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29 mai 2021 6 29 /05 /mai /2021 17:42
Eisenstein rencontre Josef von Sternberg et Marlene Dietrich sur le plateau de Morocco

Eisenstein rencontre Josef von Sternberg et Marlene Dietrich sur le plateau de Morocco

S.J. Eisenstein : Perspective Nevski

Les années 1930. Le long voyage, les films manqués et le chef-d’œuvre antinazi.

 

Lire aussi, le premier volet de la chronique d'Andréa Lauro sur Eisenstein: S.M. Eisenstein : de Sergueï Mikhaïlovitch à Sa Majesté: Les années 1920 - Un nouveau langage cinématographique (la chronique cinéma d'Andréa Lauro)

Dans les années 1920, plus de 800 films ont été réalisés en Union soviétique. Tous n’étaient évidemment pas signés par Kulešov, Eisenstein, Pudovkin ou Dovženko, la production comprenait également de nombreux films de divertissement, sans aucune déviation idéologique dommageable, des films à succès.

Le plus connu, Medvezhya svadba (Le Mariage de l’ours, 1925) réalisé par Vladimir Gardin et Konstantin Eggert, eut plus du double du public de Bronenosec Potëmkin (Le Cuirassé Potemkine).

De cette riche production il reste peu, probablement la meilleure partie comme les films de Protazanov ou le comique Poceluj Meri Pikford (Le baiser de Mary Pickford, 1926) avec la "fiancée de l’Amérique" (en voyage en URSS avec son mari Douglas Fairbanks) protagoniste avec l’acteur russe le plus célèbre de l’époque, Igor Vladimirovitch Iliinsky, dirigés par Sergei Komarov.

Entre les films d'"agitation", de propagande, de divertissement, le "septième art" en Union Soviétique était en grande expansion.

Une preuve? 

À la fin de 1928 en URSS, le nombre de cinémas en URSS était de 7331 (2389 en campagne) avec 200 millions de spectateurs par an, alors qu’avant la Révolution d’Octobre, il n’y en avait que 1412 dont 133 en campagne (donnée de 1914).

Un élément si important qu’il a été inclus dans le Premier Plan quinquennal voulu par Staline.

En effet, le cinéma aussi devait cesser toute dépendance vis-à-vis des pays capitalistes, jusqu’alors le film était produit par la firme allemande Agfa, les caméras par la firme française Debrie, et surtout le son devait être développé.

En 1928, le "Manifeste sur l’asynchronisme", signé par Eisenstein, Aleksandrov et Pudovkin, avait déjà mis au centre le nouveau progrès technique en soulignant le fait qu’il n’était pas correctement exploité, en introduisant des concepts de contrepoint et de montage sonore. Selon la théorie des trois cinéastes soviétiques "Le son devra être utilisé dans le sens du contrepoint, c’est-à-dire non en synchronisation avec les images, car le synchronisme produit une dangereuse illusion de vérité, réduisant ainsi le cinéma à un cinéma-attraction, à une simple reproduction naturaliste du réel". Eisenstein, Aleksandrov et Tissė sont allés à l’étranger pour cela: l’objectif déclaré était d’étudier la technique du cinéma sonore.

Ils séjournent d’abord à Berlin où ils travaillent à la version allemande de "L’Ancien et le Nouveau", puis s’installent avec les réalisateurs d’avant-garde Hans Richter (Rhythmus 21, Rhythmus 23) et Walter Ruttmann (Berlin, symphonie d’une grande ville), en Suisse au château de La Sarraz, près de Lausanne, où se déroule du 2 au 6 septembre 1929 le Congress International du Cinéma Indépendant.

À l’événement, accueilli par la propriétaire Hélène de Mandrot, ont participé des artistes du monde entier : les Italiens Enrico Prampolini, Alberto Sartoris, le Japonais Hiroshi Hijo, les Anglais Ivor Montagu, Jack Icaacs, les Français Alberto Cavalcanti, Jean-Georges Auriol, Léon Moussinac.

Léon Moussinac - De la longue période française, le réalisateur rappela avec une affection et une admiration infinies le "camarade Léon", Léon Moussinac (Migennes, 19 janvier 1890 - Paris, 10 mars 1964) critique de cinéma, membre très actif du Parti communiste français depuis 1924. En 1927, il avait séjourné en URSS et, après avoir rencontré l’auteur du "Cuirassé Potëmkin", il importa en France le cinéma révolutionnaire et publia les volumes "Le cinéma soviétique" et l’essai "Sergueï Mikhaïlovitch Eisenstein". Son militantisme communiste le conduit, en avril 1940, à l’arrestation. Il fut interné dans le camp de Gurs, puis transféré dans la prison militaire de Nontron, mais, comme le rappela son ami réalisateur, "les souffrances indicibles n’ont pas affaibli sa fibre de révolutionnaire"...

Léon Moussinac - De la longue période française, le réalisateur rappela avec une affection et une admiration infinies le "camarade Léon", Léon Moussinac (Migennes, 19 janvier 1890 - Paris, 10 mars 1964) critique de cinéma, membre très actif du Parti communiste français depuis 1924. En 1927, il avait séjourné en URSS et, après avoir rencontré l’auteur du "Cuirassé Potëmkin", il importa en France le cinéma révolutionnaire et publia les volumes "Le cinéma soviétique" et l’essai "Sergueï Mikhaïlovitch Eisenstein". Son militantisme communiste le conduit, en avril 1940, à l’arrestation. Il fut interné dans le camp de Gurs, puis transféré dans la prison militaire de Nontron, mais, comme le rappela son ami réalisateur, "les souffrances indicibles n’ont pas affaibli sa fibre de révolutionnaire"...

Staroye i novoye du même Eisenstein, Un chien andalou de Luis Buñuel, La passion de Jeanne d’Arc de Carl Theodor Dreyer, les films abstraits de Cavalcanti et Man Ray, les expérimentations de Richter, Ruttmann, ainsi que Branding le dernier film de Joris Ivens. Mais les objectifs du premier congrès du cinéma indépendant n’étaient pas clairs. Les réalisateurs soviétiques expliquent que "dans un système d’états capitalistes, le cinéma indépendant est une fiction comme la presse indépendante", ce qui n’a pas plu à la délégation italienne conduite par le peintre et scénographe Enrico Prampolini (Modène, 20 avril 1894 - Rome, 17 juin 1956) futuriste lié au fascisme (auteur en 1917 de la scénographie de Thaïs, réalisé par Anton Giulio Bragaglia), homme dont Eisenstein se souvint comme "figure rectiligne minuscule et désagréable". Lors de la rédaction de la résolution finale du "Congrès", les esprits se sont échauffés. Un document, introuvable même dans les revues de l’époque, affirmait : "l’art apolitique n’existe pas".

