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9 août 2019 5 09 /08 /août /2019 07:25
Rol-Tanguy. Le tableau de Guy Denning et la stèle en gare de Morlaix au rassemblement d'hommage organisé en gare de Morlaix par le PCF

Rol-Tanguy. Le tableau de Guy Denning et la stèle en gare de Morlaix au rassemblement d'hommage organisé en gare de Morlaix par le PCF

Henri Rol-Tanguy Le combat précurseur de l’Espagne
Jeudi, 8 Août, 2019

Lanceurs d'alerte en 1939 14/29. Figure de la Résistance et de la libération de Paris, le colonel avait engagé la lutte contre le fascisme dans les rangs des Brigades internationales. Pour lui, aider l’Espagne républicaine, c’était combattre le franquisme, soutenu par Hitler et Mussolini.

 

À Barcelone, à la fin des cérémonies organisées en l’honneur du 60e anniversaire de la création des Brigades internationales (BI), le colonel Henri Rol-Tanguy, alors que nous l’interrogions sur son rôle dans la libération de Paris, nous disait : « Vous me rappelez à chaque fois mon action dans la lutte contre les nazis et pour la libération de la capitale. Je vous réponds avec plaisir. Pourtant, sachez que c’est l’Espagne et notre combat précurseur contre le fascisme qui demeurent en première place dans ma mémoire. Nous avions compris avant l’heure que Franco et Hitler préparaient en Espagne la tragédie qui allait suivre. C’est là-bas que j’ai appris à me battre contre le fascisme. »

Henri Tanguy est né à Morlaix le 12 juin 1908. Il s’est installé à Paris en 1923 et deviendra ouvrier métallurgiste hautement qualifié, membre de la CGTU et du Parti communiste. « C’est la menace fasciste révélée en février 1934 qui fait vraiment entrer dans le combat politique, et surtout syndical, ce métallo passionné de vélo et d’une grande curiosité intellectuelle », écrit l’historien Roger Bourderon.

Henri Tanguy est membre de la commission exécutive du Syndicat des travailleurs de la métallurgie, responsable des jeunes et de l’activité dans les entreprises avec Jean-Pierre Timbaud, depuis octobre 1936. Il est plus particulièrement chargé d’animer la campagne de solidarité avec la jeune République espagnole après le putsch fasciste.

Jean Morawski, dans un article publié dans l’Humanité au lendemain de la mort de Rol-Tanguy (le 6 septembre 2002), rappelait qu’« André Marty, élu secrétaire, aux côtés de Dimitrov, lors du VIIIe (et dernier) congrès de l’Internationale communiste réuni à Moscou, du 25 juillet au 21 août 1935, avait été délégué en Espagne, un an plus tard. L’ancien de la mer Noire avait demandé, en février 1937, qu’on lui envoie de jeunes cadres en renfort ». Henri Tanguy fut du nombre.

Il rejoignit Marty à Albacete. Il y exerça les fonctions de commissaire politique de l’arsenal, du parc automobile des BI, puis d’une usine de fabrication de grenades. Puis il fut nommé responsable de la main-d’œuvre étrangère, avec grade de capitaine, dans les usines installées en zone républicaine. En octobre 1937, il est commissaire politique du bataillon d’instruction des volontaires francophones, basé à Villanueva de la Jara. Deux mois plus tard, la situation s’aggravant, il conduisit un millier de volontaires dans le secteur de Barcelone. Puis on le retrouva commissaire politique de la 14e brigade, la « Marseillaise », commandée par Marcel Sagnier, ancien peintre en bâtiment. De juillet à septembre 1938, il participa, à Tortosa et dans la sierra Caballes, à l’offensive sur l’Èbre. De retour en France, après le départ des Brigades, il reprit ses fonctions au Syndicat des métaux et au comité de la région parisienne du PCF. Des années plus tard, il disait : « De février 1937 au 8 mai 1945, j’ai toujours été au combat. J’ai encore, dans le corps, une balle de mitrailleuse qui m’a frappé, le 18 juin 1938, sur le front de l’Èbre. Nous étions 8 000 Français à avoir rejoint les Brigades. Sur 35 000 à 40 000 brigadistes, 15 000 étaient partis de France. 3 000 Français furent tués en Espagne. 3 000 autres anciens brigadistes périrent, par la suite, pendant la Résistance. »

« Rol », son dernier pseudo dans les années de clandestinité (il l’adjoignit à son nom de famille), lui avait été inspiré par l’Espagne : « Rol, c’était un camarade, un ami, originaire d’Épinay. Il commandait, avec le grade de capitaine, le bataillon » Commune de Paris « reconstitué après avoir été décimé. Il est tombé à la sierra Caballes, au cours des derniers combats, en septembre 1938 ». Dévoilant, le 20 octobre 1994, une plaque commémorative de l’épopée des BI, au siège du comité national du PCF, le colonel Henri Rol-Tanguy, élevé au rang de grand-croix de la Légion d’honneur, était de ceux pour qui la résistance au fascisme n’avait pas commencé en 1939, ni en 1940, mais bien en 1936. Aider l’Espagne, c’était combattre le franquisme, soutenu par Hitler et Mussolini. C’était répondre à l’urgence de défendre les valeurs républicaines. C’était un devoir si l’on voulait empêcher l’encerclement militaire de l’Hexagone par des dictatures fascistes : celles du Portugal, de l’Italie, de l’Allemagne et de l’Espagne.

Sur les cartes de l’Amicale des anciens volontaires en Espagne républicaine, le témoin a été passé aux enfants au sein de l’Acer, les Amis des combattants en Espagne républicaine, dont la secrétaire générale n’est autre que la fille de Rol, (Claire Rol-Tanguy), on pouvait lire : « La solidarité internationale que nous avons assurée au peuple espagnol en 1936-1939, au cours de sa lutte héroïque contre l’agression fasciste, s’alliait à notre souci de sauvegarder sur les Pyrénées la sécurité de la France. Notre internationalisme s’allie à l’amour de la patrie dont nous avons fait preuve dans la Résistance. »

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7 août 2019 3 07 /08 /août /2019 07:15
photo L'Humanité

photo L'Humanité

Georges Politzer Philosophe de combat
Mardi, 6 Août, 2019

Lanceurs d'alerte en 1939 12/29. Engagé contre le fascisme au lendemain de la Première Guerre mondiale, le théoricien marxiste d’origine hongroise « mort pour la France » fut fusillé comme otage, le 23 mai 1942 au Mont-Valérien.

 

«Ce n’est pas par amour de la poésie que le nazisme fabrique des mythes. Ces mythes sont des instruments politiques », explique Georges Politzer dans la brochure Révolution et contre-révolution au XXe siècle publiée clandestinement en février 1941 (1). Une formule qui caractérise, dans ce texte, la méthode de la propagande d’Hitler selon laquelle « il ne faut pas élever la masse par une propagande qui l’éclaire », mais « l’influencer en se servant des faiblesses engendrées et savamment entretenues en elle par le capitalisme », souligne le philosophe. Autrement dit, comme pour vanter n’importe quelle marque de « nouveau savon » lancé sur le marché, par l’affirmation « sans scrupule » de « n’importe quoi » pourvu que soit acquise l’adhésion subjective et passionnelle de l’auditeur à l’énonciateur et à ses prises de position unilatérales. Une « leçon » mise en œuvre avec un aplomb sans faille par l’ensemble de l’arc de l’extrême droite contemporaine, de Donald Trump à Jair Bolsonaro, en passant par Matteo Salvini, Viktor Orban, Geert Wilders et Marine Le Pen. Une « leçon sur la leçon » de Politzer dont la valeur reste plus actuelle que jamais.

Né en 1903 sujet de l’Empire austro-hongrois, Georges Politzer s’engage précocement. Issu d’une famille de la bourgeoisie juive de Hongrie, il a 15 ans en 1918 quand il adhère au Parti communiste. L’Empire disloqué, il participe à la défense de la République des Conseils, dirigée par Béla Kun, contre les troupes du dictateur Miklos Horthy, admirateur de Mussolini et initiateur des premières lois antisémites de l’entre-deux-guerres. À 17 ans, il part s’installer à Paris, non sans avoir fait un passage à Vienne afin d’assister aux séminaires de Freud et de Ferenczi.

Inscrit à la Sorbonne, où il rencontre Pierre Morhange, Henri Lefebvre et Norbert Guterman, il enseigne au lycée de Moulins, dans l’Allier, avant d’obtenir l’agrégation de philosophie, en 1926, et d’être nommé professeur de l’enseignement secondaire, emploi qu’il occupera jusqu’en 1939 (2). Militant en tant que syndicaliste enseignant, il adhère au Parti communiste français en 1929 et participe à la Revue marxiste avec Pierre Morhange, Georges Friedmann et Paul Nizan.

Ardemment impliqué dans les actions culturelles du PCF dans les années 1930 – enseignement militant, journalisme, documentation… –, il sera mobilisé en 1939 dans l’intendance à l’École militaire. Entré dans la clandestinité, il est, avec Jacques Solomon et Jacques Decour, à l’origine de la Résistance universitaire et intellectuelle communiste, en lançant dès l’automne 1940 le périodique clandestin l’Université libre, puis en février 1941 la Pensée libre, explique le Maitron (3).

« La propagande marxiste n’a jamais reculé devant l’immensité de la tâche qui consiste à porter, non seulement l’économie politique marxiste, mais encore le matérialisme dialectique devant les ouvriers des villes, comme devant les paysans, devant le métallurgiste parisien, comme devant le coolie chinois. Car le but de la propagande marxiste est d’éclairer et d’élever les masses en vue de leur libération », explique Georges Politzer : « Tout (son) effort a tendu à apprendre aux masses les plus larges à déceler, derrière les phrases de toute sorte, les intérêts de classe de la bourgeoisie, afin de les mettre à l’abri, en politique, de la tromperie et de l’illusion » (1).

