😡 "Monsieur le ministre, avec tout le respect que je vous dois, c'est de l'enfumage! Y'a combien d'euros débloqués aujourd'hui pour la santé? Y'en a pas! Y'a combien de lits ouverts? On ne sait pas! Dans nos hôpitaux, on manque de masques, de gants, de gels... vos belles paroles amusent la galerie mais ne règlent pas le problème! On veut des actes!"
➡️ 2 milliards annoncés par le gouvernement contre le coronavirus? C'est insuffisant! Pourquoi ne pas rendre les 5 milliards volés lors du #PLFSS2020, dont 1 milliard pour l'hôpital public?
➡️ Pourquoi ne pas rouvrir 100 000 lits fermés en 20 ans?
➡️ Pas de confinement des moyens financiers et humains! Pas de belles paroles mais des actes, en urgence!
Membre des Économistes atterrés, professeur à la Paris School of Business publie les Délaissés, dans lequel il fustige les politiques néolibérales. Tel un rouleau compresseur écrasant les plus défavorisés, le système à bout de souffle accroît les inégalités, détruit la planète et se voit remis en cause par la crise du coronavirus.
Au regard du contexte actuel, quel va être l’impact économique du Covid-19 ?
Nous faisons face aujourd’hui à une triple crise. Sanitaire, financière et économique. En plus des raisons de santé publique évidentes, il faut tout mettre en œuvre pour la stopper le plus vite possible afin de limiter l’impact économique. Plus elle s’inscrit dans la durée, plus les répercussions seront sévères. À mon sens, nous aurions dû prendre bien plus tôt les mesures drastiques comme le confinement, la fermeture des frontières, le couvre-feu, etc. Elles auraient permis d’atteindre le plateau de contamination plus rapidement, mais aussi de permettre aux populations de prendre dès le début la mesure de l’importance du risque épidémique. À la place, nous avons été dans une situation d’entre-deux avec les gestes barrières, nécessaires mais insuffisants, et, de l’autre, une communication gouvernementale qui nous incitait à sortir pour, par exemple, aller voter aux élections municipales. Le message n’était pas très clair. Les crises financières et économiques sont directement liées à l’urgence sanitaire. Un contrôle rapide de la contamination aurait permis de lever les doutes des marchés financiers sur les incertitudes des États européens à endiguer le Covid-19. Les pertes des petits commerces auraient été rattrapées les trimestres suivants, comme c’est déjà le cas lors des perturbations comme des grèves importantes. L’État aurait alors pu agir pour soutenir les secteurs les plus impactés. Aujourd’hui, nous sommes face à une épidémie qui prend une ampleur inédite et dont les conséquences économiques sont à l’heure actuelle difficilement mesurables.
Et qui risque d’en faire les frais ?
Si, dans les semaines à venir, notre économie enregistre une baisse conséquente de l’activité, comme lors de la crise de 2008, tous les secteurs d’activité seront touchés. Les différentes réformes du Code du travail menées par Hollande puis poursuivies par Macron permettent de licencier plus facilement. À cela, il faut aussi ajouter la réforme de l’assurance-chômage qui rend plus difficile l’accès aux prestations chômage et diminue les montants alloués. Les catégories des ouvriers et des employés seront ainsi les premières à en subir les conséquences. Dans une moindre mesure, les cadres pourraient être également touchés. On peut dès lors s’attendre à une diminution des embauches, un gel des augmentations et une hausse des cadences. Tout va dépendre en fait des moyens que le gouvernement sera prêt à mettre en œuvre pour soutenir l’activité, une fois le problème sanitaire réglé. Le président a parlé d’un soutien à l’activité, il faut voir comment cela se traduira dans les actes.
Le coronavirus semble mettre en lumière les défaillances du système capitaliste ?
En effet, le coronavirus montre la fragilité de notre système. Tant dans la rapidité de la propagation, qui montre une perte de contrôle des flux, que dans la dépendance de nos économies, en particulier dans la fabrication de produits aussi importants que les médicaments. Il ne faut pas non plus éluder la logique austéritaire et managériale mise en œuvre depuis des années et qui a organisé des coupes budgétaires dans les services publics, et notamment dans le secteur de la santé. Aujourd’hui, les personnels en première ligne dans la lutte contre le coronavirus sont ceux des hôpitaux, de la petite enfance, de l’éducation. Ces mêmes travailleurs qui manifestent depuis plus d’un an dans l’indifférence générale alors qu’ils réclament simplement des conditions de travail décentes, qui passent notamment par une augmentation de moyens humains et financiers.
D’où un chapitre entier de votre dernier livre dans lequel vous appelez à la sauvegarde des services publics ?
Depuis de nombreuses années, on assiste à un travail de sape médiatique pour dénigrer non seulement le service public, mais aussi les agents qui y travaillent. Ils sont souvent taxés de « fainéants », « improductifs », « toujours en arrêt maladie », etc. Pourtant, de nombreuses études montrent que le service public est plus efficace que le secteur privé. D’une part car il n’y a pas d’actionnaires à rémunérer, mais aussi parce que l’État, en tant qu’investisseur, bénéficiera toujours des taux d’emprunt les plus avantageux. Il y a également un effet rarement mis en avant, il s’agit de « l’effet multiplicateur de l’investissement public », théorisé par Keynes et maintes fois vérifié. La politique du Royaume-Uni en est un très bon contre-exemple. Le gouvernement a voulu cesser certains partenariats public-privé. Un rapport accablant du National Audit Office (l’équivalent britannique de la Cour des comptes) a montré que, ce faisant, la construction d’écoles coûterait 40 % de plus en cas de délégation au privé, un chiffre qui passerait même à 70 % pour les hôpitaux. Autre exemple, le système de santé aux États-Unis. Essentiellement privé, il représente 17 % du PIB, contre 11,7 % chez nous. En plus d’être inégalitaire, il est plus cher.
