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23 mars 2018 5 23 /03 /mars /2018 07:30
Communistes de Beuzec (Finistère Sud) dans les années 30 - photos archives Pierre Le Rose

Communistes de Beuzec (Finistère Sud) dans les années 30 - photos archives Pierre Le Rose

Manifestation du Front Populaire à Concarneau - photos archives Pierre Le Rose

Manifestation du Front Populaire à Concarneau - photos archives Pierre Le Rose

Conflit social de la fabrique de galoches à Rosporden - photo archives Pierre Le Rose

Conflit social de la fabrique de galoches à Rosporden - photo archives Pierre Le Rose

Le Parti communiste: de l'espoir au doute

En Bretagne, le Parti communiste a longtemps dû se contenter de la "portion congrue" à gauche. Sauf au lendemain de la Libération. Ces dernières années, il avait amorcé une remontée intéressante. Mais cet espoir a été détruit par la crise d'identité qui le traverse et a fait place au doute, y compris dans les fiefs anciens, comme les monts d'Arrée. 

Au moment du congrès de Tours, le socialisme commençait à connaître une implantation non négligeable en Bretagne, surtout dans les zones qu'André Siegfried avait déjà recensées comme favorables, dans sa remarquable autant que minutieuse étude publiée en 1913 ("Tableau politique de la France de l'Ouest sous la IIIe République"). 

Les socialistes dirigeaient alors les mairies de Brest, Lambézellec, Saint-Marc dans la banlieue brestoise, Morlaix, Douarnenez, Concarneau, Audierne dans le Finistère, Lanester dans le Morbihan et Trignac en Loire-Atlantique. 

Aux élections législatives de 1919 les socialistes avaient eu trois élus en Bretagne: Goude, le premier député socialiste breton élu dès 1910, et Masson dans le Finistère, Aubry en Illle-et-Vilaine. Tous les trois resteront à la SFIO après Tours. 

Plusieurs délégués bretons participent à ces débats de Tours. Marcel Cachin, le directeur de "L'Humanité" auteur de la motion d'adhésion de l'Internationale Communiste, avec Fossard, ne représentait pas sa Bretagne natale mais la Seine dont il était élu, le Lot et la ... Corse.

Le syndicaliste brestois Jean-Marie Guibant et le métallurgiste nantais René Gomichon se firent remarqués par leurs vigoureuses interventions en faveur de la Troisième Internationale au cours du Congrès. Guibant donnait aussi une précision intéressante, à savoir la création d'une section entièrement acquise à l'Internationale Communiste à La Feuillée, près de Huelgoat, dans les Monts d'Arrée, que Siegfried avait qualifiés de "démocratie radicale" . Radicale au sens étymologique et non partisan du terme. 

Douarnenez chantait rouge 

Dès 1921, le jeune Parti communiste, issu de la majorité du Congrès de Tours, mettait de nouvelles structures en place. Louise Bodin pour l'Ille-et-Vilaine, René Gomichon pour la Loire-Atlantique, le Treis pour le Finistère et Soufflet pour le Morbihan en furent les premiers secrétaires fédéraux. Par contre les débuts du parti furent plus difficiles dans les Côtes-du-Nord, alors assez fermées à l'influence révolutionnaire. 

Ce Parti communiste des premières années, on a quelques peines à l'imaginer. Tant par ses actions que ses querelles intestines, il se rapprochait plutôt des formations gauchistes de l'après mai 68 que du PC tel qu'on le connaît aujourd'hui. Les "nouveaux rouges" faisaient preuve d'un activisme sans borne, portant aux quatre coins de la péninsule bretonne la parole révolutionnaire et le grand espoir né d'octobre 1917. 

Charles Tillon a raconté comment le jeune syndicaliste et communiste rennais qu'il était participait alors aux grandes luttes des ports du Sud-Finistère de Douarnenez à Concarneau ("On chantait rouge", éd. Laffont, 1977). 

Douarnenez fut la première ville de France à se donner un maire communiste. Ce ne fut pas, comme on le croit à tort, le célèbre Daniel Le Flanchec, mais un tapissier nommé Sébastien Velly, qui succédait, après bien des palabres, au socialiste Fernand Le Goïc au mois de juillet 1921.

Velly mourait subitement le 9 juillet 1924. Il fut alors remplacé par le secrétaire fédéral du PC, Daniel Le Flanchec, une personnalité complexe, mais d'une popularité extraordinaire. Le Flanchec fut le héros de la longue et sanglante grève des pen-sardines douarnenistes, les ouvrières des conserveries de poisson, à la fin de l'année 1924. Il fut victime d'un attentat où il faillit laisser la vie. 

En 1936, Le Flanchec devait rompre avec le PC, mais il resta maire de Douarnenez jusqu'en 1940, avant de mourir en déportation. 

Le rôle des émigrés   

Mais, mis à part ces quelques zones d'influence, le PC n'avait encore qu'une audience limitée en Bretagne. En 1924, il ne réunissait que 13 000 voix aux législatives. 

Dans les années trente pourtant, le PC commença à "décoller", à la faveur du Front populaire. Le rôle de l'émigration fut important. Une grande partie de la classe ouvrière bretonne formait en effet les gros bataillons prolétariens dans la banlieue parisienne, notamment à Saint-Denis. 

Beaucoup de ces travailleurs, revenus au pays avec les congés payés, contribuèrent à faire connaître les idées communistes dans les campagnes bretonnes, certaines s'avérant trs réceptives, du côté d'Huelgoat et de Callac. 

Aux élections législatives de 1936, le PC dépassait 10% des voix dans trois circonscriptions bretonnes: Lannion, Guingamp et surtout Quimper, qui englobait alors Pont-l'Abbé et Concarneau. 

Pierre Guéguin, maire de Concarneau depuis 1935, futur martyr de Châteaubriant, obtenait 23% des voix au premier tour. Il manquait de peu le siège de député, le radical sortant se maintenant au second tour, contrairement aux accords du Front populaire. Dans la montagne huelgoataine, les scores communistes approchaient déjà les 20%. Mais à ces mêmes élections de 1936, la SFIO avait huit élus en Bretagne. 

Des lendemains qui chantent 

La Résistance, où son rôle fut considérable, permit au PC d'acquérir une implantation nouvelle en Bretagne. Charles Tillon devenait même ministre. 

 

Pierre Guéguin, élu maire communiste de Concarneau en 1935

Pierre Guéguin, élu maire communiste de Concarneau en 1935

Charles Tillon, ministre de l'Armée, à Carhaix à la libération (photo des archives Alain et Jean-Claude Cariou)

Charles Tillon, ministre de l'Armée, à Carhaix à la libération (photo des archives Alain et Jean-Claude Cariou)

Congrès du PCF - la délégation du PCF à Strasbourg en 47, photo Archives Pierre Le Rose (avec Daniel Trellu, Gabriel Paul, Pierre Le Rose, Marie Lambert)

Congrès du PCF - la délégation du PCF à Strasbourg en 47, photo Archives Pierre Le Rose (avec Daniel Trellu, Gabriel Paul, Pierre Le Rose, Marie Lambert)

Jeunes communistes à la Libération (archives Pierre Le Rose)

Jeunes communistes à la Libération (archives Pierre Le Rose)

Marcel Cachin dans le sud-Finistère, avec Pierre Le Rose, alors secrétaire départemental (archives Pierre Le Rose)

Marcel Cachin dans le sud-Finistère, avec Pierre Le Rose, alors secrétaire départemental (archives Pierre Le Rose)

Des lendemains qui chantent 

La Résistance, où son rôle fut considérable, permit au PC d'acquérir une implantation nouvelle en Bretagne. Charles Tillon devenait même ministre. La proportionnelle aidant, des députés communistes étaient élus dans les départements bretons pendant toute la IVe République. 

En novembre 1946, les listes communistes recueillaient 341 793 voix dans les cinq départements bretons. En pourcentage, cela faisait 22,34% des suffrages exprimés avec des pointes à 31,5% dans les Côtes-du-Nord et 27,8% dans le Finistère. Scores supérieurs à ceux de la SFIO, jamais retrouvés par le PC en Bretagne. 

En 1951 et en 1956, le PC se maintenait à un excellent niveau électoral. Dans la dernière législature de la IVe République, les députés communistes bretons étaient au nombre de cinq: Marcel Hamon et Guillaume Le Caroff dans les Côtes-du-Nord, Gabriel Paul et Alphonse Penven, le maire de Huelgoat, dans le Finistère, Gravoille en Loire-Atlantique, auxquels il faut ajouter Emmanuel d'Astier de la Vigerie, élu en Ille-et-Vilaine sur une liste commune progressiste communiste. 

Fer de lance de l'union 

Malgré la "guerre froide", le PC maintenait de fortes positions en Bretagne et gardait tout son pouvoir d'attraction politique et culturelle. Son pouvoir d'attraction sociale aussi comme en témoignent les luttes de l'époque, notamment à Brest en 1950. De même, l'opposition du PC aux guerres coloniales, en Indochine et en Algérie, lui valait le soutien d'éléments jeunes et combatifs. 

L'arrivée du général de Gaulle au pouvoir en 1958 portait un coup sévère au PC. Le nouveau mode de scrutin mis en place par la Ve République naissante (majoritaire à deux tours et non plus la représentation proportionnelle) écartait pour vingt ans les communistes bretons du Parlement. 