Durant ces journées, Eisenstein, Montagu et Moussinac tournent également un court-métrage intitulé The Storming of La Sarraz (L’Assaut de La Sarraz) qui avait pour sujet la libération du cinéma de ses chaînes commerciales, grâce à l’action des cinéastes indépendants. Le film, malheureusement perdu dans une archive non précisée de Berlin, a été écrit par Richter. Le réalisateur soviétique, en plus de diriger l’action, joue Don Quichotte.

Après le "Congrès" de Lausanne, les cinéastes soviétiques repartent pour Zurich, où un producteur nommé Wecler propose à Eisenstein un film sur le contrôle des naissances. La réponse de l’auteur de Le Cuirassé Potemkine fut ironiquement lapidaire : "Écoutez, si vous me laissez faire avorter tout Zurich, cela peut commencer à m’intéresser. Mais l’histoire d’une femme, non". Le film est finalement réalisé par Tissė et sort sous le titre Gore i radost' zhenshchiny (Misères de femmes, joies de femmes).

Puis c'est le retour à Berlin, où Eisenstein eut l’occasion de se confronter à la politique, au cinéma, au théâtre avec Ernst Toller, Erwin Piscator, George Wilhelm Pabst, Albert Einstein, Emil Jannings (qui lui proposa de réaliser un second Potëmkin avec lui comme protagoniste) Bertold Brecht et Luigi Pirandello.

Le dramaturge et le réalisateur se rencontrèrent dans un petit restaurant italien dans le quartier de Charlottenburg, en goûtant l’excellent "sabaglione", comme rappelé dans ses "Mémoires". L’écrivain sicilien admirait Eisenstein et en 1929 il avait confié à son amie Marta Abba qu’il aimerait l’inviter en Italie pour réaliser un film tiré de son "Gioca Pietro!". Mais sous Mussolini, un communiste soviétique ne pouvait pas mettre les pieds dans le pays et cet écrit, né pour le cinéma, devint des années plus tard "Acciaio", le seul film à sujet du réalisateur allemand Walter Ruttmann. Le poète rêvait de voir aussi sur le grand écran "Six personnages en quête d’acteur". C’est pourquoi il a écrit à Carl Laemmle de Universal et en a parlé avec Eisenstein. Les deux discutèrent de musique, de cinéma, de théâtre, d’art, mais finalement ils ne réalisèrent pas le film. La major, initialement intéressée par le projet, abandonna l’idée.

Le voyage de Eisenstein, Aleksandrov et Tissė se poursuit à Paris avec des entretiens avec Filippo Marinetti, Jean Cocteau, Blaise Cendrars, Man Ray, Abel Gance, Robert Desnos (poète interné comme Kurt Gerron dans le camp de Theresienstadt), Fernand Léger et James Joyce pour qui le réalisateur nourrissait une admiration démesurée au point de vouloir porter sur le grand écran son "Ulysse" ("Ulysse"). Film qui ne restera qu’une idée puisque Joyce, comme Freud, était tabou en Union Soviétique...

Les trois cinéastes se rendent ensuite à Londres, où Eisenstein joue pour son ami Hans Richter le rôle d’un policier dans le film Everyday (1929) et donne une conférence à la London Film Society. Puis en Belgique où il rencontra le peintre James Ensor et les mineurs de Liège. Il gagne les Pays-Bas pour étudier les tableaux de Van Gogh (à la Haye, son taxi risqua d’écraser la Reine Wilhelmine qui se promenait tranquillement) et de rencontrer le jeune documentaire Joris Ivens. Puis de nouveau en France, conduit par Jean Mitry et Léon Moussinac, puis de nouveau à Berlin et Londres.

Les trois Soviétiques sont partis en août 1929 avec seulement 25 dollars chacun, mais grâce à leur renommée ils n’ont pas de difficultés à pourvoir à leurs besoins. Alors qu’Eisenstein se trouvait encore à Londres, par exemple, un joaillier parisien engagea Aleksandrov et Tissė pour réaliser un film dédié à sa femme Mara Griy, une chanteuse lettone émigrée. Seule condition : le film devait être signé par "Sa Majesté". Eisenstein se contente d’un léger conseil, mais il est co-réalisateur pour le film "Romance Sentimentale". Dans le court-métrage expérimental (environ 20 minutes), le montage alterne d’abord des images "violentes", puis plus calmes, mais le protagoniste est la musique composée par Alexis Arkhangelsky et chantée par Griy elle-même.

À Paris, le 17 février 1930, la première française du dernier long-métrage du réalisateur, "L’Ancien et le Nouveau", est programmée à la Sorbonne. Tout était prêt. Eisenstein devait seulement faire un bref discours de présentation. Mais le climat à l’égard de l’Union soviétique était très lourd, au point que même un documentaire sur une performance de gymnastique a été qualifié de "propagande soviétique" et interdit parce qu’il montrait des athlètes souriants. En somme, on ne pouvait pas montrer qu’en URSS il y avait aussi le bonheur. Dans ce climat, Staroye i novoye n’avait pas encore obtenu de visa de censure, mais l’Université, cette Université, jouissait d’une sorte d’extraterritorialité et la projection, si privée, ne nécessitait aucune autorisation. Cependant, des milliers d’invitations furent préparées et envahirent la ville. Un de ces billets, imprimés sur papier bleu, finit sur le bureau de Jean Chiappe, tristement préfet de police de Paris depuis 1927 qui, comme première mesure, avait supprimé toute manifestation communiste. La projection devint ainsi publique.

Jean Chiappe, préfet (anticommuniste) de Paris

Jean Chiappe, préfet (anticommuniste) de Paris

La soirée, attendue avec impatience, était prévue dans la salle Richelieu de la Sorbonne. Une élégante pièce, avec une statue du cardinal, capable d’accueillir un millier de personnes. Il s'en présenta plus de trois mille.  Arriva l’interdiction des autorités. Chiappe s’assit près du projecteur placé aux pieds de la statue. Autour de lui, quelques policiers.