Arrêté avec sa seconde femme, Marie – dite Maïe –, le 15 février 1942, par la brigade spéciale de la préfecture de police de Paris, Georges Politzer fut remis aux autorités allemandes le 20 mars 1942. Le philosophe cité par le général de Gaulle en octobre 1943 parmi « les plus grands » qui sauvèrent « la dignité de l’esprit » sera fusillé comme otage, le 23 mai 1942 dans la forteresse du Mont-Valérien. Marie Politzer, partie de Romainville le 23 janvier 1943 pour la Pologne, mourut du typhus à Auschwitz, le 6 mars 1943.

Dans la sixième partie du poème Brocéliande de la Diane française, Louis Aragon rendra un hommage appuyé au résistant communiste « aux cheveux roux », assassiné à l’âge de 39 ans, « mort pour la France ». « Dans le Crime contre l’esprit, paru en 1943 puis repris dans l’Homme communiste », précise le Maitron, « il consacra plusieurs pages à Georges Politzer », qui passa trois mois enchaîné et torturé, « du début de mars au 23 mai précisément ». « Pierre Villon (4) se fit aussi l’écho des tortures subies par Politzer », souligne la notice du Dictionnaire biographique du mouvement ouvrier : « Arrêtés, tous deux », Georges et Maïe « ont eu une attitude héroïque devant leurs bourreaux, ils n’ont cédé ni aux tortures physiques, ni aux menaces, ni aux offres déshonorantes de récompense ».

(1) Révolution et contre-révolution au XXe siècle in Politzer contre le nazisme, textes clandestins, présentés par Roger Bourderon avec un avant-propos de Claude Mazauric, Éditions sociales, Messidor, 1984. (2) Voir Roger Bruyeron, les Trois Vies de Georges Politzer, Flammarion, 2013. (3) http://maitron-en-ligne.univ-paris1.fr, notice Politzer Georges par Nicole Racine. (4) Pseudonyme de Roger Ginsburger, membre fondateur du Conseil national de la Résistance.
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7 août 2019 3 07 /08 /août /2019 07:03
Disparition. Toni Morrison, écrire pour briser le silence
Mercredi, 7 Août, 2019

Première Afro-Américaine lauréate du prix Nobel de littérature en 1993, la romancière est morte, lundi, à l’âge de 88 ans.

 

Elle était l’un des monstres sacrés de la littérature américaine, l’un des rares écrivains à concilier succès critique et commercial. Autrice de 11 romans, de livres pour enfants, de pièces de théâtre et d’un opéra, éditrice et enseignante, Toni Morrison s’est éteinte lundi soir, à New York. Chroniqueuse infatigable de la vie des Noirs américains, en particulier des femmes, elle militait pour une littérature affranchie de toute considération raciale, luttait contre les communautarismes et « l’obsession de la couleur ». En 1993, l’Académie Nobel saluait ses « romans caractérisés par leur force visionnaire » et sa manière de « donner vie à un aspect essentiel de la réalité américaine ». Couverte d’honneurs, elle avait remporté le prix Pulitzer en 1988 pour Beloved, l’histoire d’une ancienne esclave échappée d’une plantation en 1870, visitée par le fantôme de sa fille, qu’elle avait tuée de ses propres mains. « J’ai passé ma vie entière à m’assurer que le point de vue blanc ne dominait pas mes livres » confiait-elle dans une interview en 2019.

Elle publie Angela Davis et Mohamed Ali

Née Chloe Ardelia Wofford, le 8 février 1931 à Lorain, dans l’Ohio, une ville industrielle de la « Rust Belt », elle est la deuxième d’une famille modeste de quatre enfants. Elle fait très tôt l’expérience de la ségrégation. Son père, dans son enfance, a assisté à un lynchage et en a nourrit un très vif ressentiment à l’égard des Blancs. Quand Toni a 2 ans, le propriétaire met le feu à l’appartement familial en représailles d’un retard de paiement du loyer. Convertie au catholicisme à l’âge de 12 ans, elle prend comme deuxième prénom Anthony, puis Toni, qui, accolé au nom de son mari, épousé en 1958, deviendra son nom de plume. Le goût pour les mots arrive très tôt, grâce à ses parents et à sa grand-mère, Ardelia, qui lui racontent des histoires. Lectrice fervente, Toni dévore Jane Austen, Richard Wright ou Mark Twain. Adolescente, elle fait le ménage dans des familles de Blancs, est secrétaire à la bibliothèque publique de sa ville. Quand elle est en âge d’aller à l’université, elle entre à Howard, réservée aux Noirs, puis part à Cornell, avant de revenir à Howard. Étudiante brillante, elle consacre sa thèse à William Faulkner et Virginia Woolf et rencontre Alain Locke, célèbre pour ses écrits sur la « Harlem Renaissance », un mouvement de renouveau de la culture afro-américaine. Mère de deux garçons qu’elle élève rapidement seule à New York, elle consacre son temps libre à l’écriture, tôt le matin ou tard le soir. Pour gagner sa vie, elle devient enseignante, puis éditrice, dans la prestigieuse maison Random House où elle publie Angela Davis, militante des droits civiques proche des Black Panthers, et le boxeur Mohamed Ali.

Son premier livre, l’Œil le plus bleu, paraît en 1970, l’histoire d’une jeune fille noire qui veut se conformer aux canons de la beauté blanche et avoir les yeux bleus. Quarante-cinq ans plus tard, elle aborde le même thème dans Délivrances (2015), l’émancipation d’une jeune femme qui fait de sa couleur de peau, d’abord vécue comme un fardeau, une fierté. Parmi ses livres les plus marquants, on retiendra le Chant de Salomon (1977), une fresque foisonnante qui suit l’itinéraire d’un adolescent noir parti dans le Sud profond à la recherche de ses origines. Ou encore Paradis, l’histoire de cinq femmes retrouvées mortes dans une petite ville d’Oklahoma.

Le rythme de ses phrases empruntait au jazz

Dotée d’un caractère bien trempé, Toni Morrison luttait contre toutes les conventions, jusque dans son usage de la langue. Sa littérature était âpre, parfois violente et crue, le rythme de ses phrases empruntait au jazz, le titre de l’un de ses romans (Jazz, 1993). Elle n’aimait pas qu’on qualifie son style de poétique, « parce que cela donnait une connotation luxuriante. Je voulais restituer le pouvoir originel de la langue des Noirs. Un langage riche mais sans fioritures ». Jusqu’au bout, malgré ses problèmes de santé, même si sa parole était devenue rare, Toni Morrison est intervenue dans le débat public, s’opposant farouchement à la politique « rétrograde » de Donald Trump. « C’est le silence qui m’a poussée à écrire toutes ces histoires jamais racontées, auxquelles on n’a jamais prêté attention », disait-elle au New Yorker en 2003. C’est une voix forte, respectée et inspirante qui vient de s’éteindre.

Sophie Joubert
Disparition. Toni Morrison, écrire pour briser le silence (Sophie Joubert, L'Humanité, 7 août 2019)
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7 août 2019 3 07 /08 /août /2019 06:00
Barricade, rue de la Folie-Méricourt, 25 juin 1848, par Ferdinand Rosineau - source Blog Ma Commune de Paris, par Michèle Audin

Barricade, rue de la Folie-Méricourt, 25 juin 1848, par Ferdinand Rosineau - source Blog Ma Commune de Paris, par Michèle Audin

Karl Marx (1818-1883)

Marx "journaliste" chroniqueur de la guerre des classes en France

Article de la Neue Rheinische Zeitung daté du 29 juin 1848

(éditions sociales)

Le 25 juin (1848)

"Chaque jour, la violence, l'acharnement, la fureur de la lutte ont grandi. La bourgeoisie est devenue de plus en plus fanatique contre les insurgés au fur et à mesure que ses brutalités la conduisaient moins vite au but, qu'elle se lassait davantage dans la lutte, la garde de nuit et le bivouac et qu'elle se rapprochait enfin de sa victoire.

La bourgeoisie a proclamé les ouvriers non des ennemis ordinaires, que l'on vainc, mais des ennemis de la société, que l'on extermine. Les bourgeois ont répandu l'assertion absurde que, pour les ouvriers qu'ils avaient eux-mêmes acculé de force à l'insurrection, il ne s'agissait que de pillage, d'incendie et d'assasinnat, que c'était une bande de brigands qu'il fallait abattre comme des bêtes sauvages. Et, cependant, les insurgés avaient occupé pendant trois jours une grande partie de la ville et s'y étaient comportés d'une façon tout à fait convenable. S'ils avaient employé les mêmes moyens violents que les bourgeois et les valets des bourgeois commandés par Cavaignac, Paris serait en ruines, mais ils auraient triomphé.

La façon barbare dont les bourgeois procédèrent dans cette lutte ressort de tous les faits isolés. Sans parler de la mitraille, des obus, des fusées incendiaires, il est établi qu'on ne fit aucun quartier dans la plupart des barricades prises d'assaut. Les bourgeois abattirent sans exception tout ce qu'ils trouvèrent devant eux. Le 24 au soir, plus de 50 insurgés prisonniers furent fusillés sans autre forme de procès dans l'avenue de l'Observatoire. "C'est une guerre d'extermination", écrit un correspondant de l'Indépendance belge, elle-même une feuille bourgeoise. Sur toutes les barricades on croyait que tous les insurgés sans exception seraient massacrés. Lorsque Larochejacquelein déclara à l'Assemblée nationale qu'il fallait faire quelque chose pour contrecarrer cette croyance, les bourgeois ne le laissèrent pas achever et firent un tel vacarme que le Président dut se couvrir et interrompre la séance. Lorsque M. Sénard lui-même voulut prononcer plus tard quelques paroles hypocrites de douleur et de conciliation, le vacarme recommença. Les bourgeois ne voulaient pas entendre parler de modération. Même au risque de perdre une partie de leur fortune par le bombardement, ils étaient résolus à en finir une fois pour toutes avec les ennemis de l'ordre, les pillards, les brigands, incendiaires et communistes.