Politiquement ce fut la période de rapprochement avec les socialistes, c'est-à-dire avec le PSU surtout. Le PC contribua largement aux victoires municipales de la gauche à Saint-Brieuc en 1962 et à Lorient en 1965. 

Fer de lance de l'unité des forces de gauche le PC conservait en Bretagne de solides positions dans ses bastions traditionnels: les Monts d'Arrée, bien sûr, la Montagne Noire, le sud du pays Bigouden, le Trégor rouge, la région de Guingamp, Hennebont, Lanester, Trignac... 

Douarnenez, perdue en 1951, lui faisait certes défaut, mais en 1971, le communiste Michel Mazéas retrouvait un fauteuil de maire qui a valeur historique pour son parti.

C'était alors une période assez exaltante pour les communistes. Sous l'impulsion de Waldeck-Rochet, le PC s'efforçait de se dégager des pesanteurs thoréziennes. Aux élections présidentielles de juin 1969, Jacques Duclos obtenait un excellent score, y compris en Bretagne. Avec 257 818 voix, et 15,75%, le candidat du PC devançait largement, dans les cinq départements bretons, le PSU de Michel Rocard (4,19%) et le socialisme de Gaston Defferre (3,98%). 

C'était voici treize ans à peine! 

Cette nouvelle progression communiste allait pourtant piétiner à partir de 1972. Le nouveau Parti socialiste occupait rapidement un terrain sociologiquement favorable et laminait le centrisme en Bretagne. 

Pour l'heure, le PC recueillait quand même les fruits de l'unité avec les socialistes, lors des cantonales de 1976 et surtout des municipales de mars 1977. Le PC gagnait de nouvelles mairies (Concarneau qu'il avait perdu en 1947, Carhaix, Guingamp..) et entrait dans les conseils municipaux de plusieurs grandes villes bretonnes. 

 

- A suivre   

Rentrée scolaire catastrophique - tract du PCF en 1962 (archives Pierre Le Rose)

Rentrée scolaire catastrophique - tract du PCF en 1962 (archives Pierre Le Rose)

Les candidats du Parti Communiste aux cantonales dans le Finistère en septembre 1967 (Bretagne Nouvelle)

Les candidats du Parti Communiste aux cantonales dans le Finistère en septembre 1967 (Bretagne Nouvelle)

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18 mars 2018 7 18 /03 /mars /2018 18:14
Le Comité du Tregor des Amies et amis de la Commune - 1871 organise une visite du Château du Taureau où fut enfermé Blanqui le 18 avril 2018
Inscription pour la visite du Château de Taureau le 18 avril et réservation pour le concert du 3 juin à Lannion de la chorale "Peuple et chansons" ouvertes sur le site.
Nombre de places pour la visite : 30 maximum (Tarif = 50 euros).
Nombre de places pour le concert : 300 (PT = 10 euros).
 
Exposition à la Médiathèque ; Les Décrets de la Commune du 3 au 8 avril.
 
 

Blanqui "l'Enfermé", selon le surnom que lui donne son biographe Gustave Geffroy, ami de Monet, critique et théoricien d'art de l'impressionnisme, proche de Jaurès, qui fréquenta assidûment la région de Morlaix (sa biographie de Blanqui date de 1892). 

Blanqui (février 1805- janvier 1881) , théoricien et homme politique socialiste ou communiste (à l'époque, ces concepts sont souvent interchangeables) naît à Puget-Théniers dans les Alpes-Maritimes où son père est sous-préfet. Il fut élevé à Paris dans une institution où enseignait son frère aîné Adolphe (futur économiste libéral).

Etudiant en droit et en médecine, il adhéra en 1824 à la Charbonnerie autrement appelée la société secrète des Carbonari (organisation subversive qui complotait contre la monarchie); il fut blessé en 1827 dans les manifestations d'étudiants au Quartier Latin... 

En 1830, lors des barricades de juillet, il prend le fusil et arbore la cocarde tricolore révolutionnaire contre Charles X. 

Deux ans plus tard, il entra au journal "Le Globe", mais sa vie militante se partagea entre conspirations et emprisonnements... (1832, 1836-1837, condamné à mort en 1840, il fut finalement emprisonné au Mont-Saint-Michel puis à Tours jusqu'en 1844). 

En 1848, après avoir fondé la Société Républicaine Centrale que fréquente Baudelaire. Il prône une"République égalitaire" qui fera "disparaître la dernière forme d'esclavage, le prolétariat". Il s'oppose au gouvernement provisoire bourgeois de la IIe République, réclame l'ajournement des élections qui pourraient donner une majorité au camp réactionnaire en organisant des manifestations en mars et avril 1848.   

Il est de nouveau arrêté et passe dix ans en prison à la citadelle de Belle-Ile...

A la prison de Sainte-Pélagie, en 1861, il reçoit de nombreux jeunes dont Gambetta, Clémenceau. Certains de ses disciples vont l'aider, après son évasion et son exil à Bruxelles, à jeter les bases d'un parti clandestin, véritable armée secrète composée de professionnels de la révolution.  

Après la chute de Napoléon III, il revient à Paris pour créer le journal: "La Patrie en danger". Son organisation révolutionnaire compte en septembre 1870 entre 2000 et 3000 membres et recrute dans tous les milieux, inspirée par la figure charismatique du Vieux.  

Sa filiation: la Révolution Française, le Manifeste des Egaux de Babeuf et Philippe Buonarotti qu'il côtoie. Mais Blanqui se méfie des constructions échafaudées par le socialisme utopique. Si la dictature révolutionnaire qui doit naître de la révolution a pour but ultime d'instaurer le "communisme", celui-ci ne saurait être le produit d'un système conçu d'avance: "Le Communisme est une résultante générale et non un oeuf pondu et couvé dans un coin de l'espace humain par un oiseau à deux pieds". 

Thiers le fait arrêter dans le Lot où il se repose... le 17 mars 1871 à la veille du début de la Commune.

Il était en fuite, pourchassé après sa participation aux émeutes du 30 octobre 1870 à Paris. 

Il est enfermé dans la prison de Cahors, puis au château du Taureau où il occupe une pièce voûtée appelée "salle de discipline".

C'est là que Blanqui rédige L'Eternité par les astres, un essai philosophique sur l'univers et la condition humaine, le seul livre publié de son vivant. 

Blanqui est élu membre du comité d'honneur de la Commune de Paris pendant qu'il est au château du Taureau mais Thiers, chef du gouvernement de Versailles, refuse de le rendre contre 74 otages de la Commune, dont l'archevêque Darboy. 

En 1872, Blanqui est condamné par le Conseil de guerre et enfermé à la centrale de Clairvaux, sa dernière prison, pendant sept ans. Finalement amnistié, il se consacrera jusqu'à sa mort à son journal Ni Dieu, ni maître fondé en 1840. 

Blanqui passera en tout dans sa vie 37 ans en prison. Il sort de prison à 74 ans après avoir été élu député de Bordeaux sous les barreaux, mais le scrutin a été invalidé. 

A sa mort, une foule de plus de 100 000 personnes se présente au père Lachaise.  

 

Extrait de l'Eternité par les astres de Blanqui qui nie la nécessité d'un progrès irréversible et rejoint ainsi, en dépit de l'exotisme de la thèse de la pluralité des mondes, des perspectives très contemporaines sur l'histoire:   

" Et puis, jusqu'ici, le passé nous représentait la barbarie, et l'avenir signifiait progrès, science, bonheur, illusion! Ce passé a vu sur tous nos globes-sosies les plus brillantes civilisations disparaître sans laisser une trace, et elles disparaîtront encore sans en laisser davantage. 

L'avenir reverra sur des milliards de terres les ignorances, les sottises, les cruautés de nos vieux âges! (...).

Ce que nous appelons le progrès est claquemuré sur chaque terre, et s'évanouit avec elle. Toujours et partout, dans le champ terrestre, le même drame, le même décor, la même scène étroite, une humanité bruyante, infatuée de grandeur, se croyant l'univers et vivant dans sa prison comme dans une immensité, pour sombrer bientôt avec le globe qui a porté dans le plus profond dédain, le fardeau de son orgueil.

Même monotonie, même immobilisme dans les astres étrangers. L'univers se répète sans fin et piaffe sur place. L'éternité joue imperturbablement dans l'infini les mêmes représentations".  

Extrait de la défense de Blanqui en Cour d'Assise en 1832:

"Oui, Messieurs, c'est la guerre entre les riches et les pauvres: les riches l'ont voulu ainsi; ils sont en effet les agresseurs. Seulement, ils considèrent comme une action néfaste le fait que les pauvres opposent une résistance; ils diraient volontiers, en parlant du peuple: cet animal est si féroce qu'il se défend quand il est attaqué". 

Autre extrait de l'oeuvre de Blanqui qui prône la voie révolutionnaire et la grève générale par opposition à l'idéal d'une transformation progressive par la voie des coopératives de production: 

"Jamais le capital ne consentira à l'abandon de la moindre parcelle de sa puissance. Moins traitable et moins résigné que les rois absolus, il ne veut pas, il ne peut pas faire des concessions. Il entend ne connaître que la loi de son bon plaisir. 

Désarmer la bourgeoisie, armer le peuple, c'est la première nécessité, le seul gage de salut de la révolution (...)

