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6 avril 2020 1 06 /04 /avril /2020 15:27
Hôpital - Les charognards à l’affût ! Par Patrick Le Hyaric (L'Humanité, 5 avril 2020)
Dimanche, 5 Avril, 2020 - L'Humanité
Les charognards à l’affût ! Par Patrick Le Hyaric

« En même temps » qu’ils multiplient les éloges sur les personnels de santé des hôpitaux publics, nos gouvernants commandent en douce des rapports qui visent à poursuivre l’asphyxie de notre système de santé public !

 

(Découvrez la note de la Caisse des Dépôts et Consignations en fin d'article)

 
Cette haute trahison, cette forfaiture, intervient alors que médecins, infirmiers ou réanimateurs se saignent aux quatre veines pour soigner et sauver des vies en mettant la leur en danger, du fait même des pénuries et négligences gouvernementales. Ce sale coup se prépare dans les arrière-cuisines peu ragoutantes des industries chimiques, des assurances privées, des banques et des cabinets ministériels. Les voici qui affûtent en bande organisée des projets pour tirer parti du drame planétaire et relancer le business capitaliste.
Par devant, le président de la République proclame d’une voix apeurée que la santé appartient « aux biens et service qui doivent être placés en dehors des lois du marché». Par derrière, il commande à la Caisse des dépôts et consignations, bras financier de l’Etat dont l’indépendance a encore été réduite avec la récente loi « Pacte », un rapport dont l’objectif est d’accélérer le processus de marchandisation de la santé. Ce même processus qui nous conduit aux actuelles hécatombes. 
Dans une copie destinée au cabinet élyséen, le service de prospection stratégique de la Caisse des dépôts prône le désarmement total de l’État social et de la protection des citoyens, la mise en concurrence plus grande des secteurs publics et privés pour abaisser encore les rémunérations des personnels de santé (lire ici la pièce jointe). Il propose d’accélérer les privatisations de l’hôpital public avec les fameux partenariats « public-privé » qui ont tous conduit à des fiascos sanitaires et économiques. Seules les banques s’en frottent les mains. 
Et rien n’est prévu pour augmenter les dépenses publiques de santé puisque nos ronds-de-cuir insistent pour maintenir le corset avec le fameux « objectif national des dépenses d’assurances maladie », tandis que seule la dette des cliniques privées serait restructurée au-delà des engagements gouvernementaux.
La stratégie des commanditaires de ce rapport est de pousser les feux d’un capitalisme sanitaire, appuyé sur un capitalisme numérique et financier. Des catégories de personnels seraient remplacées par une cohorte de start-up alliées aux grandes compagnies d’assurances comme AG2R ou Malakoff Humanis, des firmes chimiques comme Astra-Zeneca, des filiales du crédit agricole et de la banque postale. Et, grande innovation des technophiles du capital, puisque les banques et la Caisse des dépôts ont garanti ces dernières années des milliards d’euros aux grands croisiéristes dont l’activité a spectaculairement chutée, on transformera ces grands bateaux en « navire-hôpital en contrepartie d’une rémunération ». Inouï !
Ainsi au cœur de la pandémie, au centre d’un malheur planétaire, les milieux d’affaires en lien avec des secteurs décideurs de l’État réfléchissent aux moyens non pas de protéger les êtres humains, mais à la meilleure façon de profiter de la situation. Ceci, en mettant l’épargne populaire à disposition de la relance d’un capitalisme dont de plus en plus de personnes mesurent les impasses mortifères.
La riposte s’impose. Les débats et les prises de positions ne doivent pas rester confinés, il faut une entière transparence sur les dettes des hôpitaux et réclamer leur annulation totale, obtenir une augmentation substantielle des rémunérations des travailleurs de la santé, le retour sur tous les conquis détruits des agents du service public, un plan audacieux d’embauches, la réouverture des hôpitaux fermés, la relance de la recherche fondamentale. On trouve bien des centaines de milliards pour le secteur privé. On doit bien en trouver pour l’hôpital public. Au-delà, une grande politique de la santé publique dans le cadre d’une sécurité sociale de la vie doit être inventée, non pas avec les technophile de la Caisse des dépôts mais avec le concours de tous les intéressés, salariés et usagers. 
 
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6 avril 2020 1 06 /04 /avril /2020 14:58
Marie-George Buffet : Le sport n'est pas quelque chose de secondaire (Interview de France Info, 5 avril 2020)
Marie-George Buffet est directement touchée par le coronavirus.

 

Placée en confinement depuis début mars, la ministre des Sports du gouvernement Jospin (mai 1997 – mai 2002) ne s’est pas sentie très en forme ces derniers jours et s’en sort progressivement. Au téléphone, rien ne transparaît. Celle qui a été le fer de lance de la lutte contre le dopage est toujours aussi dynamique dès qu’il s’agit d’évoquer la chose sportive, en particulier dans cette période difficile.

Voir l’article de France Info 

Marie-George Buffet : "Le sport n'est pas quelque chose de secondaire"

Marie-George Buffet est directement touchée par le coronavirus. Placée en confinement depuis début mars, la ministre des Sports du gouvernement Jospin (mai 1997 - mai 2002) ne s’est pas sentie très en forme ces derniers jours et s’en sort progressivement. Au téléphone, rien ne transparaît. Celle qui a été le fer de lance de la lutte contre le dopage est toujours aussi dynamique dès qu’il s’agit d’évoquer la chose sportive, en particulier dans cette période difficile.

 

Au vu de la situation actuelle, quel regard portez-vous sur le sport ?

M-GB : "Tout d’abord, un constat. Le mouvement sportif a pris de sages decisions : celle de préserver la santé des sportifs et de leurs supporters, de préserver l’équité par rapport à des pays qui sont moins touchés aujourd’hui par le coronavirus. Je me rejouis enfin que le CIO ait pris la décision de reporter d’un an les Jeux Olympiques et Paralympiques. Ca va permettre à ces Jeux d’avoir tout leur rayonnement et d’être la grande fête du sport. Je pense que si ça c’était déroulé en septembre ou en octobre, il y aurait eu des injustices.

Après, concernant la privation du sport, je pense d’abord à tous ces jeunes qui ne peuvent pas aller au gymnase ou sur un stade et qui se retrouvent confinés chez eux. Il va falloir réorganiser toute une pratique au sein des clubs quand ça sera terminé pour leur permettre de retrouver leur activité sportive."

Ce sera peut-être le moyen de réfléchir sur cette course à la marchandisation qui a atteint ses limites

Quelles conséquences sur ces sportifs, sur leurs clubs, qu’ils soient amateurs ou professionnels ?

