Face au Coronavirus, nous avons besoin de solidarité entre les peuples et les nations d’Europe (Fabien Roussel)
Dans son allocution de Mulhouse hier soir, le Président de la République a beaucoup parlé de « guerre ». Mais, bien qu’il se soit exprimé à l’une des frontières de notre pays, il n’a qu’à peine évoqué la solidarité européenne. Et pour cause : l’union européenne est aux abonnés absents !
La crise sanitaire, économique et sociale que précipite la pandémie de coronavirus met à nu la totale faillite de la construction capitaliste de l’UE. La passivité de la Commission européenne et des gouvernements européens face à une crise mondiale aussi grave est proprement scandaleuse.
Ceux-ci sont incapables d'impulser de la coopération ou de l'entraide entre les États, livrés à eux-mêmes. En quelques jours, les critères budgétaires de l’Union européenne appliqués aux États sont apparus ubuesques. Ils ont d'ailleurs été levés, preuve qu'ils sont un frein aux politiques d'investissement et de soutien aux économies nationales.
De plus, les mesures proposées telle que le rachat de dettes souveraines par la BCE sont loin d'être à la hauteur de la crise qui frappe les Etats membres.
La pandémie exige une grande solidarité et une totale coopération entre les peuples et les nations d’Europe. Elle requiert une mutualisation des moyens, notamment en matière de production de matériels sanitaires. Comment peut-on croire que les 27 pays de l’Union européenne seraient incapables de réunir des industriels, des ingénieurs, des outils de productions pour faire face aux besoins criants de tous les hôpitaux ? Nous disposons des forces suffisantes pour produire en urgence des respirateurs, des masques, des médicaments.
De même, la Banque centrale européenne doit répondre immédiatement aux besoins de tous les pays de l’Union européenne confrontés à l’arrêt de leur économie. La création de monnaie et les prêts à taux 0% sont des outils à mettre au service des États de manière exceptionnelle.
La crise de l’Union européenne démontre la nécessité d’en finir avec les dogmes de la « concurrence libre et non faussée », comme avec les politiques d’austérité européennes. Pour reconstruire une Europe de la coopération et de la solidarité entre les peuples, il faudra demain mettre en place un nouveau pacte européen pour sortir enfin des règles d’or budgétaires qui ont tant affaibli les services publics, dont ceux de la santé.
Le Président de la République aime à évoquer « le jour d’après ». Pour le PCF, le jour d’après se prépare maintenant, avec ses alliés et partenaires européens.
Deux syndicalistes (de CGT et de Solidaires) décrivent comment la production de masques en Bretagne a été délocalisée en 2018: course aux profits oblige! Le patron a même fait détruire les machines ! Plus bas, le bureau départemental de l’Union syndicale Solidaires des Côtes d’Armor dénonce ce scandale et demande la relance de la production sous forme d’un établissement public ou d’une SCOOP.
CAPITALISME HONEYWELL et PRODUCTION de MASQUES en Bretagne
L’entreprise de fabrication de masques HONEYWELL a d’abord commencé par réduire ses effectifs au fil des années à Plaintel (au sud de Saint Brieuc 22). En 2018 (et pas en 2020), ce groupe a licencié ses ouvrier.e.s (38 ) pour délocaliser en Tunisie afin de faire encore plus de profit à partir d’une main d’oeuvre moins chère !
Elle a fait de même pour une autre usine à Condé sur Noireau au profit de la Roumanie, pays ou l’on travaille le plus en Europe, en moyenne 2000 heures par an environ au lieu de 1600 environ en France (cf carte européenne du volume de travail salarié) .
Là ou le volume de travail imposé aux travailleurs et travailleuses est très élevé il devient très pénible et très excessif tout à la fois de bien travailler et de bien vivre . Il y a un cercle vicieux du travaillisme (soit faire travailler plus celles et ceux qui travaillent déjà 35 heures hebdomadaires). C’est pire encore si au travaillisme s’ajoutent les bas salaires . Avec ce cumul du négatif, on est alors dans une forte exploitation de la force de travail . Il y a alors besoin de syndicats dignes de ce nom pour s’y opposer, pour la réduire au maximum . Autrement dit, il va s’agir de lutter sur deux plans (à minima) : – travailler moins (RTT à moins 35 heures hebdo) et pour être payé à l’identique, (voir plus si sur-exploité avant) . Il y a, bien sûr, à être vigilant sur d’autres aspects.
Cette exploitation renforcée ne tombe pas du ciel ! On voit que les territoires à durée de travail supérieure (à la France) avec des salaires inférieurs sont vus comme des paradis extrêmement séduisants pour les exploiteurs capitalistes obsédés de gros profits à accumuler. La logique capitaliste mondialisée excuse et banalise cette forme d’immoralité . Et plus encore avec la financiarisation des entreprises et des économies. C’est toute une rationalité – dite néolibérale – qui est à contester !
A Plaintel, il y a eu cette même logique de profit capitaliste qui écrase toute autre considération, tant le souci des bonnes conditions de vie des ouvriers et ouvrières que le souci de mise à disposition assurée d’un bien-marchandise que l’on sait à forte valeur d’usage en mars 2020 mais qu’on aurait du conserver en 2018 comme bien nécessaire au service public de la santé.
Dans ce monde-là (capitalisme mondialisé et financiarisé), les salarié.e.s souffrent au travail car on y fait trop d’heures pour des salaires modestes et souffrent encore d’en sortir et d’être au chômage car ils-elles ne perçoivent, soit plus rien, soit très peu ! Cercle vicieux encore, dont on doit sortir ! Syndiquez-vous !
Reprenons l’activité à Plaintel – voire ci-dessous en fin de communiqué – avec une RTT à 32 heures et de bons salaires car ce serait alors une entreprise modèle au plan social et au plan du bien-marchandise produit.
Christian DELARUE (militant CGT – indecosa ) et Serge LE QUEAU (SUD SOLIDAIRES 22) sont militants à ATTAC France
Que se cache-t-il derrière la fermeture de l’usine Honeywell de Plaintel ? Un scandale d’Etat !
