la deuxième à Morlaix en 15 jours. Non à la censure du droit de manifester, solidarité avec les habitants du canton d'Afrin et les Kurdes de Turquie à qui ont imposent une vraie loi d'occupation liberticide et criminelle, solidarité avec nos amis turcs qui sont très nombreux, intellectuels, journalistes, enseignants, fonctionnaires, de différentes opinions n'étant pas dans la ligne du pouvoir d'Erdogan qui fait la synthèse entre les islamistes et les nationalistes d'extrême-droite, à être victimes de cette dictature réveillant l'ultra-nationalisme: stop Erdogan!
Le Télégramme, 16 février 2018
À travers un communiqué diffusé ce vendredi après-midi, le préfet du Finistère, Pascal Lelarge, indique qu'il a "décidé d'interdire une manifestation" pro-Kurdes prévue ce samedi à midi devant la mairie de Morlaix.
Le rassemblement était prévu à l'appel de l’association La Minoterie - A pleine voix qui, selon la préfecture, "a déposé, jeudi, une déclaration de manifestation contre les opérations militaires menées par la Turquie et ses alliés sur le territoire syrien".
Le communiqué souligne que "cette déclaration ne respecte pas la réglementation applicable en la matière : non-respect des trois jours francs au moins avant la tenue de la manifestation, et non-respect de l’obligation de signature de la déclaration par au moins trois personnes domiciliées dans le département".
Des échauffourés le week-end dernier à Brest
"Par ailleurs, au cours de la semaine passée, il a été constaté que des manifestations sur ce même thème avaient occasionné d'importants troubles à l'ordre public. Le samedi 10 février, à Brest, quatre manifestantsavaient ainsi été agressés et blesséspar des individus affichant ostensiblement leur sympathie pour l’actuel gouvernement turc, et les forces de police avaient été amenées à intervenir.
Le lendemain, une nouvelle manifestation organisée dans le centre-ville de Brest avait à nouveau occasionné des tensions et l'intervention des forces de police avait à nouveau été nécessaire pour ramener le calme", signale le préfet.
"Prison et amendes possibles si la manifestation a lieu"
"Considérant qu'il est inacceptable que des tensions et conflits internationaux puissent donner lieu à des affrontements et à des violences sur le territoire national entre des personnes se réclamant des deux camps, et afin de préserver l'ordre public et de permettre aux forces de l'ordre de se consacrer pleinement à la sécurité du quotidien des habitants du département, le préfet du Finistère a décidé d'interdire la manifestation prévue à Morlaix. Plus largement, toute manifestation sur la thématique des relations entre la Turquie et les Kurdes sera interdite sur l'ensemble du département le samedi 17 et le dimanche 18 février", termine le communiqué, qui précise que "l'organisateur d'une manifestation interdite s'expose à une peine de six mois d'emprisonnement et de 7.500 euros d'amende si la manifestation a lieu malgré l'interdiction, et que les participants à une manifestation interdite sont eux-mêmes passibles de poursuites".
L'une a fêté son 17e anniversaire en prison pour avoir giflé le soldat israélien qui avait défiguré son cousin et sera jugée ce 13 février. L'autre est un jeune avocatFranco-Palestinien arrêté au lendemain de l'obtention de son diplôme d'avocat. Pierre Barbancey, grand reporter de l'Humanité,analysedans notre interview la situation de 7 000 prisonniers palestiniens et 350 enfants (de moins de 18 ans). Devant l'absence de résultats des luttes précédentes, armées comme diplomatiques, cette jeunesse palestinienne penche pour un combat démocratique et pacifique, ce qui semble faire peur à l’État d’Israël... Réalisation : Abrahim Saravaki
Une page de l'histoire du Sinn Féin se tourne. Le 10 février, Mary Lou McDonald devrait succéder à Gerry Adams à la tête du parti de gauche irlandais. Prison, attentats, combat pour la paix, durant trentecinq années, le dirigeant a relevé de nombreux défis pour hisser ce parti au rang de seule force politique présente en Irlande du Nord et en République d'Irlande. Gerry Adams laisse surtout un acte fort, l'« accord du vendredi saint » signé le 10 avril 1998. Cet accord a mis fin à un conflit de trente ans (3 500 morts) auquel se livraient les républicains défendant l'unité entre l'Irlande du Nord et la République d'Irlande et les unionistes qui prônent le rattachement à la Couronne britannique. Mary Lou McDonald et le Sinn Féin avec elle devra relever le défi d'une possible arrivée au pouvoir.