Il n’y a donc pas d’intérêt « économique » à casser les services publics ?
C’est une nouvelle fois encore une histoire de gros sous. Il y a une énorme manne financière, je rappelle qu’en France, les retraites représentent 300 milliards d’euros par an, sur laquelle le secteur privé souhaite mettre la main. La libéralisation du rail ou la réforme des retraites, pour ne citer qu’eux, s’inscrivent dans cette logique de privatisation de l’ensemble des secteurs de l’économie à laquelle on assiste depuis une trentaine d’années en France. Nous avons face à nous des élites très dogmatiques. La stratégie d’Emmanuel Macron consiste à mettre en concurrence l’un et l’autre, et faire en sorte que le privé cannibalise le public. On les oppose alors que les deux sont essentiels. Plutôt que de les mettre en concurrence, il faudrait montrer les bienfaits d’une économie mixte avec un secteur public fort qui réglemente le privé.
Avec notamment le tournant libéral pour l’agriculture dans les années 1980 ?
Au début, l’ouverture à la mondialisation a été plutôt bénéfique pour les agriculteurs. Ils pouvaient exporter leurs biens vers le monde entier, mais avec le revers de la médaille : une plus forte concurrence. Pour y faire face, ils ont dû augmenter leur productivité, avec le recours à la mécanisation. Toutefois, les denrées agricoles sont des biens très particuliers. Par exemple, un individu qui mange des pommes ne va pas se mettre à en manger deux fois plus si elles sont deux fois moins chères. En réalité, plus l’ensemble du secteur agricole se mécanise, plus il augmente sa productivité, et plus il voit ses revenus diminuer. L’économiste David Cayla, qui a beaucoup travaillé sur cette question, utilise d’ailleurs l’expression « la malédiction des agriculteurs ». À cela il faut aussi prendre en compte l’extrême financiarisation et tout particulièrement celle des matières premières au début des années 2000. Pour faciliter la vie des investisseurs, les banques ont conçu de nouveaux produits financiers tels que le Goldman Sachs Commodity Index (GSCI). Cet indice sert d’unique référence pour fixer les prix de 24 composantes à l’échelle mondiale. Il mélange à la fois les prix du blé, du sucre ou du soja, mais aussi de certaines énergies comme le pétrole ou le gaz, ainsi que d’autres biens comme les métaux industriels (zinc, aluminium, nickel) ou encore l’or et l’argent. Ces biens, qui pourtant ont des modes de production et de consommation très différents, se retrouvent liés entre eux. Ainsi, la moindre fluctuation sur l’un de ces produits aura un impact immédiat sur tous les autres. Ajoutez à cela l’extrême volatilité des cours. On se retrouve alors avec un système de prix totalement déconnecté de l’économie réelle et du quotidien des agriculteurs. Comment, dès lors, un agriculteur peut-il réaliser des investissements qu’il remboursera sur plusieurs années sans un minimum de visibilité sur les prix ?
Cette extrême financiarisation de l’économie a ensuite conduit à l’explosion des Bourses mondiales en 2008, que vous analysez comme la genèse du mouvement des gilets jaunes…
À la suite de la crise dite des subprimes, le taux de chômage a explosé partout en Europe. Les plus touchées ont été les catégories des ouvriers et des employés, principalement dans les territoires et dans les banlieues. Au lieu de pratiquer une stratégie de relance de l’économie, les gouvernements européens ont opté pour l’austérité budgétaire dès 2011. Leur seul objectif étant la réduction du déficit public. D’importantes coupes ont été faites sur les collectivités territoriales. L’effet sur les populations fut immédiat. Les Français ont subi la dégradation de leurs services publics, qui s’est traduite par moins de moyens pour les crèches, les écoles, les loisirs ou encore les associations qui animent la vie locale, créant ainsi le sentiment d’être lâchés par les pouvoirs publics. Ensuite, comme dans toute révolution, il faut un déclencheur. Dans le cas des gilets jaunes c’est la taxe sur les carburants qui a joué ce rôle. Il faut bien comprendre que ce type de taxe doit avoir pour but d’inciter un changement des comportements. Dans les grandes villes, cet effet peut fonctionner parce que l’arbitrage entre véhicule et transport en commun est possible. À Paris, par exemple, le taux d’utilisation de la voiture est de 14 %. En revanche, dans les territoires, il est autour de 85 %. Tout simplement parce qu’aucune alternative n’est possible. La taxe perd alors son caractère incitatif et devient punitive. Une taxe sur les carburants est justifiée au nom de l’impératif écologique, mais elle doit s’accompagner de toute une batterie de mesures comme le développement des transports publics partout en France ou une fiscalité plus juste à l’égard des grosses entreprises comme Total.
Le secteur privé a donc aussi un rôle à jouer ?
Il est normal que dans un pays où une grosse entreprise est implantée, l’État donne son avis. Au moins sur les grandes orientations de politique économique afin que le privé s’inscrive dans un projet de société de plus grande envergure. L’État fixe le cap et les entreprises doivent s’y insérer. Si le but est la transition énergétique, la rénovation des bâtiments et les renouvelables, les entreprises peuvent trouver des opportunités à s’engouffrer dans ce projet. Le problème en France, c’est qu’on a l’impression que ce sont les entreprises qui décident à la place de l’État, et que la seule stratégie de ce dernier consiste à libéraliser l’économie et baisser la fiscalité pour faciliter la vie des grands patrons.
Alors, quelle est la solution ?
Mon rôle, en tant qu’économiste, est de jeter les bases d’un nouveau modèle en mesure d’apporter une réponse aux enjeux sociaux et environnementaux. Mais le nerf de la guerre, c’est la politique. Mon livre les Délaissés a pour objectif de montrer qu’une très grande majorité de Français subit les effets négatifs de l’économie néolibérale. Qu’ils soient gilets jaunes, banlieusards, agriculteurs ou cadres, tous sont victimes du néolibéralisme. La société civile doit dépasser les clivages d’opposition de classes, souvent instrumentalisés par le jeu politique, et réclamer un véritable changement de paradigme économique.