M-GB : "Peut-être que ça va faire réfléchir le monde du sport de haut niveau et notamment le monde professionnel sur la question des calendriers. Il faudra peut-être revisiter des calendriers qui restent trop chargés. Ensuite, il va peut-être falloir réfléchir sur le modèle économique de certains clubs professionnels, tout ce qui concerne le contrôle des budgets, créer des salaires maximums. Ce sera peut-être le moyen de réfléchir sur cette course à la marchandisation qui a atteint ses limites. Le monde sportif doit se poser, discuter et s’interroger sur l’après. Au plan économique, au plan social, on ne pourra pas recommencer comme avant, du moins je l’espère. Et bien je pense que sur le plan sportif, c’est pareil. Il va falloir se repositionner par rapport à certains modèles."

Comment s’y prendre ?

M-GB : "Il faut encadrer les salaires, peut-être faire en sorte que les budgets des clubs soient également limités. Il faut assainir la profession des agents sportifs, régler aussi les problèmes liés aux transferts. Il faut faire marche arrière par rapport à cette course au financement, d’ailleurs on voit que cela fait perdre de l’intérêt au spectacle sportif. Quand vous avez des clubs qui se détachent tellement grâce à leur manne financière, l’intérêt du championnat devient moindre. Dans l’intérêt même du sport, il faut qu’il y ait une réflexion, qu’on calme le jeu et qu’on reparte sur des budgets plus équitables."

Le ministère des Sports, il y a encore du personnel mais il n'y a plus de moyens

Et pour le sport amateur ?

M-GB : "Il faut redonner au ministère des Sports toute sa place et tous ses moyens. Il doit prendre en charge la sortie de cette crise sanitaire en redonnant des moyens aux clubs, je parle là de toutes les subventions d’Etat mais également donner la possibilité aux collectivités territoriales d’aider - comme elles le font déjà - les clubs sportifs. Il faut aussi trouver le moyen de valoriser le travail des bénévoles. On a longtemps parlé pendant des décennies d’un statut des bénévoles, il faut aller plus loin pour encourager le bénévolat, aller vers ce statut du bénévole qui permettrait d’ailleurs qu’ils aient des droits et donc aussi des devoirs. Cela nous permettrait aussi, en lien avec les événements que l’on a connu ces dernières mois (NDLR : de nombreuses affaires de violences sexuelles dans le sport ont été révélées ces dernières semaines) de pouvoir avoir un certain contrôle de l’encadrement des clubs. Et puis, je pense qu’il faut développer l’éducation physique et sportive, l’Education Nationale n’a pas été valorisée ces dernières années, elle n’est plus reconnue dans un certain nombre de diplômes, elle est peu pratiquée au niveau de l’université, il y a un effort considérable à faire pour la revaloriser l’EPS."

Avec quels moyens financiers ?

M-GB : "J’ai entendu les propos de ceux qui nous gouvernent. Ils disent que rien ne pourra plus être comme avant et ont balayé l’idée qu’il faut restreindre les dépenses publiques, notamment dans les hopitaux. Nous sommes obligés de penser à la sortie de cette crise. Pour tout le mouvement culturel, il va falloir aider des dizaines de salles à repartir, aider les intermittants du spectacle, on va être obligés de débloquer des financements partout. Là on est dans l’urgence économique, dans l’urgence sociale, dans l’urgence humaine.

Le sport est un des vecteurs de bien-être, un lieu de convivialité, un terreau social, c’est bon pour la santé, on y apprend des des règles, il va donc falloir mettre donner des moyens au ministère des Sports et à l’Agence Nationale du Sport pour contribuer au développement de la pratique. Ca doit passer par des équipements. Tout ce que je dis, on le disait déjà il y a quelques mois, et les budgets n’ont pas suivi ! L’ANF ce n’est que 300 millions d’euros, 50 personnes. Le ministère des Sports, il y a encore du personnel mais il n'y a plus de moyens. Les missions sont difficilement discernables entre le Ministère et l’ANF, il va falloir clarifier tout cela et faire en sorte que les budgets puissent avoir un niveau qui permette de développer la pratique sportive."

Et pour Paris 2024 ?

M-GB : "Il y a déjà des impacts immédiats, par exemple l’arrêt des travaux du Paris Express. Cela aura certainement des conséquences aussi sur les infrastructures après, il ne faut pas renoncer. On peut toujours rêver de Jeux moins onéreux, plus axés sur le développement durable, et il faut travailler là-dessus. Mais il faut que cela reste la grande fête du sport car elle donne à voir quand même de la beauté du spectacle sportif et donne des envies à des millions de gamins et de gamines de faire du sport. On devra sans doute travailler plus pour combler le retard que l’on est en train de prendre, mais on ne va pas fermer l’Opéra ou la Comédie Française parce qu’il va falloir des économies. Le sport ce n'est pas quelque chose de secondaire, c’est comme la culture, donc il va falloir que ce soit parmi les priorités humaines dont on aura besoin à la sortie de cette période dramatique."

 

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6 avril 2020 1 06 /04 /avril /2020 14:54
Covid- 19 - Un risque de pénurie de médicaments (Laurence Cohen CRCE)

Mme Laurence Cohen interroge M. le ministre des solidarités et de la santé sur l’alerte lancée le 31 mars 2020 par neuf directeurs des plus grands hôpitaux d’Europe sur le risque de pénurie de médicaments essentiels pour traiter les patients atteints du Covid-19.

Ces établissements, dont l’assistance publique-hôpitaux de Paris (APHP), attirent l’attention des gouvernements européens sur les stocks largement insuffisants pour fournir des soins intensifs adéquats. Ces ruptures d’approvisionnement s’expliquent en grande partie par la délocalisation de la production de médicaments à l’étranger et interrogent notre modèle sanitaire et notre indépendance pharmaceutique et économique.

Sans approvisionnement rapide, les réserves de curare, midazolam ou propofol seront épuisées d’ici à deux semaines, voire d’ici à quelques jours dans les hôpitaux les plus sévèrement touchés. Or, ces anesthésiques et hypnotiques sont indispensables pour les patients en réanimation.

Aussi, elle lui demande ce que le Gouvernement entend faire en urgence pour répondre à cette demande, pour exiger des groupes pharmaceutiques d’augmenter leurs capacités de production afin de faire face aux besoins, pour organiser une meilleure coopération aux niveaux européen et international afin de ne pas mettre les soignants face à une incapacité d’exercer leurs missions et par conséquent de limiter le nombre de décès. Elle lui demande également s’il entend mettre en place un groupe de travail composé de scientifiques, de syndicalistes, d’élus de toutes sensibilités politiques pour étudier les conditions de mise en place d’un pôle public du médicament et de la recherche afin d’éviter, notamment, que de nouvelles ruptures de stock ne se reproduisent.

