Mathieu, 17 ans, lycéen en première à Nantes, membre des Jeunesses Communistes depuis la fin 2016 et du PCF depuis septembre 2017 suite à son adhésion à la fête de l'Huma sur le stand du PCF Finistère, nous parle des raisons de son engagement, des formes qu'il prend dans ces mois de résistance à la réforme du lycée et de l'université, et plus généralement à la politique de Macron. Vendredi 11 mai, il a tenté de résister aux CRS qui évacuaient la fac de Nantes occupée par les grévistes.
Mathieu, à quand tu daterais ta première prise de conscience politique ?
A partir de la loi travail en 2016, je veux m'engager dans une organisation politique pour agir, sachant que j'étais déjà très mobilisé dans mon collège, en 3ème, aux côtés des lycéens en grève ...
Je savais qu'il y avait des problèmes dans le monde depuis que j'étais petit mais j'ai pris part aux manifestations contre la loi El Khomri sans faire encore partie d'un comité.
J'ai participé au blocus de mon collège et de mon lycée avec des lycéens, les organisateurs étant en première et en terminale et ne faisant pas partie d'organisation politique.
Qu'est-ce que tu as fait que tu as été attiré par le communisme ?
Les jeunesses communistes étaient le groupe avec lequel j'avais le plus de contact. J'en avais déjà entendu parler et j'avais entendu parler des événements révolutionnaires d'Europe et du reste du monde à travers l'histoire, je me suis dit qu'il fallait militer dans une organisation politique qui voulait transformer la société.
Je voulais me mettre vraiment à militer et je ne savais pas encore qu'exister d'autres manières de militer et comités hors des partis politiques. J'étais attiré par le marxisme. Ma sœur, déjà militante des JC et du PCF, m'avait conseillé de lire « Le Manifeste du Parti Communiste » et je l'ai lu en seconde. Cela m'a apporté une pensée politique politique derrière : une thèse et une solution pour éradiquer les problèmes mondiaux. J'ai été marqué par le lien du texte avec la réalité sociale et économique d'aujourd'hui. Les descriptions du communisme que j'ai pu lire m'ont paru claires et logiques.
Est-ce que tu n'as pas l'impression de faire des choix à contre-courant ? Est-ce que tu penses d'abord que les partis ont encore un avenir, un potentiel d'attraction et une utilité ?
Je ne sais pas si je suis bien placé pour répondre à cette question, mais un parti t'apporte une idéologie structurante, un lien avec une pensée politique, des points d'appui au niveau du militantisme, des compagnons de lutte. Au niveau des actions, cela n'a pas été toujours ce que j'attendais. Je suis en désaccord avec certaines décisions du Parti, comme les décisions par rapport à la Zad ou les propos de dénonciation sur les black blocks.
Que représente le communisme pour toi ? Comme pratiques et valeurs ?
Les valeurs historiques du communisme ont eu une portée et une importance capitale au XIX e et au XXe siècle, elles ont permis des grandes avancées, ce sont des valeurs humaines et sociales essentielles qu'on essaie de faire oublier en mettant en exergue simplement les dictatures, le stalinisme, les échecs d'expériences autoritaires qui ont été souvent des caricatures de communisme.
La définition de ce que représente le communisme en deux trois mots ?
L'humain d'abord avant le profit égoïste de quelques-uns. Le partage des richesses. Une utopie qui vaut le coup qu'on se batte pour elle.
Est-ce que tu penses que le communisme a encore un avenir ?