D’autres s’installèrent dans la cour et autour de la salle. Craignant des troubles et des affrontements, il y avait beaucoup de communistes que la police avait hâte d’arrêter, les organisateurs - l'habituel Léon Moussinac et le psychanalyste et professeur de la Sorbonne René Allendy - annulèrent la projection. Et ils ont invité le réalisateur à prolonger son discours, qui est devenu une véritable conférence. Eisenstein n’était pas un grand orateur, mais il parla pendant trois heures. Il illustra ses théories sur le montage et le "cinéma intellectuel" et irrita Chiappe, qui dut subir la gifle sans pouvoir intervenir. Ironie d'Eisenstein qui frappa la presse. Le lendemain, le quotidien bourgeois "Le Matin" écrivit : "Ne craignez pas les bolcheviks qui ont le couteau entre les dents, mais ceux qui ont le sourire sur les lèvres!".

Mais l’événement à la Sorbonne était important pour une autre raison. Durant la conférence, Eisenstein affirme pour la première fois en public de vouloir réaliser un film tiré d’un livre particulièrement important pour les communistes : "Le Capital" de Karl Marx.

Karl Marx

Karl Marx

L’idée est venue à Eisenstein après le tournage d’Octobre.

Dans un petit cahier daté du 12 octobre 1927 (retrouvé en 1976), le réalisateur note : "Décidé de filmer "Le Capital" sur un scénario de Karl Marx". Personne n’était au courant de son projet le plus ambitieux, ni ses collaborateurs, ni Staline ou les bureaucrates qui l’avaient souvent entravé et censuré. Le projet devient plus concret après la rencontre parisienne avec James Joyce. Le raisonnement du réalisateur était fascinant : "Si à partir d’un bol de soupe Joyce arrive à toute la flotte britannique, pourquoi un cinéma vraiment marxiste ne pourrait-il pas, en s’appuyant sur le détail d’un bas de soie, englober tout un tissu social?". Du concret à l’abstrait, de l’objet commun à la généralisation conceptuelle. Un exploit presque impossible, mais Eisenstein avait le cinéma pour y parvenir, il suffit de penser au montage du "Cuirassé Potëmkin" ou à celui du même "Octobre". Eisenstein en parla à la Sorbonne, mais le projet, aussi fascinant fût-il, resta dans le tiroir.

Eisenstein avait également entamé des négociations avec Hollywood, mais l’appel américain tardait à arriver. Pendant ce temps, au risque d’être expulsé de Paris pour propagande communiste, il continuait à étudier des sujets possibles pour les producteurs occidentaux en général et pour ceux des États-Unis en particulier. Avec Ivor Montagu, il travailla à la transposition cinématographique de Le chemin de Buenos-Aires un reportage d’Albert Londres sur le colonialisme et l’esclavage (Les aventures de Londres inspirèrent le dessinateur belge Hergé pour la réalisation du célèbre Tintin), mais le projet se termina après une première manifestation d'intérêt sans suite d’une maison de production française.

Le réalisateur s’intéressa donc à une biographie de Sir Basil Zaharoff, marchand d’armes, parmi les hommes les plus riches de son temps, en proposant l’idée à la fois aux producteurs français et anglais, et aux producteurs américains, mais là encore, il n’en fit rien. Toujours pour les Américains, Eisenstein envisagea de tirer parti au cinéma d’une comédie de George Bernard Shaw, proposée par le même auteur, intitulée Arms and the man, mais ne réussit pas à susciter l’intérêt.

Au début des années 1930, arriva par télégramme à l’invitation attendue pour Hollywood, suivi de la visite à Paris de Jesse Louis Lasky (San Francisco, 13 septembre 1880 - Beverly Hills, 13 janvier 1958), parmi les pionniers du cinéma américain, fondateur avec Adolph Zukor de Paramount Pictures. Eisenstein signe un contrat de six mois à 900 dollars par semaine, ainsi que l’engagement des camarades Aleksandrov et Tissė.

De la longue période française, le réalisateur rappela avec une affection et une admiration infinies le "camarade Léon", Léon Moussinac (Migennes, 19 janvier 1890 - Paris, 10 mars 1964) critique de cinéma, membre très actif du Parti communiste français depuis 1924. En 1927, il avait séjourné en URSS et, après avoir rencontré l’auteur du "Cuirassé Potëmkin", il importa en France le cinéma révolutionnaire et publia les volumes "Le cinéma soviétique" et l’essai "Sergueï Mikhaïlovitch Eisenstein". Son militantisme communiste le conduit, en avril 1940, à l’arrestation. Il fut interné dans le camp de Gurs, puis transféré dans la prison militaire de Nontron, mais, comme le rappela son ami réalisateur, "les souffrances indicibles n’ont pas affaibli sa fibre de révolutionnaire, de communiste, de patriote...". Il survécut Ses écrits sont conservés au département des arts du spectacle de la Bibliothèque nationale de France.

Revenant à l’engagement américain, les trois Soviétiques traversèrent l’Océan à bord du transatlantique "Europe" et arrivèrent aux États-Unis le 12 mai 1930. Le voyage des cinéastes fut critiqué aussi bien en URSS que dans les milieux conservateurs d’Hollywood qui ne comprennent pas un tel emballement pour des communistes.

Comme en Europe, l’agenda fut chargé entre voyages, rencontres, conférences. Eisenstein a parlé à l’Université Columbia à New York, à Harvard à Boston, à Yale à New Haven, ainsi qu’aux universités de Chicago et de Californie (les trois sont les premiers Soviétiques à accéder à cet État), devant les Afro-Américains de la Nouvelle-Orléans, à une convention des distributeurs de Paramount à Atlantic City et à Hollywood.

Mary Pickford

Mary Pickford

Jesse Louis Lasky

Jesse Louis Lasky

La série de rencontres est aussi très dense. Eisenstein dîne dans un restaurant de New York avec Douglas Fairbanks et Mary Pickford ; dans les studios Paramount il travaille avec Jackie Coogan désormais adolescent ; il rencontre Josef von Sternberg et Marlene Dietrich sur le plateau de Morocco. Avec Luis Buñuel, il parle du préfet Chiappe qui, sollicité par la droite et par des associations patriotiques et religieuses, avait également bloqué la distribution de L’âge d’or. Et encore King Vidor, Berthold et Salka Viertel. À Boston, on lui présenta même Rin Tin Tin.