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4 avril 2020 6 04 /04 /avril /2020 13:48
Crise de l'hôpital, nouveau plan de réorganisation néo-libéral: Pierre Laurent, sénateur communiste de Paris, président du Conseil National du PCF, écrit au Président Macron

Lettre de Pierre Laurent à Emmanuel Macron

Monsieur le Président, Emmanuel Macron

En contact quotidien comme sénateur de Paris avec des médecins et des personnels soignants de l'AP-HP, je tiens à vous alerter sur la grave rupture démocratique ressentie sur le terrain et dans toute la population. Tout le monde fait face. Les acteurs de la santé publique sont exemplaires. Ils se donnent corps et âme pour sauver des vies, mais ils attendent clairement que la suite ne ressemble en rien à ce qu'ils vivent en réalité depuis des années, et encore plus durement ces dernières semaines. Demain, les mots ne pourront pas rester lettre morte, sinon la colère sera immense.Le 12 mars dernier, lors de votre première intervention télévisée sur la lutte contre le coronavirus, vous déclariez notamment: « ce que révèle déjà cette pandémie, c'est que la santé gratuite sans condition de revenu, de parcours ou de profession, ne sont pas des coûts ou des charges mais des biens précieux, des atouts indispensables quand le destin frappe [...]. Il est des biens et des services qui doivent être placés en dehors des lois du marché ».

Inutile de vous dire combien je partage cette pétition de principe, qui fonde depuis la création de la Sécurité sociale, la ligne de conduite des communistes en matière d'accès à la santé et à la protection sociale.

La pandémie met aujourd'hui à nu les choix politiques contraires faits depuis des années, choix que notre pays et sa population paient en ce moment très cher. Durant les premières années de votre quinquennat, je n'ai cessé d'alerter avec les parlementaires de mon groupe, sans jamais être entendu. J'ai rencontré les personnels et médecins, notamment de l'AP-HP, à de multiples reprises à l’occasion des débats parlementaires comme du tour de France des hôpitaux que nous avons initié de 2018 à 2019. Afin de relayer l'ampleur des exigences exprimées, qui disaient déjà tout des risques encourus face à une grave crise sanitaire, nous avons élaboré une proposition de loi d'urgence pour l'hôpital et la santé, dont le fil conducteur est précisément de placer la santé au dessus des lois du marché.

Le 25 mars, vous avez enfin affirmé à l'hôpital de Mulhouse, un établissement au premier rang du désastre, qu' "à l'issue de cette crise, un plan massif d'investissement et de revalorisation de l'ensemble des carrières sera conduit pour notre hôpital".

De telles paroles en pareilles circonstances ne peuvent être prononcées à la légère. Or, le premier avril, un article de Mediapart révèle qu'à la demande de l’Élysée une note de travail rédigée par deux hauts fonctionnaires de la Caisse des Dépôts esquisserait un plan pour l'hôpital prenant la direction exactement contraire à tout ce qu'exige la population et la très grande majorité des médecins et soignants de France, et en l'occurrence au principe même que vous évoquiez le 12 mars. Ce plan consisterait en une accélération massive des processus de privatisation rampante et de marchandisation des hôpitaux qui prévalent depuis des années et nous ont conduit à la dramatique situation actuelle. Pour le moins, des éclaircissements rapides sont nécessaires.Monsieur le Président, êtes-vous en mesure de démentir sans ambiguïté cette direction de travail et existe-t-il d'autres notes de travail du même type déjà en circulation auprès de vos services ? Au-delà, pouvez-vous garantir que le plan pour l'avenir de l'hôpital que tout le pays attend ne sera pas élaboré dans le secret de notes confidentielles sans y associer avant publication les médecins et les personnels, sans y associer la représentation nationale? Un processus transparent, national, doté de moyens publics, à l'image du grand débat national, ne serait-il pas plus approprié à construire le plan pour l'hôpital et le système de santé publique dont notre pays a besoin demain?

C'est en tout cas la proposition que je vous fais. Avec mes collègues parlementaires, nous sommes disposés à nous investir pleinement dans unetelle élaboration citoyenne. Nous misons résolument sur l'intelligence collective de toutes les composantes de la Nation pour construire un plan d'avenir pour nos hôpitaux, nos Ehpad et notre système de santé. Seule la démocratie peut reconstruire la confiance.

Je vous prie d’agréer, Monsieur le Président, l’expression de mes salutations distinguées.

Pierre Laurent

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4 avril 2020 6 04 /04 /avril /2020 13:27
Jeudi, 2 Avril, 2020
Romain Gizolme : « Il faut concilier impératifs éthiques et sanitaires »

Depuis le début de la crise, la situation dans les Ehpad ne cesse de se tendre. L’isolement des résidents dans les chambres inquiète. Entretien.
 

Romain Gizolme est Directeur de l’AD-PA, association des directeurs au service des personnes âgées

Le gouvernement demande l’isolement individuel des résidents dans leur chambre pour limiter la contagion. Est-ce LA solution ?

Romain Gizolme Il faut avoir conscience que le confinement a des conséquences sur l’état psychologique des personnes âgées. Il s’agit aussi d’une restriction de liberté. C’est pourquoi nous avons saisi le Comité consultatif national d’éthique (CCNE), qui doit rendre son avis bientôt. Ce n’est pas parce que nous sommes dans l’urgence qu’il faut lâcher sur les questions d’éthique. Nous voulons des mesures proportionnées et différenciées. Celle visant à isoler complètement doit être prise avec parcimonie. Et ça implique que les personnels puissent disposer de masques.

Qu’en est-il des masques et des tests de dépistage ?

Romain Gizolme Ça commence à s’améliorer dans les établissements, mais c’est toujours compliqué pour les services à domicile. Il faut absolument que les services de l’État s’organisent pour leur livrer des masques. Il faut aussi pratiquer des tests, aussi bien sur les personnels que sur les personnes âgées. Cela nous permettrait de savoir que les salariés vont bien. Et cela justifierait les mesures d’isolement en logement individuel pour les pensionnaires malades. C’est ce qu’on met en place en période de grippe saisonnière. Le coronavirus ne touche pas 100 % des résidents d’un même établissement. Cibler les personnes positives permettrait d’éviter d’imposer à tout le monde de rester seul en chambre, pendant de nombreuses semaines, voire mois. Les autres pourraient être libres de circuler un peu. On concilierait ainsi impératif éthique et sanitaire.

Après trois semaines de confinement, les personnes âgées doivent commencer à ressentir certains effets…

Romain Gizolme Oui. On voit des gens qui se nourrissent moins. D’autres qui développent des troubles du comportement. On peut supporter des mesures contraignantes, mais si celles-ci durent trop longtemps, elles ne seront plus acceptées, et au final, plus applicables.