La grève, malgré ses inconvénients, est le moyen naturel, à la portée de tous, auquel tous participent. La coopération n'est qu'un moyen accessible seulement aux plus instruits, suspects ou indifférents, ou même inconnus de tout le reste. La grève est la seule arme vraiment populaire dans la lutte contre le Capital. Appuyées provisoirement sur la grève comme moyen défensif contre l'oppression du Capital, les masses populaires doivent concentrer tous leurs efforts vers les changements politiques, reconnus seuls capables d'opérer une transformation sociale et la répartition des produits selon la justice.

L'état social étant gangrené, pour passer à un état sain, il faut des remèdes héroïques; le peuple aura besoin, pendant quelques temps, d'un pouvoir révolutionnaire".    

Et encore cet "Avis au peuple, le toast de Londres" (25 février 1851): 

"Le devoir d'un révolutionnaire, c'est la lutte toujours, la lutte quand même, la lutte jusqu'à l'extinction. " Qui a du fer, a du pain" (...) Pour les prolétaires qui se laissent amuser par les promenades ridicules dans les rues, par des plantations d'arbres de la liberté, par des phrases sonores d'avocat, il y aura de l'eau bénite d'abord, des injures ensuite, enfin de la mitraille, de la misère toujours" 

 

Sources: 

Article de Bernard Duraud dans le numéro spécial de L'Humanité "1871-2011: Ils étaient les Communards"

Revue de la Bibliothèque du Travail (BT 2), décembre 1973: "Utopistes et précurseurs du communisme"

Le Taureau Forteresse Vauban- Baie de Morlaix - Guillaume Lécuillier, avec les dessins du dessinateur de BD Pellerin (chez Skol Vreizh)

Le Comité du Tregor des Amies et amis de la Commune - 1871 organise une visite du Château du Taureau où fut enfermé Blanqui le 18 avril 2018
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18 mars 2018 7 18 /03 /mars /2018 16:47
Amoco Cadiz: ce qu'en disait le PCF en mars 1978 - des documents collector des archives de Jean-Yvon Ollivier !

En cette période de commémoration des 40 ans de la marée noire de l'Amoco Cadiz, merci à notre ami Jean-Yvon Ollivier de nous avoir communiqué ces archives précieuses sur les positions du PCF à l'époque et l'analyse qu'on faisait des causes structurelles, capitalistes, de cette marée noire dont le cinéaste militant communiste finistérien René Vautier allait tirer le chef d'oeuvre de documentaire militant "Marée noire, colère rouge" !   

Le département du Finistère comptait alors plusieurs centaines d'élus communistes et des dizaines de mairies à direction communiste, à Douarnenez, Concarneau, plusieurs ports et communes du Pays Bigouden, Le Relecq Kerhuon, Scaër, le Centre-Finistère autour de Carhaix, Huelgoat, Scrignac, Berrien.

Et la fédération, très forte et organisée, comptait des milliers d'adhérents.   

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18 mars 2018 7 18 /03 /mars /2018 16:36
18 mars 1871: Début du soulèvement de la Commune de Paris: un gouvernement et un mouvement émancipateur par le Peuple, pour le Peuple!
18 mars 1871: Début du soulèvement de la Commune de Paris: un gouvernement et un mouvement émancipateur par le Peuple, pour le Peuple!

18 mars 1871 : Début du soulèvement de la Commune de Paris
Il y a 147 ans, au printemps de 1871, les quartiers populaires parisiens se soulèvent pour s’engager dans une forme inédite de gouvernement démocratique : la Commune de Paris.
PARIS ASSIÉGÉ, PARIS RÉSISTE
En septembre 1870, la Prusse écrase la France de Napoléon III à Sedan. La République est proclamée, mais la moitié nord de la France est envahie et la capitale est assiégée. Alors que Paris connaît la famine et le froid, le peuple de Paris résiste, combat et s’organise dans la Garde nationale.
Le 18 mars 1871, Paris se rebelle. L’Assemblée nationale, élue en février, est dominée par des notables hostiles à la République. Se méfiant de Paris, qui a voté massivement républicain, elle choisit de s’installer à Versailles. Le gouvernement d’Adolphe Thiers entend mettre fin à la fronde de la capitale et de sa Garde nationale. Le 18 mars, il veut récupérer les canons installés à Montmartre. Il se heurte à la résistance du peuple de Paris. La ville se couvre de barricades. Le soir, le Comité central de la Garde nationale s’installe à l’Hôtel de Ville. La Commune commence! 

 


UN GOUVERNEMENT DU PEUPLE, PAR LE PEUPLE, POUR LE PEUPLE
La Commune a rêvé d’un gouvernement du peuple, par le peuple, pour le peuple. L’idéal de démocratie directe la porte vers « l’intervention permanente des citoyens dans les affaires communales ».
Les politiques mises en œuvre par la Commune sont diverses : un logement pour tous, constituer une « République démocratique et sociale » en se souciant du respect du travailleur, et de la dignité au travail, octroyer une place aux femmes dans la société, en amorçant notamment leur droit au travail, l’égalité des salaires avec les hommes, et la promotion de l’instruction des filles. La Commune a pour principe absolu la liberté, elle prône l’éducation et la laïcité.
L’expérience est brève et s’achève dans un bain de sang. Mais sa mémoire marque en longue durée la double histoire du mouvement ouvrier et de la République.

18 mars 1871: Début du soulèvement de la Commune de Paris: un gouvernement et un mouvement émancipateur par le Peuple, pour le Peuple!
18 mars 1871: Début du soulèvement de la Commune de Paris: un gouvernement et un mouvement émancipateur par le Peuple, pour le Peuple!
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16 mars 2018 5 16 /03 /mars /2018 20:29
Le 16 mars 2007, Lucie Aubrac, héroïne de la Résistance nous quittait: Résister doit toujours se conjuguer au présent
Le 16 mars 2007, Lucie Aubrac, héroïne de la Résistance nous quittait: Résister doit toujours se conjuguer au présent

Le 16 mars 2007, Lucie Aubrac, héroïne de la Résistance nous quittait.
Sa phrase "le verbe Résister doit toujours se conjuguer au présent" a marqué mes engagements et mes combats. Et aujourd'hui plus que jamais, s'engager, c'est résister..Résistons, et agissons.

 

Lucie AUBRAC (Fondation de la Résistance)

http://www.fondationresistance.org/


(1912-2007)

 

Née le 29 juin 1912, Lucie Bernard a 17 ans lorsqu'elle réussit le concours d'entrée à l'École normale d'institutrices du boulevard des Batignolles à Paris. Déjà d'un caractère bien trempé, elle refuse l'uniforme de l'internat et décide de s'installer à Paris où elle vit de petits boulots.

Très vite elle prend conscience de la montée des fascismes en Europe et rapidement elle adhère aux Jeunesses communistes. En 1936, elle se rend à Berlin à l'occasion des Jeux olympiques et découvre la réalité du nazisme.

Tout en militant activement, elle entreprend alors des études d'histoire et, en 1938, elle est reçue à l'agrégation d'histoire géographie.

 Lorsque la guerre éclate, elle est en poste à Strasbourg où elle fait la rencontre de Raymond Samuel, ingénieur des Ponts et Chaussées, mobilisé comme officier du génie. Ils se marient le 14 décembre 1939.

Fin juin 1940, Raymond est fait prisonnier par l'armée allemande. Alors qu'il est détenu à Sarrebourg, Lucie parvient à le faire évader, fin août 1940, profitant de la confusion générale.

À l'automne 1940, l'université de Strasbourg est repliée à Clermont-Ferrand où Lucie doit se présenter pour avoir une affectation. Dans cette ville, elle forme avec Jean Cavaillès, Emmanuel d'Astier de la Vigerie et Georges Zérapha un premier noyau de Résistance, la « dernière colonne » préfiguration du mouvement Libération-Sud.

À partir de 1941, le couple Aubrac s'installe à Lyon. Raymond exerce son métier d'ingénieur tandis que Lucie est nommée professeur au lycée de jeunes filles Edgar Quinet.

Militante et membre du cercle des dirigeants de Libération-sud, elle s'adonne alors, entre ses cours, à de multiples activités clandestines : en juillet 1941, elle contribue à la parution du premier numéro du journal Libération, elle fabrique des faux papiers et aide des résistants à franchir la ligne de démarcation. En mai de la même année, elle donne naissance à son premier enfant Jean-Pierre.

Le 15 mars 1943, son mari, adjoint au général Delestraint, chef de l'Armée secrète est arrêté à Lyon par la police de Vichy et incarcéré à la prison Saint-Paul. Avec un aplomb incroyable, Lucie Aubrac fait pression sur le procureur de la République et parvient à le faire libérer.

Étant devenue une spécialiste des évasions, elle organise peu de temps après, l'enlèvement par des faux Gestapistes, de trois résistants détenus à l'Hôpital de l'Antiquaille (dont Serge Ravanel) puis de quatre détenus à l'hôpital de Saint-Étienne.

Le 21 juin 1943, c'est l'arrestation à Caluire de Jean Moulin et de plusieurs responsables de la Résistance, dont Raymond Aubrac. Incarcérés au fort Montluc, ils sont interrogés sous la torture par Klaus Barbie dans les bâtiments de l'École de santé militaire, devenue siège de la Gestapolyonnaise. Lucie, enceinte, monte un coup de main audacieux. Le 21 octobre 1943, en plein jour, les armes à la main, à la tête d'un groupe franc des MUR pour qui elle est « Catherine », elle mène l'attaque de la camionnette de la Gestapo dans laquelle sont transférés Raymond Aubrac et une dizaine d'autres résistants.(1)

Désormais identifié et recherché par toutes les polices allemandes et vichystes, le couple erre de cachette en cachette dans l'attente d'un avion qui les emporte finalement à Londres avec leur petit garçon le 8 février 1944. Quatre jours plus tard, elle accouche d'une  fille qu'elle prénomme Catherine.