Après l’Italie et l’Espagne, nous voilà entrés dans le temps suspendu et le combat quotidien pour éviter que ne se propage à vitesse folle ce maudit virus qui s’infiltre partout avec la même arrogance qu’il défie les analyses scientifiques. Seule certitude : sans les mesures draconiennes qui nous sont imposées, le bilan humain pourrait s‘avérer effrayant, comme nous n’en avons connu qu’en temps de guerre. Il l’est déjà pour l’Italie qui essuie chaque jour les décès par centaines.
La puissance de l’onde de choc est telle que les enjeux des élections municipales, pourtant ô combien importants, paraissent bien dérisoires. De nombreux citoyens l’ont fait savoir en s’abstenant massivement dimanche dernier. Ils l’ont fait à bon droit quelques heures après que le premier ministre ait demandé de fermer l’essentiel des lieux publics. Mais celles et ceux qui ont déposé un bulletin dans l’urne ont majoritairement sanctionné le gouvernement, confirmé nombre de maires sortants, pousser les écologistes et conforté les listes d’union des forces de gauche. Sur ces données fondamentales, à relativiser au regard du record d’abstention, se construiront sans doute les rapports de force de demain pour ériger une société opposée à celle qui craque sous nos yeux, avec le nez rivé sur les profits et l’obsession du gain facile qui nous plongent dans une insécurité permanente et maximale, sociale, économique et désormais sanitaire.
A cette heure les esprits sont intégralement tournés vers la situation stupéfiante que nous vivons. Et à raison. Chacune, chacun est appelé à réorganiser son quotidien, des millions de salariés vivent dans l’angoisse des conséquences de l’arrêt brutal des commerces, des services et d’une partie de la production.
Tous les regards, toutes les attentions se tournent vers les personnels médicaux et hospitaliers, admirables, en première ligne face à une catastrophe annoncée. L’équation à résoudre s’avère simple : comment faire face à l’afflux prévisible de patients sans les moyens adéquats en lits et personnels, férocement rognés par chacune des cures austéritaires. Ces femmes et ces hommes durement éprouvés par des années d’austérité imposée et des cadences infernales, qui ont multiplié les mouvements sociaux pour alerter sur leur situation professionnelle dégradée, sont donc appelés à un nouveau sacrifice au service de l’intérêt général. Cet épisode tragique et héroïque nous oblige à tourner définitivement la page des réductions de crédits pour la santé publique et à sanctifier la Sécurité sociale. Voilà des « décision de rupture » impératives, « quoi qu’il en coûte » ! Mais au-delà, les forces de progrès, politiques, syndicales associatives doivent travailler ensemble à redéfinir le rôle de la puissance publique et des solidarités sociales dans l’organisation la société. Un monde du commun est à construire.
Le monde d’hier, celui du court terme, du saccage des services publics, de la finance reine, a pris un sérieux coup de vieux. Les besoins immédiats et de moyen terme de l’ensemble de l’économie font sauter tous les verrous, imposés par les instances européennes en lien avec les gouvernements libéraux.
Les choix peuvent être faits dès maintenant pour engager de nouveaux et passionnants chantiers pour une toute autre société, de la ville au pays, de l’Europe à la planète. Qu’elles aient ou non voté, des forces considérables étaient disponibles dimanche dernier pour le progrès social, écologique et démocratique. A l’affût, elles ont et auront de plus en plus un rôle décisif, dans les urnes comme dans la cité. Dans l’immédiat, il convient d’écouter et d’appliquer les recommandations des autorités sanitaires. L’urgence est vitale, au sens propre du terme !
Le Parlement vote un "état d'urgence sanitaire" qui menace les libertés publiques et le droit social
La loi contre le coronavirus, très vaste, confie des pouvoirs exorbitants au gouvernement via un « état d’urgence sanitaire » dont le contrôle s’avère insuffisant. Les attaques contre le Code du travail en pleine épidémie ont aussi été dénoncées.
Adopté. L’Assemblée nationale a voté dans la nuit de samedi à dimanche le projet de « loi d’urgence pour faire face à l’épidémie de Covid-19 », par 510 voix contre 37. Les députés PCF, FI et trois PS se sont prononcés contre. D’abord à cause de la création d’un « état d’urgence sanitaire » finalement démesuré. « Nous étions d’accord sur le principe. Nous ne voulons pas freiner le gouvernement dans sa capacité d’action face au coronavirus. Mais cela doit se faire dans le respect de l’État de droit. Le texte présenté transfère des pouvoirs exorbitants à l’exécutif », dénonce Stéphane Peu. L’élu PCF explique que son groupe a proposé d’aligner ce nouvel état d’urgence sur celui déjà existant, créé en 1955. « L’idée était de garantir un contrôle du Parlement au bout de douze jours. Mais cela a été refusé, s’alarme-t-il. Nous allons au final vers un état d’urgence qui dans sa durée et dans la faiblesse des contrôles va au-delà de l’article 16 de la Constitution », lequel confie des pouvoirs exceptionnels au président de la République, avec saisie possible du Conseil constitutionnel au bout de 30 jours par les parlementaires.