Sans compter le manque de moyens humains...

Romain Gizolme On sent clairement le manque de personnels, d’autant que toutes les relations sociales sont réduites a minima. Il est certain que la question du bilan et de l’état du secteur va revenir sur le devant de la scène politique après la crise. Ce n’est pas encore le moment. Notre préoccupation, là, c’est de tout mettre en œuvre pour limiter l’impact du coronavirus sur les personnes âgées qui sont les plus vulnérables.

Entretien réalisé par Alexandra Chaignon
 
Situation critique dans les EHPAD à l'heure du Covid-19 - Interview de Romain Rizolme, directeur de l'AD-PA, et reportage à Paris - L'Humanité, 2 avril 2020
Jeudi, 2 Avril, 2020
Dépendance. Dans les Ehpad de la Ville de Paris, la tempête arrive

Déjà une vingtaine de décès liés au coronavirus parmi les 2 000 pensionnaires des maisons de retraite publiques de la capitale. Familles et salariés s’inquiètent du manque d’informations, de matériel et de personnel qualifié.

 

« D ans mon établissement, il a déjà au moins huit cas, et quand j’y retournerai demain, il y en aura un autre. Cela va très vite », explique Jean-Paul (1), soignant dans un des 15 Ehpad gérés par le centre d’action sociale de la Ville de Paris (CASVP). On comptait mercredi une vingtaine de décès parmi les 2 000 résidents de ces établissements publics. « La vague est arrivée. Nous avons des cas dans tous nos établissements. Reste à savoir comment on va arriver à en limiter l’impact », résume Hervé Spaenlé, sous-directeur des services aux personnes âgées. Depuis le 8 mars, les familles n’ont plus le droit d’aller voir leurs proches. Le 27, certaines avaient reçu des courriers les informant de la présence de cas suspects. Depuis, elles n’ont plus aucune information et l’angoisse monte. « Je téléphone deux fois par semaine. J’arrive à parler à une aide-soignante. Elle me dit que tout va bien, mais j’ai peur. Le virus est entré dans la résidence et ma mère a 84 ans », explique Jeanine, dont la mère est en Ehpad depuis douze ans.

Combinaison partagée

Les pensionnaires sont depuis ce week-end tous confinés dans leurs chambres. Dans un premier temps, la semaine dernière, seuls les cas suspects étaient concernés par cette mesure. Les déplacements entre les étages étaient, eux, interdits. Recommandé par le ministère, le confinement total ne va pas sans difficultés. « La consigne est dure à comprendre pour ceux qui n’ont plus toute leur tête. Chaque fois que vous avez le dos tourné, il y en a un qui sort de sa chambre. On passe nos journées à essayer de les raisonner », explique Michel, un aide-soignant. « On aurait dû regrouper les cas suspects sur un seul étage et leur allouer un personnel dédié pour permettre une vraie isolation », s’agace Maryse Gautier Leghlid, présidente d’une association des familles de résidents des Ehpad du CASVP.

Les équipements sont, comme partout, insuffisants. Même pour se rendre dans les chambres des cas avérés, il n’y a pas masques FFP2, et pas toujours de charlotte ou de lunettes. « On a une seule combinaison de protection, alors elle reste dans la chambre. On la met tous à tour de rôle, au risque d’être contaminés et de répandre le virus », raconte Jean-Claude. Les soignants disposent depuis seulement le 23 mars de trois masques par jour. C’est plus que les recommandations de l’ARS, souligne la direction, mais insuffisant pour pouvoir en changer à chaque résident et limiter les risques de contamination. « Ces masques sont arrivés beaucoup trop tard. On en réclamait depuis des semaines. Pendant tout ce temps, forcément, on a fait entrer le virus », tempête Jean-Claude.

Des bénévoles en renfort

Le manque de personnel complique aussi la réponse. « Il y a eu beaucoup d’arrêts. Les gens pensent qu’ils ont le Covid. Ils ne veulent pas prendre le risque d’infecter les résidents et ils ont peur. Certains aussi doivent garder leurs enfants ou habitent trop loin », explique Christian Giovannangeli, délégué FO au CASVP. Selon la direction, entre 25 % et 30 % des soignants manquent à l’appel. Déjà chronique en temps normal dans les Ehpad, le sous-effectif explose, alors même que les missions se multiplient et se complexifient. « Avec le confinement, on doit aller de chambre en chambre pour les repas et on est deux pour 28 personnes. On doit courir partout, apporter les plats, les réchauffer, aider certains à manger. En fin de journée, on est exténués », raconte Laura, une aide-soignante.

« On essaye de leur simplifier le quotidien. Ils peuvent utiliser des taxis entre 19 heures et 7 heures du matin et on propose des logements meublés sur Paris, que des agences privées nous ont mis à disposition », explique Hervé Spaenlé. Une prime de 35 euros par jour de présence a aussi été allouée par la mairie. Mais le personnel se plaint de la pression des chefs et du manque de considération. « J’imaginais qu’on allait tous se serrer les coudes. Mais non. Il faudrait qu’on se sente soutenus et encadrés, mais on a l’impression de se débrouiller tous seuls », souligne Laura.

La direction fait aussi appel aux intérimaires et, pour la première fois, aux bénévoles, venus pour l’essentiel d’autres services du CASVP ou de la mairie. Trente soignants du secteur de la petite enfance se sont déjà portés volontaires. « Ces personnels de remplacement et titulaires surchargés vont-ils être en mesure d’appliquer strictement les consignes ? » s’inquiète Maryse Gautier Leghlid. « Dans une situation comme celle-là, tout est un risque, reconnaît Hervé Spaenlé. Mais nous n’avons pas le choix. »

(1) Les prénoms ont été changés.
Camille Bauer
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4 avril 2020 6 04 /04 /avril /2020 13:14
Fin de vie, contention: les Ehpad en pleine crise éthique (Médiapart, 3 avril 2020)
Fin de vie, contention: les Ehpad en pleine crise éthique
Par


L’administration des soins en Ehpad ainsi que les règles régissant la contention sont revues dans l’urgence, provoquant l’indignation de certains soignants. Selon les chiffres encore partiels du gouvernement, 884 décès « rattachés au Covid » sont à déplorer depuis le 1er mars dans ces établissements.

 

«C’est violent », lâche Carine*. Cette infirmière décrivait la semaine passée, dans Mediapart, l’organisation mise en place pour accueillir les résidents Covid-19 de son Ehpad des Hauts-de-Seine. Une semaine plus tard, elle se retrouve en première ligne face à l’épidémie.