Avec cela, ils n'avaient pas même l'héroïsme que les journaux s'efforcent de leur attribuer. De la séance d'aujourd'hui de l'Assemblée nationale, il ressort que lorsque l'insurrection éclata, la garde nationale fut consternée d'effroi; des informations de tous les journaux des couleurs les plus diverses, il ressort clairement, malgré toutes les phrases pompeuses, que le premier jour, la garde nationale parut en faible nombre, que le second et le troisième jour, Cavaignac dut les faire arracher de leur lit et mener au feu par un caporal et quatre hommes. La haine fanatique des bourgeois contre les ouvriers insurgés n'était pas à même de surmonter leur lâcheté naturelle.   

Les ouvriers, par contre, se sont battus avec une bravoure sans pareille. De moins en moins en mesure de remplacer leurs pertes, de plus en plus refoulés par des forces supérieures, pas un instant ils ne montrèrent de lassitude. Dès le 25 au matin, ils ont dû reconnaître que les chances de la victoire tournaient nettement contre eux. De nouvelles troupes arrivaient par masses successives de toutes les régions; la garde nationale de la banlieue, celle des villes plus éloignées, venaient en gros détachements à Paris. Les troupes de ligne qui se battaient s'élevaient, le 25, à plus de 40.000 hommes, plus que la garnison ordinaire; à cela s'ajoutait la garde mobile avec de 20 à 25.000 hommes; puis la garde nationale de Paris et des autres villes. De plus, encore plusieurs milliers d'hommes de la garde républicaine. Toutes les forces armées qui entrèrent en action contre l'insurrection s'élevaient, le 25, certainement de 150 à 200.000 hommes; les ouvriers en avaient tout au plus le quart, ils avaient moins de munitions, absolument aucune direction militaire et point de canons utilisables. Mais ils se battirent en silence et désespérément contre les forces énormément supérieures. (...)

Le 25 au matin, les insurgés occupaient les positions suivantes: le Clos Saint-Lazare, les faubourgs Saint-Antoine et du Temple, le Marais et le quartier Saint-Antoine.

Le Clos Saint-Lazare (d'un ancien monastère) est une grande étendue de terrain en partie bâtie, en partie couverte seulement de maisons inachevées, de rues tracées, etc. La gare du Nord se trouve exactement en son milieu. Dans ce quartier riche en bâtisses inégalement disposées et qui renferme en outre quantité de matériaux de construction, les insurgés avaient construit une forteresse formidable.

L'hôpital Louis-Philippe, en construction, était leur centre; ils avaient élevé des barricades redoutables que des témoins oculaires décrivent comme tout à fait imprenables. Derrière se trouvait le mur de ceinture de la ville, cerné et occupé par eux. De là, leurs retranchements allaient jusqu'à la rue Rochechouart ou dans les alentours des barrières. Les barrières de Montmartre étaient fortement défendues; Montmartre était complètement occupé par eux. Quarante canons, tonnant contre eux depuis deux jours, ne les avaient pas encore réduits. 

On tira de nouveau toute la journée avec 40 canons sur ces retranchements; finalement, à 6 heures du soir, les deux barricades de la rue Rochechouart furent prises et bientôt après le Clos Saint-Lazare succombait aussi.    

Sur le boulevard du Temple, la garde mobile prit à 10 heures du matin plusieurs maisons d'où les insurgés envoyaient leurs balles dans les rangs des assaillants. Les "défenseurs de l'ordre" avaient avancé à peu près jusqu'au boulevard des Filles du Calvaire. Sur ces entrefaites, les insurgés furent refoulés de plus en plus loin dans le faubourg du Temple, le canal Saint-Martin occupé par endroits et de là, ainsi que du boulevard, l'artillerie canonnait fortement les rues plus larges et droites. Le combat fut d'une violence extraordinaire. Les ouvriers savaient très bien qu'on les attaquait là au cœur de leurs positions. Ils se défendaient comme des forcenés. Ils reprirent même des barricades dont on les avait vu déjà délogés. Mais après une longue lutte, ils furent écrasés par la supériorité du nombre et des armes. Les barricades succombèrent l'une après l'autre; à la tombée de la nuit, non seulement le faubourg du Temple était pris, mais aussi, au moyen du boulevard et du canal, les abords du faubourg Saint-Antoine et plusieurs barricades de ce faubourg.

A l'hôtel de ville, le général Duvivier faisait des progrès lents, mais réguliers. Des quais, il prit de flanc les barricades de la rue Saint-Antoine, en même temps qu'il canonnait l'île Saint-Louis et l'ancienne île Louvier avec des pièces lourdes. On se battit également là avec un grand acharnement mais on manque de détails sur cette lutte dont on sait seulement qu'à 4 heures la mairie du IXe arrondissement ainsi que les rues avoisinantes furent prises, que les barricades de la rue Saint-Antoine furent emportées d'assaut l'une après l'autre et que le pont de Damiette qui donnait accès dans l'île Saint-Louis fut pris. A la tombée de la nuit, les insurgés y étaient partout refoulés et tous les accès de la place de la Bastille dégagés.

Ainsi, les insurgés étaient rejetés de toutes les parties de la ville, à l'exception du faubourg Saint-Antoine. C'était leur position la plus forte. Les nombreux accès de ce faubourg, le vrai foyer de toutes les insurrections parisiennes, étaient couverts avec une habileté particulière. Des barricades obliques, se couvrant mutuellement les unes les autres, encore renforcées par le feu croisé des maisons, constituaient un double front d'attaque. Leur assaut aurait coûté une énorme quantité d'existences. 

Devant ces retranchements campaient les bourgeois, ou plutôt leurs valets. La garde nationale avait fait peu de choses ce jour-ci. C'est la ligne et la garde mobile qui avaient accompli la plus grande partie de la besogne; la garde nationale occupait les quartiers calmes et les quartiers conquis.

C'est la garde républicaine et la garde mobile qui se sont comportées le plus mal. La garde républicaine, réorganisée et épurée comme elle l'était, se battit avec un grand acharnement contre les ouvriers, gagnant contre eux ses éperons de garde municipale républicaine.

La garde mobile, qui est recrutée, dans sa plus grande partie, dans le lumpen-prolétariat parisien, s'est déjà beaucoup transformée, dans le peu de temps de son existence, grâce à une bonne solde, en une garde prétorienne de tous les gens au pouvoir.  Le lumpen-prolétariat organisé a livré sa bataille au prolétariat travailleur non organisé. Comme il fallait s'y attendre, il s'est mis au service de la bourgeoisie, exactement comme les lazaroni à Naples se sont mis à la disposition de Ferdinand. Seuls, les détachements de la garde mobile qui étaient composés de vrais ouvriers passèrent de l'autre côté.  

(...)

La bravoure avec laquelle les ouvriers se sont battus est vraiment admirable. Trente à quarante mille ouvriers qui tiennent trois jours entiers contre plus de quatre-vingt mille hommes de troupe et cent mille hommes de garde nationale, contre la mitraille, les obus et les fusées incendiaires, contre la noble expérience guerrière de généraux qui n'ont pas honte d'employer les moyens algériens! Ils ont été écrasés, et, en grande partie, massacrés. On ne rendra pas à leurs morts les honneurs comme aux morts de Juillet* et de Février**; mais l'histoire assignera une toute autre place aux victimes de la première bataille rangée décisive du prolétariat". 

Karl Marx- Neue Rheinische Zeitung - 29 juin 1848

* 1830

**1848

 

 

A lire aussi:

Les grands textes de Karl Marx - 1 : la critique des libertés formelles de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen, dont le pivot est le droit de propriété - une critique des déterminants bourgeois de la Révolution Française

Les grands textes de Karl Marx - 2 - La religion comme opium du peuple

Les grands textes de Karl Marx - 3: l'aliénation produite par la propriété privée et le capitalisme dans les Manuscrits de 1844

Les grands textes de Marx - 4: Les pouvoirs de l'argent (Ebauche d'une critique de l'économie politique, 1844)

Les grands textes de Karl Marx - 5: le matérialisme historique théorisé dans l'Idéologie allemande (1845)

Les grands textes de Karl Marx - 6 - L'idéologie, antagonismes de classes sociales et idées dominantes

Les grands textes de Karl Marx - 7 - Le Manifeste du Parti communiste - Les conditions du communisme se développent dans le développement du capitalisme et de la domination de la bourgeoisie

Les grands textes de Karl Marx - 8 - Qu'est-ce qu'être communiste? - Manifeste du Parti communiste (1848)

Les grands textes de Karl Marx - 9 - Sur le socialisme et le communisme utopique, Manifeste du Parti communiste

Les grands textes de Karl Marx - 10 - La lutte des classes en France - Les raisons de l'échec de la révolution de Février 1848

Les grands textes de Karl Marx - 11 - Les luttes de classe en France - les leçons de la répression du soulèvement ouvrier de juin 1848

Les grands textes de Karl Marx - 12 - l'élection de Louis Napoléon Bonaparte - Les luttes de classe en France

Les grands textes de Karl Marx - 13 - la journée révolutionnaire du 23 juin 1848 racontée dans la Neue Rheinische Zeitung

Les grands textes de Karl Marx - 14 - la journée révolutionnaire du 24 juin 1848 racontée dans la Neue Rheinische Zeitung

Marx et Engels: les vies extravagantes et chagrines des deux théoriciens du communisme!