Fin 2018 le groupe multinational américain Honeywell fermait son site de production industriel de Plaintel pour le délocaliser en Tunisie licenciant en même temps 38 salarié(es). Cette entreprise, créée il y a une cinquantaine d’années et qui compta jusqu’à 300 salarié(es) avant son rachat en 2010 par Honeywell, au groupe Spirian fabriquait des masques respiratoires jetables et des vêtements de protections sanitaires en quantité considérable. Sa production était de 200 millions de masques par an, soit près de 20 millions par mois, fabriqués sur des machines ultras-modernes pouvant produire chacune 4000 masques à l’heure.
Non contente de faire appel aux aides de l’Etat pour financer les huit plans sociaux que la multinationale Honeywell à mis en œuvre pour se débarrasser de ses salariés, Honeywell a pris la décision irresponsable en novembre 2018 de détruire ses huit machines en les faisant concasser par la déchetterie située sur la zone industrielle des Châtelet à Ploufragan.
Les sections syndicales Cgt et Cfdt de l’usine de Plaintel avaient à l’époque, lancé un cri d’alarme pour empêcher la fermeture du site et la destruction de leur outil de production. Elles avaient multiplié les actions et les démarches pour éviter le pire. Elles s’étaient même adressées au Président de la République Emmanuel Macron et au Ministre de l’Economie Bruno Le Maire. Mais ces derniers ce sont contentés d’accuser réception de leurs courriers mais se sont bien gardés d’intervenir. Ils pensaient sans doute en bon libéraux, qu’une intervention de l’Etat ne servirait à rien, puisque que dans un monde mondialisé et heureux, la main invisible du marché finirait par montrer son efficience pour préserver l’intérêt général.
Aujourd’hui, le retour au réel est brutal et c’est avec stupeur que le pays tout entier découvre avec la catastrophe sanitaire du coronavirus qu’il ne possède pratiquement pas de stocks de masques, pourtant indispensables pour protéger les personnels soignants, l’entourage des malades et tous les salarié(es) obligé(es) de travailler pour éviter que le pays tout entier ne s’écroule. Pour l’union syndicale Solidaires des Côtes d’Armor, la fermeture de l’usine Honeywell de Plaintel et la destruction de ses outils de production, comme l’inaction des autorités publiques représentent un scandale qui doit être dénoncé. La chaine des responsabilités dans cette affaire doit aussi être mise en lumière. Les Dirigeants d’Honeywell et les autorités de l’Etat doivent aujourd’hui rendre des comptes au pays. D’ores et déjà Solidaires a demandé à plusieurs Parlementaires de la Région d’interpeller le Gouvernement sur ce scandale. Solidaires propose également que le site industriel de fabrication de masques de protection sanitaire de Plaintel soit récréé en urgence sous un statut d’Etablissement Public Industriel et Commercial (EPIC) ou sous la forme d’une Société Coopérative Ouvrière de Production (SCOOP). Le personnel compétent et disponible existe et ne demande que cela. De l’argent il y en a. La Banque Centrale Européenne vient de débloquer 750 milliards de liquidités. Que cet argent soit mis en priorité au service de l’urgence sanitaire et de l’intérêt général, plutôt que de laisser aux seules banques privées le privilège de le prêter ou pas.
Saint Brieuc le 26 mars 2020. Le Bureau Départemental de Solidaires des Côtes d’Armor
"Distanciations sociale", inégalités de traitement, mondialisation en accusation... Le philosophe et psychanalyste, professeur honoraire de psychopathologie clinique, éclaire les débats que suscite la crise liée au coronavirus et analyse les effets du confinement sur les individus et sur nos sociétés. Un entretien décapant de la directrice de rédaction avec le président de l'appel des appels.
Le pays vit sous confinement depuis plus d’une semaine. Quelle analyse le psychanalyste que vous êtes fait-il de cette « distanciation sociale » imposée pour juguler le coronavirus ? Quels peuvent en être les effets à moyen terme, tant au niveau individuel que collectif ?
Roland Gori. Le terme de « distanciation sociale » est inapproprié et maladroit. Bien au contraire, il convient d’inviter à la proximité et à la solidarité sociales, tout en exigeant une « distanciation physique ». Il ne s’agit pas de se replier individuellement mais au contraire de mettre à profit ce temps suspendu pour être affectivement et socialement ensemble. De ce point de vue, les nouvelles technologies sont un moyen formidable pour « être seuls, ensemble ». Ce qui est péjoratif en temps normal est formidablement palliatif en période d’épidémie. Sinon, on finira par devenir dingues, persécutés et phobiques pour les uns, hypocondriaques graves pour les autres, désespérés et suicidaires pour certains, transgressifs et compulsivement en prise de risques pour d’autres encore. Il faut relire le récit de Thucydide de la peste à Athènes au Ve siècle avant J.-C. sur les risques qui menacent une cité en temps d’épidémie : chaos, panique, dégradation morale, terreur religieuse, compulsion à jouir sans entrave pour conjurer l’échéance fatale… Le risque qui menace chacune des cités ou chacun des pays en proie à une grave épidémie, c’est l’anomie, la perte des normes et des lois qui les régissent pour réguler les comportements sociaux et intégrer les individus. C’est l’heure de vérité de tout gouvernement, de son potentiel à réagir au choc. Faute de confiance dans le gouvernement, la peur s’installe, durablement. C’est une émotion morale et politique dont Hobbes, celui du Léviathan, fait le principe fondateur de toute religion et de tout État. Que l’on adhère ou pas à ses analyses, il nous faut reconnaître que toute terreur, quelle que soit son origine, pandémique, climatique, sociale, économique ou militaire, est un défi pour un État et ne peut le laisser indemne. Toute la question est de savoir ce qu’il en sortira…
Comment cette crise révèle-t-elle la violence des inégalités ?
Roland Gori. À toutes les époques, la menace de mort met à nu les inégalités sociales et les conditions d’existence des individus. Thucydide déjà le remarquait pour la peste à Athènes : « Chacun se livra à la poursuite des plaisirs avec une audace inégalée (…). Nul ne montrait un empressement à atteindre avec quelque peine un but honnête. (…). Nul n’était retenu par la crainte des dieux, ni par les lois humaines. » Voilà la tendance indécente des individus face au chaos, devenir un « autoentrepreneur » de sa survie et jouir sans entrave des moyens dont chacun dispose. Heureusement, une autre tendance existe, la philia, l’amitié qui considère que cela ne sert à rien de survivre si on reste seul. Même Robinson ne saurait exister sans son Vendredi…
La société française est terriblement fracturée. Cette crise sanitaire peut-elle néanmoins recréer un sentiment de « destin commun », dans la mesure où l’épidémie ne connaît ni les frontières, ni les classes sociales ?