Or cet « état d’urgence sanitaire » pourra être déclaré d’emblée pour une durée de deux mois, puis renouvelable de mois en mois. « Nous avons proposé la création d’un comité national associant l’ensemble des forces politiques, sociales et économiques afin de dépasser cette crise dans la concorde, la confiance et la transparence. Mais cela a été refusé. La démocratie est pourtant une condition sine qua non pour surmonter cette épreuve et faire adhérer le peuple tout entier aux mesures adoptées », pointe Stéphane Peu. « Les assemblées ne sont pas de trop ! Nous sommes prêts, jour et nuit, dès que l’on nous convoque, à venir délibérer », abonde Jean-Luc Mélenchon. L’insoumis considère qu’il « n’y avait pas de vide juridique » nécessitant la création d’un « état d’urgence sanitaire », mais se disait prêt à le voter avant de voir enfler « l’étendue incroyable des pouvoirs conférés au gouvernement » sans contrôle suffisant.
La hausse des pénalités ne fait pas l’unanimité
« Nous ne pouvons pas créer ex nihilo un dispositif juridique alors que nous sommes moins de trente parlementaires présents dans l’hémicycle », signale le socialiste Boris Vallaud. Les travées de l’Assemblée étaient de fait quasi vides, seuls trois députés par groupe étant autorisés à venir pour représenter l’ensemble des 577 élus, pour cause d’épidémie. La plupart des députés PS se sont cependant abstenus, tout comme les sénateurs PCF amenés à se prononcer plus tôt, dans la nuit de jeudi. Notamment parce que le Parlement examinait un texte composé d’ordonnances : le gouvernement est lors d’un premier vote habilité à écrire la loi à la place des chambres législatives, qui ratifieront ou non le texte rédigé lors d’un vote à venir. Il est ainsi possible de laisser l’exécutif élaborer une loi avant de la repousser. Le contenu du texte s’est en outre précisé au fil des jours, l’union nationale réclamée par le président de la République Emmanuel Macron se délitant au fur et à mesure des débats.
L’évolution des règles de confinement a divisé. Si l’ensemble des parlementaires s’entendent pour le faire respecter, la hausse des pénalités n’a pas fait l’unanimité. Les amendes pour non-respect passent de 135 euros la première fois à 1 500 euros en cas de récidive. Et jusqu’à 3 750 euros et six mois de prison ensuite. « Nous sommes au-delà de toute proportionnalité. Il faut de plus se dispenser d’une peine d’emprisonnement alors que nos prisons sont pleines », s’émeut le député LT (Libertés et territoires) Charles de Courson. Mais c’est surtout l’absence de contrôle sur l’état d’urgence qui a opposé les élus, tout comme les attaques portées contre le droit du travail. Cette deuxième raison a aussi poussé les députés PCF et FI à voter contre le texte. Car le projet du gouvernement prévoit de laisser certaines entreprises déroger à la durée légale du travail et aux 35 heures, à l’acquisition et la prise de congés payés et jours de repos, et aux réunions des instances représentatives du personnel (IRP). Les secteurs concernés n’ont pas été précisés, et la durée de ces mesures n’a pas été circonscrite à celle de l’épidémie.
Les municipales reportées au mois de juin
Si le ou les jours de carence ont été temporairement supprimés dans le public comme dans le privé, afin que le maintien des rémunérations se fasse dès le premier jour de l’arrêt de travail dans ce contexte d’épidémie, des coups sévères ont donc été portés aux salariés. Tout employeur pourra contraindre les salariés, confinés ou non, au dépôt de jours de RTT ou de repos issus du compte épargne temps. L’imposition sans limite des congés payés a par contre été renvoyée à un accord de branche ou d’entreprise par le Sénat, qui l’a limitée à six jours ouvrables. « Les droits sociaux ne doivent pas être la seule variable d’ajustement dans les moments difficiles », prévient Jean-Luc Mélenchon, pour qui « ceux qui ont le plus sont appelés à donner le plus ». « On connaît la volonté du gouvernement d’affaiblir le Code du travail. C’est insupportable en temps normal et encore plus dans cette situation. Les Français sont prêts à se retrousser les manches pour lutter contre le virus sans que ne soient prises des mesures discrétionnaires, autoritaires ou attentatoires au droit social », ajoute Stéphane Peu.
Enfin, les parlementaires se sont entendus sur le report des élections municipales au mois de juin, les dates du 21 ou du 28 juin étant les plus envisagées, à condition que la situation sanitaire le permette. La question de la date de dépôt des listes a animé les débats, certains voulant les circonscrire au mois de mars. La date du 2 juin a finalement été retenue, avec un début de campagne fixé au 8 juin. Il est en outre prévu que les plafonds de dépenses de campagne soient majorés par un futur décret. Si les résultats du premier tour ont été confirmés, il a été précisé que les conseillers municipaux et communautaires élus le 15 mars entreront finalement en fonction en juin. Les anciennes assemblées sont donc maintenues d’ici là.
Coronavirus : Que comptez vous faire pour protéger les salarié-es ? (Fabien Roussel-PCF)
Vous trouverez ci-dessous la Question Au Gouvernement de Fabien Roussel, posée ce matin à l’Assemblée nationale.
Monsieur ministre,
Le monde du travail est en 1ere ligne.
Il y a d’abord toutes celles et ceux qui assument des activités essentielles au bon fonctionnement de notre pays. Nous pensons bien sûr à tous les soignants, auxquels la nation doit exprimer une infinie reconnaissance.
Mais il y a aussi tous les autres : les auxiliaires de vie auprès des personnes âgées, ceux qui vivent au quotidien auprès des personnes handicapées, les policiers, les gendarmes, les pompiers ou encore les personnels pénitentiaires... Ils sont ainsi des dizaines de milliers, forcément au contact d’autres personnes, qui font un travail admirable mais qui ne comprennent pas pourquoi ils ne peuvent pas faire garder leurs enfants, pourquoi n'ont-ils pas de masque, de gel et de gants ?
Il y a aussi toutes celles et ceux qui, dans le privé comme dans le public, nous permettent de continuer à vivre du mieux possible : que ce soient les enseignant-es, les fonctionnaires, les caissièr-es, les livreur-ses ou les postier-es, tous sont indispensables, mais eux aussi se sentent oubliés car ils n’ont pas de protection et ils doivent faire valoir leur droit de retrait quand leur direction les met en danger, comme chez Amazon ou GE Belfort.