Les grands textes de Karl Marx - 15 -  la journée révolutionnaire du 25 juin 1848 racontée dans la Neue Rheinische Zeitung
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7 août 2019 3 07 /08 /août /2019 05:43
ARAGON L’UNITÉ À L’ÉCOLE DE L’ESPAGNE (L’HUMANITE - Mercredi 31 Juillet 2019 - Alain Nicolas)

 

Les lanceurs d'alerte en 1939 8/29.

L’écrivain a été un des artisans de l’union pour le soutien à la République, vaincue en janvier 1939. Une étape passionnée et douloureuse dans son combat pour avertir des dangers du fascisme, et rassembler contre lui les écrivains, les artistes, le peuple.

«Machado dort à Collioure », chantera Aragon dans les Poètes, vingt ans après la mort du poète espagnol. Le 22 février 1939, « trois pas suffirent hors d’Espagne » pour que l’épuisement et le désespoir précipitent sa fin. Pour Louis Aragon, l’année 1939 commence dans l’amertume. Le 26 janvier, Barcelone, capitale et dernier bastion de la République espagnole, tombe aux mains des franquistes. Une semaine plus tard, Aragon et Elsa Triolet sont au Perthus. Au poste-frontière, seuls passent les civils, les femmes, les enfants. La France refuse l’entrée aux combattants républicains, qui risquent à tout moment la mort ou les travaux forcés. Aucune exagération dans ce chiffre : 200 000 exécutés selon les statistiques. Il faudra encore trois jours pour que le gouvernement Daladier cède à la pression de toutes les forces politiques, syndicales, venues de tous les milieux, de toutes les religions, et enfin ouvre les frontières.

Cette unité, Aragon en a été, et dès la première heure, un des plus actifs ouvriers. En septembre 1936, à son retour de Moscou, où il était resté quelques semaines après les obsèques de Gorki, il apprend que, contrairement à ce qui s’imprimait en URSS, la tentative de putsch militaire n’a pas échoué. On se bat en Espagne depuis juillet. Aragon, Elsa et deux écrivains émigrés d’Allemagne, Regler et Stern, partent pour Madrid à bord d’un camion gris transportant une petite imprimerie et un projecteur de cinéma. Tout cela donné par l’Association internationale des écrivains pour la défense de la culture, créée au congrès de Paris en 1935. Aragon et Elsa sont accueillis par Rafael Alberti, rencontrent Neruda. Malraux est là, lui aussi. La délégation rencontre l’Alliance des intellectuels antifascistes pour la défense de la culture, parcourt la ligne de front, participe à un meeting le 25 octobre. Il déclare que « la France s’est déshonorée (…) en ne retenant pas la main du fascisme ». À son retour, avec Jean-Richard Bloch, il demande en vain une entrevue à Léon Blum pour lui demander de renoncer à la non-intervention. Bloch avait déjà rencontré le premier ministre du Front populaire en août. Blum avait hésité.

Il n’hésite plus. Il a abandonné à son sort la République espagnole et laissé à Hitler et Mussolini un magnifique banc d’essai. La guerre d’Espagne est pour Aragon à la fois un exemple, une école et une passion. « L’Espagne au cœur » : c’est pour lui, croirait-on, que Neruda a inventé (en 1937) la formule. Lui, il dira plus tard : « J’ai dans mon nom le raisin d’Espagne. » Mais, au-delà des hasards biographiques, des sentiments de fraternité avec les poètes et le peuple espagnols, le conflit est le moyen de prendre à la lettre l’inscription de Schiller sur la cloche de Bâle : « J’appelle les vivants, je pleure les morts, et je brise les foudres. » Le chemin de l’unité a été long, escarpé, sinueux. Depuis son adhésion au PCF en 1927, il a connu une ligne ultrasectaire, puis unitaire à partir de la prise du pouvoir par les nazis. Ce schéma ne rend pas compte, certes, de la complexité des itinéraires et des divisions du Parti, de l’Internationale, des groupes d’écrivains et d’artistes qu’ils influencent, des surréalistes français en particulier et, évidemment, d’Aragon lui-même. Mais il est clair que, dans cette ligne unitaire, il est tout à fait lui-même.

Artisan du congrès international des écrivains pour la défense de la culture en 1935, il avait agi pour que Malraux et Gide, avec qui il est brouillé, figurent à sa présidence collective. Le sacrifice de son orgueil est utile : impressionnés par l’élan unitaire, Brecht, Babel, Pasternak, Musil, Huxley, Heinrich Mann sont dans le comité. Dans l’assistance, Breton et Éluard, qui ont exclu Aragon. Au premier rang, Léon Blum, pas encore premier ministre. Dirigeant Ce soir, quotidien créé en 1937 par Paul Vaillant-Couturier, il travaille avec Jean-Richard Bloch, qui n’est pas communiste à l’époque, et n’hésite pas à publier un grand texte de Malraux, l’Espoir. C’est bien l’espoir qui anime Aragon. Alertant sur les dangers qui menacent, sa chronique « Un jour du monde » de Ce soir est un exercice de lucidité, d’intransigeance parfois, mais aussi de confiance dans la capacité des peuples. Une leçon que, malgré les épreuves, il ne cessera de proclamer.

Alain Nicolas

 

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6 août 2019 2 06 /08 /août /2019 05:42
Barricade rue de la Mortellerie, juin 1848 - Tableau musée du Louvre

Barricade rue de la Mortellerie, juin 1848 - Tableau musée du Louvre

Karl Marx (1818-1883)

Marx "journaliste" chroniqueur de la guerre des classes en France

Article de la Neue Rheinische Zeitung daté du 28 juin 1848

(éditions sociales)

Le 24 juin (1848)

"Toute la nuit, Paris fut militairement occupé. De forts piquets de troupes se tenaient sur les places et sur les boulevards.

A 4 heures du matin retentit la générale. Un officier et plusieurs hommes de la garde nationale entrèrent dans toutes les maisons pour y aller chercher les gardes de leur compagnie qui ne s'étaient pas présentés volontairement.

Vers le même moment, le grondement du canon retentit à nouveau, avec plus de violence, aux environs du pont Saint-Michel, le point de liaison des insurgés de la rive gauche et de la Cité. Le général Cavaignac, revêtu ce matin de la dictature, brûle d'envie de l'exercer contre l'émeute. La veille, on n'avait employé l'artillerie qu'exceptionnellement et on ne tirait le plus souvent qu'à la mitraille; mais aujourd'hui, on poste sur tous les points de l'artillerie, non seulement contre les barricades, mais aussi contre les maisons; on tire non seulement à mitraille, mais à boulets de canon, avec des obus et avec des fusées à la Congrève.

Dans le haut du faubourg Saint-Denis, un violent combat commença le matin. Les insurgés avaient occupé dans le voisinage de la gare du Nord une maison en construction et plusieurs barricades. La première légion de la garde nationale attaqua sans acquérir toutefois d'avantage quelconque. Elle épuisa ses munitions et elle eut près de cinquante morts et blessés. A peine put-elle conserver sa position jusqu'à l'arrivée de l'artillerie (vers 10 heures) qui rasa la maison et les barricades. Les troupes réoccupèrent la ligne du chemin de fer du Nord. La lutte dans toute cette contrée (appelée Clos Saint-Lazare et que la Kölnische Zeitung transforme en "Cour Saint-Lazare") se poursuivit encore longtemps et fut menée avec un grand acharnement. "C'est une véritable boucherie" écrit le correspondant d'une feuille belge. Aux barrières Rochechouart et Poissonnière s'élevèrent de fortes barricades; le retranchement près de la rue Lafayette fut rétabli également et ne céda que l'après-midi aux boulets de canon. 

Dans les rues Saint-Martin, Rambuteau et du Grand-Chantier, les barricades ne purent être prises également qu'à l'aide des canons. 

Le café Cuisinier, en face du pont Saint-Michel, a été démoli par les boulets de canon.

Mais le combat principal eut lieu l'après-midi vers trois heures sur le quai aux Fleurs où le célèbre magasin de confections "A la Belle Jardinière" fut occupé par 600 insurgés et transformé en forteresse. L'artillerie et l'infanterie de ligne attaquent. Un coin du mur démoli s'écroule avec fracas. Cavaignac qui commande le feu lui-même invite les insurgés à se rendre, sinon il les fera tous passer au fil de l'épée. Les insurgés s'y refusent. La canonnade reprend et, finalement, on y jette des fusées incendiaires et des obus. La maison est complètement démolie; 80 insurgés gisent sous les décombres.

Dans le faubourg Saint-Jacques, aux alentours du Panthéon, les ouvriers s'étaient également retranchés de tous les côtés. Il fallut assiéger chaque maison comme à Saragosse.  Les efforts du dictateur Cavaignac pour prendre d'assaut ces maisons furent si vains que le brutal soldat d'Algérie déclara qu'il y ferait mettre le feu si les occupants ne se rendaient pas. 

Dans la Cité, des jeunes filles tiraient des fenêtres sur les soldats et la garde civile. Il fallut, là aussi, faire agir les obusiers pour obtenir le moindre résultat.

Le 11e bataillon de garde mobile qui voulait passer du côté des insurgés, fut massacré par les troupes de la garde nationale. C'est du moins ce qu'on dit.