Déjà trois décès dans l’établissement, et encore onze autres patients testés positifs au virus. « Il se propage à une vitesse incroyable, témoigne Carine. J’étais de repos le week-end dernier et, lundi, j’avais l’impression qu’ils avaient tous perdu 10 kilos, à voir leur visage meurtris. Quand je pars, je crains de ne pas les retrouver vivants. » Aucun transfert possible dans les hôpitaux du secteur, « tous surbookés ».

L’infirmière décrit aussi ces décès brutaux, en quelques heures seulement : « Nous n’étions pas du tout préparés à cela. Une résidente avait quelques symptômes, des maux de ventre, une petite toux. Elle est morte en deux heures. Ça va vite, très vite. »

Alors que le gouvernement commence seulement à réagir, à recenser et à dérouter une partie des moyens vers les quelque 11 000 établissements collectifs d’accueil des personnes âgées, la réalité du terrain semble quasiment inchangée. Carine, par exemple, était seule hier pour la surveillance infirmière de 37 résidents, dont 11 Covid-19, malgré la mobilisation de la réserve sanitaire dans son établissement.

Impossible dans ces conditions d’être au plus près des patients. « Hier, nous n’avions plus de blouses en papier pour rentrer dans les chambres. On a réussi à trouver des blouses de bloc auprès d’un hôpital. Ça ira pour une semaine, et après ?, s’interroge Carine. Même les cartons spéciaux pour jeter nos déchets médicaux contaminés commencent à manquer. Pour les médicaments, ça va, pour le moment, on gère. »

Stéphanie Lévêque, médecin coordonnatrice dans trois Ehpad de Haute-Garonne, ne peut pas en dire autant, elle qui craignait déjà la semaine dernière de ne pas avoir de quoi assurer des soins palliatifs décents. « Dans un de mes Ehpad, il n’y aura bientôt plus de Valium ni de scopolamine, le médicament indiqué pour les encombrements de type bronchite. Nous allons manquer aussi de sédatifs. Je suis en train de constituer un stock à partager entre mes trois établissements pour parer au plus pressé. »

Ce médecin s’inquiète aussi de la lenteur des procédures administratives et réclame depuis trois semaines que soit appliquée la possibilité pour les professionnels en ville de se fournir en midazolam auprès des pharmacies hospitalières. Cette injection, utilisée dans le cadre de la loi Leonetti-Claeys, permet une sédation profonde pour deux indications particulières, les hémorragies massives et la détresse respiratoire aiguë.

L’obstacle est double : si les autorités de santé ont conscience qu’il faut en laisser l’accès aux praticiens des Ehpad, pour leurs patients qui ne seront pas transférés à l’hôpital faute de places, les arbitrages se font attendre au ministère de la santé afin d’éditer l’arrêté officiel. « J’espère que le temps administratif ne causera pas de mort douloureuse par des asphyxies non soulagées », souligne Stéphanie Lévêque. Par ailleurs, le midazolam faisant partie des médicaments prioritaires pour les patients ayant contracté le Covid-19 et hospitalisés en réanimation, sa « rétrocession » en ville est limitée (voir cet article sur les pénuries naissantes à l’hôpital).

Selon un rapport d’une agence régionale de santé (ARS) que Mediapart a pu consulter, une « tension sur le midazolam » est effectivement relevée. Il est également indiqué qu’une « prise en charge médicale alternative afin de permettre des soins palliatif en Ehpad » est en cours de rédaction.

Des médecins et directeurs d’établissements commencent effectivement à recevoir des consignes, en provenance des ARS ou de services de soins palliatifs hospitaliers, parfois relayées par les ordres locaux et les sociétés savantes, ce que confirme le ministère de la santé interrogé par Mediapart. Il s’agit d’adapter les procédures classiques de prise en charge médicale, en cas de détresse respiratoire aiguë sans possibilité de transfert vers l’hôpital, déjà saturé ou sur le point de l’être.

Dans l’un de ces documents, que Mediapart a pu consulter, en date du 20 mars 2020, il est écrit que ces « propositions diffèrent des récentes recommandations en ce qui concerne les doses et modalités de surveillance », avant qu’il ne soit précisé que ces conseils ont été rédigés avant tout pour soulager les patients dans une « période exceptionnelle ».

« L’intention des démarches thérapeutiques proposées est d’assurer le confort de patients confrontés à un état asphyxique dont on sait que l’évolution sera rapidement défavorable, poursuit le document, et dans un contexte où « les réévaluations régulières habituellement pratiquées par les équipes soignantes ne pourront pas être assurées. » Avant de préciser : « Il ne s’agit pas de démarches visant à précipiter le décès des patients mais bien de leur assurer un apaisement. »

Ces mises en garde ne rassurent guère Nathalie*, infirmière dans une maison d’accueil spécialisée (MAS) d’un hôpital psychiatrique de l’est de la France. Les MAS sont des unités où des patients de longue date, atteints de maladie mentale et le plus souvent très dépendants, finissent en général leur vie. Dans son unité, où la moyenne d’âge avoisine les 75 ans, il y a déjà dix résidents suspectés Covid-19.

« Oui, il faut les soulager, mais à quel prix ? », s’inquiète Nathalie. Ici aussi, le personnel médical a reçu des fiches indiquant les différents protocoles à suivre en cas d’aggravation de la maladie et de non-hospitalisation, et que Mediapart a pu consulter. « On nous demande de mettre nos patients sous sédation, mais sans respirateur comme à l’hôpital, on va au décès !, s’alarme l’infirmière. On nous dit de gérer, de prendre soin d’eux, mais avec juste un peu d’oxygène et de morphine, comment fait-on ? »

La détresse de cette infirmière est immense : « J’espère que je n’aurai pas à faire le geste fatal. La question de la culpabilité va être énorme. Si on décide d’éteindre un patient en détresse respiratoire, si la famille le sait et porte plainte, est-ce que la direction nous soutiendra puisque rien n’est écrit noir sur blanc ? »

La crise sanitaire suscitée par le Covid-19 engendre d’autres impasses éthiques. Depuis l’apparition des premiers cas et décès dans les Ehpad, le confinement des résidents dans leur chambre s’est généralisé. Mais une partie des personnes âgées, et notamment celles, nombreuses, souffrant de troubles cognitifs de type Alzheimer, ont bien du mal à respecter cette règle. Elles peuvent, dans la minute, oublier ce que vient de dire l’aide-soignante, sortir de leur chambre pour déambuler dans les couloirs.

Conscientes du problème, certaines agences régionales de santé ont également commencé à proposer des protocoles pour accompagner l’usage de la « contention chimique ou physique », parfois utilisée, sur prescription médicale et avec une limite de durée, en cas d’agressivité passagère ou de mise en danger du personnel ou des résidents.