Il y a peu de dirigeants politiques en Europe qui peuvent se targuer d'avoir autant marqué l'histoire contemporaine de leur pays que Gerry Adams, le président du parti de gauche irlandais Sinn Féin depuis trente-cinq ans. Il était donc logique de s'arrêter sur son parcours exceptionnel alors qu'il s'apprête à passer le relais, le 10 février. Ce jour-là, le congrès de la formation républicaine élira une nouvelle dirigeante. Le choix annoncé sera en soi un symbole du rayonnement que Gerry Adams aura grandement contribué à assurer à son parti. Il devrait, en effet, se porter sur l'actuelle vice-présidente du parti, une femme de 48 ans, originaire, non plus d'Irlande du Nord, comme l'étaient traditionnellement la plupart des responsables du Sinn Féin, mais de la République d'Irlande elle-même. La promotion de Mary Lou McDonald, hier déjà première parlementaire européenne de son parti (en 2004), aujourd'hui (depuis 2011) députée au Parlement de Dublin, illustrera ainsi à elle seule l'une des réussites les plus importantes de l'action de Gerry Adams : faire du Sinn Féin un acteur politique de premier plan dans toute l'Irlande et crédibiliser, par là même, toujours plus, l'objectif stratégique central de son parti qui est la réunification du pays.
Un peu d'histoire
Un petit rappel historique s’impose à ce propos : lors de la création du nouvel État libre d’Irlande, en 1922, les unionistes, descendants des colons anglais et écossais, majoritaires dans la région du nord du pays, avaient décidé de rattacher « leur » province à la Grande-Bretagne. Depuis, Londres considère cette partie de l’Irlande comme l’une des quatre « nations » constitutives du Royaume-Uni. Dès lors, les républicains d’Irlande du Nord, favorables au retour de la province dans la nation irlandaise, engagèrent le combat que l’on sait – y compris, par la voie militaire avec l’IRA, opposée à la Royal Ulster Constabulary – contre les forces d’occupation. Le Sinn Féin fut longtemps présenté comme la « vitrine politique » de l’IRA, et Gerry Adams comme un membre clandestin de l’IRA, ce que l’intéressé a toujours démenti.
C'est, au contraire, dans son action inlassable pour que soit définitivement tournée la page de la lutte armée au profit de la seule lutte politique que Gerry Adams a acquis sa stature de leader incontournable, tant en Irlande même que, progressivement, vis-à-vis des dirigeants britanniques successifs. Et les succès enregistrés sur cette voie sont spectaculaires.
Sans faille
L'étape clé de ce défi historique fut, on le sait, le fameux accord du vendredi saint du 10 avril 1998, par lequel unionistes et républicains d'Irlande du Nord ouvrirent la voie à une cogestion de la province dans des institutions spécifiques (Conseil des ministres et Assemblée propres à l'Irlande du Nord) et à la création d'instances de coopération entre la République d'Irlande et l'Irlande du Nord. En outre, Londres et Dublin s'engagèrent à reconnaître la double citoyenneté irlandaise et britannique aux habitants de l'Irlande du Nord. Cet accord fut massivement approuvé tant par les citoyens de l'Irlande du Nord que par ceux de la République d'Irlande. Encore fallait-il s'assurer, côté républicain, du respect durable de la décision arrachée deux ans auparavant à l'IRA de renoncer à la lutte armée et, dans le même temps, arriver à gérer tant bien que mal la cohabitation plus qu'atypique avec les chefs unionistes, souvent ultras et anciens ennemis jurés. Or, si cette expérience ne fut évidemment pas exempte de crises (comme c'est le cas en ce moment même), elle aura permis d'instaurer la paix dans la province et de déplacer le conflit sur le seul terrain acceptable en démocratie : celui de la politique.