Vers midi, l'insurrection avait nettement l'avantage. Tous les faubourgs, les Batignolles, Montmartre, La Chapelle et La Villette, bref toute la limite extérieure de Paris, depuis les Batignolles jusqu'à la Seine, et la plus grande moitié de la rive gauche de la Seine étaient entre ses mains. Ils s'y étaient emparés de 13 canons qu'ils n'utilisèrent pas. Au centre, ils arrivaient dans la Cité et dans la partie basse de la rue Saint-Martin sur l'hôtel de ville qui était couvert par des masses de troupes. Mais cependant, déclara Bastide à la Chambre, il sera pris dans une heure peut-être par les insurgés, et c'est dans la stupeur provoquée par cette nouvelle que la dictature et l'état de siège furent décidés. A peine en fut-il pourvu que Cavaignac recourut aux moyens les plus extrêmes, les plus brutaux, comme jamais encore on ne les avait utilisés dans une ville civilisée, comme Radetzy lui-même hésita à les employer à Milan. Le peuple fut de nouveau magnanime. S'il avait riposté aux fusées incendiaires et aux obusiers par l'incendie, il eût été victorieux le soir. Mais il se garda d'utiliser les mêmes armes que ses adversaires.

Les munitions des insurgés se composaient le plus souvent de coton-poudre qui était fabriqué en grandes quantités dans le faubourg Saint-Jacques et dans le Marais. Sur la place Maubert était installé un atelier pour fondre les balles.

Le gouvernement recevait continuellement des renforts. Durant toute la nuit, des troupes arrivèrent à Paris; la garde nationale de Pontoise, Rouen, Meulan, Mantes, Amiens, Le Havre arriva; des troupes vinrent d'Orléans, de l'artillerie et des pionniers d'Arras et de Douai, un régiment vint d'Orléans. Le 24 au matin, 500.000 cartouches et 12 pièces d'artillerie de Vincennes entrèrent dans la ville; les cheminots de la ligne de chemin de fer du Nord, d'ailleurs, ont arraché les rails entre Paris et Saint-Denis pour qu'aucun renfort n'arrive plus.

C'est avec ces forces conjuguées et cette brutalité inouïe qu'on parvint l'après-midi du 24 à refouler les insurgés.

La fureur avec laquelle la garde nationale se battit et la grande conscience qu'elle avait qu'il y allait de son existence dans ce combat, apparaissent dans le fait que, non seulement Cavaignac, mais la garde nationale elle-même, voulait mettre le feu à tout le quartier du Panthéon!

Trois points étaient désignés comme les quartiers principaux des troupes assaillantes: la porte Saint-Denis où commandait le général Lamoricière, l'hôtel de ville où se tenait le général Duvivier avec 14 bataillons, et la place de la Sorbonne d'où le général Damesne luttait contre le faubourg Saint-Jacques.

Vers midi, les abords de la place Maubert furent pris et la place elle-même cernée. A une heure, la place succombait. Cinquante hommes de la garde mobile y tombèrent! Vers le même moment, le Panthéon, après une canonnade longue et violente, était pris ou plutôt livré. Les quinze cent insurgés qui y étaient retranchés, capitulèrent - probablement à la suite de la menace de M. Cavaignac et des bourgeois, écumant de rage, de livrer tout le quartier aux flammes. 

Vers le même moment, les "défenseurs de l'ordre" avançaient de plus en plus sur les boulevards et prenaient les barricades des rues avoisinantes. Dans la rue du Temple les ouvriers étaient refoulés jusqu'au coin de la rue de la Corderie; dans la rue Boucherat on se battait encore, également de l'autre côté du boulevard, dans le faubourg du Temple. Dans la rue Saint-Martin retentissaient encore des coups de fusil isolés; à la pointe Sainte-Eustache, une barricade tenait encore.

Le soir, vers 7 heures, on amena au général Lamoricière deux bataillons de la garde nationale d'Amiens qu'il employa aussitôt à cerner les barricades derrière le Château-d'Eau. A ce moment, le faubourg Saint-Denis était calme et libre; il en était de même de presque toute la rive gauche de la Seine. Les insurgés étaient cernés dans une partie du Marais et du faubourg Saint-Antoine. Cependant, ces deux quartiers sont séparés par le boulevard Beaumarchais et le canal Saint-Martin, et celui-ci était libre pour la troupe.

Le général Damesme, commandant de la garde mobile, fut atteint, près de la barricade de la rue de l'Estrapade, par une balle à la cuisse. La blessure n'est pas dangereuse. Les représentants Bixio et Dornès ne sont pas non plus blessés aussi dangereusement qu'on le croyait au début.

La blessure du général Bedeau est également légère.

A 9 heures, le faubourg Saint-Jacques et le faubourg Saint-Marceau étaient pour ainsi dire pris. Le combat avait été d'une violence exceptionnelle. C'est le général Bréa qui y commandait maintenant. 

Le général Duvivier à l'hôtel de ville avait eu moins de succès. Cependant les insurgés y avaient été aussi refoulés. 

Le général Lamoricière, après une résistance violente, avait dégagé les faubourgs Poissonnière, Saint-Denis et Saint-Martin jusqu'aux barrières. Les ouvriers ne tenaient encore que dans le Clos Saint-Lazare; ils s'étaient retranchés dans l'hôpital Louis-Philippe.

Cette même nouvelle fut communiquée par le président de l'Assemblée Nationale à 9 heures et demie du soir. Cependant, il lui fallut se rétracter plusieurs fois. Il avoua que l'on tirait encore beaucoup de coups de feu dans le faubourg Saint-Martin.

Les insurgés tenaient encore environ la moitié du terrain qu'ils occupaient le matin du 23. Ce terrain représentait la partie est de Paris, les faubourgs Saint-Antoine, du Temple, Saint-Martin et le Marais. Le Clos-Saint-Lazare et quelques barricades du Jardin des Plantes formaient leurs postes avancés.

Tout le reste de Paris était dans les mains du gouvernement.

Ce qui frappe le plus dans ce combat désespéré, c'est la fureur avec laquelle se battaient les "défenseurs de l'ordre". Eux qui, auparavant, avaient des nerfs si sensibles pour chaque goutte de "sang bourgeois", qui avaient des crises de sentimentalité à propos de la mort des gardes municipaux du 24 février, ces bourgeois abattent les ouvriers comme des animaux sauvages. Dans les rangs de la garde nationale, à l'Assemblée nationale, pas un mot de compassion, de conciliation, pas de sentimentalité d'aucune sorte, mais bien une haine qui éclate avec violence, une fureur froide contre les ouvriers insurgés. La bourgeoisie mène avec une claire conscience une guerre d'extermination contre eux. Qu'elle soit pour l'instant victorieuse ou qu'elle ait immédiatement le dessous, les ouvriers exerceront contre elle une terrible vengeance. Après une lutte comme celle des trois Journées de juin, seul le terrorisme  est encore possible, qu'il soit exercé par l'un ou l'autre des partis. 

(...)

Karl Marx, suite de l'article de Neue Rheinische Zeitung daté du 28 juin 1848 sur les journées révolutionnaires parisiennes du 23 et 24 juin 1848: première partie de l'article: Les grands textes de Karl Marx - 13 - la journée révolutionnaire du 23 juin 1848 racontée dans la Neue Rheinische Zeitung

A lire aussi:

Les grands textes de Karl Marx - 1 : la critique des libertés formelles de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen, dont le pivot est le droit de propriété - une critique des déterminants bourgeois de la Révolution Française

Les grands textes de Karl Marx - 2 - La religion comme opium du peuple

Les grands textes de Karl Marx - 3: l'aliénation produite par la propriété privée et le capitalisme dans les Manuscrits de 1844

Les grands textes de Marx - 4: Les pouvoirs de l'argent (Ebauche d'une critique de l'économie politique, 1844)

Les grands textes de Karl Marx - 5: le matérialisme historique théorisé dans l'Idéologie allemande (1845)

Les grands textes de Karl Marx - 6 - L'idéologie, antagonismes de classes sociales et idées dominantes

Les grands textes de Karl Marx - 7 - Le Manifeste du Parti communiste - Les conditions du communisme se développent dans le développement du capitalisme et de la domination de la bourgeoisie

Les grands textes de Karl Marx - 8 - Qu'est-ce qu'être communiste? - Manifeste du Parti communiste (1848)

Les grands textes de Karl Marx - 9 - Sur le socialisme et le communisme utopique, Manifeste du Parti communiste

Les grands textes de Karl Marx - 10 - La lutte des classes en France - Les raisons de l'échec de la révolution de Février 1848

Les grands textes de Karl Marx - 11 - Les luttes de classe en France - les leçons de la répression du soulèvement ouvrier de juin 1848

Les grands textes de Karl Marx - 12 - l'élection de Louis Napoléon Bonaparte - Les luttes de classe en France

Les grands textes de Karl Marx - 13 - la journée révolutionnaire du 23 juin 1848 racontée dans la Neue Rheinische Zeitung

Marx et Engels: les vies extravagantes et chagrines des deux théoriciens du communisme!

Les grands textes de Karl Marx - 14 -  la journée révolutionnaire du 24 juin 1848 racontée dans la Neue Rheinische Zeitung
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6 août 2019 2 06 /08 /août /2019 05:18

Les chroniques Latines de Jean Ortiz portent un regard loin des clichés sur les luttes de libération du continent sud-américains... Toujours un oeil vif sur l'Espagne et les enjeux sous-jacents du quotidien...

 

Il finira par nous coûter plus cher, Franco, « que ese de los camiones ». Brève « de barra » (de comptoir), (brève de « tapeo »), entendue à San Sebastian. Pour le supporter de base de la Real Sociedad, « ese de los camiones », c’est Toutankhamon.