En juillet 1944, elle participe à la mise en place des Comités de libération dans les zones libérées puis rejoint son mari commissaire régional de la République à Marseille. En janvier 1945, Raymond Aubrac doit quitter son poste et s'installe à Paris avec Lucie qui siège désormais à l'Assemblée consultative.

Puis, Lucie Aubrac reprend son métier d'enseignante sans pour autant mettre un terme à son action militante. La décolonisation, l'évolution de la condition féminine, les problèmes de société sont des combats qui la mobilisent à la Ligue des Droits de l'Homme.

À la retraite Lucie Aubrac, infatigable, s'emploie, notamment par d'innombrables conférences dans les établissements scolaires à travers toute la France, à communiquer aux nouvelles générations le sens des valeurs de solidarité, de fraternité et de justice qui firent la grandeur du combat de la Résistance.

Lucie Aubrac qui était vice-présidente d'honneur de la Fondation de la Résistance, s'est éteinte le mercredi 14 mars 2007. Les honneurs militaires lui ont été rendus dans la cour d'honneur de l'Hôtel national des Invalides. Devant Raymond Aubrac, ses trois enfants, ses dix-huit petits enfants, des membres du gouvernement, de nombreux résistants et la foule nombreuse de ses amis, le président de la République Jacques Chirac a prononcé son éloge funèbre. « Lucie Aubrac, nous n'oublierons pas votre message » a dit le chef de l'Etat rappelant que « la cohésion nationale est un combat de tous les jours » et que nous devions « garder vivante dans nos cœurs la flamme des luttes de la République pour la Liberté ».

Frantz Malassis

(1) Cet extraordinaire épisode de la Résistance française est relaté dans son ouvrage Ils partiront dans l'ivresse, qui a été porté à l'écran par Claude Berri avec comme acteurs principaux Carole Bouquet et Daniel Auteuil.

La sortie du film Lucie Aubrac fut l'occasion pour certains milieux d'orchestrer une campagne odieuse d'insinuations envers le couple Aubrac. Dans ce contexte, Raymond et Lucie Aubrac portèrent plainte contre Gérard Chauvy, auteur de Aubrac, Lyon 1943, qui fut condamné pour diffamation en 1998. Les dommages et intérêts versés par ce dernier et son éditeur furent intégralement versés à la Fondation de la Résistance, (dont Lucie Aubrac était vice-présidente d'honneur) à charge pour elle d'offrir chaque année un prix spécial à plusieurs lauréats nationaux du concours scolaire de la Résistance et de la Déportation.

Lucie Aubrac : une incarnation de la Résistance
VENDREDI, 16 MARS, 2007
L'HUMANITÉ

Disparition . L'épouse de Raymond, l'une des figures de la Résistance, s'est éteinte mercredi soir à l'âge de quatre-vingt-quatorze ans. Elle était restée une militante inlassable.

«Convaincre les jeunes qu'ils sont capables de résister. » À l'heure où la triste nouvelle (hélas attendue) a assombri la nuit de mercredi à jeudi, cette phrase récente de cette grande dame aux cheveux neigeux et au regard droit a surgi en notre mémoire, phrase à la saveur familière frappée du sceau de l'insoumission, une phrase comme une évidence, une injonction, un testament philosophique. Lucie Aubrac s'est éteinte, mercredi soir, à l'Hôpital Suisse de Paris d'Issy-les-Moulineaux. Elle avait quatre-vingt-quatorze ans et « était hospitalisée depuis deux mois et demi », a expliqué sa fille, Catherine.

L'âme vagabonde, nous avons alors fermé les yeux pour respirer bien fort. Mesurer le temps parcouru. Le chemin arpenté. Le legs universel. Puis, nous avons pensé à Raymond, figure indissociable, fusionnelle. Les voilà l'un sans l'autre désormais, quelle drôle d'idée. Impossible défi, enchâssés qu'ils sont dans la mémoire collective. Improbable réalité, pour eux tout simplement mais aussi pour l'histoire qui leur doit tant... Mon Dieu qu'il est difficile de « dire » ces deux êtres en leur ampleur et, au plus près, sans rien travestir ni réduire, raconter ce parcours hors du commun.

une inlassable ferveur

Si le XXe siècle n'avait pas connu le nazisme, Vichy, la Résistance, les lois antisémites et la nécessité vitale, absolue, d'échapper aux persécutions en changeant d'identité, Lucie Aubrac n'aurait jamais existé. Elle serait restée Lucie Bernard jusqu'au 14 décembre 1939, jour de ses noces avec Raymond Samuel, puis, comme ce fut le cas brièvement, elle se serait appelée Lucie Samuel. Monsieur et Madame Samuel. Elle, jeune communiste, fille de vignerons du Mâconnais, née en juin 1912, agrégée d'histoire, réputée « sévère » mais « brillante » (1). Lui, enfant de Vesoul, fils d'une famille juive polonaise, ingénieur des Ponts et Chaussées, licencié en droit à Paris et diplômé d'une université américaine. Seulement, ces époux-là au nom juif n'étaient pas libres de s'aimer. Et leurs vies se trouvaient menacées.

En plongeant dans la nuit noire de l'Occupation et en entrant dans la Résistance, Lucie et Raymond devinrent Aubrac. Ils le resteront pour jamais. En quelque sorte. Des héros ? Lucie se fâchait toujours en entendant ce mot. « Les héros, sont d'abord ceux qui sont morts. » Inlassable ferveur d'une certaine idée de la France et de l'engagement, toujours prête à bousculer la posture de l'icône. Car depuis la Libération, on dit « les Aubrac » et rien d'autre, comme si, par la simple évocation de ce nom mythifié par la France, on voulait aussi dire une présence commune et convoquer par ce nom une source inépuisable d'élévation, une urgence aussi, partout où l'homme est blessé. Célébrité ou pas, chez les Aubrac, on n'a jamais transigé avec les principes ni avec les engagements fondamentaux. Cette « règle », cette forme d'idéal humain, ce souci d'une liberté inaliénable, tout cela remonte loin.

Ils s'étaient rencontrés à Strasbourg en 1939, quelques mois avant leur mariage, et dès l'année suivante, à peine Raymond était-il fait prisonnier qu'elle l'aidait (déjà) à s'évader d'une prison de Sarrebourg (Moselle). À l'automne 1940, en zone libre, Lucie rencontra, à Clermont-Ferrand, le journaliste Emmanuel d'Astier de la Vigerie qui organisait un petit groupe clandestin, La dernière colonne, et faisait paraître un journal clandestin. Raymond et Lucie s'installèrent ensuite à Lyon, et, avec une pléiade de jeunes qui refusaient la bête immonde et la croix gammée, ils fondèrent le mouvement Libération-Sud et se lancèrent, tous à corps perdu, dans les premières actions de l'ombre. C'est de ces années-là que datent les coups d'éclat qui feront de leur patronyme l'un des symboles de la France debout.

entre passion et patience

Jusqu'en novembre 1943, Lucie Aubrac enseigne au lycée de jeunes filles Edgard-Quinet de la capitale des Gaules. À cette date, elle reçoit sa révocation en raison de ses engagements trop visibles contre l'occupant. Depuis novembre 1942, elle dirige en effet dans toute la région un corps franc. Rôle essentiel : les évasions. Celle de Raymond en personne fut la plus célèbre. Le 21 juin 1943, à Caluire, Raymond, sous le pseudonyme de François Vallet, est arrêté par les sbires de Klaus Barbie. Avec lui, Jean Moulin, chef du Conseil national de la Résistance (CNR), bientôt massacré, et une dizaine de résistants. Lucie, enceinte, n'a qu'une obsession : revoir Raymond, le sauver d'une mort certaine. Avec un mélange d'inconscience et de courage, elle se jette dans la gueule de la Gestapo pour le faire évader, en échafaudant un judicieux stratagème. Lors d'un audacieux coup de main durant un transfert de prisonniers, avec ingéniosité et sang-froid, les armes à la main, elle réussit à libérer son mari et treize autres résistants. Recherchés activement par la Gestapo, le couple gagne Londres le 8 février 1944, avec leur petit garçon, Jean-Pierre. Lucie accouche quatre jours plus tard d'une fille, Catherine.

À la Libération, Lucie Aubrac rejoignit son mari, nommé commissaire de la République (préfet) à Marseille, puis représenta le Mouvement de libération nationale à l'Assemblée consultative de Paris (2). Le retour à la vie « normale » est alors marqué au fer rouge : les affaires du monde leur importent plus que la glorification de ce qu'ils firent. Valeurs aux coeurs et aux tripes, intactes, le couple fit corps. À lui le recul, la mise à distance, le sang-froid pour balayer d'un revers de main les défroqués du Kremlin qui l'accusèrent d'avoir été un agent du KGB, et en voulaient pour preuve que Ho Chi Minh avait séjourné un temps dans le pavillon familial des Aubrac. À elle la repartie quand on lui suggérait que son engagement antinazi avait pu être dicté par sa sympathie avec le PCF, eux les compagnons de route : « Être communiste sous l'Occupation, est-ce que ça ne voulait pas dire d'abord qu'on se battait contre Hitler ! » (3). Lui, travailla aussi en Afrique et lutta contre la famine avec la FAO. Elle, féministe (« Sans les femmes, disait-elle, la Résistance ne pouvait rien faire »), reprit son métier d'enseignante. Et ne cessa plus, dès lors, de militer en faveur de la paix et de livrer, à travers de nombreuses conférences et dans d'innombrables classes, le témoignage de son engagement dans la Résistance. Il faut avoir vu une fois dans sa vie le lien quasi charnel qu'elle nouait avec les élèves, pour comprendre la générosité de la pédagogue et l'éloquence de son humanité, entre passion et patience.