« Nous allons modifier le paysage politique du tout au tout, déclara Gerry Adams. Nous allons réussir. » Depuis lors, en effet, lui qui avait subi la sinistre prison de Long Kesh sans jugement , qui fut victime de deux attentats qui ont failli lui coûter la vie ; lui, dont même la voix fut bannie de la radio britannique par Margaret Thatcher, fit preuve d'une détermination sans faille pour parvenir à cette métamorphose. Aussi, lorsque, quatre mois à peine après ce fameux « vendredi saint », un groupe dissident de l'IRA, opposé au processus de paix, fit exploser une bombe tuant 29 personnes, il se montra d'une fermeté implacable dans la condamnation de ce crime. Gerry Adams est aujourd'hui reconnu comme un homme de paix.
Mutation
Ces vingt années furent naturellement semées d'embûches. Plus d'une fois, en Irlande du Nord, de vieux démons de l'ex-IRA surgirent à nouveau, aussitôt exploités par les irréductibles adversaires du Sinn Féin. Mais jamais Gerry Adams n'a renoncé devant l'obstacle :
« Nous avons perdu l'initiative ; il faut vite la reprendre ! » m'avait-il expliqué un jour, avec sa calme assurance. En République d'Irlande, les coups reçus ne sont pas moindres. C'est que, sous la conduite de son emblématique leader, le Sinn Féin est devenu un authentique parti de gauche, proche du peuple et investi dans toutes les grandes questions sociales : « Ce qui inquiète les partis traditionnels, c'est que le Sinn Féin a réussi à capter l'électorat ouvrier et populaire au détriment des partis centristes, ce qui introduit une logique de classe dans la politique irlandaise », notait fort justement, à la veille des dernières élections générales dans la République d'Irlande, il y a tout juste deux ans, un éminent universitaire de Dublin (1).
De fait, le Sinn Féin est aujourd'hui un acteur majeur de la gauche irlandaise et européenne. « Il y a vingt ans, nous n'avions qu'un député. Aujourd'hui, nous en avons 23 en Irlande et 27 en Irlande du Nord », rappelait Gerry Adams, en annonçant son prochain départ. De fait, le Sinn Féin, seul parti présent dans les deux parties du pays, est la deuxième force politique en Irlande du Nord et la troisième en République d'Irlande. Ses parlementaires européens siègent au groupe de la Gauche unitaire européenne (GUE). « L'idéologie du républicanisme irlandais trouve ses racines dans la Révolution française : liberté, égalité, fraternité ! » déclarait Declan Kearney, un élu de l'Assemblée d'Irlande du Nord, lors d'une récente rencontre avec Pierre Laurent au siège du PCF.
Le Brexit constitue le dernier défi majeur auquel se sera attelé le président du Sinn Féin : plutôt que de le subir (puisque la future frontière extérieure de l'UE risque en principe de couper l'Irlande en deux !), il a, là encore, choisi l'offensive en soulignant que la réunification des deux Irlandes était la vraie solution au problème. « Le Sinn Féin fera campagne pour la tenue d'un référendum et pour la victoire dans les cinq prochaines années ! »
(1) Aidan regan, professeur à l'University College of dublin (« la Tribune » du 22 février 2016).
RAPPEL DES FAITS Sous le régime d'une Constitution taillée à sa démesure, l'offensive militaire lancée par le président du pays dans le nord-ouest de la Syrie apparaît comme une nouvelle fuite en avant d'Ankara.
Hamit Bozarslan - Docteur en histoire et en sciences politiques, directeur d'études à l'École des hautes études en sciences sociales (EHESS)
«L'Arabie saoudite a contribué très massivement à la confessionnalisation du conflit syrien.»
Ahmet Insel - Universitaire et politologue
« L'UE a une utilité pour Erdogan, qui est d'afficher qu'il est toujours un homme respecté par les puissances occidentales.»