Même mort... physiquement, le dictateur n’en finit pas d’aligner les factures. Le montant du transfert de la momie, du Valle de los Caídos jusqu’au cimetière madrilène de Mingorrubio (un nom à la blondeur touchante) et de quelques aménagements sur sites coûteraient au total 51.520,96 euros, IVA (TVA) comprise.... Plus du double de la somme initialement prévue. Faut-il donc l’enterrer à mi-chemin ? Organiser des soldes géantes ? Offrir le cercueil et les restes aux dirigeants de Vox ? Sur une cheminée, cela risque d’être un peu encombrant... Dans le caveau de Mingoblond repose déjà, depuis 1988, l’impitoyable muse, Carmen Polo, l’épouse que quelques centaines d’espagnols pleurèrent.

Le cortège allait s’ébranler lors ce bon vieux Tribunal Supremo se prononça, sur recours de la famille, à l’unanimité, pour que l’exhumation du dictateur soit stoppée, et que les restes restent (répétition) au Valle de los Caídos pour éviter tout « trouble à l’ordre public » (en espagnol ancien : « les manifs antifascistes »).

Finalement, c’est l’extrême-droite et les intégristes fascistes qui tiennent la corde. Ils viennent de proposer de « faire saint » Franco, certains étant pour la canonisation, et les canons, au dictateur, ça lui parle ; d’autres seulement de le béatifier, pour qu’il reste au Valle. Le meilleur dans tout ceci, c’est que même mort, il aurait réalisé des miracles ! Il aurait sauvé un chat, Yuko ; il aurait permis à la citoyenne d’Álava, María Luisa Ferro, de gagner la somme fabuleuse de 100€ à la Loterie Nationale, il aurait redonné la santé à des malades (ici, avec Lourdes, on connaît !), mais surtout, d’après la très sérieuse extrême-droite espagnole, il aurait permis au Tribunal Suprême de trancher dans le « bon sens ».

Il a bien raison, si l’on fait l’impasse, depuis plus de trente ans, sur les politiques néolibérales menées par la droite et le PSOE, sur l’inféodation aux Etats-Unis, sur l’épuisement du modèle de « la transition », sur la crise des valeurs, sur le creusement des inégalités digne de l’ancien « défilé de Despeñaperros », sur l’impunité des crimes contre l’humanité du franquisme...

La Conférence épiscopale, quant à elle, tient à préciser qu’elle n’y est pour rien, et que l’initiative émane « d’individus ». On oublie si vite que l’Archevêque de Tolède, pendant la guerre, s’écria : « Bénis soient les canons, pourvu que dans la brèche qu’ils ouvrent, fleurisse l’Évangile ». Oui, canonisons Franco et le néo-franquisme... à coups de canons.

 

 

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6 août 2019 2 06 /08 /août /2019 05:11

Par Roland Charlionet et Luc Foulquier

 
Pour affronter les défis écologiques de notre temps, l’approche marxienne est indispensable. Les communistes s'emploient à la mettre en avant.

Selon les conceptions anthropologiques de Marx et Engels, si la nature a produit homo sapiens et homo neanderthalensis, c’est l’humanité qui a produit l’être humain d’aujourd’hui dans un chantier permanent. Nous devons assumer la responsabilité de prolonger l’hominisation biologique d’avant homo sapiens puis sociale depuis, dans un processus d’humanisation de plus en plus civilisée, porteur de sens et respectueux dans ses liens avec la nature, comme l’a montré Lucien Sève dans Commencer par les fins (La Dispute, 1999). C’est une conception dialectique du mouvement fait de rapports et de contradictions.

 

L’apport décisif d’une pensée marxienne en écologie

Marx a montré que le genre humain ne se résume pas à son espèce biologique mais qu’il édifie continûment un monde extérieur aux organismes de chaque individu (processus d’évolution de l’humanité) et que le lien entre l’homme et la nature s’enracine dans le travail et les systèmes de production. La pensée marxienne n’est pas une suite de dogmes ou de règles à appliquer. C’est une méthodologie qui nous impose de réaliser, dans chaque situation concrète, un effort d’analyse théorique et pratique.

Appliquée à l’écologie, elle peut être résumée comme suit :

• inscrire toute activité humaine dans les cycles naturels, car l’humain appartient à la nature ;

• reconnaître le double rôle de l’humain comme producteur et consommateur, lui permettant par l’inter­médiaire de son travail, de rendre la société compatible avec le renouvellement des écosystèmes ;
• analyser concrètement le métabolisme des rapports homme-nature (c’est-à-dire l’ensemble des échanges de matière et d’énergie entre la société humaine et son environnement naturel) pour déceler et combattre à chaque instant toute contradiction entre eux ;

• développer les biens communs de l’humanité en organisant efficacement leur partage et leur gestion entre et par tous les humains.

L’expérience montre que la mise en pratique de cette pensée marxienne ne va pas sans l’organisation d’une lutte de classe acharnée.

« La pensée marxienne n’est pas une suite de dogmes ou de règles à appliquer. C’est une méthodologie qui nous impose de réaliser, dans chaque situation concrète, un effort d’analyse théorique et pratique. »

 

L’usage de Marx que font les communistes pour nourrir leur perspective écologique

Depuis les années 1960, le PCF a produit beaucoup de réflexions, d’analyses et de concrétisation (dans les communes et les départements qu’il dirige) se référant à la pensée marxienne sur l’écologie (cf. l’ouvrage de Guy Biolat, Marxisme et environnement, Les éditions sociales, 1973), même si des difficultés apparaissent pour les intégrer de manière permanente et cohérente à la vie et dans les actions quotidiennes du parti. Cela va de la création de la commission « Cadre de vie, environnement, écologie » en 1969, au rapport de Pierre Juquin « Les communistes et le cadre de vie », lors du comité central de juin 1976 (le PCF est alors le premier parti à consacrer une séance de son instance dirigeante à ce thème), en passant par le traitement de l’écologie dans les textes de congrès du PCF depuis le XXIIe (1976) et dans les différents journaux quotidiens, revues et périodiques qu’il anime (notamment Avancées scientifiques et techniquesProgressistesLa Revue du projet et Cause commune). De nombreux auteurs, communistes engagés ou théoriciens marxistes, participent à ce mouvement. 

Pour aller dans le sens de l’émancipation humaine, il est nécessaire de résoudre un certain nombre de défis. Parmi les principaux, nous en relevons cinq :

  1. Celui du développement des connaissances : comment pouvons-nous utiliser nos connaissances et gérer les applications techniques potentiellement dangereuses qui en résultent, s’adapter aux transformations sociétales qui en découlent dans le respect des hommes et de la nature ?
  2. Celui des obstacles au développement humain durable. Allons-nous continuer à produire en épuisant les ressources naturelles d’un côté et en accumulant de l’autre les déchets ? Marx répondait déjà en partie à la question en utilisant le concept de métabolisme pour décrire l’économie circulaire dans toute la complexité des rapports homme/nature.
  3. Celui de la nécessaire préservation de la biosphère. Elle est notamment altérée par les pollutions massives (les résidus plastiques dans les océans, l’air pollué…) et le réchauffement climatique, qui est déjà visible, dû à l’effet de serre lié à la combustion des ressources carbonées fossiles.

« Notre conception de l’écologie est fondamentalement politique car elle n’est pas coupée des luttes sociales, environnementales, économiques et éthiques. »

  1. Celui du recul observé de la biodiversité, qui constitue un enjeu central car les êtres humains y sont pour quelque chose. Les tentatives de privatisation de ce bien commun se généralisent sous la férule du système capitaliste ainsi que, à l’inverse, la sacralisation d’une nature idéalisée qui exclut l’humain. Ces deux approches conduisent à des catastrophes humaines et environnementales.
  2. Celui de la nécessaire prévention des risques et des pollutions, qui concerne les différents domaines de l’activité productive humaine et qui touche l’ensemble des gens, en particulier les salariés des entreprises. Comme le faisait déjà remarquer Engels dans La Situation de la classe laborieuse en Angleterre au sujet des conditions de vie des ouvriers anglais, les inégalités sociales vont de pair avec les inégalités environnementales et cela se vérifie aussi aujourd’hui !


Dans tous les cas l’application des principes de la dialectique marxienne s’avère judicieuse : ne pas opposer les humains à la nature ; examiner attentivement les ruptures de métabolisme entre la société et la nature et y porter remède ; s’opposer à toute délocalisation de productions polluantes ou dangereuses, mais modifier les modes de production jusqu’à les rendre propres et sans risques en utilisant les techniques les plus modernes et l’intervention des salariés ; ne pas opposer production et consommation car l’une ne va pas sans l’autre ; s’opposer aux privatisations et marchandisations des biens communs et au contraire développer leurs domaines de partage et de gestion collective ; favoriser la convergence des luttes sociales et environnementales comme cela a été fortement le cas lors des conflits engagés par les cheminots pour sauver la SNCF de la privatisation…

Enfin, il est indispensable d’instaurer dans tous les domaines la justice sociale et la démocratie. Les biens communs de l’humanité reposent sur deux piliers indissociables : le partage de leur usage entre tous les êtres humains et la cogestion durable de ces biens par tous les citoyens. Cette conquête apparaît comme la condition indispensable pour que l’humanité puisse se développer sans aliénations ni exploitations, dans le respect des hommes et de la nature. C’est une suite de luttes, une bataille de classe. En ce sens notre conception de l’écologie est fondamentalement politique car elle n’est pas coupée des luttes sociales, environnementales, économiques et éthiques. C’est un des enseignements forts que l’on peut tirer des assises de l’écologie que le PCF organisait les 4 et 5 mai 2018.