Mais le réalisateur se lie en particulier avec deux autres cinéastes de génie : Walt Disney et Charlie Chaplin. Pour le premier, il nourrissait une grande admiration, notamment parce qu’il reconnaissait au premier "Mickey Mouse" une critique ironique de la société standardisée. Il en devint un grand ami. Avec le second, entre deux défis au tennis, il parla à plusieurs reprises du cinéma, mais surtout du communisme et de l’Union soviétique. Le réalisateur anglais se souvint dans son autobiographie : " Un jour, en discutant avec lui du communisme, je lui demandai s’il pensait que le prolétariat instruit était égal, mentalement, à l’aristocratique fort de la tradition culturelle des générations qui l’avaient précédé. Il me parut surpris de mon ignorance. Eisenstein, issu d’une famille de la bourgeoisie russe, dit : « Donnez-leur la possibilité de s’instruire et la fertilité célébral des masses sera comme un nouvel humus très riche". Aux deux amis, le cinéaste soviétique dédia deux livres intitulés simplement "Walt Disney" et "Charlie Chaplin".

Parallèlement, des idées pour de nouveaux sujets se développaient. À Paris, Eisenstein et Lasky avaient déjà discuté, sans succès, de certaines œuvres de Zola et de Menschen im Hotel (Grand Hotel) de l’autrichienne Vicki Baum (puis porté sur grand écran en 1932 avec Greta Garbo comme protagoniste). Aux États-Unis, le premier projet proposé au réalisateur fut la transposition du roman The War of the Words (La guerre des mondes) de H. C. Welles, mais l’idée, qui fit des années après la fortune d’Orson Welles, fut bientôt abandonnée faute de fonds.

Par contrat, Eisenstein pouvait également présenter des idées pour de nouveaux films. Il conçut ainsi le film Glass House inspiré du roman despotique My d’Evgenij Ivanovitch Zamjatin, mais l’absence d’une histoire capable d’exprimer cette idée fit capoter le projet. Il retient donc avec Aleksandrov et Montagu un sujet tiré de L’or de Blaise Cendrars intitulé Sutter’s Gold : une grande démystification du capitalisme américain. Mais les producteurs se demandaient : "Pouvons-nous permettre que des bolcheviks abordent le thème de l’or ?" et la réponse fut négative. Le Museum of Modern Art de New York conserve jalousement le plan de travail détaillé de cette œuvre manquée.

Un autre livre retint cependant l’attention du réalisateur, c’était An American tragedy de Theodore Dreiser. Publié en 1925, il représente une fresque de la société américaine du début du XXème siècle. Plusieurs versions du scénario, approuvées par le même auteur, sont présentées à la Paramount, mais la critique de la société américaine est rejetée par la major qui confie le même film, réécrit et sans le partage de Dreiser, à Josef von Sternberg.

Le 23 octobre 1930, Paramount annonce la résiliation du contrat avec Eisenstein. Le réalisateur a souligné : "L’opposition (à son travail) était constituée par les banquiers qui représentaient les intérêts des banques [...] et ne visaient que la sécurité, sans excès ni complications, et préféraient presque toujours produire les types de films qui avaient déjà réussi". À cela s’ajoute l’impréparation d’Eisenstein, d’Aleksandrov et de Tissė par rapport aux nouvelles techniques, qui s’étaient rendus à l’étranger pour les étudier, et la campagne anticommuniste naissante menée par le major Frank Pease et des organisations fascistes.

Le réalisateur et ses collaborateurs n’avaient plus d'autre choix que le retour en URSS. Cependant, Eisenstein a eu le temps d’obtenir de Sam H. Harris les droits de la comédie théâtrale Once in a Lifetime de Moss Hart et George S. Kaufman, avec l’idée de la mettre en scène à Moscou. Tout était prêt. Le voyage de retour ferait étape au Japon pour la réalisation d’un film sur le Pays du Soleil Levant.

Ichikawa Sadanji II

Ichikawa Sadanji II

Partie de tennis entre Eisenstein et Charlie Chaplin

Partie de tennis entre Eisenstein et Charlie Chaplin

La culture orientale avait toujours eu une grande influence sur le cinéaste. Tous les croquis, dessins, travaux graphiques, essais, scénarios montraient un trait capable de faire écho aux idéogrammes. Certaines de ses théories sur le montage, comme on le sait, sont issues de l’écriture chinoise et japonaise. Et après, il y avait aussi la passion pour le Kabuki, la forme théâtrale née à Kyoto en 1603, dont le nom est composé de trois idéogrammes “ka” (chant), “bu” (danse) e “ki” (habilité) et dérive du verbe “kabuku” c'est-à-direêtre dehors de l'ordinaire”. Eisenstein, qui l’était vraiment, admirait la "forme d’ensemble" de ces représentations qu’il vit en direct en 1928 lors d’un voyage à Moscou et à Leningrad du célèbre acteur kabuki Ichikawa Sadanji II.

Mais Eisenstein ne réalisa aucun film sur le Japon, changea d’itinéraire et s’installa au Mexique. En effet, le 24 novembre 1930, Eisenstein signe avec Mary Craig Sinclair, épouse de l’écrivain progressiste Upton Sinclair, un contrat qui lui assure 25 000 dollars "pour la réalisation d’un film appelé pour l’instant génériquement film mexicain".

La première nuit mexicaine, Eisenstein, Aleksandrov et Tissė la passent cependant en prison. L’anticommunisme "made in USA" les avait pratiquement présentés comme des "terroristes" et ce n’était pas une bonne carte de visite, même pour le social-démocrate Mexique. Albert Einstein et Charlie Chaplin, suivis par d’autres, se mobilisèrent par télégrammes et appels à la libération. Le réalisateur soviétique put ainsi commencer, même en Amérique centrale, son activité entre mondanité, politique et cinéma.

Il rencontre Diego Rivera, Frida Kahlo, Tina Modotti, David Alfaro Siqueiros, José Clemente Orozco. Il s’est rapproché de la culture mexicaine en lisant "The Golden Bough : A Study in Comparative Religion" de l’anthropologue James Frazer et "Idols behind altaros" de la journaliste Anita Brenner, volume enrichi par les photos de Tina Modotti. Il se passionne pour les dessins érotiques du lieu qu’il commence à reproduire.