Didier Billion - Directeur adjoint de l'Institut de relations internationales et stratégiques (Iris)
«La Turquie reste un pays incontournable dans le cadre d'équilibres régionaux à reconstruire.»
REMISE EN CAUSE DE L’ÉTAT DE DROIT, DES LIBERTÉS PUBLIQUES ET DE LA DÉMOCRATIE… LA DÉRIVE AUTOCRATIQUE DE RECEP TAYYIP ERDOGAN EST-ELLE RÉVERSIBLE ?
HAMIT BOZARSLAN Je n’aurai pas de réponse à cette question. Dans la vision d’Erdogan, la nation est dans un état de guerre permanente. Cela lui permet à la fois la mobilisation totale de la nation et son identifi- cation personnelle avec elle, la nation et son leader devant être en fusion charnelle. De fait, il y a une désinstitutionalisation massive du pays, non seulement en ce qui concerne les institutions étatiques, mais aussi l’indépendance des partis politiques, qui est totalement vidée de toute substance. On a l’impression que la société est totalement assommée et que les repères sont totalement détruits avec un bloc turco-sunnite, le bloc majoritaire représentant autour de 65% de la population, qui ne le lâchera sans doute pas de sitôt. Erdogan a réussi soit à neutraliser, soit à immobiliser totalement cette couche de la population. Le discours nationaliste fonctionne. Pour le résumer, on peut rappeler son slogan : «La terre ne peut devenir patrie et le tissu ne peut devenir drapeau qu’à condition d’être arrosés de sang.» Ce discours très violent est atténué par les médias européens, qui jettent un voile pudique sur la Turquie. Il y a deux facteurs qui sont aussi très importants à souligner. Le premier, c’est qu’il y a eu un rapprochement très net entre Erdogan, les ultrakémalistes nationalistes et le Parti d’action nationaliste, qui est un parti d’extrême droite de type national-socialiste. Ce rapprochement fait qu’aujourd’hui il peut dominer le camp de la droite dans sa totalité. De l’autre côté, le camp de la gauche est totalement marginalisé.
AHMET INSEL Il faut toujours espérer qu'une telle dérive soit réversible, dans tous les pays, par des moyens démocratiques et pacifiques. De plus en plus, une inquiétude monte en Turquie sur le fait que les futures échéances électorales pourraient ne pas être représentatives et que les résultats pourraient être truqués par le gouvernement. Au jourd'hui, Erdogan semble pouvoir gagner les élections sans passer par des manipulations. Qu'en sera-t-il dans un an ? Nous ne le savons pas. La réversibilité de la situation est liée à la crédibilité d'une opposition qui puisse gagner les élections et au fait que le pouvoir accepte le résultat des urnes. Aujourd'hui, malheureusement, une partie de l'opposition est déclarée illégitime par le pouvoir, notamment le parti prokurde. D'un autre côté, il y a une certaine résilience de la société civile qui essaie de résister, de manifester mais d'une manière de plus en plus limitée. Cela dit, la société civile est terriblement réprimée dans ses expressions critiques notamment sur les médias sociaux. Il y a un deuxième facteur qui décime l'opposition et qui permet à Erdogan de conserver son pouvoir. C'est l'intervention militaire en Syrie, à Afrin. Malheureusement, les enquêtes d'opinion montrent que plus de 70 % de la population approuvent l'intervention militaire actuelle. Du coup, l'opposition de la société civile démocratique, qui s'exprime pour une solution de paix et remet en cause la justification de cette intervention, est étouffée et reste très isolée.