Le communisme aura toujours des partisans de par le monde. Les dernières élections ne sont pas représentatives. Beaucoup de communistes se sont sentis obligés de voter pour Mélenchon par vote utile. Avec les réseaux sociaux, on arrive à développer la pensée communiste, au-delà des adhérents communistes, il y a aussi pas mal de sympathisants qui se reconnaissent dans les valeurs, les combats, les symboles. Plein de gens se rendent compte compte que le communisme est la pensée politique que leur plaît le plus et qui explique le plus le désordre du monde en offrant une voie pour sortir de ce système, et des valeurs qui sont les plus propices pour se battre pour un monde meilleur. Dans mon lycée qui est plutôt bourgeois à Nantes, en dehors des apolitiques, la majorité des jeunes, on a un clivage net entre les gens qui sont pour le capital, déjà petits ou grands bourgeois et contents de l'être, et d'autres jeunes qui se réclament du socialisme, du communisme, de l'anarchisme, qui veulent faire changer la société et visent l'égalité.
Qu'est-ce que tu penses de France Insoumise et de la dynamique qu'a incarné la candidature Mélenchon ?
On ne peut nier qu'ils ont bien réussi leur coup en atteignant un score satisfaisant pour un groupe que on peut classer à l'extrême-gauche par certains aspects. Malheureusement, ils ont fait une campagne de diabolisation par rapport au PCF après. Il n'y a plus de dynamique unitaire entre eux et nous or seule l'unité peut faire reculer les nationalistes, les identitaires, et la droite libérale représentée par Macron ou Les Républicains.
Est-ce que tu as eu des lectures politiques qui t'ont marqué après la lecture du « Manifeste » ?
Des lectures de textes néo-situationnistes comme ceux du Comité Invisible. Des récits sur la guerre d'Espagne. Un récit de prolétaire au XIXe siècle entre 1865 et 1890. L'écrivain américain Thoreau qui a influencé les idées de désobéissance civile.
En quoi consistent tes actions militantes depuis quelques mois ?
Depuis peu, il y a un comité lycéen nantais qui a été créé auquel je participe beaucoup avec d'autres camarades des JC. On organise des blocus de différents lycéens : plus de 3 lycées bloqués à Nantes entre le 22 mars et les vacances de Pâques pour dénoncer la réforme du lycée et de l'Université, la loi ORE qui renforce la sélection sociale à l'école et ne pas donne les moyens de fonctionner. De plus, on organise des cortèges lycéens, c'est-à-dire le départ de plusieurs centaines de lycéens avec nos banderoles et nos drapeaux du comité. Je réalise d'ailleurs des visuels et des banderoles pour notre comité lycéen nantais (CLN).
J'ai aussi manifesté en solidarité avec la ZAD pour éviter leur évacuation violente, dénoncer la répression policière qu'ils subissent. 300 blessés à la ZAD, c'est écœurant !
Avec les Jeunesses Communistes, on se croise dans les manifestations, on fait des collages et des réunions où on débat et où on parle de nos prochaines actions.
Qu'est-ce que tu penses que représentent Macron, son arrivée au pouvoir et sa politique ?
On a la nouvelle droite, ultra-capitaliste, qui est en train de détruire les droits sociaux et démocratiques par ses réformes. Dès ses premiers mois au pouvoir, il enlève l'impôt de solidarité sur la fortune. Des réformes anti-corruption ont été désamorcés. C'est du "deux poids, deux mesures" : on met des personnes en prison parce qu'elles sont pauvres et qu'elles volent, dealent, pour des délits mineurs, alors que des politiques ou des patrons volent la collectivité, le FISC, et s'en sortent toujours très bien. En France, la prison, c'est pour les pauvres et jamais pour les riches, qui s'en sortent toujours très bien face à la justice française.
Qu'est-ce que tu attends du congrès du PCF ?
Je n'ai pas trop suivi ce qui va être débattu précisément. Cela serait bien qu'il y ait une campagne de recrutement pour les Jeunesses Communistes, qu'on crée des cortèges Jeunesses Communistes, qu'on dynamise le recrutement militant. Aujourd'hui, beaucoup de gens veulent s'investir sans savoir ce que c'est exactement que le PCF, comment militer avec lui, etc... Il y a un gros effort de communication à faire.
Propos recueillis par Ismaël Dupont
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