« Madame conscience »

En 1997, le réalisateur Claude Berri porte à l'écran l'histoire du couple quand les cinéphiles, eux, continuent d'aduler (à juste titre) l'Armée des ombres, de Jean-Pierre Melville (1969), dont l'architecture fait directement référence aux propres souvenirs de Lucie. Un malheur n'arrive jamais seul. En avril 1998, après une polémique absolument indigne, les époux obtinrent que l'historien Gérard Chauvy et son éditeur Albin Michel soient condamnés pour « diffamation publique » après la publication d'un torchon, Aubrac, Lyon 1943, qui mettait en doute leur rôle dans la Résistance. Un pic d'émotion vite atténué par le retour à la dignité des faits. Alors, avec un infatigable enthousiasme, drôle ou grave, elle continuait de raconter, de se confesser aussi parfois (4), de commenter, de s'emporter, d'alerter sur l'état du monde, de s'indigner des inégalités galopantes. Avec les sans-papiers par exemple. Contre la résurgence d'idées glauques et fascisantes. Surtout contre la bêtise. Emmanuel d'Astier de la Vigerie l'avait d'ailleurs surnommée « Madame Conscience ». Et c'est peu dire. En mars 2004, avec plusieurs figures de la Résistance, comme Georges Séguy, Jean-Pierre Vernant, Maurice Kriegel-Valrimont, Germaine Tillion, Georges Guingouin, Lise London, etc., elle avait signé avec son mari un appel aux jeunes générations pour qu'ils réagissent devant la remise en cause du « socle des conquêtes sociales de la Libération ».

Le XXIe siècle, enfanté dans l'incertitude, était aussi le sien. Tout début 2007, elle appelait à « résister à l'ordre établi, au libéralisme et à une classe politique ayant le plus grand intérêt à ce que rien ne change ». Résister c'est réfléchir. Réfléchir c'est penser. Et penser c'est agir. À ceux qui prétendent définir l'« identité nationale » en dressant des barbelés, nous préférerons, toujours, « être avec » Lucie Aubrac, et continuer de parler de bien commun, de justice, d'égalité des droits et de cet imaginaire français dont on rêve qu'il reste universel. Il y a quelques années, elle déclarait : « Aubrac, aujourd'hui, ça sonne Résistance. Au fond, ça a peut-être été bénéfique, pour nous. Ça nous a obligés à nous engager, et dans le bon sens. Car le mot résister doit toujours se conjuguer au présent. »

(1) Simone Signoret, qui l'eut pour professeur, rappela souvent la figure de ce professeur « absolument fabuleux ».

(2) Elle fut candidate sur la liste de Waldeck Rochet aux législatives de novembre 1946, présentée en troisième position.

(3) Entretien avec Gilles Smadja

dans l'Humanité (février 1997).

(4) Grand officier de la Légion d'honneur, elle était l'auteur de plusieurs livres, parmi lesquels :

Ils partiront dans l'ivresse, (1984), Cette exigeante liberté, (1997),

la Résistance expliquée à mes petits enfants, (2000).

Jean-Emmanuel Ducoin

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16 mars 2018 5 16 /03 /mars /2018 06:58
Pierre Semard, le dirigeant cheminot communiste fusillé par les Nazis le 7 mars 1942 - par André Marty, avec la publication de sa dernière lettre - un document exceptionnel de l'édition d'Alger du livret publié par le PCF aux Editions Liberté (archives Jean-Claude Cariou)
Pierre Semard, le dirigeant cheminot communiste fusillé par les Nazis le 7 mars 1942 - par André Marty, avec la publication de sa dernière lettre - un document exceptionnel de l'édition d'Alger du livret publié par le PCF aux Editions Liberté (archives Jean-Claude Cariou)
Pierre Semard, le dirigeant cheminot communiste fusillé par les Nazis le 7 mars 1942 - par André Marty, avec la publication de sa dernière lettre - un document exceptionnel de l'édition d'Alger du livret publié par le PCF aux Editions Liberté (archives Jean-Claude Cariou)
Pierre Semard, le dirigeant cheminot communiste fusillé par les Nazis le 7 mars 1942 - par André Marty, avec la publication de sa dernière lettre - un document exceptionnel de l'édition d'Alger du livret publié par le PCF aux Editions Liberté (archives Jean-Claude Cariou)
Pierre Semard, le dirigeant cheminot communiste fusillé par les Nazis le 7 mars 1942 - par André Marty, avec la publication de sa dernière lettre - un document exceptionnel de l'édition d'Alger du livret publié par le PCF aux Editions Liberté (archives Jean-Claude Cariou)
Pierre Semard, le dirigeant cheminot communiste fusillé par les Nazis le 7 mars 1942 - par André Marty, avec la publication de sa dernière lettre - un document exceptionnel de l'édition d'Alger du livret publié par le PCF aux Editions Liberté (archives Jean-Claude Cariou)
Pierre Semard, le dirigeant cheminot communiste fusillé par les Nazis le 7 mars 1942 - par André Marty, avec la publication de sa dernière lettre - un document exceptionnel de l'édition d'Alger du livret publié par le PCF aux Editions Liberté (archives Jean-Claude Cariou)
Pierre Semard, le dirigeant cheminot communiste fusillé par les Nazis le 7 mars 1942 - par André Marty, avec la publication de sa dernière lettre - un document exceptionnel de l'édition d'Alger du livret publié par le PCF aux Editions Liberté (archives Jean-Claude Cariou)

 

A l'heure où le statut public de la SNCF, produit des combats de la Résistance, est remis en cause par cet allié du monde de la finance qu'est Macron, comme le statut des Cheminots, il n'est pas inutile de revenir sur les fondements historiques de cette France des services publics, et d'abord à travers le souvenir des combats qui ont conduit au Front Populaire et à la Résistance. 

Voici une édition exceptionnelle d'un livret valorisant l'action et le sacrifice pour la Résistance de Pierre Sémard imprimé à Alger deux ans après l'exécution du cheminot communiste par le PCF, avec des commentaires d'André Marty et de Jacques Duclos. 

Archives personnelles Jean-Claude Cariou  

Une réédition postérieure du livret d'hommage au dirigeant communiste Pierre Sémard

Une réédition postérieure du livret d'hommage au dirigeant communiste Pierre Sémard

Le 7 mars 1942, le cheminot communiste et cégétiste Pierre Semard était exécuté par les Nazis, martyre d'un idéal mis en oeuvre à la Libération -Relisons sa dernière lettre

Pierre SEMARD, fusillé le 7 mars 1942. 
Pierre Sémard est né le 15 février 1887 à Bragny-sur- Saône dans une famille de cheminots. Devenu cheminot lui-même, Pierre Sémard s’engage activement dans le syndicalisme. Il devient le secrétaire général de la Fédération des cheminots CGT en juin 1921, de la Fédération des cheminots CGTU après la scission, puis de nouveau avec la CGT réunifiée en 1936.
La famille Pierre Sémard habitait au 65 avenue Secrétan dans le 19èarrondissement où se trouve aujourd’hui un nouvel immeuble des HLM.
En 1939, à la déclaration de guerre, Pierre Sémard est réquisitionné comme cheminot et doit s’installer avec sa famille à Loches en Indre et Loire. C’est dans cette ville qu’il est arrêté, en octobre 1939, par le gouvernement de l’époque en vertu d’un décret qui interdit le Parti Communiste Français.
Alors que l’armée allemande envahit le pays, Pierre Sémard est maintenu en détention au camp de Gaillon dans l’Eure d’où les autorités de Vichy le livreront plus tard comme otage à l’occupant.
Durant sa captivité, Pierre Sémard, malgré son internement, réussit à garder le contact avec les syndicats clandestins, il sera un personnage-phare dans la mobilisation des Cheminots contre les nazis.
Il apporte ses conseils, rédige des appels au combat et dans sa dernier lettre avant d’être fusillé, il lance un ultime appel à ses amis cheminots : " Je meurs avec la certitude de la libération de la France. Dites à mes amis cheminots qu’ils ne fassent rien qui puisse aider les nazis. Les cheminots me comprendront, ils m’entendront, ils agiront. Adieu chers amis, l’heure de mourir est proche. Mais je sais que les nazis qui vont me fusiller sont déjà des vaincus et que la France saura poursuivre le bon combat".
Les cheminots joueront un rôle considérable dans ce qu’on a appelé "la bataille du rail".
Le 6 mars 1942, Pierre Sémard est transféré à la prison d’Évreux et remis le lendemain aux autorités allemandes pour être fusillé comme otage, le lendemain.
Juliette, l’épouse de Pierre Sémard, fut elle aussi arrêtée le 7 août 1941, elle avait assuré durant l’internement de son mari la liaison avec la direction clandestine des cheminots. Jugée le 5 janvier 1942, elle fut condamnée à 8 ans de travaux forcés. Déportée à Ravensbrück, elle fut rapatriée le 24 juin 1945.
Avec la complicité de son épouse, Pierre Sémard avait, jusqu’à son exécution, tenu une place considérable dans la direction de la Résistance cheminote. Cette place lui a été reconnue officiellement au titre de la Résistance Intérieure Française. Pierre Sémard est inhumé au cimetière du Père-Lachaise à Paris.