Il y a tous ces travailleurs et toutes ces travailleuses qui ont peur d’être licencié-es. Interdisez les licenciements dans cette période au moins.
Et puis il y a ceux qui se demandent pourquoi ils doivent aller travailler, au péril de leur santé, dans des secteurs non essentiels, dans le bâtiment, pour produire des rétroviseurs dans le Grand Est, des paquebots à St Nazaire ou encore des trains à Valenciennes. Il y a ceux comme les travailleurs des ports qui demandent à ce que leur activité se concentre sur le strict nécessaire. Sans règle claire, des entreprises non indispensables continuent de tourner. Il ne peut pas y avoir d’un coté un confinement total et de l’autre des salariés qui prennent les transports pour aller au travail et se regroupent dans leur entreprise.
Monsieur le Ministre
Celles et ceux qui sont au front sont toujours les mêmes. Que comptez vous faire pour les protéger ?
Fabien Roussel, secrétaire national du PCF, député du Nord,
Ce jeudi 19 mars, les députés siègent pour une séance de questions au gouvernement ainsi que pour voter l’état d’urgence sanitaire. L’occasion pour les élus de faire entendre une autre voix dans une crise où l’exécutif est tout-puissant. On en a causé avec le député PCF Pierre Dharréville.
Regards. Avant toute chose, était-ce bien raisonnable de réunir les parlementaires, fussent-ils seulement une petite trentaine, quand on sait que déjà 18 d’entre vous ont le coronavirus ?
Pierre Dharréville. Il est nécessaire, en prenant toutes les précautions, de faire vivre le débat démocratique. C’est aussi la meilleure manière de faire face et d’apporter les meilleures réponses à la situation. De la même façon qu’un certain nombre de gens sont à la tâche – dans les supermarchés, etc. –, il faut assurer la vie démocratique, nous en avons besoin dans ces moments-là.
Vous avez demandé au gouvernement d’investir massivement dans la santé, en matériel comme en personnel. Que pensez-vous des annonces faites par l’exécutif depuis le début de la crise ? La France va-t-elle payer « quoi qu’il en coûte » ?
Il faut placer la santé au-dessus de toute préoccupation, ça doit être une priorité première. Nous avons, ces derniers mois, ces dernières années, beaucoup alerté sur l’état de l’hôpital public et sur le sous-investissement dont il était victime, sur l’assèchement des dépenses de protection sociale et donc des dépenses de santé. Aujourd’hui, nous sommes dans une situation qui est impactée par les décisions politiques prises par le passé. Il faut qu’on gèle toutes les démarches de restriction et de suppression prises dans l’hôpital. Il faut leur donner les moyens de s’organiser correctement, pour affronter le risque qui surgit, mais aussi continuer à faire face aux problèmes de santé qui ne sont pas liés au coronavirus. Il faut arrêter de leur serrer la vis comme c’est le cas depuis trop longtemps. Concrètement, les hôpitaux pourraient se retrouver rapidement avec des problèmes de trésorerie. Il faut s’en occuper pour qu’ils puissent passer les commandes de matériels dont ils ont besoin. Il y a aussi la question du personnel, y compris du personnel de service afin d’assurer un haut niveau d’hygiène. Il faut leur donner les moyens et la confiance pour qu’il gère au mieux la crise. Tout ça, le gouvernement peut le décider. Je vois un gouvernement qui essaye de faire face, ce qui n’empêche ni le débat, ni de faire des propositions.
« Le libéralisme a une part de responsabilité dans les difficultés que nous avons à faire face à la crise. »
Autre question de votre part, celle de « pouvoir mobiliser des industries capables de produire des respirateurs, des médicaments ». Cette pandémie a bien démontré notre dépendance en la matière, notamment vis-à-vis de la Chine. Que faudrait-il faire ? Vous avez notamment évoqué l’idée de « réquisitionner des outils essentiels à produire les médicaments dont nous avons besoin »...
Il y a une entreprise qui fabrique des respirateurs en France. Le ministre de la Santé m’a répondu ce matin, elle va être mobilisée, l’État a passé des commandes, c’est une bonne chose. C’est une question essentielle, on va en avoir grandement besoin. Je suggère qu’on interroge nos industriels pour modifier un certain nombre de productions afin qu’elle participe à cet effort si elles le peuvent. Plus généralement, la conception et la fabrication du médicament et des dispositifs médicaux ont été de plus en plus délocalisées. Nous proposons un pôle public du médicament, ce qui suppose une volonté politique qui n’existe pas aujourd’hui. Un exemple : il y a un laboratoire dans le Rhône qui est dans une situation de liquidation judiciaire, sans repreneur. La puissance publique devrait intervenir, se doter d’une force de frappe pour peser sur le marché et l’orienter et non pas pour que le marché se voit confier le soin de gérer notre souveraineté en termes de médicaments, et donc en termes de santé.
Pensez-vous que, une fois la crise passée, les politiques néolibérales vont reprendre une activité normale, comme si de rien n’était ?
J’ose espérer que la crise peut ouvrir quelques yeux et nous obliger à prendre quelques décisions qui vont contrecarrer les plans néolibéraux. Pour l’instant, je me garderais de tout pronostic. Je pense que le libéralisme a une part de responsabilité dans les difficultés que nous avons à faire face à la crise. Le virus passe notre société au révélateur et montre, plus que jamais, la nécessité de dépasser le capitalisme. Même si le capitalisme n’a pas créé le virus et il ne suffira pas de prendre des mesures progressistes pour que les virus n’existe plus. En tout cas, la période montre notre besoin de services publics forts, efficaces, capables de réagir. On les a affaiblis ces dernières années. Il faudra regarder la réalité en face.