Tina Modotti

Tina Modotti

S.J. Eisenstein (2): Perspective Nevski - Les années 1930. Le long voyage, les films manqués et le chef-d’œuvre antinazi - la chronique cinéma d'Andréa Lauro

Dans ses voyages mexicains, Eisenstein a été dirigé d’abord par Austin Aragon-Leiva, un ethnologue et spécialiste de l’art mexicain, puis par Jorge Palomino Cañedo, un jeune historien heureusement marié, que le réalisateur avait rencontré à Mexico quand il lui a été présenté par Diego Rivera et Frida Kahlo. Palomino a été un guide pour le réalisateur dans son séjour à Guanajuato, pendant que le Soviétique était à la recherche des lieux où tourner le "film mexicain". Une intense amitié naît entre les deux hommes, comme en témoigne une lettre que le soviétique envoie à son amie et confidente Pera Attacheva, et un échange épistolaire entre les deux hommes, y compris des dessins homoérotiques. Cet élément alimente les rumeurs sur l’homosexualité d’Eisenstein, jamais admise publiquement et peut-être jamais consommée.

Cependant, sur le sujet, une vaste littérature se développa et se développe encore : des voix qui le voyaient lié à son ami Grigori Vassili Alexandre aux nombreuses images sensuelles de ses films (des marins du Potëmkin, à l'écrémage de "L’Ancien et le Nouveau"), jusqu’à l’essai "Eisenstein" de Dominique Fernandez. Le cinéma a également abordé le sujet. Selon le réalisateur gallois Peter Greenaway, Eisenstein a découvert qu’il était gay au Mexique et, partant de cette conviction, avec son style provocateur et sensuel, Greenaway a réalisé en 2015 le film Eisenstein au Guanajuato (Que viva Eisenstein!), première partie d’une trilogie, avec Elmer Bäck dans le rôle du réalisateur et Luis Alberti dans celui de Palomino Cañedo. Le court-métrage Sergei/sir Gay (2017) réalisé par Mark Rappaport est également intéressant.

Ce qui est certain, c’est que l’homosexualité, présumée ou réelle, n’était pas appréciée en URSS et Eisenstein, peut-être pour faire taire les rumeurs, rentré chez lui en 1934, épousa Pera Attacheva (1900 - Moscou, 24 septembre 1965). Des voix et quelques certitudes, au point que selon Marie Seton, la biographe officielle d’Eisenstein, l’homme mourut vierge comme un célèbre poète, Giacomo Leopardi.

De retour au cinéma, Eisenstein est tombé amoureux, peut-être pas par hasard, du pays d’Amérique centrale et, dans ce climat culturel, a pensé à une "Synthèse retentissante de l’histoire du Mexique le long de l’axe d’un thème progressiste et libertaire, traversé violemment par une dominante érotique et religieuse".

Le film, d’une durée prévue de deux heures, devait comprendre un prologue, quatre épisodes titrés Sandunga, Maguey, Fiesta, Soldatera et un épilogue. Tous joués par des acteurs non professionnels.

Dans le prologue, situé dans le Yucatan, les images d’anciennes cérémonies mortuaires contrastent avec celles de l’érotisme vital d’un couple d’amants qui se balancent sensuellement sur le hamac. En Sandunga, la région de Tehuantepec est fortement contaminée par le colonialisme espagnol et la reprise de l’ancienne tradition folklorique devient une expression de la lutte des classes. Dans Maguey est raconté le thème du travail, l’extraction du jus de la plante maguey, comme centre de la révolte des peones contre les haciendados (les propriétaires terriens). Les rebelles sont vaincus et enterrés vivants. Seule la tête reste dehors avant d’être piétinée par un troupeau de chevaux. Un homme est tué sous les yeux impuissants de sa bien-aimée, victime de violence charnelle de la part d’un riche propriétaire terrien. A Fiesta, une procession de moines pénitents entre de grands crânes et la crucifixion du Christ parmi les voleurs sur le Calvaire, évoquent le sacrifice du peuple mexicain opprimé par un pouvoir tyrannique. Dans l’épilogue, qui marque la fin de la classe dominante, les gens retirent leurs masques mortuaires et montrent leurs visages souriants.

Avec Tissė, Eisenstein a tourné 160 bobines, plus de 70 000 mètres de film, pour un total de 40 heures de projection. Un parcours fascinant de luttes et de résistances dans l’histoire du Mexique, de la domination espagnole à la Révolution de Pancho Villa et Emiliano Zapata, mais ce film n’a jamais vu le jour. Le réalisateur ne réussit pas à tourner l’épisode Soldatera, qui raconterait les exploits d’un personnage féminin pendant la guerre civile mexicaine, et surtout il ne put monter Que viva México!.

Raison ? Plus d’une. D’abord les désaccords avec les Sinclair et avec H. Kimbrough, beau-frère de l’écrivain et directeur de production, qui n’aimait pas sa prétendue homosexualité. Le couple "progressiste" ne savait rien des coûts du cinéma (en peu de temps les dépenses avaient augmenté à 53 000 dollars, plus du double par rapport à l’accord initial) et Eisenstein, avec une équipe réduite, avait surestimé l’organisation mexicaine (à Mexico, il n’y avait pas de laboratoire de développement pour vérifier les mètres de film filmés quotidiennement) et tout le tournage était expédié à Los Angeles.

Mais une fois de plus, c’est la politique qui a tourmenté Eisenstein et l’a empêché de terminer Que viva México. Trois attaques subies par le cinéaste soviétique. La première venue de Upton Sinclair qui, bien qu’il soit considéré comme un progressiste aux États-Unis, demande expressément un film "apolitique", ne partageant pas la lutte radicale que le projet du film exprimait. La deuxième attaque provient de la censure mexicaine qui, se référant à l’épisode Maguey, prononça "il n’y a pas lieu d’insister sur l’antagonisme entre deux couches de la même collectivité nationale". La troisième attaque, la plus violente, venait de l’URSS. Les libertés de l’artiste n’étant plus tolérées, un financement capable de terminer le film fut refusé. Mais il y eut plus. Staline lui-même envoya le 21 novembre 1931 un télégramme à Sinclair pour discréditer le réalisateur : " Eisenstein perdit la confiance de ses camarades dans l’Union soviétique. STOP. Il est considéré comme un déserteur qui a rompu avec son pays. STOP. Je crains que les gens ici perdront bientôt intérêt pour lui. STOP. Je suis vraiment désolé, mais toutes ces affirmations sont des réalités. STOP. Je vous souhaite bien-être et la réalisation de votre plan pour nous rendre visite. STOP. Salutations".

Entre l’automne et l’hiver 1931, les relations entre Eisenstein et Sinclair deviennent impossibles et, à la mi-janvier 1932, peu avant le tournage de Soldatera, le travail est interrompu.