Le 7 mars 1942, le cheminot communiste et cégétiste Pierre Semard était exécuté par les Nazis, martyre d'un idéal mis en oeuvre à la Libération -Relisons sa dernière lettre

En ce moment, on parle beaucoup des cheminots, de leur statut de privilégiés, du démantelement du reseau SNCF, alors aujourd'hui petite leçon d'histoire par devoir de mémoire.
Le 07 mars 1942, Pierre Semard tombait sous les balles des nazis à l’âge de 55 ans. La vie trop brève de ce militant d’exception fut d’une intensité remarquable, traversant des moments très forts de l’histoire sociale et politique de la première partie du 20ème siècle. Il reste le symbole de la résistance des cheminots à l’Occupation

Sa dernière lettre avant d'être exécuté :

"Chers amis,

Une occasion inespérée me permet de vous transmettre mon dernier mot, puisque dans quelques instants je serai fusillé.

J'attends la mort avec calme. Je démontrerai à mes bourreaux que les communistes savent mourir en patriotes et en révolutionnaires.

Ma dernière pensée est avec vous, camarades de lutte, avec tous les membres de notre Grand Parti, avec tous les Français patriotes, avec les héroïques combattants de l'Armée Rouge et son chef, le grand Staline. Je meurs avec la certitude de la libération de la France.

Dites à mes amis, les cheminots, que ma dernière volonté est qu'ils ne fassent rien qui puisse aider les nazistes.

Les cheminots me comprendront ; ils m'entendront ; ils agiront; j'en suis convaincu.

Adieu, chers amis, l'heure de mourir approche. Mais je sais que les nazistes, qui vont me fusiller, sont déjà vaincus et que la France saura poursuivre le grand combat.

Vivent l'Union Soviétique et ses Alliés ! Vive la France.

Pierre SÉMARD."

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11 mars 2018 7 11 /03 /mars /2018 07:50
Forum de la résistance à Brest le 19 avril 2018 - 18h - en présence de Georges Duffau-Epstein, conférence de Michel Madec et de descendants de FTP de la région brestoise
Forum de la résistance à Brest le 19 avril 2018 - 18h - en présence de Georges Duffau-Epstein, conférence de Michel Madec et de descendants de FTP de la région brestoise
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8 mars 2018 4 08 /03 /mars /2018 12:00
L'Humanité, un siècle de combat pour l'affranchissement des femmes - lettre de la féministe libertaire Séverine, L'Humanité du 19 mai 1919

Le 19 mai 1919, L'Humanité titrait à la Une : "Pour l'affranchissement des femmes". L'éditorial était signé de la journaliste libertaire Séverine :

"Mon féminisme

Hé ! quoi, aurais-je l'orgueil d'en avoir un à moi toute seule ; de m'instaurer en schismatique à l'égard d'un dogme reconnu ?

Oh ! pas du tout ! Mais c'est question de tempérament, et de circonstances.

Vallès, révolutionnaire jusqu'aux moelles, nul ne le contestera, entendit demeurer en marge de toutes les écoles socialistes. Moi qui fait, au contraire, partie de la plupart des associations féministes, je n'appartiens qu'à la tendance commune, sans vouloir m'inféoder à aucun mode de tactique. Tantôt avec celui-ci, tantôt avec celui-là, sans ambition dans tous, et sans aucun souci de popularité, je suis l'audace qui m'agrée, l'initiative qui me paraît juste, l'intervention qui me semble heureuse - d'où qu'elle vienne.

Un seul but m'apparaît : l'émancipation féminine, l'égalité des droits comme des salaires, la communion sincère des deux sexes pour l'effacement d'une longue et cruelle injustice.

Mais j'avoue ne pas me satisfaire complètement des théories en présence.

Beaucoup de politiciennes, et parmi les plus subtiles, s'imaginent avoir partie gagnée lorsque des parlementaires semblent acquis à la cause. Pure duperie ! Même les plus loyaux de nos hommes d'État hésitent devant l'inconnu du problème, s'efforcent de gagner du temps, reculent devant la disproportion formidable qu'a créée la guerre, et qui remettrait entre les mains de la majorité féminine le sort du pays tout entier.

Elles s'abusent, celles qui prennent les mots pour des réalités, des promesses pour des actes. On les lanterne, on les berne, on les "emploie".

Elles ont servi, pendant la guerre, à de toutes autres fins que le féminisme. Celui-ci n'a presque plus existé qu'à titre accessoire, raison sociale, tradition. Je n'aurai pas l'injustice d'alléguer qu'on n'a rien fait pour son service. Mais je persiste à croire, et à dire, qu'il n'existe plus qu'à l'état secondaire dans les préoccupations et les sollicitudes.

Une des fiertés de ma carrière sera de m'être fait conspuer à la mairie Drouot, en décembre 1916, pour avoir dit que si nous comptions comme électeurs nous aurions pu, peut-être imposer l'examen des propositions autrichiennes et abréger la durée du massacre.

Cela, tout le monde va le proclamer demain. Trois cents dames, alors, me huèrent ; trente femmes, dont la plupart en deuil, m'acclamèrent avec d'inoubliables apostrophes d'encouragement et de confiance. Jamais je n'ai ressenti telle satisfaction de conscience, ni - je le répète exprès - semblable fierté.

Ailleurs, le féminisme me déroute quelque peu par son accent agressif. Toutes, nous avons plus ou moins souffert de l'homme. En tant que "citoyennes", unanimement. Dans le privé, la nature des peines est infiniment variable suivant qu'il s'agit du père, du frère, du fiancé, de l'époux, de l'ami ou du fils. Mais la somme des déceptions, des chagrins ne varie guère...

Et il ne faudrait pas que l'amertume qui en résulte fît dégénérer le féminisme en bataille des sexes. Ceci n'a rien à voir avec cela. Nos épreuves personnelles ne doivent servir qu'à nous rendre plus compréhensives du mystère des êtres, plus indulgentes envers les défaillances, plus tendres, plus pitoyables.

A ne regarder que le mauvais côté de l'humanité, on deviendrait sinon féroce, du moins parfaitement indifférent aux maux qu'il lui plaît de subir. Mais le secret, sinon du bonheur, du moins de la souriante acceptation de vivre, c'est de relever toujours les miettes de beauté, les parcelles de bonté qui consolent du reste. Métier de chercheur d'or, évidemment, mais où la récolte est autrement précieuse !

S'il est de mauvais pères, il en est aussi d'excellents ; s'il est de tristes compagnons, il en est dont la sollicitude inlassable perpétue en vous la douceur de l'enfance. Pourquoi - alors qu'il suffisait dans la Bible implacable, d'un seul juste pour sauver une ville - pourquoi les uns ne feraient-ils pas oublier les autres ?

Rien ne se fonde que sur l'amour : la haine est stérile. Nous ne sommes jamais qu'une moitié de l'humanité. Réclamons-en les droits. Mais sans manquer au pacte fondamental de tendresse qui nous lie depuis le commencement du monde. C'est le berceau qui nous rattache : la nature est une finaude qui a tendu le piège qui convient. Acceptons tendrement d'être prise à celui-là.

Mais refusons hautement, dignement, avec grâce s'il est possible, avec malice au besoin, de le laisser devenir prétexte à tout un réseau de chausse-trappes. Ça, c'est fini, il faut désormais jouer franc jeu.

On a mis le temps pour en arriver là. Voilà bien une trentaine d'années que je m'appliquai à prouver, par l'exemple, qu'une femme peut exercer un métier jusque-là presque exclusivement masculin. Car Delphine de Girardin, malgré son talent, à cause de sa situation privilégiée, n'avait pas été une professionnelle.

J'ai lutté, j'ai prouvé. Et, dès le début, j'ai soutenu en toute occasion la cause des femmes. Si j'ai affirmé ma volonté de n'être rien, jamais, j'ai soutenu tout effort féminin, la solidarité entre nous me paraissant chose due.

Et en 1900, au Congrès féministe que Marguerite Durand, alors directrice de la Fronde, organisa avec tant d'intelligence, d'audace et de tact, j'adhérai pleinement à son initiative et à ses travaux. Ouvrez-le, cadettes, ce gros volume des procès-verbaux de nos séances : vous verrez qu'y sont discutées la plupart des questions qui vous passionnent aujourd'hui.

Il y a dix-huit ans ! Alors, vous comprenez, j'ai un peu le sourire, quand des jeunes femmes m'interpellent sévèrement : "Etes-vous féministe ?"

Trente-six ans de journalisme où - sauf trois meurtrières mondaines acquittées d'ailleurs parmi d'élégantes ovations - j'ai toujours défendu socialement, sentimentalement la femme et ses droits ; dix-huit ans de service actif pour la cause, me confèrent le privilège un peu mélancolique de répondre : "Je l'étais bien avant vous !"

Mais sans révérences au pouvoir ni coups de griffe au compagnon. Et révolutionnairement.