L’irruption du coronavirus et sa diffusion partout dans le monde viennent rappeler l’humanité à sa condition. Il s’agit d’un événement majeur qui suscite l’inquiétude, provoque des incompréhensions et déclenche des mesures inédites. Il vient aussi mettre au jour les graves dangers provoqués par les politiques néolibérales et l’urgence de profonds changements. Inutile de préciser que l’accélération macroniste n’a pas arrangé les choses. C’est l’état de civilisation de nos sociétés qui est révélé par le virus. Nous sommes devant neuf chantiers et bien d’autres.
Considérer la santé comme un bien commun mondial. Les humains ont partie liée tout autour de la planète. Nous sommes interdépendants, et ce n’est qu’ensemble que nous pourrons relever les défis communs. Nous savons que les fragilités sanitaires des uns mettent en danger la sécurité de tous les autres. Nous savons que les pollutions, la malproduction, le maltravail et la malbouffe nous abîment. C’est pourquoi le droit à la santé doit être ardemment promu au rang de priorité première de l’échelle nationale à l’échelle internationale. Cela suppose une solidarité dont les obsédés de la frontière ne veulent pas et que les obsédés du libéralisme veulent réduire à sa plus simple expression. Cela suppose aussi que rien ne puisse passer avant, pas même l’orthodoxie budgétaire.
Développer les outils de santé publique. Former des professionnels de santé est une exigence qui appelle un plan d’action rapide. Dans tous les domaines, nous manquons de professionnels du soin justement formés, justement reconnus et justement rémunérés. Le droit à la santé appelle des services publics de santé développés permettant l’égal accès de toutes et de tous aux soins. L’hôpital public est en crise depuis des années maintenant, avec un personnel en grande souffrance. Les gouvernements n’en ont toujours pas pris la mesure. Ces services publics doivent être accompagnés de systèmes solidaires de protection sociale étendus en termes d’assurance-maladie. Il y a encore beaucoup à faire en la matière. Il faut arrêter d’assécher les ressources de la sécurité sociale. Plusieurs chercheurs ont dénoncé le manque de moyens pour la recherche sur les virus de type corona, témoignage d’un défaut beaucoup plus global. Comment agir sans savoir ? La recherche en général – notamment fondamentale et médicale en particulier – est un secteur crucial qui ne doit pas être soumis aux exigences de rentabilité. Vecteur décisif du progrès humain, elle doit être inscrite dans des logiques d’ordre public. La politique du médicament elle-même, déjà en question, est désormais clairement en cause, tant le secteur est affaibli. Notre pays a besoin de prendre toute sa part dans la conception et la fabrication, ce qui renforce la nécessité de construire un pôle public du médicament.
Être capable de réactions adaptées. La situation actuelle appelle à revoir les règles habituelles pour protéger les plus fragiles. Cela veut dire a minima repousser la trêve hivernale pour les expulsions, débloquer des moyens pour les EHPAD, renoncer à appliquer la réforme de l’assurance-chômage, créer un fonds de soutien aux TPE… Elle appelle également une régulation plus forte de la finance et de l’économie. Les grandes manœuvres spéculatives doivent être bloquées et les appels au boursicotage doivent cesser avec les bonifications sociales et fiscales qui les encouragent. Elle appelle encore l’investissement public. L’hôpital public, notamment, doit recruter et former massivement et de façon accélérée du personnel. Et nous devons accepter qu’un certain nombre de dépenses indispensables occasionnées par la crise sanitaire et ses effets devront être amorties sur un temps long.
Augmenter la protection sociale solidaire. Il ne peut y avoir de droit à la santé sans assurance-maladie. La Sécurité sociale, affaiblie par certaines mesures au cours des dernières années, peut encore progresser en la matière. Mais c’est toute la protection sociale qui doit gagner du terrain. La récente réforme de l’assurance-chômage, dont les dégâts étaient annoncés, va voir ses effets négatifs décuplés avec la crise qui s’annonce. Et la réforme des retraites, dont l’un des objectifs affichés est de laisser les seniors plus longtemps dans l’emploi ou le chômage, va se révéler encore plus inadaptée à nos existences. De tout temps, les forces de l’argent et les forcenés du libéralisme ont voulu réduire la part des richesses produites socialisée pour faire face ensemble aux risques. La crise du coronavirus montre la dangerosité de cette obsession. C’est ensemble, en développant des moyens de sécurité sociale, par la solidarité, que nous nous protégeons le mieux.
Lutter contre les inégalités, fléau pour toute l’humanité. L’aspiration à l’égalité est forte, à commencer par l’égalité entre les femmes et les hommes. Nous savons combien la santé est sensible aux conditions sociales. Nous savons combien la misère et la faiblesse des ressources impactent toute l’existence. Toute une part de l’économie européenne et mondiale prospère sur ces réalités qui précarisent la vie d’une part importante de la population. Et le capitalisme fonde son développement sur la permanence et l’accroissement de ces inégalités, qui provoquent le malheur d’un si grand nombre pour le profit de quelques-uns et qui attisent les tensions destructrices. Cela rend d’autant plus urgent de garantir un travail justement rémunéré et des conditions de vie décentes à chacune et chacun, comme une condition du contrat social.
Mettre en cause la croissance capitaliste, accélératrice de fragilités. La crainte d’un ralentissement de l’économie n’a pas été le moindre des freins à la prise en compte du risque. Or, il était impossible d’agir efficacement sans affecter la vitesse, l’ampleur et la nature des échanges marchands qui structurent l’organisation de nos sociétés et de leurs relations ; et donc sans toucher aux profits des puissants (l’économie du sport en a été la partie la plus visible). Les événements viennent donc interroger la structure de l’économie mondiale. La nécessité de relocaliser un certain nombre de productions était déjà établie pour des raisons environnementales et sociales. Au passage puissent les multinationales du commerce en ligne ne pas tirer encore bénéfice de la situation… Il ne s’agit pas de prôner des modèles autarciques, protectionnistes, nationalistes, mais une organisation raisonnée de la production et des échanges, le respect de celles et ceux qui travaillent, un autre rapport aux ressources de la planète, des modèles de coopération plutôt que de concurrence, la préservation de secteurs essentiels en gestion publique. Oui, il y a besoin de services publics. Tout cela ne va pas de soi, nécessite des débats de fond et appelle de la politique.