DIDIER BILLION En politique, rien n'est jamais irréversible, néanmoins la situation des droits démocratiques et de l'État de droit est aujourd'hui très préoccupante en Turquie. La multiplication des limogeages et des emprisonnements, notamment depuis la tentative de coup d'État du 15 juillet 2016, réduit considérablement la possibilité des diverses forces démocratiques de faire librement valoir leurs points de vue. En dépit de cette situation, il me semble que le Parti de la justice et du développement (AKP), au pouvoir depuis plus de quinze ans et qui a systématiquement gagné les 13 consultations électorales organisées depuis lors, a « mangé son pain blanc ». Ainsi le référendum portant sur la modification de la Constitution, organisé en avril 2017, constitue un tournant politique. Malgré l'asymétrie des moyens médiatiques, le climat politique exécrable dans lequel s'est tenue la campagne référendaire et les forts soupçons de fraude électorale, les partisans du « oui » n'ont recueilli que 51,4 % des suffrages exprimés. De plus, les deux principales villes du pays, Istanbul et Ankara, administrées par l'AKP, ont voté « non ». Ce sont des faits d'une grande portée politique. Depuis, on observe une incontestable fébrilité au sein des cercles les plus proches d'Erdogan, se manifestant, entre autres, par la démission forcée des deux maires d'Istanbul et Ankara. En outre, des rumeurs persistantes circulent sur des élections anticipées, ce qui n'est pas le signe d'une grande sérénité.
L'ARMÉE TURQUE EST À NOUVEAU ENTRÉE EN GUERRE EN SYRIE. QUELLES SONT LES VISÉES DE LA POLITIQUE ÉTRANGÈRE DU PRÉSIDENT TURC ?
DIDIER BILLION L'opération militaire « Rameau d'olivier », initiée le 20 janvier dernier, a un but clair : éliminer le Parti de l'union démocratique (PYD), regroupant une partie des Kurdes syriens, qualifié de terroriste car considéré par les autorités turques comme la franchise locale du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK). Les autorités turques ne cessent de répéter depuis des mois qu'il est hors de question d'accepter qu'une « entité terroriste » puisse se constituer à leur frontière. Cela étant posé, quelle que soit l'appréciation politique que l'on peut porter sur le PYD, il est totalement illusoire d'imaginer pouvoir éradiquer ce dernier par des moyens militaires. C'est politiquement qu'il est envisageable de trouver une solution d'ensemble aux défis syriens, dont la question kurde est partie.
D'une façon plus générale, on constate que la politique régionale de la Turquie a quelques difficultés à se doter d'un axe organisateur. La catastrophique gestion de la crise syrienne par Ankara depuis l'été 2011 a contribué à gâcher de nombreux atouts qu'elle possédait et son président fonctionne désormais au coup par coup dans un environnement régional, il est vrai, infiniment chaotique. Pour autant, la Turquie reste un pays incontournable dans le cadre d'équilibres régionaux à reconstruire.
AHMET INSEL En lien avec la Syrie, il y a deux visées. La première, c'est le danger kurde qui est la ligne politique séculaire de l'État turc au-delà même des options d'Erdogan et du parti au pouvoir. Erdogan est totalement entré dans cette logique. Tout ce que les Kurdes peuvent gagner en termes d'acquis politiques dans la région est considéré comme une remise en cause de l'intégrité de la Turquie. Il y a malheureusement un large consensus dans la classe politique turque à ce sujet. Même les électeurs et les membres du parti principal d'opposition, le Parti social-démocrate, ne sont pas franchement hostiles à cette intervention. Deuxième problème, cette situation de guerre est propice pour Tayyip Erdogan pour consolider sa base électorale. Il a en effet réussi, depuis un an et demi, à constituer une alliance de fait avec le parti d'extrême droite nationaliste. Par conséquent, la guerre en Syrie a aussi une fonction de politique intérieure qui prime peut-être sur toute autre considération.