Le réalisateur, malgré tout, espérait pouvoir monter le tournage en URSS, mais Sinclair, qui avait initialement promis au cinéaste de lui envoyer les bobines, en vertu du contrat qui privait le réalisateur de tout droit sur l’œuvre, ne tint pas sa promesse. Comme si cela ne suffisait pas, pour financer sa campagne aux primaires du Parti démocrate pour le poste de gouverneur de la Californie, il vendit une grande partie du film à Sol Lesser, modeste réalisateur spécialisé dans les films d’aventure et dans la série de Tarzan. De ce matériau sont sortis Thunder Over Mexico (1933) avec des images principalement tirées de l’épisode Maguey, du prologue et de l’épilogue, et deux courts-métrages intitulés Eisentein au Mexique. En 1939, Marie Seton, déjà citée, réussit à trouver 5000 mètres de négatif et, réunissant des pièces des films déjà en circulation, réalise un nouveau film d’environ une heure intitulé Time in the Sun, fait avec une certaine affection pour le réalisateur, mais avec un montage purement narratif. La déchirure a continué. La société Bell & Howell acheta du matériel à Sinclair pour en tirer cinq documentaires didactiques, parfois regroupés sous le titre Mexican Sumphony. Eisenstein commenta : "Ce qu’ils ont fait, comme montage, est déchirant". Mais l’odyssée de Que viva México! continua. En 1955, Jay Leyda, critique américain passionné de cinéma soviétique, découvrit d’autres négatifs déposés à la cinémathèque du Museum of Modern Art de New York et, à juste titre, choisit de ne pas faire d’interventions personnelles, Mais il se limite à relier huit mille mètres de film sous le titre Eisenstein Mexican Film, Episodes for Study mettant en lumière la méthode de travail du réalisateur. Pour défendre Eisenstein et son film mexicain, un comité international est également né, mais le matériel tourné n’est arrivé en URSS qu’en 1970, après avoir été pendant des années "gardé" au Museum of Modern Art de New York. De ce film, l’ami Aleksandrov, qui avait participé au projet initial, réalisa Que Viva Mexico! - Da Zdravstvuyet Meksika! (1976) dans lequel il explique lui-même les vicissitudes du film. La version la plus connue et peut-être plus fidèle de l’œuvre, mais le Que viva México! pensé et tourné par Eisenstein.

Eisenstein, qui ne put jamais mettre la main sur son Que viva México! , pour beaucoup son meilleur film, fut contraint de rentrer en URSS. Après un arrêt forcé de six semaines dans la ville frontalière mexicaine de Nuevo Laredo (ville où Ed Wood a fait son premier film) le 14 mars 1932, il rentre aux États-Unis. Un mois plus tard, il embarque seul sur le paquebot transatlantique Europe pour Brême, puis rejoint l’Union soviétique par voie terrestre. Le séjour à l’étranger, riche d’espoirs et de déceptions, dura deux ans et neuf mois.

Viktor Kartashov (Le Pré de Béjine, Eisenstein)

Viktor Kartashov (Le Pré de Béjine, Eisenstein)

Durant le voyage de retour, Eisenstein, jamais satisfait, s’est concentré sur d’autres sujets. Il songea à un film sur la Russie qu’il voulait tourner pendant son retour à Moscou ; il essaya de développer un sujet étudié en Allemagne, A Modern "Götterdämmerung" (Un crépuscule moderne des dieux) centré sur l’histoire de deux milliardaires, l’industriel Ivar Kreuger et le financier Alfred Loewenstein ; il a écrit le scénario d’une comédie intitulée MMM pour laquelle il a contacté les acteurs Maksim Štrauch et son épouse Yudif Glizer, déjà actif avec le metteur en scène soit théâtre soit dans le premier long métrage La Grève. Il réfléchit encore sur L’Ulysse de Joyce et suggère une version cinématographique du roman La condition humaine d’André Malraux.

De plus, la fascination d’Eisenstein pour la culture orientale l’a amené à développer l’idée d’un cycle de films sur les cinq forces du Yang et du Ying : la terre, l’eau, le métal, le feu et le bois. La terre avait déjà été illustrée dans L’Ancien et le Nouveau; pour l’eau, il pensa à un film sur le condottiere ouzbek Tamerlan qui retira l’eau de son royaume et mourut dans une inondation; pour le métal il chercha à reprendre le projet de L’or de Sutter; il n’a pas développé de projets spécifiques sur le bois et le feu, mais ce qui est certain, c’est que les cinq forces, harmonisées avec l’utilisation du son et de la couleur, auraient dû être intégrées dans la fresque grandiose Moskva (Moscou) qui, dans les intentions du cinéaste, il devait raconter les événements de la ville à différentes époques. La réalisation de ce film aurait coïncidé avec le retour au théâtre d’Eisenstein pour le spectacle "Moskva II" ("Moscou II") édité avec le scénariste Nathan Zarchi, ancien collaborateur de Pudovkin, dont la mort prématurée fit échouer le projet.

Eisenstein considère enfin, à plusieurs reprises, dès le long séjour parisien, un film sur la révolution haïtienne intitulé Black Majesty (Sa Majesté noire) inspiré du roman homonyme écrit par John Vandercook, ainsi que des textes The Black Napoleon (Le Napoléon noir) de Percy Waxman, Čërnyj Konsul ("Le consul noir") d’Anatoli Vinogradov et à la comédie Der schawarze Napoleon ("Le Napoléon noir") de Karl Otten, tous centrés sur la figure de Toussaint Louverture. Eisenstein pense confier le rôle principal à Paul Robeson (Princeton, 9 avril 1898 - Philadelphie, 23 janvier 1976), acteur et chanteur afro-américain (Ol' Man River) à la vive sympathie communiste. Mais malgré deux voyages à Moscou de Robeson et de sa femme, qui lui coûtèrent cher aux États-Unis puisqu’il refusa d’aider les Américains emprisonnés en URSS et nia l’existence des goulags, le projet ne put aboutir.

Lorsque Eisenstein revint dans sa patrie, beaucoup de choses avaient changé en URSS. Staline, dont le portrait tyrannique s'affichait sur toute une page de la "Pravda" en 1929, était désormais le maître incontesté de l’Union soviétique. La culture aussi en subit les conséquences. Ce fut la saison du "Réalisme soviétique" ou "Réalisme socialiste", inaugurée par la résolution du Comité central du PCUS le 23 avril 1932 appelée "Sur la reconstruction des organisations artistiques et littéraires". Tout devait être plié à la "doctrine". Il n’y avait plus de place pour la liberté et l’expérimentation. La première à en faire les frais fut la littérature. Le Parti se lança contre les "bourgeois" qui avaient rendu grande la saison des avant-gardes. Le 14 avril 1930, Maïakovski se suicide d’une balle dans le cœur.