Développer la démocratie citoyenne. Être informé et faire des choix. Ne pas subir le cours des choses imposé par les plus forts. C’est là les exigences qui émergent devant cette crise. C’est lorsqu’ils sont informés, lorsqu’ils disposent de la connaissance que les femmes et les hommes sont le mieux à même de réagir face au danger. Et c’est dans des choix élaborés collectivement que les réactions sont les plus efficaces. D’où la nécessité de recréer de la confiance dans les outils publics et de revitaliser la démocratie. Ce qui est vrai pour l’urgence l’est d’autant plus en temps ordinaire. Cette crise a mis en exergue le besoin de voir la puissance publique prendre ou reprendre la main sur des champs qu’elle avait abandonnés. Nous devons partout faire grandir la démocratie pour que les orientations économiques ne s’imposent pas à la volonté démocratique, à l’intérêt général, au bien commun. La démocratie sanitaire, la démocratie sociale sont des dimensions incontournables de cette dynamique cruciale.
Relancer la solidarité internationale. Peut-on imaginer une réponse solide qui ne naisse pas d’une solidarité et d’une coopération internationales décuplées, alors que les institutions internationales sont profondément affaiblies? Nous sommes liés. Liés face au défi de la planète, liés face au défi de la santé, comme nous le sommes aussi dans un autre registre face au défi du terrorisme : liés face à notre destin d’humanité. Il faut donc réinvestir dans les institutions pour les transformer et redéfinir leurs ambitions avec l’objectif de leur permettre de jouer un rôle accru face aux défis communs en cherchant les voies d’une solidarité concrète à la hauteur des enjeux.
Retrouver du sens pour une nouvelle dynamique de civilisation. L’épidémie peut avoir des effets contraires sur les relations sociales. Elle peut attiser le repli, la méfiance, la peur, la dépression. Elle peut aussi décupler la solidarité, l’attention, la combativité, la prise de conscience. Dans l’immédiat, elle modifie nos relations sociales et nos activités humaines. Les précautions sont salutaires pour peu qu’elles ne tournent pas à la névrose. Nous devons être vigilants à ce qu’elles ne viennent pas neutraliser tout ce qui nous rapproche et nous lie. Cette occasion dramatique, qui met en lumière les transformations sociales indispensables, doit provoquer un sursaut d’humanité : prendre soin de l’humain. Elle doit nourrir nos rêves d’un monde meilleur, nous donner de la force pour affronter le défi de l’humain et de la planète. Pour le communiste que je suis, elle renforce la conviction que l’organisation capitaliste du monde est inadaptée, contraire au bien humain. Elle renforce l’urgence de construire une dynamique de gauche pour engager une nouvelle étape de progrès de civilisation, en France, en Europe et dans le monde. Rien de tout cela n’évitera le surgissement de virus, mais c’est ainsi que nous serons plus forts pour leur faire face, ensemble, aujourd’hui et demain.
Dans une interview au Journal du Dimanche, le député communiste du Nord a précisé les propositions de son groupe politique dans la lutte contre la pandémie:
La pandémie actuelle met en lumière les inégalités sociales. Sans-abri, réfugiés, mal-logés, personnes âgées… dans notre société, les plus précaires, faute de ressources suffisantes, sont en première ligne, révélant l’insuffisance des moyens mis en place par l’État pour les protéger.
Certes, le gouvernement a suspendu les expulsions jusqu’au 31 mai prochain. Mais ça ne suffira pas, loin de là. Alors que le confinement est désormais devenu la règle pour éviter la propagation de l’épidémie, que vont faire les familles qui s’entassent dans des taudis ou des bidonvilles ? Quelles solutions pour les habitants menacés de coupures d’énergie ? Comment les plus modestes, qui consacrent une large part de leur budget au loyer, vont-ils faire face quand leurs revenus baisseront ? Comment confiner toutes celles et tous ceux qui dorment dans la rue ? Qu’en est-il de ces femmes, ces hommes et ces enfants privés de liberté dans des centres de rétention administrative ? Sans oublier les plus âgés, qui vont se retrouver coupés du monde ? Pour résumer, comment cela va-t-il se passer pour toutes les personnes à faibles ressources ?
Cette crise sanitaire sans précédent révèle l’insuffisance des moyens mis en place jusqu’à aujourd’hui par l’État pour protéger les plus vulnérables. Emmanuel Macron appelle à faire preuve « d’esprit solidaire et de sens des responsabilités ». Prenons-le au mot. Il ne suffit pas de prendre des mesures à caractère économique, il va falloir des mesures sociales. Des mesures pour protéger et prendre soin des plus fragiles socialement, qui sont aussi ceux parmi les plus exposés au virus. Car confrontés au manque de ressources pour se préparer et se protéger du Covid-19, beaucoup font face à un risque plus élevé d’être contaminé et donc de répandre le virus.
Mal-logement Une violence sociale renforcée par l’épidémie
À l’heure où chacun doit rester chez lui pour une durée indéterminée, les familles mal logées sont exposées à des problèmes de santé physiques et mentaux.