HAMIT BOZARSLAN Le contexte doit effectivement être élargi. Erdogan, qui a flirté avec toutes les organisations djihadistes, « État islamique » compris, a joué avec le feu. Il n'est pas le seul. L'Arabie saoudite, par exemple, a contribué très massivement à la confessionnalisation du conflit syrien. Les défaites successives d'Erdogan dans la politique arabe et plus particulièrement dans la politique syrienne, son repli notamment par rapport à la Russie et à l'Iran, l'ont conduit à se concentrer sur un seul objectif qui est de détruire toute entité kurde. Mais cet objectif même doit être placé dans un cadre plus large. Il y a une très violente nostalgie d'empire en Turquie. La lecture que donne Erdogan de l'histoire, c'est que l'histoire du monde est l'histoire de la guerre du monde contre la Turquie. L'histoire est lue comme l'histoire d'une lutte entre les nations et l'histoire à venir est lue comme l'histoire d'une revanche sur l'histoire du passé. Pour lui, cette guerre continue aujourd'hui et de nouvelles batailles décisives auront encore lieu. Le deuxième élément très important à souligner, c'est que, selon Erdogan, les Turcs ont une double mission historique. En premier lieu, celle de dominer le monde pour lui apporter justice, administration, droit et harmonie. Cette mission aurait été entravée par l'action des ennemis de la nation, ennemis de l'intérieur et de l'extérieur, ainsi que par la trahison des élites turques. D'ici à 2067, qui sera l'année du millénaire de la première défaite byzantine, il faut, pour Erdogan, que la Turquie soit prête pour l'inauguration d'une nouvelle ère de domination turque. La deuxième mission historique selon Erdogan, c'est que la Turquie constitue le bras armé de l'islam sunnite. Il faut placer la guerre actuelle dans cette vision. Aujourd'hui, dans sa perspective, le principal obstacle à la réalisation de ce projet après les défaites successives sont les Kurdes.
QUELLES ACTIONS LA FRANCE ET L'UE PEUVENT-ELLES ENGAGER POUR SOUTENIR LA SOCIÉTÉ TURQUE DANS SA RÉSISTANCE À L'ESPÈCE DE FUITE EN AVANT DU RÉGIME À LAQUELLE NOUS ASSISTONS ?
DIDIER BILLION Rester ferme quant à la défense des hommes et des femmes qui sont limogés de leur travail ou emprisonnés sans que les accusations formulées à leur encontre ne soient véritablement toujours étayées. Dénoncer le fait que des élus soient démis de leurs fonctions, que des parlementaires soient privés de leur liberté. Maintenir le lien avec les forces d'opposition démocratique, les organisations syndicales et associatives indépendantes. La tâche est certes compliquée, mais Erdogan n'est pas insensible à ces prises de position car il ne peut être en opposition avec la totalité de ces partenaires. Sa visite officielle en France, au début du mois de janvier, tend à le prouver. Malgré la difficulté de la relation avec la Turquie, il serait irresponsable de geler les relations avec ce pays.
AHMET INSEL Depuis que la perspective d'adhésion de la Turquie à l'Union européenne est bloquée, la prise de l'UE sur la Turquie est affaiblie. Aujourd'hui, l'UE n'est plus tellement un partenaire très efficace pour la Turquie. La Turquie pousse les relations bilatérales. En revanche, l'UE a une utilité pour Erdogan, qui est d'y afficher qu'il est toujours un homme respecté par les puissances occidentales. Nous, nous sommes un peu dans l'expectative à savoir si l'UE, pour des raisons de court terme ou pour des raisons de continuation des habitudes institutionnelles, se plie à ce diktat d'Erdogan. Je pense cependant qu'il est important de garder le dialogue avec le pouvoir pour rappeler, à chaque fois, les exigences des droits de l'homme. Pas simplement comme une formule passe-partout, mais avec des contraintes, c'est-à-dire que tant que la Turquie continuera à emprisonner des députés, à emprisonner des gens qui appellent à la paix, il faudrait que la Turquie soit considérée comme un État non démocratique et qui soit donc traité comme tel. On regrette beaucoup en Turquie, dans la société civile démocratique, que les pays européens et particulièrement la France aient une position ambivalente dans les relations avec la Turquie. On peut comprendre que la gestion des djihadistes français en Turquie soit une priorité sécuritaire mais, pour cette priorité sécuritaire de la France, il serait très regrettable que soient sacrifiées les positions que la France doit fermement défendre en matière de droits de l'homme.