Roland Gori. Tout dépend de la manière dont la situation va être gérée. C’est bien d’être transparent et de donner toutes les informations. Mais il y a un risque d’« infobésité » qui provient de l’avalanche d’informations non triées, non expliquées, contradictoires et sans hiérarchisation. C’est la catastrophe des médias/spectacles, qui livrent une information qui n’a de valeur qu’au moment où elle émerge et produit ce symptôme des « sociétés du spectacle » (Guy Debord), où « le vrai n’est plus qu’un moment du faux ». Par contre, le virus ignore les frontières des nations et des classes sociales, et rappelle à chacun la finitude de la condition humaine. Les emblèmes du pouvoir et de la richesse se révèlent ridicules face à la maladie et à la mort, mais ils peuvent aider à mieux s’en préserver.
Vous dénoncez régulièrement dans vos livres la « dégradation du langage » par le pouvoir macroniste. Fallait-il utiliser le mot de « guerre », comme l’a fait le président ?
Roland Gori. Si nous sommes en « guerre » (sept fois répété), pourquoi est-ce que ceux qui sont au front n’ont pas de munitions ? Qu’est-ce qui fait que le gouvernement n’a pas sanctionné cet état-major pitoyable qui a oublié de nous préparer à une guerre annoncée ? Pourquoi ne sanctionne-t-on pas plus sérieusement les arnaqueurs et les pilleurs qui tentent de profiter de la situation ? Je n’invite pas à punir, j’essaie de montrer la légèreté d’une communication qui employant ce terme de « guerre » n’en tire pas les conséquences. En psychopathologie, cela s’appelle « une parole à responsabilité limitée ».
« Le néolibéralisme est mort mais ils ne le savent pas », affirmiez-vous, il y a quelques mois. Que dit cette crise sanitaire du capitalisme mondialisé ?
Roland Gori. La pandémie a révélé les promesses fallacieuses de la mondialisation et les mensonges des États néolibéraux responsables de la mort de milliers de personnes, faute d’avoir pris les mesures qui s’imposaient, pour avoir massacré les dispositifs de santé et avoir fait prévaloir l’économie financiarisée sur l’humain. On a écrit des milliers de pages, prononcé des millions de mises en garde, et cela n’a rien changé ! Margareth Thatcher et Ronald Reagan ont initié une colonisation néolibérale des mœurs que les autres gouvernements ont poursuivie et, comme dans toute colonisation, il y a destruction des biens et des personnes, des crimes véritables. Ainsi, cette pandémie démontre expérimentalement l’aberration des réformes entreprises par les néolibéraux. Les peuples ont vu la santé et la vie de leurs proches exposées, ils ne se soumettront pas. L’augmentation de la cote de popularité du président reflète davantage une attente qu’une confiance, elle plébiscite davantage ses paroles que l’action de son gouvernement. C’est la faillite du « en même temps » ! Vous superposez l’allocution présidentielle du jeudi 12 mars et les propositions de la ministre du Travail, et il ne vous reste plus qu’à demander au gouvernement de déposer le bilan ! Les gens veulent sauver leur peau et leur travail, ils ne pardonneront pas aux néolibéraux, quels que soient les masques dont ils s’affublent, d’avoir mis l’un comme l’autre en danger.
Entretien. Philippe Martinez, secrétaire général de la CGT, analyse la stratégie du gouvernement pour faire face à la crise et avance ses propositions, comme par exemple que « les salariés forcés de rester chez eux ne perdent pas un centime de salaire ». Emmanuel Macron doit réunir ce vendredi les organisation syndicales et patronales.
Augmentation de la durée hebdomadaire du travail dans certains secteurs, réduction du temps de repos… que pensez-vous des ordonnances prises par le gouvernement pour « faire face à la crise » ?
Philippe Martinez. Nous n’en pensons que du mal. Il est scandaleux de prendre ce type de mesures, qui dérogent très largement au droit du travail. Le gouvernement nous explique qu’il s’agit de faire face à la crise, mais nous avons appris que ces ordonnances devaient être appliquées jusqu’à fin décembre : en réalité, ce sont bien des mesures d’après crise ! Cela fait dix jours que nous bataillons avec le gouvernement pour qu’il dissocie activités essentielles – qui doivent continuer de fonctionner – et activités secondaires. Or, la plupart des ministres, Bruno Le Maire en tête, considèrent que cette distinction n’a pas lieu d’être. C’est absurde. Nous continuons de fabriquer des avions, des navires de croisière… En avons-nous un besoin urgent pendant la période ?
Appelez-vous à interrompre ces activités ?
Philippe Martinez. Oui. Il faut stopper d’urgence toutes les activités non essentielles à la survie du pays. C’est ce que nous réclamons au gouvernement depuis des jours. Maintenir coûte que coûte ces entreprises ouvertes pose un double problème : cela met en danger les salariés et cela accapare du matériel de protection qui fait cruellement défaut aux soignants, et à l’ensemble des travailleurs en première ligne, comme la grande distribution, par exemple. La loi du marché ne doit pas primer sur la santé. Dans un entretien récent à l’Humanité, le philosophe Roland Gori disait en substance : « Nous sommes en guerre, mais ceux qui sont en première ligne n’ont pas de munitions. » Cela résume malheureusement très bien la situation.
Les mesures de soutien économique mises en place par le gouvernement (chômage partiel, prêts aux entreprises, report du paiement de cotisations sociales, etc.) vous paraissent-elles à la hauteur ?
Philippe Martinez. Que l’on vienne en aide aux entreprises pendant la période me semble normal, mais il ne faut pas le faire n’importe comment. S’il s’agit d’aider les grands groupes à rattraper les profits qu’ils ne pourront pas engranger pendant la crise, cela ne va pas. J’ai eu des retours de petits employeurs qui ont du mal à accéder aux aides gouvernementales. Ce sont pourtant les petites entreprises qui en ont le plus besoin.