Le féminisme ne me semble pas un tout, mais une fraction de l'immense effort à fournir pour affranchir le monde. Il y a là une criante iniquité à réparer. Le prolétariat masculin doit, se doit à lui-même de nous aider à l'abolir, comme nous lui devons toutes nos énergies pour secouer le joug qui l'écrase. On ne saurait disjoindre les aspirations, les intérêts: il faut marcher du même pas sur la route encore obscure - et s'appuyer un peu contre l'épaule voisine aux instants de lassitude.

Tout mon féminisme tient en deux mots : Justice, d'abord ; et puis tout de suite, bien vite, Tendresse.

SÉVERINE

L'Humanité, un siècle de combat pour l'affranchissement des femmes - lettre de la féministe libertaire Séverine, L'Humanité du 19 mai 1919
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8 mars 2018 4 08 /03 /mars /2018 10:35
Léon Moussinac. Ciné Histoire

Léon Moussinac. Ciné Histoire

Cette semaine, un film documentaire très émouvant à été présenté à la télévision retraçant la vie de Léon MOUSSINAC journaliste et critique cinéma communiste à l'Huma. L'occasion de retrouver une figure qui illustre l'apport des communistes à la culture et l'art au XXe siècle. 
Télévision. Léon Moussinac, le cinéma et l’héritage de Spartacus
ÉMILE BRETON
VENDREDI, 27 OCTOBRE, 2017
L'HUMANITE
 
 

Léon Moussinac, l’héritage de Spartacus. Samedi 28 à 18 h 45 et jeudi 2 novembre à 0 h 40 sur Ciné + Classic. Un film de Patrick Cazals sur ce poète, militant du cinéma, ami d’Eisenstein, de Louis Delluc, Aragon, Paul Vaillant-Couturier, et aussi critique pourl’Humanité.

Voilà une belle vie. Pleine. Léon Moussinac, né en 1890 à Migennes, en Bourgogne, où son père, passionné de l’histoire des chemins de fer, était chef de gare à Laroche-Migennes, est mort en 1964 à Paris. Homme de grande culture, il fut poète, écrivain, historien du cinéma. Et militant communiste de 1924 à sa mort. « Je me suis efforcé, écrivit-il, de mettre mes actes en accord avec ma conscience d’écrivain militant. » Il fut l’ami de son aîné Francis Jourdain, de ses contemporains Eisenstein, Louis Delluc, Aragon, Paul Vaillant-Couturier. Et de bien d’autres. Il créa en 1926 le ciné-club les Amis de Spartacus, bientôt interdit par le préfet de police, où pour la première fois en France fut projeté le Cuirassé « Potemkine ».

Passionné de cinéma, il écrivit dans diverses revues avant de tenir la rubrique critique dans l’Humanité et, figurant, il boxa Gaston Modot dans Fièvre, de Louis Delluc. Dans l’Humanité justement, il critiqua le film américain Jim le harponneur, bien oublié aujourd’hui, n’eût été le procès que lui firent les distributeurs, mécontents qu’on vînt ainsi déprécier leur marchandise. Procès que lui et son journal gagnèrent, après bien des années. Ainsi naquit le droit de critique cinématographique : il est notre père à tous.

Emprisonné en 1940

S’intéressant à l’architecture et au théâtre, il participa en 1930 à la fondation du Théâtre ouvrier de France et, à Moscou, fit jouer Labiche par le Théâtre juif. Il fut emprisonné en 1940 à la Santé pour « propagande communiste » puis interné au camp de Gurs. Résistance et Libération. Directeur de l’Idhec en 1945, d’abord, puis de l’Ensad (École nationale supérieure des arts décoratifs), il se retira ensuite dans le Lot avec sa femme Jeanne. Tout cela, Patrick Cazals le dit dans ce film d’une heure. Et sans emphase. Avec des témoins, et notamment son neveu, fils de Jean Lods, cinéaste lui aussi, ceux qui le connurent à la fin de sa vie, des historiens… Ce qui frappe dans tous ces témoignages, c’est autant le respect que l’affection qui les baignent. Une belle vie, oui.

journaliste
Léon Moussinac, homme de passions, intellectuel communiste
ÉMILE BRETON
MERCREDI, 28 JANVIER, 2015
L'HUMANITÉ
Photo : Ciné histoire

En deux volumes, l’Association française de recherche sur l’histoire du cinéma (AFRHC) publie, avec le concours de la Fondation Gabriel-Péri, un ensemble de contributions sur l’apport du théoricien aux avancées du cinéma en France dans les années 1930 et au-delà, et un choix de ses textes.

«Léon Moussinac est très certainement un des intellectuels français de l’entre-deux-guerres le plus original quant à la compréhension théorique des enjeux sociaux et culturels des arts ; or, sa notoriété n’excède pas les quelques spécialistes du politique, alors qu’il publia sur le cinéma, le théâtre ou les arts décoratifs, et qu’il occupa nombre de responsabilités institutionnelles. » Ainsi s’ouvre la préface de Valérie Vignaux à Léon Moussinac, un intellectuel communiste, ensemble d’études collectives qu’elle dirigea avec François Albéra. Donnant quelques exemples, assez cruels pour les auteurs cités, de cet escamotage, elle rappelle quelle place il tint aux côtés d’Henri Barbusse et de Paul Vaillant-Couturier dans l’élaboration de ce « communisme culturel » qui marqua la France des années trente. Ce fut aussi le temps où – écrit Laurent Véray dans sa contribution, « Écrire et agir pour aider le cinéma français à s’élever à la dignité d’art » – son exigeante amitié avec les cinéastes d’alors, Delluc, Gance, L’Herbier et Epstein, fut décisive pour la naissance de ce que Langlois devait appeler « la première vague du cinéma français ». Renvoyons sur ce point à la lecture des différentes contributions évoquant le théoricien, pour retenir la place qui fut la sienne dans la naissance d’une vraie critique de cinéma en un temps (est-il vraiment révolu, même si les formes en sont plus insidieuses ?) où il s’agissait avant tout de « faire la réclame » des films sortis. Il fut, en effet, le premier à publier une critique cinématographique dans une revue littéraire alors prestigieuse, le Mercure de France, de 1920 à 1925. Mais c’est par les critiques régulières qu’il donna à l’Humanité de 1922 à 1932 qu’il put mettre en œuvre son souci de pédagogie (lancement de ciné-clubs, conférences), que d’autres contributions de ces deux volumes soulignent.

Exigeant à l’égard des films 
comme des spectateurs

Quarante et un de ces articles sont publiés et c’est un bonheur que de voir à quelle hauteur se situaient ses exigences à l’égard des films comme des spectateurs. Une citation pour en donner idée. Il écrivait, dans l’Humanitédu 4 juin 1926, mettant en garde les intellectuels attendant du cinéma qu’il devienne un art pour l’élite : « [C]es intellectuels n’ont pas compris que l’image pouvait n’être pas seulement expressive dans son ordre, son mouvement ou son sujet, mais belle plastiquement et riche ainsi d’une émotion nouvelle, et qu’il s’agissait de déterminer quels éléments plastiques pouvaient contribuer à cette beauté. » Qu’on lise ses articles pour apprendre à garder le regard clair devant une œuvre.

Haute idée de son métier d’écrire, qui le conduisit à mener, et à gagner, la première en date des batailles pour la liberté de la critique. Pas seulement pour lui, mais pour tous les critiques. Ayant exercé sa dent dure sur une adaptation fleur bleue de Moby Dick (de Lloyd Bacon, 1930, qui avait, pour les États-Unis, gardé le titre de Melville) et que son distributeur français, Jean Sagène, mini-nabab de l’époque, avait rebaptisée Jim le harponneur, il fut assigné en justice, et l’Humanité avec lui, par ce distributeur. Trois procès s’ensuivirent que « le harponneur » finit par perdre et qui consacraient la liberté de critique. Historique – et c’est bien la seule raison pour laquelle Jean Sagène mérite de passer à la postérité, à ce seul titre. Pour ça, et pour avoir écrit – rappelé par Moussinac dans l’Humanité du 14 mai 1926 : « J’ai réussi dans le camembert, dans le journalisme, il n’y a aucune raison que je ne réussisse pas dans le cinéma ». Ce combat pour une critique libre et contre la censure des films après l’envoi de policiers (1928) aux séances du ciné-club Spartacus, qu’il animait, puis contre l’interdiction de projections, bien d’autres contributions de ces deux livres sont là pour les rappeler, et qu’il faut aller voir. Mais, aussi bien, Jean-Pierre Léonardini pourrait consacrer (ce n’est pas une suggestion, encore moins une injonction) un article d’égal volume à ses batailles pour le théâtre… La raison pour laquelle ces deux livres tranchent sur les idées reçues en matière d’étude sur des auteurs engagés (a fortiori engagés avec les communistes), c’est sans doute qu’on s’y est, tout du long, attaché « surtout à ne pas faire disparaître la personne, car elle est la définition même de l’engagement, celui-ci étant d’abord un choix individuel avant de devenir une action pour autrui » (Valérie Vignaux, «Léon Moussinac 
théoricien du cinéma : d’une poétique 
des arts à une politique de la culture»). 
Un Moussinac vivant.

 
Léon Moussinac. Journaliste, cinéphile et militant
DOMINIQUE WIDEMANN
MERCREDI, 1 AOÛT, 2012
L'HUMANITÉ

Léon Moussinac sera le premier à signer des critiques cinématographiques dans les colonnes de l’Humanité. Précurseur, il restera jusqu’à sa mort, en 1964, fidèle à ses idées et à son parti.