La même évolution a eu lieu au cinéma. En 1930, pour diriger les nouvelles installations cinématographiques soviétiques, Soyuzkino, Ankino et enfin GUKF (la direction d’État de l’industrie cinématographique), est nommé Boris Choumiatski (Ulan-Udė, 16 novembre 1886 - Moscou, 29 juillet 1938). L’homme n’avait aucun mérite ni compétence cinématographique, mais il avait été compagnon d’exil de Staline en Sibérie. C’est avec cette nomination que commença l’action visant à discréditer Eisenstein. Dans un essai de Sergueï I. Anisimov, daté de 1931, le réalisateur était accusé de ne pas pouvoir montrer authentiquement son temps. L’année suivante, l’Encyclopédie Soviétique l’a appelé "un représentant de l’idéologie de la couche révolutionnaire de l’intelligence petite-bourgeoise, qui est prêt à suivre les traces du prolétariat". Pour Staline, Eisenstein, il était "un trotskiste sinon pire".

Aleksandrov, très opportuniste, commença à réduire les contacts avec le réalisateur et fut récompensé par Choumiatski lui-même. On lui proposa, en effet, la réalisation d’une comédie intitulée Vesëlye rebjata (Joyeux Garçons, 1934) supervisée par Staline lui-même. Le film fut un succès et lança en URSS un nouveau genre, la comédie satirique musicale, qui se développa rapidement grâce à la diffusion du son. Aleksandrov devint le maître de ce type de films et réalisa, entre autres, Cirk (Le cirque, 1936) une condamnation du racisme face à l’amour et au bonheur et Volga Volga (1938) sur l’affrontement, à travers deux orchestres, entre la vieille mentalité bureaucratique et la nouvelle initiative populaire. Les deux films sont interprétés par son épouse Ljubov' Orlova. Aleksandrov réalise également quelques longs-métrages sur la figure et l’œuvre politique de Staline, mais ne travaille plus avec Eisenstein.

Pas encore satisfait, Choumiatski, qui avait refusé les financements pour mettre fin à Que viva México!, commença à rejeter toutes les idées d’Eisenstein, y compris celles qui étaient en préparation, comme les MMM et Sa Majesté noire. Les critiques et les attaques se multiplient aussi dans les quotidiens et au réalisateur, rentré en URSS en 1932, il ne reste plus qu’à accepter le "déclassement" et à retourner enseigner la mise en scène à l’Institut d'État de Cinématographie (VGIK). Durant cette période, "Sa Majesté" écrivit d’importants textes théoriques, y compris un traité, jamais achevé, sur la mise en scène et la récitation de l’acteur.

La nouvelle doctrine du "Réalisme socialiste", née au Comité central du PCUS et adoptée par la littérature en 1934, fut formalisée dans le cinéma pendant le XV Anniversaire du cinéma soviétique, événement qui se tint à Moscou le 8 janvier 1935. Staline y envoya un message. Parlant pour le Parti, c’est Dinamov qui critiqua ouvertement Eisenstein pour son formalisme et pour ses expérimentations. Le cinéaste répondit en parlant de l’évolution et de l’état du cinéma soviétique, mais les autres réalisateurs prirent leurs distances. Le grand Dovjenko, toujours épris de Staline, pontifia : "Tes films [...] sont mille fois plus chers que tes théories. Ton film vaut plus que tes idées irréalisées et tes discours sur les femmes polynésiennes". Ce ne fut pas moins Pudovkine : "C’était une exposition assez nébuleuse : loin d’être claire". Le seul Koulesov eut le courage d’admettre : "Cher Sergueï Mikhaïlovitch! On ne brûle pas pour trop de culture, quand on brûle pour trop de jalousie".

Trois jours plus tard, au Théâtre Bolchoï, Staline décerna l’ordre de Lénine, la plus haute distinction, aux réalisateurs soviétiques. Pour Eisenstein, il n’y eut que des prix de quatrième ordre. Le metteur en scène ne se désagrégeait pas, démontrant une supériorité évidente, et déclara vouloir plus que tout le seul retour derrière la caméra.

L’occasion se concrétisa lorsque Aleksandr Rzheshevsky, réalisateur et scénariste qui avait déjà travaillé avec Pudovkin, proposa à Eisenstein un scénario qu’il venait de refuser de Boris Barnet. Le manuscrit était inspiré du recueil Zapiski ohotnika (Mémoires d'un chasseur) de Ivan Tourgueniev, spécifiquement au récit Bežin lug (Le Pré de Béjine), l’histoire vraie de Pavlik Morozov, le garçon-héros, qui s’est révolté et a dénoncé le père "koulak".

Le thème de la collectivisation des terres avait été abordé dans L’Ancien et le Nouveau d’Eisenstein, dans La Terre de Dovjenko et il était de retour sur le grand écran en 1934 avec Schast'e (Le bonheur), film qui rendit célèbre le réalisateur Alexandre Ivanovitch Medvedkine, mais qui a irrité les dirigeants du PCUS... c’était une comédie. Le Pré de Béjine vint considérée, en revanche, comme un soutien à la collectivisation des fermes et utile à la construction d’un jeune héros. Le projet a donc été approuvé par le Komsomol (Union de la jeunesse communiste léniniste de toute l’Union).

Le réalisateur, qui fit recours une fois de plus à des acteurs non professionnels, pour le rôle du jeune protagoniste, rebaptisé Stepok, auditionna deux mille enfants. Il choisit finalement Viktor Kartashov, âgé de 11 ans, frappé par la croissance asymétrique des cheveux et la pigmentation de la peau. Le tournage débuta le 5 mai 1935 et alterna entre les études de la Mosfilm de Moscou, de l’Ukraine et du Caucase. En septembre de la même année, le tournage subit un arrêt. Le réalisateur tomba malade de la variole. Pas encore complètement guéri, il retourna au travail en décembre et revint en février. Mais Choumiatski, en août 1936, lui ordonna de réécrire le scénario en l’accusant de formalisme, d’intellectualisme et même de mysticisme. Avec la collaboration de l’écrivain Isaak Babel, malvenu dans les milieux culturels "officiels", Eisenstein réécrit le scénario et recommence le tournage. En janvier 1937, le réalisateur tombe de nouveau malade à seulement deux semaines de travail de la fin du tournage.