Il y a d’autre part un décalage entre les montants mis sur la table pour les entreprises et pour les salariés. Le gouvernement insiste sur l’effort fait pour le chômage partiel, mais je rappelle que les salariés ne sont toujours indemnisés qu’à hauteur de 84 % de leur salaire net : c’était déjà le cas avant, il n’y a donc pas d’effort supplémentaire. Nous sommes en état d’urgence sanitaire : nous réclamons que tout soit mis en œuvre pour que les salariés forcés de rester chez eux ne perdent pas un centime de salaire. Nous pouvons tout à fait mettre à contribution les assurances privées pour cela.
Des primes de 1 000 euros commencent à être distribuées à des salariés en première ligne, comme dans la grande distribution. Est-ce une bonne chose, selon vous ?
Philippe Martinez. Je comprends parfaitement que des salariés mal payés ne crachent pas sur des primes qui, souvent, doublent leur salaire ! Mais on voit bien que l’enjeu est plus important. Le gouvernement « redécouvre » ces millions de travailleurs essentiels au pays, mais qui sont d’ordinaire invisibles. En général, ils sont payés au SMIC. C’est pourquoi, au lieu de se contenter de primes, nous appelons à une revalorisation urgente du salaire minimum. On a été capables de faire voter une loi de finances rectificative dans l’urgence, on pourrait tout à fait procéder de même pour le salaire minimum.
Quel est le rôle d’un syndicat comme la CGT dans une telle crise ?
Philippe Martinez. Il est encore plus fondamental dans ce genre de période. On reçoit tous les jours des appels de salariés, pas forcément syndiqués, qui nous demandent des informations. Ils se renseignent sur les possibilités de droit de retrait, sur la nature des protections disponibles… Nous devons aussi leur expliquer le contenu des ordonnances, les règles pour les arrêts maladie, etc. Nous continuons par ailleurs à épauler les salariés qui se mobilisent dans les entreprises.
Le pouvoir a annoncé un plan d’investissement « massif » pour l’hôpital, sans en préciser le montant, ni les modalités. Comment faire pour tirer toutes les leçons de la crise actuelle ?
Philippe Martinez. Le président de la République l’a en effet annoncé, mais il reste à savoir quelle forme prendra ce plan. Les soignants se bagarrent depuis des mois pour obtenir des moyens supplémentaires : créations d’emplois, arrêt des fermetures de lits, revalorisation salariale… C’est terrible qu’il faille en passer par une crise d’une telle ampleur pour entendre des engagements de la part du gouvernement. Mais nous restons vigilants. Les promesses formulées en temps de crise s’envolent parfois très vite après. Nous avons en mémoire les conséquences de la crise de 2008. Les peuples ne devront pas payer la note, une fois encore.
Ordonnances gouvernementales : "Le pouvoir profite de la crise sanitaire pour s'attaquer aux droits des salariés » (Fabien Roussel - PCF)
Les ordonnances adoptées par le conseil des ministres confirment ce que laissait craindre le projet de loi sur l'état d'urgence sanitaire que les parlementaires communistes n'ont pas voté.
Alors que tout appelle à protéger les salariés, du public comme du privé, à confiner les salariés qui risquent la contamination dans des secteurs non indispensables, le gouvernement décide de s'en prendre à leurs droits et à leurs conditions de travail. Il encourage notamment les employeurs à recourir massivement aux heures supplémentaires, à remettre en cause les congés payés, à l'indemnisation partielle du chômage technique.
Pire, Le Président Macron et son Premier ministre Edouard Philippe laissent au patronat le pouvoir de gérer la crise selon ses seuls critères, en laissant à des négociations de branche la mise en œuvre de ces dispositions. Et ils ne mettent aucune limite de durée aux dispositions annoncées comme dérogatoires, mais dont le risque est qu'elle devienne la règle avec la crise économique qui s'annonce.
Des années de politiques d'austérité contre les services publics, et particulièrement contre l'hôpital public, de cadeaux à la finance et aux grandes fortunes ont lourdement affaibli notre pays au moment où il doit affronter l'épidémie de Covid-2019. On en voit chaque jour les effets sur notre système de santé publique, dont les personnels doivent aujourd'hui assumer toutes les carences, comme à travers les difficultés que rencontre notre appareil de production pour répondre au défi de la crise actuelle.
Face à la crise sanitaire, face à la catastrophe économique qui se dessine, c'est à une toute autre logique qu'il faut immédiatement mettre en oeuvre. Les recettes du passé, celles qui ont permis aux
banques de reprendre leurs activités spéculatives après la crise de 2008 et aux actionnaires des grands groupes de se goinfrer en désintégrant notre tissu industriel, n'ont que trop duré.
Le PCF demande le paiement des salaires à 100 %, le maintien des congés des salariés, l'indemnisation à 100 % du chômage partiel et le recours à l'embauche plutôt qu'au développement des heures supplémentaires. Pour financer ces mesures exceptionnelles, le PCF propose de mettre à contribution les multinationales, les assurances, le secteur bancaire et les moyens de la BCE.
Comme l'ont fait ses parlementaires dans les deux Assemblées, le PCF propose ainsi que tous les moyens nécessaires soient dégagés orientés vers la protection de la population, la défense des droits
des salariés, l'emploi et le soutien à l'activité économique utile au pays, vers le renforcement de nos services publics, à commencer par nos hôpitaux.
Fabien Roussel, secrétaire national du PCF, député du Nord,
Le « plan d’investissement massif » du chef de l’État constitue un aveu d’échec des politiques d’austérité. La crise sanitaire révèle les failles du système hospitalier, sous pression depuis plus d’une décennie et sommé de se transformer en entreprise.
« C’est dramatique, violent et douloureux qu’il ait fallu une crise de cette ampleur pour espérer un simple geste du président de la République. » En première ligne dans l’hôpital parisien de la Pitié-Salpêtrière, le neurologue David Grabli accueille avec amertume le discours d’Emmanuel Macron. Aux personnels essorés, lessivés, le chef de l’État a promis, mercredi, depuis l’hôpital militaire de Mulhouse, qu’ « à l’issue de cette crise, un plan massif d’investissement et de revalorisation de l’ensemble des carrières sera construit pour notre hôpital ». Sans préciser les contours et le montant, il s’est engagé à « majorer les heures supplémentaires sous forme d’une prime exceptionnelle ».