Léon Moussinac entre à l’Humanité en 1922. Il y tiendra durant une dizaine d’années une chronique de critique cinématographique inédite, sur le fond et la forme, dans la presse de l’époque. Au fil du temps, Moussinac affirmera la liberté de la critique et de l’opinion, la dimension artistique du cinéma. On lui doit également l’émergence de la notion de patrimoine cinématographique, qui dote ainsi le cinéma d’une histoire dont Léon Moussinac fixera les films étapes. Il confiera plus tard la tâche à son successeur, Georges Sadoul, qui publiera l’encyclopédie que l’on sait. Grâce à quoi, son image recouvrira celle de Moussinac dans le panthéon communiste.

Avant l’arrivée de Léon Moussinac, point de critique cinématographique dans l’Humanité. Il entame une critique à la première personne, qui vise à créer une esthétique de l’écran. Il y dissèque jeu des acteurs, cadrage, montage, photographie, technique et technologie, tout en s’employant à la recherche du beau et de l’émotion. Avec une constante : la dénonciation des « tripatouillages, des mercanti, de la médiocrité », dénonciation qui va se faire de plus en plus véhémente contre le capitalisme et ses mauvais films. Ceux-là, Moussinac leur fait la chasse. Il va dans les salles populaires et note les réactions du public. En toute indépendance, il défendra envers et contre tout l’Auberge rouge, du jeune Jean Epstein, « contre les vieillards impuissants encore maîtres – pour combien de temps ? – des destinées du cinéma ». De même, il soutient la Roue, d’Abel Gance, tandis que Pierre Sémard, dirigeant des cheminots dont les grandes grèves hurlent encore, s’en prend au film, qu’il juge « contraire aux intérêts de la classe ouvrière ». Moussinac rétorque : « Dans l’état actuel du développement de la cinégraphie, comme dans toute formation d’un art, il s’agit de perfectionner l’outil et de fouiller la matière. » Dont acte. Moussinac admire le cinéma américain, la sensualité de ses stars. Pour lui, le corps de l’acteur accueille une cinématographie. Moussinac s’attache vite à la notion de patrimoine cinématographique. Au point de faire racheter le négatif de Fièvre, film de son ami Louis Delluc, pour en tirer des copies et les diffuser dans les ciné-clubs. Dès 1927, il dressera un historique des films scientifiques et des films comiques.

Au cours des années précédentes, Moussinac a mené, par sa chronique, un combat politique, esthétique et littéraire, non sans une certaine verve surréaliste. Il n’hésite pas, dans ses débuts à l’Humanité, à s’en prendre à tous les « cinéphobes », au premier rang desquels Anatole France, communiste et prix Nobel dont tout le PCF porte le deuil récent. Avec la « bolchevisation » du Parti, la plume de Moussinac, à partir de 1923, va se charger de « menaces et de silences, de prophéties rageuses et anticapitalistes », explique Tangui Perron, évoquant les contradictions de Léon Moussinac qui au fil des années vont s’aiguiser à vouloir tout à la fois « trouver la beauté du film, malgré le film » et « faire table rase » de l’indigence qui régnerait partout dans le cinéma du capital. Article du 16 mars 1927 : « Nous le rappelons ici sans cesse : en régime capitaliste, le cinéma ne saurait être qu’une industrie, un film ne pouvant avoir d’autre but que de “faire de l’argent” ; en régime communiste, le cinéma ne saurait être qu’un art, un film ne pouvant avoir d’autre but que d’amuser, d’émouvoir ou d’instruire. » Du même auteur, une chronique du 5 mai suivant : « Il y a très peu de films intéressants à voir. Il s’agit donc de n’aller au cinéma qu’à bon escient, donc rarement, pour siffler un film dont la médiocrité est offensante, ou d’esprit dangereux, et pour applaudir toute 
œuvre vraiment cinématographique. Pas simple. »

Pourtant, la politique des bruits et des cris va, sur papier journal, servir d’arme pour la critique et le cinéma. « Les communistes en général et Léon Moussinac veulent accentuer et politiser les réactions de la foule, la transformer en masse critique et agissante », soulignent les intervenants. En témoignent les appels à « siffler chaque semaine les actualités du Pathé-Aubert-Gaumont-Journal ». Inlassablement, le vendredi, Moussinac tient les comptes, décrit les hauts faits : l’Internationale qui couvre la Madelon à Châlons, les « À bas la guerre ! » qui retentissent à Limoges, à Courbevoie. Il synthétise deux traditions, celle qui consiste à siffler au théâtre, et le « sabotage » ouvrier. L’Humanité du 2 juillet 1927 : « Nos camarades allemands siffleront à Berlin pour les mêmes raisons que nous. »

En 1928, pour avoir fustigé le film Jim le harponneur, Léon Moussinac est attaqué en justice par un grand patron de l’industrie cinématographique, Jean Sapène, qui vient de rénover les studios de Joinville. La presse corporative conspue Moussinac « le Moscoutaire ». Condamné, Moussinac gagne en appel. Il fonde avec d’autres critiques – Jean Prévost, de la NRF, ou encore le cinéaste René Clair – l’Association amicale de la critique cinématographique. Conquête encore vivante.

La même année, Léon Moussinac va fonder les Amis de Spartacus pour diffuser le cinéma soviétique. Les séances sont privées, pour tenter de contourner la censure. Les militants communistes distribuent les cartes pour y assister dans les bistrots, dans la rue, à l’Humanité. Le choc visuel est énorme. Les spectateurs s’identifient aux films. Vantent leurs « qualités documentaires » en même temps que celles des premiers romans « prolétariens » que publie le journal. Le courrier des lecteurs montre à quel point la « réalité » des mots et des images fait exister ce pour quoi ces femmes et ces hommes se battent. Le rendent « vrai ». L’aventure sera interrompue au bout de six mois par le ministère de l’Intérieur. Lorsque Léon Moussinac meurt, en 1964, fidèle à son parti, bouleversé par le rapport Khrouchtchev, son ami Aragon, rencontré en 1918, lui adresse, dans les Lettres françaises, l’un de ses textes magnifiques, Cette nuit de nous, et s’engage, en poète, à ne jamais la quitter.

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5 mars 2018 1 05 /03 /mars /2018 20:53
Marie - Maï- Politzer morte à Auschwitz, il y a 75 ans, le 6 mars 1943
Marie - Maï- Politzer morte à Auschwitz, il y a 75 ans, le 6 mars 1943
Marie - Maï- Politzer morte à Auschwitz, il y a 75 ans, le 6 mars 1943

Marie Politzer morte à Auschwitz, il y a 75 ans, le 6 mars 1943

Marie Politzer, également connue sous le nom de « Maï ou Maïe Politzer », est née le 15 août 1905 à Biarritz et morte le 6 mars 1943 à Auschwitz. Mariée à Georges Politzer, philosophe français d'origine hongroise.
Jeune, Marie Politzer est passionnée par le théâtre et met en scène des pièces avec ses amies. Après avoir fait ses études secondaires dans un couvent de Biarritz, elle suit une formation de sténo - dactylo à Bayonne, fait des études ce commerce par correspondance1puis elle part à Paris pour entrer dans une école de sage-femme.

Elle est diplômée de la Pitié - Salpétriere. Elle rencontre Georges Politzer, son futur mari, dans un train en rentrant pour les vacances,, en 1929. Il divorce pour l'épouser et le couple se marie le 5 mars 1931.
Son mari étant communiste, elle adhère à ses idéaux et entre en clandestinité avec lui durant l'occupation, en août 1940, après avoir confié leur fils de sept ans à ses parents. Il écrit des articles pour des journaux de résistants. Elle prend en charge le transport des textes aux imprimeries clandestines et, alors qu'elle est blonde, elle se teint les cheveux en brun pour être moins reconnaissable.
Georges et Marie Politzer sont arrêtés à leur domicile clandestin dans le 18e arrondissement de Paris le 14 février 1942 par les brigades spéciales. Elle reste au dépôt jusqu'au 23 mars, puis est détenue au secret à la prison de la Santé où elle voit une dernière fois Georges Politzer avant qu'il soit fusillé le 23 mai 1942. Elle est ensuite transférée au Fort de Romainville en août 1942.
Elle est transférée à Auschwitz par le convoi du 24 janvier 1943, convoi qui contient entre autres des résistantes françaises, la plupart non juives et en majorité communistes, parmi lesquelles de nombreuses veuves de fusillés, telle Hélène Solomon-Langevin, femme de l'écrivain Jacques Solomon.
Elle porte à Auschwitz le numéro 31 680. Danielle Casanova, arrivée par le même convoi qu'elle, et qui a pris la fonction de dentiste au camp, arrive à lui trouver un poste de médecin au Revier du camp, bien qu'elle ne soit que sage-femme. Les conditions sont difficiles, mais un peu moins mauvaises que dans le reste du camp : les médecins n'ont pas à subir d'appel, sont abrités du froid et mangent correctement. Elle y meurt du typhus le 6 mars 1943.
C'est par Marie-Claude Vaillant-Couturier, elle aussi déportée par le convoi du 24 janvier 1943, que la famille de Maï Politzer apprend sa mort, après la libération des camps.
Comme pour Georges Politzer, la mention « mort pour la France » fut accordée à Maï Politzer le 18 mai 1946.

Robert Clément

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