«Les effets du mal-logement sont démultipliés en période de confinement », souligne Manuel Domergue, directeur des études de la Fondation Abbé-Pierre (FAP). Pour les familles qui vivent en situation de surpeuplement ou en habitat indigne, rester des semaines enfermé est lourd de conséquences. « Habiter dans ces conditions a des conséquences directes sur la santé », rappelle Manuel Domergue. Le surpeuplement a des effets avérés sur le développement des petits enfants et sur la réussite scolaire des plus grands. Dans l’habitat insalubre, sans même parler des cas de saturnisme, le manque d’aération et l’humidité entraînent des maladies respiratoires. C’est déjà vrai en temps normal. Ce le sera d’autant plus en étant bloqué 24 heures sur 24. Les risques domestiques, déjà nombreux dans ces logements, sont eux aussi amenés à se démultiplier.
Le mal-logement prolongé met aussi à rude épreuve l’équilibre psychologique des habitants. « Pour l’instant, ça tient encore, mais dans quelque temps certaines familles vont exploser », prévient Jean-Baptiste Eyraud, de Droit au logement (DAL). Source de tensions entre voisins, la surexposition au bruit, inévitable dans les appartements mal isolés phoniquement, va s’accroître avec le confinement. Dans les logements surpeuplés, les relations intrafamiliales, déjà difficiles, vont être mises à rude épreuve. Le risque d’accroissement de la violence est réel. « Non, le foyer n’est pas pour tout le monde l’endroit du confort ou du réconfort. Le foyer, déjà évité par les femmes victimes de violences conjugales en temps normal, devient une prison en période de confinement », a prévenu hier le collectif Collages féminicides.
Réquisition d’hôtels vides et moratoire sur les loyers
Le mal-logement est aussi un vecteur de contamination. « Les habitats indignes, surpeuplés, précaires et les gens à la rue sont des lieux de propagation de l’épidémie. Nous allons payer des années d’incuries de politique du logement », prévient Jean-Baptiste Eyraud. Comment, par exemple, respecter les gestes barrières dans des bidonvilles où les familles vivent entassées et où il n’y a même pas l’eau courante ? « Ce sont aussi des publics où l’information est compliquée à diffuser », s’inquiète Manuel Domergue. Pour pouvoir loger et isoler ces publics, les associations appellent à une réquisition d’urgence des hôtels vides. Des négociations dans ce sens entre le gouvernement et les hôteliers auraient démarré.
Les inquiétudes concernent aussi l’après-crise. Le 12 mars, la trêve hivernale, qui interdit les expulsions locatives, a été prolongée jusqu’au 31 mai. Ce répit devrait, selon le ministère du Logement, protéger 4 000 à 5 000 familles. Mais la mesure ne répond pas à ceux que la crise sanitaire appauvrit. « Si tout ça dure, les familles qui ont déjà du mal à payer leur loyer ne vont plus y arriver. Elles vont accumuler les impayés », prévient Eddie Jacquemart, de la CNL (Confédération nationale du logement). Redoutant une vague d’expulsions locatives après la crise, les associations appellent le gouvernement à prendre des mesures, dont l’arrêt de la suspension de l’APL (aide personnalisée au logement) en cas d’impayés. Certaines, comme la CNL, veulent un moratoire sur les loyers. La FAP propose la création d’un fonds d’indemnisation ciblant les locataires dont les revenus vont s’effondrer. Un effort financier, chiffré à 200 millions d’euros, pour empêcher quelques centaines de milliers de personnes de perdre leur toit.
Précarité « On n’a plus rien à manger »
Ahou (1) fait partie de ces milliers de familles monoparentales qui vivent dans la capitale. Depuis hier, elle panique. « Je n’ai pas un sou pour acheter à manger. D’habitude, je me débrouille avec les Restos du cœur ou d’autres associations, mais là, comment je vais faire ? » D’autant plus que le confinement n’est pas propice au système D et à la solidarité concrète. « Hier, j’ai anticipé, je suis allée voir une amie qui a accepté de me prêter 5 euros. J’ai cru que j’étais sauvée pour quelques jours. Mais quand je suis allée au supermarché, il n’y avait plus de pâtes, plus de riz… » Sa voix s’étrangle. Elle a 36 ans, « mais j’en parais 50 », lâche-t-elle, épuisée par les épreuves. Avec une carte de séjour de deux ans obtenue de haute lutte, cette Ivoirienne se bat seule depuis son arrivée en France pour offrir un avenir à son fils de 9 ans, scolarisé dans une école parisienne. Brahima, un grand gaillard de 1,60 m qui aime le foot et les copains, pendant trois semaines confiné dans un studio d’hébergement d’urgence d’à peine 20 mètres carrés ? « Et encore, on a de la chance, si on était encore dans l’hôtel… » « L’hôtel », c’est celui du Samu social, avec une chambre de 8 mètres carrés dans laquelle elle et son fils ont vécu pendant huit ans, sans cuisine, sanitaires sur le palier. « Aujourd’hui, dans le studio, je peux cuisiner, mais on n’a rien à manger ! » Quant à « l’école à la maison », là encore, cela va relever du parcours du combattant. « Je n’ai pas d’ordinateur. Mais les maîtresses ont donné des consignes dans les cahiers, alors je vais le faire travailler comme je peux », explique celle qui était institutrice en Côte d’Ivoire. Ahou est loin d’être la seule dans cette situation : « Je ne suis pas la plus à plaindre. Je connais certaines femmes qui ont encore moins que moi, et doivent gérer 4 enfants dans des appartements minuscules. » Animatrice vacataire à la mairie de Paris, avec seulement quelques heures de travail au compteur, son « salaire » oscille chaque mois entre 100 et 300 euros. Alors, elle s’inquiète aussi pour le « jour d’après ». « J’ai cru comprendre que les vacataires ne seraient pas payés. Il faut pourtant qu’on trouve des solutions de solidarité, sinon on ne va ne pas s’en sortir… Il ne faut pas que l’État nous laisse tomber. »
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Entretenir la mémoire des débats et des luttes de la gauche sociale.
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