Des mesures à appliquer d’urgence pour affronter l’épidémie
À l’écoute de ces annonces, le corps médical oscille entre prudence et colère. « Nous n’avons pas besoin d’un beau discours compassionnel, il faut des actes, estime Christophe Prudhomme (CGT), porte-parole de l’Association des médecins urgentistes (Amuf). Or, les promesses sont floues, non chiffrées, elles ne sont pas à la hauteur de la crise. Le chef de l’État promet des primes alors que nous réclamons une hausse des salaires pour tous les personnels. » Hugo Huon, président du Collectif Inter-Urgences, nuance de son côté : « C’est positif. Mais après tous les plans que l’on nous a proposés et qui étaient en deçà de ce qui était nécessaire pour les soins, on attend de voir. » Tous martèlent leurs revendications : une augmentation des salaires des paramédicaux de 300 euros, des effectifs suffisants pour maintenir et rouvrir des lits. Soit une augmentation de 5 % du budget des hôpitaux correspondant à une enveloppe de 4 milliards d’euros.
Des mesures à appliquer d’urgence pour affronter l’épidémie, qui aggrave la situation des établissements devenus de vraies Cocotte-Minute. Depuis plus d’un an, le monde hospitalier est secoué par une crise sans précédent. Parties des services d’urgences, des grèves très suivies, d’une longévité historique, se sont ensuite diffusées à tous les étages des établissements. Pour la première fois, la colère a fédéré toutes les catégories de l’hôpital. Infirmières, aides-soignantes, médecins, psychiatres, chefs de service… tous ont alerté sur l’état catastrophique de l’hôpital public. En vain. Raison pour laquelle, en janvier dernier, 1 100 médecins ont démissionné de leurs responsabilités administratives pour ne plus participer à la gestion du manque de moyens. Silence radio du gouvernement Macron, toujours. Qui n’est d’ailleurs pas l’unique responsable des politiques de santé mortifères. Celles de ses prédécesseurs ont bien préparé le terrain.
La loi HPST de 2009 a été une catastrophe
Car le traitement de choc prescrit à l’hôpital remonte à plusieurs années. En 2009, la loi hôpital, patients, santé, territoire (HPST) a bousculé la gouvernance des établissements au détriment des soignants. Le directeur s’est alors retrouvé dans une position de patron. « C’était la première fois qu’il y avait des manifestations aussi importantes de médecins, rappelle Christophe Trivalle, chef de service de gériatrie à l’hôpital Paul-Brousse de Villejuif (Val-de-Marne), membre de la Commission médicale d’établissement (CME) centrale de l’AP-HP, l’instance où siègent les représentants élus des médecins. Cette loi a été catastrophique. Tous les pouvoirs ont été donnés au directeur. Son seul objectif, c’est d’assurer l’équilibre financier. Or, l’hôpital est d’abord là pour soigner. » Ce membre du Collectif inter-hôpitaux ajoute : « L’autre catastrophe, ce sont les regroupements en pôles, qui ont entraîné des destructions de services, une diminution des lits, donc des effectifs. Sans oublier une souffrance du personnel soignant et médical. »
Depuis des années, les budgets hospitaliers sont asphyxiés
Pris dans des plans d’économies, le secteur se transforme en hôpital-entreprise. C’est d’ailleurs l’esprit de la tarification à l’activité (T2A), votée fin 2003. Ce système obéit à une volonté de rationaliser les modes de financement des établissements. « La T2A a été un instrument pervers : les hôpitaux sont rémunérés en fonction des activités effectuées en leur sein, précise David Grabli, médecin. Ce qui incite à augmenter la productivité. Or, les tarifs hospitaliers baissent, notamment en raison d’un Ondam (Objectif national des dépenses d’assurance-maladie – NDLR) fermé », voté chaque année au Parlement. Frédéric Pierru, sociologue de la santé, relève qu’ « en 1990, la part hospitalière était de 46,6 % dans les dépenses courantes de santé, contre 38,3 % en 2017. On a perdu 8,3 %, quand l’Allemagne ne perd que 3 % » .
Alors que l’épidémie menace aujourd’hui de faire s’écrouler le système hospitalier, tous exigent un investissement massif dans l’hôpital. Comme l’assène le sociologue, « à force d’avoir réduit les capacités hospitalières, en particulier en soins intensifs, particulièrement coûteux, nous sommes désormais à la merci de la moindre pandémie ». Pour lui, « on voit le désastre de ces choix budgétaires à court terme devant nos yeux. Et de cela, nos élites devront rendre des comptes, une fois la pandémie passée. »
Notre pays, comme le reste du monde, fait face à une épreuve majeure.
Le nombre de personnes mortes des suites du coronavirus augmente de jour en jour de manière exponentielle.
Nous avons affaire à un défi historique, qui appelle la mobilisation de la nation tout entière.
C'est d'ailleurs dans cet esprit que le PCF a d'emblée proposé la création d'un comité d'urgence nationale, où se réuniraient des représentants du gouvernement, du comité scientifique, des partis politiques, des associations d'élus locaux, des organisations syndicales, du monde économique.
Quoi qu'ils subissent, les Français font face. Ceux qui travaillent dans nos services publics, souvent maltraités, sont aux avant-postes, dans les hôpitaux, dans les communes, dans les collectivités ou encore pour assurer la sécurité. Dans le privé aussi, ils sont nombreux à monter au front, dans les supermarchés, dans les Ephad, dans l'agriculture, dans les transports... Oui, de belles solidarités s'organisent dans tout le pays car le monde du travail est solidaire.
Les communistes et leurs élu·e·s, dans le même état d'esprit, se sont mis à la disposition du pays. Partout, ils s'emploient à construire les actions d'entraide et de solidarité que requiert la situation, à apporter l'aide indispensable aux personnes les plus fragiles comme aux professions en première ligne.
Nos parlementaires ont demandé que tous les salariés au contact avec du public puissent bénéficier de tous les moyens de protection dont ils ont besoin : masques, gel, gants... Ce qui suppose que tout soit mis en oeuvre pour permettre à l'industrie de les produire en quantité suffisante.
Ils ont aussi appelé à un confinement général bien plus strict que celui mis en place par le gouvernement, puisque c'est le seul moyen, en l'état actuel, de lutter contre la propagation du virus, préconisé l'Organisation mondiale de la santé. Les entreprises qui ne sont pas indispensables à l'activité du pays doivent s'arrêter. Il n'est pas admissible que 45% des salariés continuent de travailler dans des secteurs non essentiels à la gestion de l'urgence sanitaire.