« Les biens communs de l’humanité reposent sur deux piliers indissociables : le partage de leur usage entre tous les êtres humains et la cogestion durable de ces biens par tous les citoyens. »

Avec notre approche novatrice de l’écologie politique élaborée autour du concept d’écommunisme, nous contribuons aux actions et aux réflexions nécessaires pour dépasser le capitalisme car nous retrouvons le constat que Marx faisait il y a déjà cent quarante ans : le capitalisme exploite partout avec la même indécence les hommes et la nature. n

Roland Charlionet est chercheur à l’Institut national de la santé et de la recherche médicale. Luc Foulquier est ingénieur et chercheur en écotoxicologie. Ils sont membres de la coordination de la commission écologie du PCF.

Cause commune n°8 • novembre/décembre 2018

 

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À propos de « Cause commune »

La revue « Cause Commune » est la revue d'action politique du PCF.

Aller au-delà des apparences pour mieux comprendre et agir plus efficacement ; suivre les élaborations et les décisions du Parti communiste ; préparer des initiatives militantes efficaces : Cause commune, c'est tout cela et plus encore.

La revue donne la parole aux communistes mais aussi aux chercheurs et artistes de tous horizons. Ils font le point des débats et nous emmènent au-delà des sentiers battus de l'idéologie dominante.

Cette revue paraît tous les deux mois.

Au cours de ce mois d’août notre Blog vous propose quelques articles de « Cause Commune » parus entre novembre 2018 et août 2019.

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6 août 2019 2 06 /08 /août /2019 05:06

 

Ancien combattant de la guerre d’Espagne, Joseph Almudever est à présent l’un des rares survivants des Brigades internationales. Il fête aujourd’hui ses 100 ans.

La Tour-du-Crieu (Ariège), envoyé spécial.

Combien sont-ils encore en vie ? De tous ces combattants venus de 53 pays pour vaincre le fascisme entre 1936 et 1938, 15 000 sont morts en terre d’Espagne. « Por vuestra libertad y la nuestra ! » proclamait la devise des Brigades internationales. Quatre-vingts ans après cette guerre, peut-être Joseph Almudever est-il el ultima brigadista.

Le vieil homme habite une maison blanche construite de ses mains à La Tour-du-Crieu, aux portes de Pamiers, en Ariège. Sur les murs, des photos d’hier et d’aujourd’hui, des drapeaux républicains rouge-jaune-violet, des affiches. Quelques fragments d’une vie longue et tumultueuse. Joseph Almudever est né en 1919 à Marseille de parents espagnols. Il va à l’école en France, puis de l’autre côté des Pyrénées lorsqu’en 1931 la famille revient s’établir à Alcacer, village de son père, dans la province de Valence. « 70 % des villageois étaient illettrés. Alors, je leur faisais la lecture des journaux. » C’est ainsi que Joseph apprend la situation dans les mines d’Asturies, les grandes grèves de 1934 matées dans le sang par un certain général Franco.

L’adolescent a déjà une certitude : « Tant qu’existera le capitalisme, le monde ne sera pas humain. » Ce qui déclenche toute une vie de combat ? « La faim ! Tu sais ce que c’est la faim ? » Peu après la victoire du Frente Popular, en février 1936, il rejoint les Jeunesses socialistes unifiées, d’obédience communiste. Survient le soulèvement militaire, le 18 juillet. Joseph, 17 ans, est trop jeune pour s’engager dans les troupes républicaines. Grâce à un certificat de naissance délivré par la mairie d’Alcacer, qui lui attribue opportunément deux ans supplémentaires, il peut rejoindre le front de Teruel, en Aragon. « Au début, nous avions un fusil mais pas de balles. Alors que les franquistes disposaient de tanks, de canons. C’est pour ça qu’on a perdu la guerre. » Aujourd’hui encore, il s’énerve à la seule évocation de Léon Blum et sa politique de non-intervention : « Ils ont tué la République ! »

Le brigadiste a risqué sa vie sous l’uniforme

Le 25 mai 1938, el Chiquet (le Petit) est blessé sur le front de Teruel par un tir de mortier. Il est évacué, soigné. Huit décennies plus tard, il conserve de cette blessure trois éclats logés dans le ventre. À la sortie de l’hôpital, en juillet 1938, Joseph apprend à sa grande stupeur qu’il n’a plus sa place dans les rangs de l’armée républicaine. « Je ne comprenais pas. » Sans doute, les divisions internes du camp républicain ne sont pas étrangères à la mise à l’écart du jeune sergent.

Joseph s’engage alors dans les Brigades internationales. Ces antifascistes du monde entier savent que l’enjeu de cette guerre dépasse les frontières de l’Espagne. Combattre Franco, c’est combattre ses alliés Hitler et Mussolini. À Silla, près de Valence, Joseph appartient à la 129e brigade, composée de Français, Belges, Suisses, Algériens, tous francophones. « Mais il nous est impossible de rejoindre Teruel ! » Où se joue pourtant une bataille décisive. La 129e brigade est immobilisée. Elle sera bientôt démobilisée. Le gouvernement républicain décide, en octobre 1938, le retrait des Brigades internationales. À Barcelone, Joseph assiste, le 15 novembre, au célèbre adieu de Dolorès Ibarruri aux brigadistes. « La Pasionaria a dit qu’on ne nous oublierait jamais. »

Joseph Almudever a risqué sa vie sous l’uniforme d’une armée républicaine qui ne voulait guère de lui et il n’a pas pu combattre dans les Brigades internationales qui lui ouvraient les bras. Le paradoxe ne s’arrête pas là. Alors que les républicains doivent fuir vers la France, que la guerre d’Espagne semble terminée, el Chiquet, après un court séjour à Marseille, revient à Valence le 7 février 1939 à bord d’un navire britannique transportant de la farine. Les franquistes l’arrêtent deux mois plus tard dans le port d’Alicante. « Juste avant, j’ai jeté mon livret des Brigades à la mer, pour qu’on ne le trouve pas sur moi. » Il n’échappe pas aux geôles des nationalistes, est condamné en 1941 à trente ans de détention. Joseph est pourtant libéré l’année suivante, car les prisons franquistes sont pleines à craquer.

La situation politique actuelle rend pessimiste le vieil homme

S’il sort de prison, c’est pour entrer dans la clandestinité : il rejoint le groupe des guérilleros du Levant. Cette faction poursuit la lutte armée sur le sol espagnol, mais ses chefs sont arrêtés et fusillés. L’étau se resserre. En août 1947, le jeune républicain doit fuir à travers les Pyrénées, de nuit. Pour enfin s’établir à Pamiers.

Toute une matinée passée avec Joseph Almudever ne suffit pas pour épuiser son récit sur la tragédie espagnole. Sur cette guerre qui n’aurait jamais dû être perdue. Carmen, qu’il a épousée en Espagne, est venue le rejoindre en Ariège. Ils ont eu cinq enfants. Joseph a exercé le métier de maçon, milité au PCF et à la CGT.

Avant de rencontrer un homme de cet âge, le visiteur peut redouter des pertes de mémoire, des confusions. Son esprit agile dissipe vite les craintes. Joseph se permet même des voyages en Espagne. Mais la situation politique actuelle le rend pessimiste. Il voit dans « la division de la classe ouvrière » la première cause de la montée de l’extrême droite. Joseph pose un regard indulgent sur ses neuf petits-enfants : « Ils sont moins engagés que moi politiquement, mais ils n’ont pas eu la même vie. » Avec eux, il fêtera, aujourd’hui 30 juillet, son 100e anniversaire. Compleaños feliz, compañero Almudever !

Bruno Vincens

 

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6 août 2019 2 06 /08 /août /2019 05:00
Les grands textes de Karl Marx - 13 -  la journée révolutionnaire du 23 juin 1848 racontée dans la Neue Rheinische Zeitung

Karl Marx (1818-1883)

Marx "journaliste"

Article de la Neue Rheinische Zeitung daté du 28 juin 1848

(éditions sociales)

Le 23 juin (1848)

"La révolution de Juin offre le spectacle d'une lutte acharnée comme Paris, comme le monde n'en ont pas encore vu de pareille. De toutes les révolutions précédentes, ce sont les journées de mars à Milan qui témoignent de la lutte la plus chaude. Une population presque désarmée de 170.000 âmes battit une armée de 20 à 30.000 hommes. Mais les journées de Mars à Milan sont un jeu d'enfants à côté des journées de Juin à Paris. Ce qui distingue la révolution de Juin de toutes les révolutions précédentes, c'est l'absence de toute illusion, de tout enthousiasme.

Le peuple n'est point comme en Février sur les barricades chantant Mourir pour la patrie - les ouvriers du 23 juin luttent pour leur existence, la patrie a perdu pour eux toute signification. La Marseillaise et tous les souvenirs de la grande Révolution ont disparu. Peuple et bourgeois pressentent que la révolution dans laquelle ils entrent est plus grande que 1789 et 1793.

La révolution de Juin est la révolution du désespoir et c'est avec la colère muette, avec le sang-froid sinistre du désespoir qu'on combat pour elle; les ouvriers savent qu'ils mènent une lutte à vie et à mort, et devant la gravité terrible de cette lutte le vif esprit français lui-même se tait.

L'histoire ne nous offre que deux moments ayant quelque ressemblance avec la lutte qui est menée probablement encore en ce moment à Paris: la guerre des esclaves de Rome et l'insurrection lyonnaise de 1834. L'ancienne devise lyonnaise aussi: "Vivre en travaillant ou mourir en combattant", a de nouveau surgi, soudain, au bout de 14 ans, inscrite sur les drapeaux.