Dans l’un de ces documents, consulté par Mediapart, titré « Déambulation et nécessité de confinement : propositions de réflexe », il est rappelé que dans le contexte du Covid-19, où « l’intérêt collectif prime sur l’intérêt individuel, il pourra malheureusement être nécessaire de confiner le résident/patient dans sa chambre. […] En fonction de la tolérance de ce confinement, des moyens de contention chimique et/ou physique supplémentaire pourront être envisagés ».

La contention chimique, cela signifie l’administration d’anxiolytiques ou de tranquillisants, voire de neuroleptiques. En matière de contention physique, le document préconise la « contention ventrale », qui renvoie à une chaise équipée d’une sorte de tissu à scratch, utilisée dans le cas des chutes à répétition.

Louise*, psychologue dans un Ehpad d’Occitanie, confirme que la consigne est bien passée dans toutes les maisons de retraite de sa région. Elle s’en indigne : « Il y a un risque létal dans ces contentions ! Avec ces médicaments, la personne s’alimente moins et le danger de faire des fausses routes est majeur, ainsi que les pertes d’équilibre. Scotchée à un fauteuil, toute la journée, ce sont des escarres assurées. » La surveillance et la « réévaluation clinique régulière » de ce type de traitement, préconisées « toutes les 30 à 60 minutes », paraissent complètement illusoires, dans des établissements notoirement connus pour leur sous-effectif.

Un directeur d’Ehpad dans l’Aude, qui critique depuis le début de la crise l’approche « tout sanitaire » de l’épidémie, assure n’avoir reçu aucune consigne particulière en la matière pour ses résidents, mais il prévient : « La contention est tout sauf un soin. Donc comment on cherche des alternatives ? Nous avons le cas d’une personne souffrant d’Alzheimer, déambulant, présentant des signes évocateurs de Covid. On lui accorde une attention particulière pour éviter qu’elle ne se promène. Mais c’est compliqué et requérant en temps humain. »

Louise pointe la gestion de cette crise par la pénurie, sur ce sujet comme sur d’autres depuis le début de l’épidémie : « Le problème majeur, on le sait, c’est la protection des soignants, qui sont les seuls ou presque depuis des semaines à rentrer dans les Ehpad. Or, nous n’avons pas assez de masques dans mon établissement, et aucun masque FFP2. Est-ce que ce n’est pas ça, la priorité, plutôt que de préconiser des mesures délétères pour la santé, pour des personnes qui n’ont même pas le Covid ? »

Le sujet semble suffisamment grave pour avoir motivé une nouvelle note du Comité consultatif national d’éthique pour les sciences de la vie et de la santé, rendue publique le 30 mars, entièrement dédiée aux Ehpad. Cette note a été remise trois jours plus tôt aux autorités nationales. « Les mesures envisagées à l’échelle des établissements doivent tenir compte d’exigences sanitaires pour les personnes résidentes et leur entourage, ainsi que d’exigences éthiques et humaines fortes, également essentielles », relève le comité, qui « renouvelle son alerte sur les structures collectives ».

Il rappelle à maintes reprises l’importance des tests, qui comme les masques manquent partout, ainsi que les différentes mesures possibles de confinement collectif, ou de « zones dédiées », en lieu et place du confinement individuel, qui présenterait des « risques psychologiques facteurs de surmortalité ou d’altération de l’état de santé ». Être maintenu dans sa chambre « soulève d’importantes questions non seulement sanitaires, mais aussi éthiques, légales et plus largement sociales. [Ce maintien] conduit à priver les résidents de ce qui fait souvent le sens de leur existence en fin de vie », conclut ce document. Beaucoup, en effet, n’ont plus reçu aucune visite de proche depuis le 6 mars.

« On pourra, à la fin de la crise, se gargariser de ne pas avoir eu de cas Covid ici ou là, ajoute en écho Louise, en Occitanie. Mais on ne parlera pas de tout ce qui découle de ces mesures de confinement par la contention, de ces personnes qui vont devenir grabataires en une semaine ! »

Nombre de soignants devraient d’ailleurs résister à de telles injonctions : « Les résidents sont confinés en chambre et oui, dans les unités Alzheimer, c’est difficile de le faire respecter, complète Tatiana Dubuc, aide-soignante au Havre et responsable CGT. Mais tant que le médecin ne donne pas de prescription médicale précise dans ce sens, on ne contentionnera pas, ce n’est pas du tout notre politique. »

« Donner des médicaments ou attacher sur une chaise ou dans un lit des patients, c’est ce qui se pratiquait dans les hospices d’autrefois, et c’est une philosophie inverse que tente de mener le secteur depuis 20 ans, avec production à foison de chartes de bientraitance, explique Louise. Donc, c’est non seulement un reniement mais aussi un immense bond en arrière. »

Le sentiment lancinant d’être, dans cette crise encore, « la cinquième roue du carrosse » est assez général. La fille d’une résidente d’un Ehpad à Viroflay, dans les Yvelines, alors qu’il y a déjà eu deux décès dans l’établissement et toujours dix personnes en surveillance renforcée, bataillait encore cette semaine pour obtenir des protections adéquates, l’Ehpad ayant lancé un appel aux familles pour trouver des masques, des sur-blouses, des sur-chaussures et du gel hydroalcoolique. L’établissement est fermé aux familles depuis le 6 mars mais, bien sûr, le virus circule. « Ma mère a 92 ans, c’est l’horreur », confie-t-elle, dans une telle colère qu’elle a écrit directement au président de la République.

Carine, depuis son Ehpad des Hauts-de-Seine, se dit tout simplement « écœurée » : « Il a fallu attendre une crise sanitaire cataclysmique pour qu’on réalise enfin la situation dans laquelle nous nous trouvons, depuis des années. » Jeudi 2 avril, le directeur général de la santé Jérôme Salomon a pour la première fois rendu publiques les données communiquées par les Ehpad depuis le début de la crise, des chiffres encore partiels : 14 638 cas « confirmés ou possibles » de Covid-19 y ont été recensés ainsi que 884 décès depuis le 1er mars.

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4 avril 2020 6 04 /04 /avril /2020 05:09
2 avril 2020 - Questions de Fabien Roussel au Premier Ministre Edouard Philippe à l'Assemblée Nationale

Questions de Fabien Roussel au Premier ministre

Monsieur le Premier ministre

2 questions liées à l’urgence sanitaire.

- Deux entreprises du secteur de la santé sont menacées de fermetures. Les laisser mourir, c’est abandonner encore un peu plus de notre souveraineté. Luxfer à Clermont Ferrand qui produit des bouteilles d’oxygène et Famar Lyon qui produit 12 médicaments d’intérêts thérapeutiques majeurs dont l’azithromycine, antibiotique utilisé contre les infections de la gorge et des poumons, prescrit en même temps que la chloroquine dans le traitement du COVID. La production est à l’arrêt faute de repreneur !! Allez-vous entrer même temporairement dans le capital de ces entreprises pour les sauvegarder et les mettre au travail !