L'état d'urgence sanitaire que le gouvernement vient de faire adopter par les assemblées ne répond pas à ces exigences d'intérêt général. C'est pourquoi nos parlementaires n'ont pas voté les projets de loi qui l'instauraient.
Non seulement notre appel à une mobilisation des forces vives du pays n'a pas été pris en compte, mais le gouvernement s'est arrogé tous les pouvoirs. Il s'est affranchi du contrôle du Parlement afin d'agir par ordonnances pour déréglementer le droit du travail. Les premières décisions viennent de tomber et elles sont édifiantes : les entreprises pourront faire travailler leur salariés jusqu'à 60 heures par semaine au lieu du seuil maximum légal de 48 heures !
Enfin, notre pays doit aussi faire appel à la mobilisation de toute la société, y compris les multinationales, les compagnies d'assurances, les géants du numérique ou les grandes fortunes. A ce jour, rien n'est prévu de ce côté-là. C'est pourtant là que nous trouverons les ressources nécessaires pour surmonter cette crise inédite. Si les forces du travail sont aujourd'hui mobilisées, celles du capital doivent l'être aussi !
La bataille des « jours d'après » commence maintenant. Faisons monter de toutes parts l'exigence que l'intérêt de l'humain et celui de la planète passent avant ceux de l'argent et des logiques de profit.
En février 2020, 25 experts internationaux envoyés par l’OMS pour enquêter sur la situation en Chine ont déclaré dans leur rapport : « L’histoire de l’utilisation sans compromis et rigoureuse par la Chine de mesures non pharmaceutiques pour contenir la transmission du virus Covid-19 dans de multiples contextes fournit des leçons essentielles pour la réponse mondiale. Ce sont les seules mesures dont il est actuellement prouvé qu’elles interrompent ou minimisent la chaîne de transmission chez l’homme. »
Le gouvernement Macron a tardivement pris la mesure de l’ampleur de la crise sanitaire induite par le Covid-19 et a annoncé, en conséquence, des mesures de confinement indispensables pour ralentir la propagation du virus. Devant l’urgence de la situation, nous avons accompagné cette décision dont la logique est de diminuer le nombre de contaminé·e·s et la prolifération du virus. D’autres choix, comme le dépistage systématique et le confinement sélectif des contaminé·e·s ont été choisis par d’autres pays (Chine, Corée du Sud) avec des résultats encourageants. Cette autre stratégie de gestion de crise sanitaire ne peut se réaliser dans le cadre d’une politique néolibérale d’austérité vis-à-vis des besoins humains, dans le cas présent de la santé des populations, comme l’ont fait la majorité des gouvernements européens dont la France.
Afin d’éviter la saturation du système sanitaire, l’objectif est de diminuer les arrivées de flux de patient·e·s atteint·e·s par le Covid-19 pour ne pas déborder les capacités de prise en charge des hôpitaux. Tout cela va devoir se réaliser dans un contexte de forte dégradation de notre système public hospitalier, dénoncé unanimement par tous les acteurs de la santé depuis plus d’un an, mais aussi dans l’incapacité à répondre à la mise en sécurité des soignant·e·s et des patient·e·s par du matériel adapté. Hallucinant dans un pays qui se considère comme une des 7 plus grandes puissances avancées du monde ! Certes les professionnels de santé ont un devoir de soins, mais la société, l’État a un devoir de les protéger et d’adopter une politique adaptée pour fournir les médicaments et matériels (gants, masques, blouses, respirateurs…) nécessaires à leurs missions et à leur sécurité.
Si le confinement est aujourd’hui essentiel, il faut réunir d’urgence les conditions pour en sortir le plus rapidement possible ; cela passera par un dépistage intensif de tous les soignant·e·s, de toutes les personnes en contact avec du public, de tous les patient·e·s présentant des symptômes même atypiques. Encore faudrait-il qu’une mise à disposition massive de tests de dépistage soit réalisée, mais comme pour les masques on nous dit : « ça va arriver ! »
La saturation des moyens sanitaires, tant redoutée, déjà effective en Italie et dans certains de nos hôpitaux, va immanquablement orienter les choix des traitements. Les professionnel·le·s ne pourront plus prendre des décisions que sur des critères médicaux mais aussi sur des pratiques dégradées avec un nombre restreint des respirateurs en réanimation.
Déjà épuisés, confrontés à un manque intolérable de moyens, voilà qu’ils vont devoir faire des priorités d’accès à la guérison, à la vie. Alors, E. Macron peut toujours les nommer « les héros en blouse blanche », aujourd’hui les mots ne suffisent pas et le « quoiqu’il en coûte » non plus. Les personnes âgées dans les Ehpad vont être abandonnées à leur sort.
Il s’agit aujourd’hui de faire des propositions concrètes et immédiates envers les hôpitaux en termes de moyens humains, matériels et financiers, afin de couvrir les besoins Covid-19, mais aussi les autres cas sévères ou urgents. Le PCF fait des propositions d’urgence :
Mettre à disposition immédiate du matériel en quantité nécessaire à la sécurité des soignant·e·s et des patient·e·s, des tests biologiques et des respirateurs en réanimation. Nous demandons une clarification des politiques de production de ces matériels et de la politique de réserve matérielle sanitaire en France.
Arrêt immédiat de toutes les restructurations hospitalières en cours, des fermetures de services et la réouverture de lits.
Paiement de toutes les heures supplémentaires des personnels hospitaliers qui se cumulent et s’amplifient dans la période et revalorisation immédiate du point d’indice dans la fonction publique hospitalière (pas question de primes catégorielles).
Lors d’un collectif budgétaire, rectifier l’ONDAM (objectif national des dépenses d’assurance maladie) à hauteur de 5 % avec au moins 4 milliards d’euros pour répondre aux besoins urgents de l’existant. La LFR (loi des finances rectificative) prévoit immédiatement 2 milliards d’euros pour l’hôpital (pour payer les arrêts maladie, l’achat de masques et le soutien au personnel soignant), c’est-à-dire le montant des rallonges budgétaires prévues sur le quinquennat. Tout laisse à croire que les sommes prévues pour les 3 prochaines années seront mobilisées en une seule fois. C’est d’autant plus probable que cette LFR n’inscrit aucun budget supplémentaire pour les dépenses publiques et les services publics. C’est une LFR qui s’inscrit dans les politiques d’austérité ! Des gens vont mourir, malades et personnels soignants, mais le gouvernement fait ses comptes pour rassurer les marchés !