HAMIT BOZARSLAN La première chose à rappeler, c'est qu'il y a une sorte de résignation des démocraties par rapport aux antidémocraties. La première chose qui est nécessaire, c'est le courage politique. Et ce courage politique, malheureusement, n'existe pas. Ce n'est pas la première fois dans l'histoire. Chaque fois que les démocraties capitulent devant les antidémocraties, in fine, elles finissent par en payer le prix. La deuxième chose qui me paraît vraiment très importante, c'est que la France, seule, ne peut rien faire. L'Union européenne peut faire beaucoup. Mais on a l'impression vraiment qu'il y a une paralysie de l'UE. Il y a énormément de mécontentement mais, en même temps, l'UE en tant qu'instance n'arrive absolument pas à avoir une politique étrangère. La question, c'est, effectivement, de réanimer l'UE, qui est quand même le premier partenaire économique de la Turquie et le premier fournisseur d'armes, ne serait-ce qu'en suspendant totalement toute livraison d'armes.
LA REVUE DE PRESSE
Le Monde
Allan Kaval
« Lancée le 20 janvier, l'offensive est entrée dans sa troisième semaine avec des airs de sale guerre tandis que les lignes de front semblent s'enliser. Si les assaillants ont rogné l'enclave d'Afrin sur plusieurs axes, les miliciens syriens, estimés à plus de 10 000 hommes armés par Ankara, n'ont réalisé que des percées relativement limitées sur un terrain vallonné où l'on se bat pour le contrôle de collines stratégiques. »
20 Minutes avec AFP
Le 5 janvier 2018
« Sur le respect de l'État de droit, Erdogan vante une justice "indépendante". Sa courte visite à Paris était son plus important déplacement dans un pays de l'UE depuis le putsch manqué de 2016 et la répression qui l'a suivi. Plus de 140 000 personnes ont été limogées ou suspendues et plus de 55 000 ont été arrêtées, dont des universitaires, des journalistes et des militants pro-Kurdes, accusés de propagande "terroriste"».
« PLONGÉ DANS SON SOMMEIL »...
Voici une déclaration de Recep Tayyip Erdogan : « Notre patrie de 5 millions de kilomètres carrés a littéralement été pillée dans le passé (...), il ne nous reste plus que ce pays, la Turquie, de 780 000 kilomètres carrés. (...) Certains pensent que cela aussi est trop pour nous. Ils nous ont tellement forcés la main qu'ils ont fini par réveiller le géant plongé dans son sommeil. »
Intervention de Marie-Christine Vergiat au Parlement européen en session plénière à Strasbourg le 6 février lors d'un débat joint sur la situation des droits de l'Homme en Turquie et sur la situation à Afrin, région kurde du Nord de la Syrie qui a été envahie par les troupes d'Erdogan le 20 janvier dernier.
"Madame la Présidente, depuis juillet 2016, la situation en Turquie ne cesse de se dégrader. Des milliers de personnes croupissent dans les prisons, y compris sans qu’aucune accusation réelle n’ait été portée contre eux ou sans qu’ils puissent avoir accès à un avocat. Les témoignages de tortures se multiplient: fonctionnaires, avocats, magistrats, défenseurs des droits de l’homme en font les frais parmi d’autres. Les journalistes de Cumhuriyet comme les responsables d’Amnesty International en sont des symboles, mais les minorités, et notamment les Kurdes, en sont les principales victimes. La lutte contre le terrorisme a bon dos. C’est une répression tous azimuts qui est en cours et l’invasion d’Afrine a permis à Recep Erdogan de durcir encore un peu plus l’état d’urgence. Comment peut-on laisser la Turquie intervenir à Afrine avec l’aide de groupes terroristes contre ceux qui ont été parmi les principaux acteurs de la lutte contre Daech? L’état de droit, les droits de l’homme, le droit international ont-ils encore un sens pour l’Union européenne? Il est temps d’arrêter M. Erdogan, les troupes turques doivent se retirer de Syrie."
:
Favoriser l'expression des idées de transformation sociale du parti communiste.
Entretenir la mémoire des débats et des luttes de la gauche sociale.
Communiquer avec les habitants de la région de Morlaix.