-Encore une fois je me permets de vous interroger sur le manque de matériel, avec de nouvelles pénuries qui se font jour comme celles des médicaments, des anesthésiants et des blouses.

Concernant leur production, que ce soit les masques, les respirateurs, des pièces de rechanges, des lits médicalisés, les blouses ou même des médicaments comme je viens d’en parler, le manque se fait toujours sentir sur le terrain et cela devient de plus en plus grave: dans les Ephad, pour les para médicaux, kiné, osthéo, orthophonistes… Les forces de sécurité, les libéraux, infirmiers ou médecins, les ambulanciers, les salariés obligés de travailler, sont toujours en manque de matériel de protection !!

Des entreprises, dans nos régions proposent leurs services pour produire ces matériels. C’est du bricolage. Des ingénieurs, des industriels dans l’automobile, dans le textile, dans la filière papetière ne demandent qu’à mobiliser leurs compétences, leurs outils de production !

Réunissez-les, faites les travailler, de gré ou de force !

Vous avez la possibilité de mobiliser beaucoup plus de forces productives pour aller beaucoup plus vite dans la production de matériel.

A ce jour chaque région, chaque hôpital bricole dans son coin en passant des accords là avec une entreprise locale, là avec un constructeur automobile.

Nous avons besoin d’une coordination de cette production, d’une mobilisation générale de tous nos moyens de production !

Pourquoi ne mettez-vous pas en place un ministère sous votre responsabilité chargé de piloter à grande échelle la production et l’acheminement de ces matériels, mobilisant les forces économiques, associant le ministère de la santé, de l’industrie et de la recherche ?

Avec un objectif: allez plus vite, travailler jour et nuit pour répondre à la demande et être moins dépendant de spéculateurs qui profitent de la situation !

Fabien Roussel, secrétaire national du PCF, député du Nord,
Le 2 avril 2020

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3 avril 2020 5 03 /04 /avril /2020 18:00
Professeur André Grimaldi: Gérer l’hôpital comme une entreprise, voilà ce qui a affaibli notre système face à la pandémie (L'Humanité, 2 avril 2020)
Jeudi, 2 Avril, 2020 - L'Humanité
« Gérer l’hôpital comme une entreprise, voilà ce qui a affaibli notre système face à la pandémie », analyse le Professeur Grimaldi

Entretien. Professeur de médecine à la Pitié-Salpêtrière et cofondateur du Collectif inter-hôpitaux, André Grimaldi décrit l’idéologie qui a mis à genoux l’hôpital public. Et énumère toutes les alertes qui ont été ignorées...

 

Mardi, Emmanuel Macron a plaidé pour un « principe de justice à l’égard de tous les choix passés ». Comme le président, diriez-vous que l’épidémie à laquelle nous faisons face était imprévisible et que ces choix ne peuvent pas être questionnés ?

André Grimaldi. On ne pouvait effectivement pas prévoir ce coronavirus. Mais la survenue d’une épidémie était, elle, envisageable et envisagée depuis longtemps par de nombreux infectiologues et médecins. Des plans ont même été bâtis ces dernières décennies. La preuve : la France s’était dotée de centaines de millions de masques pour faire face au virus H1N1, en 2009. Dire qu’il nous était impossible de prévoir un certain nombre de mesures est donc faux. Le véritable problème, c’est que l’on a affaibli notre système de santé jusqu’à nous démunir face à une éventuelle pandémie.

Qui sont les responsables de cet affaiblissement ?

André Grimaldi. Cette inflexion politique remonte à la fin du XX e siècle, quand, à l’échelle mondiale et au sein de l’Organisation mondiale du commerce, s’est instillée l’idée que, si la santé relevait bien des compétences des États, son mode de gestion devait rejoindre celui des entreprises. Cette idéologie a été ensuite partagée, à droite comme à gauche. L’hôpital public s’est retrouvé à suivre le modèle commercial des cliniques privées, qui ne relèvent pas du service public et cherchent les activités les plus rentables, en travaillant à flux tendu. C’est tellement vrai que, en 2009, la loi Bachelot, qui met en place la gouvernance d’entreprise dans les hôpitaux, adopte la terminologie du commerce. On parle désormais de conseil de surveillance, de directoire… Le directeur n’est plus un médecin mais peut venir de n’importe quel secteur privé. Pour cette idéologie, les lits, les stocks de matériel…, c’est de l’argent perdu. On est passé d’un « hôpital de stocks » à un « hôpital de flux ».

Des inflexions sont-elles intervenues depuis dix ans ?

André Grimaldi. Après la crise de 2008, les déficits des banques sont devenus ceux des États. Il fallait donc assainir les dettes publiques. L’État ayant plus la main sur l’hôpital public que sur la médecine libérale de ville, les majorités successives, sous Sarkozy comme sous Hollande, ont contraint le budget du public, en diminuant les remboursements de la Sécurité sociale. Quelque 800 millions d’euros d’économies ont été demandés aux hôpitaux chaque année. Au début, cela s’est traduit par des réorganisations. À la fin, par la diminution du nombre de lits et de personnels. Le modèle, c’est celui de la médecine industrielle. Les activités programmées, standardisées et techniques sont payées à l’acte. Cela fonctionne très bien pour la prise en charge en ambulatoire de la cataracte, de la coloscopie, de la pose de pacemaker ou de prothèse de hanche. Autant d’actes normés, standardisés et chiffrés. Ce modèle convient parfaitement aux cliniques privées qui cherchent la rentabilité. Mais pas à l’hôpital public.

Y a-t-il eu des symptômes avant-coureurs de la crise actuelle ?

André Grimaldi. Bien sûr. Avant le coronavirus, l’hôpital public a dû faire face à plusieurs phénomènes de saturation. La première a trait à l’explosion du nombre de consultations sans rendez-vous aux urgences. Résultat : des patients qui se retrouvent pendant des heures dans des couloirs sur des brancards, parce qu’il n’y a plus de lits ni de personnels suffisants pour prendre les en charge. Ce phénomène a culminé à l’automne dernier avec l’épidémie de bronchiolite. Un phénomène pourtant attendu et programmé chaque année. Mais, pour la première fois, faute de lits et de personnels, une quarantaine d’enfants ont dû être transférés des hôpitaux parisiens vers des établissements à 200 kilomètres de là (lire notre édition du 13 décembre). La bronchiolite 2019 n’était pourtant pas plus grave que celle des années précédentes. Mais les services ont été débordés. Or nous sommes au cœur des missions de l’hôpital : la réanimation et la pédiatrie. Cette situation a conforté la colère et les revendications au sein des établissements. Comme ses prédécesseurs, la ministre de l’époque, Agnès Buzyn, a répondu par un sparadrap : l’octroi d’une prime pour les infirmières de l’AP-HP… Et, en même temps, elle faisait voter un budget de la Sécurité sociale prévoyant de nouvelles économies.