Annulation de la dette des hôpitaux.
Plan d’embauche ambitieux immédiatement et 30 000 places supplémentaires dans les écoles d’infirmières dès la rentrée de septembre 2020.
Ne laissons pas la France et l’Union européenne continuer, malgré cette crise sanitaire sans précédent, à démanteler notre système public de santé et rappelons-leur qu’il est aujourd’hui urgent de penser à « l’humain d’abord ».
Une crise financière et économique s’annonçait. Le coronavirus l’a accélérée et a révélé qu’il s’agit d’une crise de civilisation. La pandémie a disloqué les chaînes de production structurées par les multinationales au cours des vingt dernières années, mis au grand jour la suraccumulation consécutive au gonflement démesuré des capitaux relancé après la « grande récession » de 2009, et précipité le krach financier.
Sentant la situation leur échapper, les dirigeants occidentaux font mine de répudier le néolibéralisme. Les 27 gouvernements de l’UE ont suspendu les normes européennes de déficits budgétaires. Mais ils envisagent de financer ces dépenses, soit par le Mécanisme européen de solidarité qui ne les prête qu’en contrepartie de plans d’austérité meurtriers, soit par l’émission de Coronavirus Bonds, des obligations « européennes » placées sur les marchés : ce serait donner à la domination du capital financier le renfort d’un fédéralisme européen, aux dépens des services publics, de l’emploi et des salaires !
Pourtant, le moyen de se passer des marchés financiers est sous nos yeux. La Banque centrale européenne veut injecter 1 050 milliards sur les marchés d’ici à la fin de l’année. Mais les services publics, l’industrie du matériel médical verront-ils la couleur de cet argent ? En France, la loi de finances rectificative se contente de faire allusion à une « réserve » indigente de 2 milliards pour les dépenses de santé, alors qu’il en faudrait immédiatement au moins cinq fois plus ! Une gifle aux professionnels de la santé et aux salariés envoyés au front de la production pour préserver les profits.
Bien plus, nos dirigeants saisissent l’occasion pour allonger la durée du travail et pour préparer le terrain à une régression durable des droits sociaux. De bons esprits annoncent déjà que, la crise passée, il faudra redoubler d’austérité budgétaire pour éponger les déficits.
En un mot, au moment où la crise sanitaire fait éprouver à tous les habitants de la planète le besoin immédiat d’une tout autre mondialisation, le mot d’ordre reste le même : l’argent pour le profit, pas pour les êtres humains ! La domination du capital nous pousse au bord de la barbarie.
C’est pourquoi les mesures efficaces pour vaincre l’épidémie sont celles qui amorcent tout de suite une remise en cause radicale des logiques inspirées par la rentabilité financière, et leur remplacement par d’autres critères. Il faut :
Mobiliser les filières industrielles pour produire médicaments et matériels médicaux, ainsi que les biens et services indispensables à la population pendant la période de confinement. La protection des travailleurs de ces secteurs contre le virus est la première priorité. Cet effort doit être planifié et pouvoir passer par des réquisitions, des nationalisations ou la création d’entreprises publiques. Il devrait s’appuyer sur la mobilisation des moyens nécessaires à l’échelle européenne et intégrer de nouveaux accords de coopération internationaux, de partage des technologies.
Rendre effectif l’arrêt temporaire de la production dans les autres secteurs en en tirant les conséquences : interdire les licenciements et maintenir 100 % du salaire, y compris pour les plus précaires, première étape dans la construction progressive d’une sécurisation de l’emploi et de la formation pour toutes et tous.
Obliger les banques, les grandes entreprises et les propriétaires bailleurs à décaler le paiement, par les ménages qui le demandent, des charges d’emprunts bancaires et des factures pré-engagées et vitales (téléphonie, loyer, électricité…).
Mettre en place un dispositif de prêts bancaires de trésorerie à taux nul ou négatif, refinancés par la BCE, strictement réservés aux entreprises qui s’engageront à maintenir l’emploi et les salaires.
Démocratiser : en cas de non-respect des engagements pris par les entreprises ou les banques, les représentants des salariés (CSE) doivent avoir le pouvoir de saisir des comités régionaux de mobilisation constitués sous l’égide des conseils régionaux et des CESER.
Créer un fonds d’urgence sanitaire et de sécurisation pour le financement de ces différents dispositifs, alimenté par une contribution des grandes entreprises, des banques et des compagnies d’assurances, ainsi que par le rétablissement de l’impôt sur la fortune et l’abrogation du plafonnement à 30 % de l’impôt sur les revenus financiers (flat tax).
Mettre en place un programme de prêts à taux négatif de la Caisse des dépôts pour les investissements dans les hôpitaux et les services publics (embauches, formation, achats d’équipements, création de nouveaux établissements). La Banque de France déclarerait ces prêts éligibles au refinancement par la BCE au taux le plus faible pratiqué pour ses opérations (actuellement, -0,75 %), et le dispositif pourrait être étendu à l’ensemble des États membres de l’UE.
Nous pouvons vaincre l’épidémie : il faut pour cela s’attaquer tout de suite à la domination du capital. µ
L’arrivée officielle du printemps a lieu ce vendredi 20 mars et le beau temps succède depuis quelques jours aux pluies qui ont beaucoup arrosé le pays ces dernières semaines, sans toutefois causer de gros dégâts saufs en certains endroits limités géographiquement. Dimanche 22 mars, se déroule la journée mondiale de l’eau. Un sujet que l’épidémie du coronavirus risque d’occulter cette année. Il reste que l’accès à l’eau potable n’existe toujours pas pour près d’un milliard d’habitants sur terre. En France, la quasi-totalité des départements ont été soumis à des restrictions d’eau durant l’été 2019 du fait de la longue sécheresse estivale. Avec le réchauffement climatique, la gestion de l’eau mérite un débat national. Il faudra bien l’avoir un jour en France afin de déboucher sur des mesures préventives
A l’occasion de la journée mondiale de l’eau, « Vision du monde », une association de solidarité internationale « tient à rappeler son engagement auprès des enfants les plus vulnérables au sein des contextes fragiles pour faire face à la crise de l‘eau» dans une déclaration accompagnée d’un bilan chiffré de ses activités. L’association nous rappelle qu’aujourd’hui dans le monde « ce sont encore 844 millions de personnes qui sont privées d’accès à l’eau».