La révolution de Juin est la première qui divise vraiment la société tout entière en deux camps ennemis qui sont représentés par le Paris de l'Est et le Paris de l'Ouest. L'unanimité de la révolution de Février a disparu, cette unanimité poétique, pleine d'illusions aveuglantes, pleine de beaux mensonges et qui fut représentée si dignement par le beau phraseur traître Lamartine. Aujourd'hui, la gravité implacable de la réalité met en pièces toutes les promesses séduisantes du 25 février. Les combattants de Février luttent aujourd'hui eux-mêmes les uns contre les autres, et, ce qui n'arriva encore jamais, il n'y a plus d'indifférence, chaque homme capable de porter les armes participe vraiment à la lutte dans la barricade ou devant la barricade.   

(...)

Mais passons à la description de la lutte elle-même.

D'après nos nouvelles d'hier, force nous était de croire que les barricades avaient été disposées d'une façon assez incohérente. Les informations détaillées d'aujourd'hui font ressortir le contraire. Jamais encore les ouvrages de défense des ouvriers n'ont été exécutés avec un tel sang-froid, avec une telle méthode.

La ville était divisée en deux camps. La ligne de partage partait de l'extrémité nord-est de la ville, de Montmartre, pour descendre jusqu'à la porte Saint-Denis, de là, descendait de la rue Saint-Denis, traversait l'île de la Cité et longeait la rue Saint-Jacques, jusqu'à la barrière. Ce qui était à l'Est était occupé et retranché par les ouvriers; c'est de la partie ouest qu'attaquait la bourgeoisie et qu'elle recevait ses renforts.

De bonne heure le matin, le peuple commença en silence à élever ses barricades. Elles étaient plus hautes et plus solides que jamais. Sur la barricade à l'entrée du faubourg Saint-Antoine, flottait un énorme drapeau rouge.

Le boulevard Saint-Denis était très fortement retranché. Les barricades du boulevard, de la rue de Cléry et les maisons avoisinantes, tout à fait transformées en forteresses, constituaient un système de défense complet. C'est là, comme nous le relations hier déjà, que commença le premier combat important. Le peuple se battit avec un mépris indicible de la mort. Sur la barricade de la rue de Cléry, un fort détachement de gardes nationaux fit une attaque de flanc. La plupart des défenseurs de la barricade se retirèrent. Seuls sept hommes et deux femmes, deux jeunes et belles grisettes, restèrent à leur poste. Un des sept monte sur la barricade, le drapeau à la main. Les autres commencent le feu. La garde nationale riposte, le porte-drapeau tombe. Alors une des grisettes, une grande et belle jeune fille, vêtue avec goût, les bras nus, saisit le drapeau, franchit la barricade et marche sur la garde nationale. Le feu continue et les bourgeois de la garde nationale abattent la jeune fille comme elle arrivait près de leurs baïonnettes. Aussitôt, l'autre grisette bondit en avant, saisit le drapeau, soulève la tête de sa compagne, et, la trouvant morte, jette, furieuse, des pierres sur la garde nationale. Elle aussi tombe sous les belles des bourgeois. Le feu devient de plus en plus vif. On tire des fenêtres, de la barricade; les rangs de la garde nationale s'éclaircissent; finalement des secours arrivent et la barricade est prise d'assaut. Des sept défenseurs de la barricade, un seul encore était vivant; il fut désarmé et fait prisonnier. Ce furent les lions et loups-cerviers de la Bourse de la 2e légion qui exécutèrent ce haut fait contre sept ouvriers et deux grisettes. 

La jonction des deux corps et la prise de la barricade sont suivies d'un moment de silence anxieux. Mais il est bientôt interrompu. La courageuse garde nationale ouvre un feu de peloton bien nourri sur des masses de gens désarmés et paisibles qui occupent une partie du boulevard. Ils se dispersent épouvantés. Mais les barricades ne furent pas prises. C'est seulement lorsque Cavaignac arriva lui-même avec la ligne et la cavalerie, après un long combat et vers 3 heures seulement, que le boulevard fut pris jusqu'à la porte Saint-Martin.

Dans le faubourg Poissonnière, plusieurs barricades furent érigées et, notamment, au coin de la rue Lafayette où plusieurs maisons servaient également de forteresse aux insurgés. Un officier de la garde nationale les commandait. Le 7e régiment d'infanterie légère, la garde mobile et la garde nationale avancèrent contre eux. Le combat dura une demi-heure; finalement, les troupes eurent la victoire, mais seulement après avoir perdu près de 100 morts et blessés. Ce combat eut lieu après 3 heures de l'après-midi.

Devant le palais de justice, des barricades furent édifiées également, dans la rue de Constantine et les rues avoisinantes, ainsi que sur le pont Saint6michel où flottait le drapeau rouge. Après un combat plus long, ces barricades furent aussi prises.

Le dictateur Cavaignac posta son artillerie près du pont Notre-Dame. De là, il canonna les rues Planche-Mibray et de la Cité, et il put facilement la faire ranger en batterie contre les barricades de la rue Saint-Jacques.

Cette dernière rue était coupée par de nombreuses barricades et les maisons transformées en vraies forteresses. L'artillerie seule pouvait agir là, et Cavaignac n'hésita pas un instant à l'employer. Tout l'après-midi, retentit le grondement des canons. La mitraille balayait la rue. Le soir, à 7 heures, il ne restait plus qu'une barricade à prendre. Le nombre des morts était très grand.  

Aux abords du pont Saint-Michel et dans la rue Saint-André-des-Arts, on tira également à coups de canon. Tout à l'extrêmité nord-est de la ville, rue Château-Landon où un détachement de troupes se risqua, une barricade fut également démolie à coups de canon.

L'après-midi, le combat devint de plus en plus vif dans le faubourg nord-est. Les habitants des faubourgs de La Villette, de Pantin, etc, vinrent en aide aux insurgés. Toujours, on élève à nouveau les barricades et en très grand nombre. 

Dans la Cité, une compagnie de la garde républicaine s'était glissée entre deux barricades sous prétexte de vouloir fraterniser avec les insurgés et avait ensuite tiré. Le peuple furieux se précipita sur les traîtres et les abattit homme par homme. C'est à peine si 20 d'entre eux eurent le loisir de s'échapper.

La violence de la lutte grandissait sur tous les points. Tant qu'il fit clair, on tira à coups de canon; plus tard on se borna à la fusillade qui se poursuivit bien avant dans la nuit. Encore à 11 heures, la générale retentissait dans tout Paris, et à minuit, on échangeait encore des coups de fusil dans la direction de la Bastille. La place de la Bastille était entièrement au pouvoir des insurgés ainsi que tous ses accès. Le faubourg Saint-Antoine, le centre de leur puissance, était fortement retranché. Sur le boulevard de la rue Montmartre, jusqu'à la rue du Temple, il y avait en masse serrée de la cavalerie, de l'infanterie, de la garde nationale et de la garde mobile.

A 11 heures du soir, on comptait déjà plus de 1.000 morts et blessés.

Telle fut la première journée de la révolution de Juin, une journée sans précédant dans les annales révolutionnaires de Paris. Les ouvriers de Paris combattirent tout à fait seuls la bourgeoisie armée, contre la garde mobile, la garde républicaine réorganisée et contre les troupes de ligne de toutes les armes. Ils ont soutenu la lutte avec une bravoure sans exemple, qui n'a de pareille que la brutalité, également sans exemple, de leurs adversaires. On se prend d'indulgence pour un Hüser, un Radetzky, un Windischgraetz, lorsqu'on voit comment la bourgeoisie de Paris s'adonne, avec un véritable enthousiasme, aux tueries arrangées par Cavaignac.

Dans la nuit du 23 au 24, la Société des droits de l'homme, qui avait été reconstituée le 11 juin, décida d'utiliser l'insurrection au profit du Drapeau rouge et, par conséquent, d'y participer".

Karl Marx, Neue Rheinische Zeitung - 28 juin 1848

Lire aussi:

Les grands textes de Karl Marx - 1 : la critique des libertés formelles de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen, dont le pivot est le droit de propriété - une critique des déterminants bourgeois de la Révolution Française

Les grands textes de Karl Marx - 2 - La religion comme opium du peuple

Les grands textes de Karl Marx - 3: l'aliénation produite par la propriété privée et le capitalisme dans les Manuscrits de 1844

Les grands textes de Marx - 4: Les pouvoirs de l'argent (Ebauche d'une critique de l'économie politique, 1844)

Les grands textes de Karl Marx - 5: le matérialisme historique théorisé dans l'Idéologie allemande (1845)

Les grands textes de Karl Marx - 6 - L'idéologie, antagonismes de classes sociales et idées dominantes

Les grands textes de Karl Marx - 7 - Le Manifeste du Parti communiste - Les conditions du communisme se développent dans le développement du capitalisme et de la domination de la bourgeoisie

Les grands textes de Karl Marx - 8 - Qu'est-ce qu'être communiste? - Manifeste du Parti communiste (1848)

Les grands textes de Karl Marx - 9 - Sur le socialisme et le communisme utopique, Manifeste du Parti communiste

Les grands textes de Karl Marx - 10 - La lutte des classes en France - Les raisons de l'échec de la révolution de Février 1848

Les grands textes de Karl Marx - 11 - Les luttes de classe en France - les leçons de la répression du soulèvement ouvrier de juin 1848

Les grands textes de Karl Marx - 12 - l'élection de Louis Napoléon Bonaparte - Les luttes de classe en France

Marx et Engels: les vies extravagantes et chagrines des deux théoriciens du communisme!

Les grands textes de Karl Marx - 13 -  la journée révolutionnaire du 23 juin 1848 racontée dans la Neue Rheinische Zeitung
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