Y a-t-il eu d’autres alertes ?

André Grimaldi. Oui, avec une autre épidémie, qui démontre que notre système est totalement inadapté. Une épidémie qui tue lentement, sans bruit : les maladies chroniques. Vingt millions de Français sont touchés. Le modèle industriel de la médecine programmée et standardisée ne marche pas pour ces maladies car elles demandent une prise en charge globale, sur le temps long. Le plan santé 2022 présenté l’été dernier était censé mieux organiser la prise en charge de ces pathologies grâce à la médecine de ville et à l’hôpital-entreprise. Mais ni l’une ni l’autre ne peut faire face. Aujourd’hui, en guise de « rupture », on parle d’un service hospitalier qui comprendrait non plus seulement les établissements publics, mais aussi les hôpitaux privés lucratifs et non lucratifs. On mélangerait ainsi les personnels de ces établissements, qui relèvent du droit privé, avec ceux de la fonction publique… Les propos récents du premier ministre sur la fin du statut des agents des hôpitaux publics résonnent encore plus fort aujourd’hui. Il s’agit là que d’une évolution de l’idéologie à l’œuvre ces trente dernières années.

Entretien réalisé par Stéphane Guérard

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3 avril 2020 5 03 /04 /avril /2020 06:00
Le tour de France des hôpitaux qui annonçait la catastrophe sanitaire - Diego Chauvet, Jeudi, 2 Avril, 2020 - L'Humanité
Le tour de France des hôpitaux qui annonçait la catastrophe sanitaire - Diego Chauvet, Jeudi, 2 Avril, 2020 - L'Humanité

Jeudi, 2 Avril, 2020 - L'Humanité
Le tour de France des hôpitaux qui annonçait la catastrophe sanitaire
Diego Chauvet

Les parlementaires communistes ont pu dresser un constat alarmant, mis en exergue par la pandémie du coronavirus, et élaborer une proposition de loi pour y remédier.

Depuis février 2018, les parlementaires communistes, députés et sénateurs, effectuent un tour de France des hôpitaux. En deux ans, ils ont pu visiter et rencontrer les personnels de quelque 150 établissements publics dans le pays. Ce qu’ils y ont entendu, ce qu’ils ont pu constater, prend une résonance toute particulière, alors que vient d’éclater une crise sanitaire historique. « Avant de commencer ce tour de France, nous avions effectué des visites dans nos départements respectifs, explique la présidente de la commission des Affaires ­sociales du Sénat, Laurence Cohen. Ce que nous avons constaté ensuite n’a fait que confirmer au plan national les situations locales. » Selon la parlementaire communiste, les soignants, et tout particulièrement les urgentistes, « tiraient la sonnette d’alarme ». « Ils nous expliquaient clairement qu’en cas d’épidémie de grippe plus importante ou d’épisodes de ­canicule, ils n’avaient plus les moyens de faire face. Ils nous répétaient tous qu’ils n’étaient plus assez nombreux, et qu’il n’y avait plus assez de lits. »
« On a cassé l’outil pour des considérations comptables »

Ce tour de France des hôpitaux a confirmé également que cette situation alarmante est bien le produit des politiques menées. « La gestion actuelle par Emmanuel Macron est en cause, mais le problème remonte bien plus loin dans le temps, assure Laurence Cohen. C’est le résultat de choix politiques continus depuis trente ans. » Des décisions qui sont toutes allées dans la même direction : « Réduire le nombre de lits, le nombre de personnels. Au lieu de partir des besoins de la population, on a cassé l’outil pour des considérations comptables, dénonce la sénatrice. Par exemple, lorsque l’on constate un manque de médecins, on “fédère les moyens”. Ce qui signifie que l’on éloigne les hôpitaux des populations qui en ont besoin, et par la même occasion, on multiplie les déserts médicaux. » Lors de leur tour de France, les parlementaires n’ont pas seulement rencontré les personnels soignants. « Nous avons eu également des entretiens avec les directions d’hôpitaux. Et au bout d’un moment, 90 % de ceux que nous avons rencontrés ont fini par nous exposer les problèmes. » Impossible pour les dirigeants de structures hospitalières de maintenir leur réserve… Laurence Cohen dénonce à partir de ces constats, les politiques conduites lors des quinquennats précédents : celle de Marisol Touraine comme celle de Roselyne Bachelot. La « réhabilitation » dont cette dernière bénéficie, à propos des commandes de vaccins contre la grippe A en 2009, ne doit pas faire oublier la loi à son nom, qui a créé des groupements hospitaliers sur les territoires, au détriment des hôpitaux publics de proximité.

Grâce à leur tournée, les parlementaires communistes ont préparé un projet de loi, « plus que jamais valable ». Ils proposent 100 000 créations de postes dans les hôpitaux publics, et 300 000 sur trois ans dans les Ehpad. « Nous avons remis cette proposition de loi à Agnès Buzyn, en mains propres, dit Laurence Cohen. Nous y faisons des propositions sur tout ce qui est mis en exergue par la crise du Covid-19 , y compris sur la question de la pénurie des médicaments. » Les déclarations d’intention du président ne rassurent pas l’élue. La note de la Caisse des dépôts et consignations, datée du 26 mars, sur un plan pour l’hôpital public, révélée le 1er avril par Mediapart, n’incite pas à l’optimisme : son orientation semble clairement néolibérale.

Diego Chauvet

Le tour de France des hôpitaux qui annonçait la catastrophe sanitaire - Diego Chauvet, Jeudi, 2 Avril, 2020 - L'Humanité
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3 avril 2020 5 03 /04 /avril /2020 05:38

La pandémie de coronavirus place notre pays et l’ensemble de l’humanité face à d’immenses défis. A commencer par celui de sauver les vies menacées, de protéger toute la population. Elle révèle aussi une crise de civilisation profonde et les méfaits désastreux de décennies de libéralisme qui ont fragilisé nos services publics et notre industrie, et par conséquence notre capacité d’action face à la crise sanitaire.

La lutte contre le COVID-19 appelle à une mobilisation exceptionnelle immédiate. Elle exige aussi de transformer notre mode de développement, l’utilisation de l’argent et de créer de nouveaux pouvoirs d’intervention pour les travailleurs, afin d’éviter que cette situation ne se répète et de répondre aux immenses défis à relever.

C’est tout le sens des propositions que le Parti communiste français met en débat aujourd’hui.

Covid_19 : les propositions du PCF
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