Les populations auxquelles « Vision du Monde » vient en aide par la coopération « vivent souvent dans des zones rurales et doivent alors marcher en moyenne 6 kilomètres chaque jour pour se rendre à un point d’eau. Une eau souvent impropre à la consommation et porteuse de bactéries qui rend les enfants malades et les éloigne de l’école. Dans le monde, chaque jour, près de 1.000 enfants de moins de cinq ans meurent de maladies liées à l’eau. De nombreux ménages, centres de santé et écoles, ne disposent toujours pas d’eau, ni de savon pour le lavage des mains, constituant ainsi un facteur aggravant quant à la propagation d’épidémies», précise cette association.
Des puits en bon état 20 ans après leur construction
On imagine que les rencontres et travaux prévus à l’occasion de cette journée mondiale de l’eau vont être gravement perturbés par les dispositions prises un peu partout dans le monde pour contenir le coronavirus. Mais, «Vision du Monde » insiste sur l’idée que « la crise de l’eau peut être résolue. En travaillant main dans la main avec les communautés locales », l’ONG humanitaire développe « des projets « WASH » impliquant eau potable, assainissement et hygiène au sein de ses programmes de développement. Son approche basée sur les transferts de compétences lui permet non seulement d’assurer la construction de puits mais également de former les populations pour qu’elles puissent à leur tour en prendre soin. Nous études prouvent que les puits construits par Vision du Monde sont toujours en état de marche 20 ans après», indique le dossier de presse publié à l’occasion de cette journée de l’eau.
Avec l’accélération d’un réchauffement climatique et ses multiples conséquences observables aussi chez nous ces dernières années, une gestion rationnelle de l’eau doit aussi être débattue désormais en France. Au cours de l’été 2019, des arrêtés préfectoraux ont imposé des restrictions d’eau dans au moins 87 département métropolitains. Paradoxalement, les départements les plus épargnés par ces restrictions furent ceux de l’Ile-de-France alors qu’ils concentrent 12 millions d’habitants et une multitude d’activités économiques sur une superficie relativement restreinte par rapport à la plupart des régions de ce pays.
Quand l’Ile-de-France échappe presque seule aux restrictions d’eau
Il n’y a là aucun miracle. Pour protéger Paris et sa banlieue des crues de la Seine, des grands barrages de rétention ont été édifiés voilà plus d’un demi-siècle sur les cours des principaux affluents de la Seine que sont l’Aube, la Marne et l’Yonne. Ils permettent, en cas de fortes précipitations prolongées dans le temps, de stocker de l’eau en nous évitant les inondations que provoquerait souvent la Seine autour du goulot d’étranglement qu’est l’agglomération parisienne. Inversement, les milliards de m3 d’eau en stock à la fin du printemps dans les barrages ont permis, durant l’été 2019, de soutenir le débit de la Seine à hauteur de 60% , mais aussi de disposer ainsi d’un eau d’assez bonne qualité pour être purifiée par les usines de traitement qui nous fournissent l’eau potable au robinet.
La France est un pays où le débat sur la gestion de l’eau est trop passionnel pour être positif depuis trop d’années, et plus encore depuis la mort de Remi Fraisse, victime d’une grenade lancée par un policier le 26 octobre 2014, sur le chantier du barrage de Sivens dans le Tarn. Deux visions inconciliables s’affrontent trop souvent : les partisans d’une agriculture productiviste et exportatrice veulent toujours plus d’eau pour irriguer le maïs, les céréales à paille et des oléagineux comme le tournesol. Face à eux, des citoyens, majoritairement citadins et se réclamant de l’écologie, ne veulent rien changer dans le milieu naturel ce qui revient à mettre la nature sous cloche, fut-ce au détriment de notre souveraineté alimentaire.
En raison même des enjeux liés à une indispensable gestion de l’eau en lien avec les conséquences du réchauffement climatique, il est temps de regarder la réalité en face. Le manque d’eau à certaines périodes de l’année sera de nature à mettre en cause notre souveraineté alimentaire. Trop de pluies sans dispositifs de stockage pour écrêter les crues dans des zones subitement inondables feront de plus en plus de morts dans les villes et villages de France.
Cela ne veut pas dire qu’il convient de faire des grands barrages de la dimension du Lac de Der en Champagne, ou celui de Pannecière-Chaumard dans le département de la Nièvre sur le cours de l’Yonne. Mais posons-nous cette simple question : comment seraient alimentés en eau de nombreux habitants de la région PACA aujourd’hui s’il n’y avait pas le lac de Serre-Ponçon sur le cours de la rivière Vaucluse dans les Alpes ? Posons-nous cette autre question : combien de rivières seront à sec en été dans les prochaines années si, faute de réserves de différents volumes mises en place quand il pleut beaucoup, les sécheresses estivales seront de plus en plus fréquentes en France, comme c’est le cas en Australie aujourd’hui ?
Débattons d’une politique raisonnée du stockage de l’eau
Dans les prochaines décennies une politique raisonnée sur stockage de l’eau va prendre beaucoup d’importance pour deux raisons aussi simples que vitales. Elle permettra de limiter les dégâts et le nombre de victimes lors des inondations que provoqueront des pluies intenses de plus en plus fréquentes. Elle permettra aussi d’avoir de l’eau au robinet et d’irriguer un certain nombre de cultures, maraîchères et arboricoles notamment, permettant aussi d’assurer notre souveraineté alimentaire.
3 personnes sur 10 dans le monde n’ont pas accès à l’eau potable en toute sécurité
Près de la moitié des personnes qui puisent leur eau directement dans les eaux de surface vit en Afrique subsaharienne
6 personnes sur 10 n’ont pas accès à des installations sanitaires gérées en toute sécurité
4 milliards de personnes doivent faire face à une grave pénurie d’eau au moins un mois par an
En 2018, à travers son partenariat avec World Vision, Vision du Monde a fourni de l’eau potable à 4 millions de personnes, amélioré les installations sanitaires pour 2, 8 millions de personnes, délivré des formations sur les bonnes pratiques d’hygiène à 5 millions de personnes
:
Favoriser l'expression des idées de transformation sociale du parti communiste.
Entretenir la mémoire des débats et des luttes de la gauche sociale.
Communiquer avec les habitants de la région de Morlaix.