L’histoire racontée était celle du jeune Stepok (Viktor Kartashov), pionnier d’une commune agricole, qui dénonce le père violent Samokhin (Boris Zakhava), partisan des koulak, comme auteur d’un incendie provoqué pour saboter la récolte de blé de la communauté. Le jeune homme se bat pour ses idées, mais finalement il est tué par son parent dans un fusillade.

Mais Eisenstein, comme cela avait déjà été le cas pour Que viva México !, ne réussit pas à terminer Le Pré de Béjine. Le 17 mars 1937, Choumiatski ordonne l’arrêt définitif du tournage du film. L’accusation était de ne pas affronter la lutte de classe, mais de développer une lutte élémentaire et presque biblique entre le bien et le mal. Deux jours plus tard, le réalisateur convoqua une conférence de cinéastes qui, dans l’intention de l’intéressé, aurait dû contrecarrer la décision de Choumiatski, mais aucun des participants ne prit la défense d’Eisenstein qui, le 5 avril, fut contraint, comme d’habitude à l’époque stalinienne, à faire "autocritique" devant la direction de la Mosfilm.

Le matériel tourné de Le Pré de Béjine, coûtant plus de deux millions de roubles, dépassait les cinq heures et, compte tenu des nombreuses modifications, il existait plusieurs versions du film. On ne les verra jamais. Il semble, en effet, qu’un incendie en 1942 à Mosfilm, au début de la Seconde Guerre mondiale, brûla la seule copie existante de Bežin lug, même si on ne comprend pas pourquoi la copie n’a pas été mise en sécurité, avec d’autres, au début de la guerre. En 1962, le réalisateur russe Sergei Ioutkevitch aidé par Naum Kleiman, monta des parties du film gardées jalousement par la femme d’Eisenstein, Pera Attacheva, et plusieurs photos de scène. Le résultat fut un "film photo" d’environ une demi-heure (apparemment il y a aussi une version de 70 minutes) dans laquelle on peut voir, une fois de plus, les dons du réalisateur : des émouvantes images de l’enterrement de la mère du protagoniste, tuée par son père, à la triste fin qu’elle voit le jeune Stepok aller à la rencontre de son père, lui arracher son fusil et mourir parmi ses compagnons.

L’homme qui a coûté au réalisateur le film et de nombreux autres projets, Boris Choumiatski, a aussi eu une mauvaise fin. Entre le 8 et le 9 janvier 1938, il est destitué de ses fonctions et arrêté pour avoir saboté le cinéma soviétique. Victime d’une purge stalinienne, il est condamné à mort et fusillé le 29 juillet.

Au contraire, une réhabilitation partielle d’Eisenstein commença. Si Lazare Moïsseïevitch Kaganovitch prononçait : "On ne peut pas faire confiance à Eisenstein. Il a encore balancé des millions de roubles sans rien nous donner [...] parce qu’il est contre le socialisme", le réalisateur fut défendu par Molotov et Ždanov. Le dramaturge Vsevolod Višnevski a admis qu’au Mexique et en URSS "de vrais crimes avaient été commis" et a imaginé avec le cinéaste deux films, malheureusement jamais réalisés : l’un sur la guerre civile espagnole, l’autre sur l’organisation de l’Armée rouge en 1917, d’après un ouvrage du même auteur intitulé "My - ruskij narod" ("Nous, peuple russe").

Mais c’est surtout Staline, bien conscient du talent d’Eisenstein, qui le défendit et lui donna une autre chance. Alors que les tensions grandissent avec l’Allemagne nazie et avec la volonté de promouvoir le culte de sa personnalité, en effet, le chef de l’URSS en janvier 1938 commanda à Eisenstein la réalisation d’un film biographique sur un condottiere russe capable au XIIIème siècle de vaincre les envahisseurs teutoniques, Alexandre Nevski.

Eisenstein commença à travailler sur le nouveau projet avec une nouvelle équipe, le seul Tissė, qui avait entre-temps assuré la photographie d’Aerograd (1935) dirigé par Dovženko, était resté à ses côtés. Pour la première fois, il dirige des acteurs professionnels. Staline prétend que le rôle du protagoniste est joué par Nikolaï Konstantinovitch Tcherkassov (Saint-Pétersbourg, 27 juillet 1903 - Moscou, 14 septembre 1966). La raison ? Simple : l’acteur était député du Soviet Suprême et pouvait donc "contrôler" le réalisateur. Mais Tcherkassov était aussi un grand interprète, élève de Stanislavsky, il avait été danseur, acteur sur scène et sur grand écran. À signaler Deputat Baltiki (Le député de la Baltique, 1937) de Iossif Kheifitz et Alexandre Zarkhi et Pëtr Perviy (Pierre le Grand, la première partie sortie en 1937, la deuxième en 1938), film monumental de Vladimir Petrov. Sans doute l’acteur le plus talentueux de son époque en Union soviétique.

Pour Alexandre Nevski, le réalisateur avec la méticulosité habituelle étudia et reconstruit une époque à travers des esquisses, préparées par lui-même, qui concernaient les costumes, les armures, les ornements. Il recréa, dans le torride juillet 1938, la bataille qui eut lieu le 4 avril 1242 sur le gelé lac Peïpous en utilisant des radeaux pneumatiques et de la glace artificielle.Cette scène, comme le rappelait Tissė, a été filmée "à la vitesse de huit à douze images par seconde, au lieu de vingt-quatre, pour souligner le rythme particulier dramatique de la bataille".

Avec le nouvel opéra Eisenstein, le film sonore (le premier film sonore en URSS est Putyovka v zhizn (Le Chemin de la vie), réalisé par Nicolaï Ekk en 1931. Mais les dialogues approuvés par le Parti étaient faux et propagandistes, donc Eisenstein décida d’enrichir le film avec de la musique, parfaite comme contrepoint aux images. Ces notes ont été spécialement et magnifiquement écrites par Sergueï Prokofiev (Sontsivka, 23 avril 1891 - Moscou, 5 mars 1953) compositeur extraordinaire, accusé comme le réalisateur, de formalisme. Les deux génies devinrent inévitablement amis.

Eisenstein a déclaré à propos du tournage du film : "J’étais profondément conscient de faire un film, qui était d’abord, et surtout, contemporain : la ressemblance était frappante entre les événements décrits dans les chroniques et les récits épiques et les événements de nos jours. En substance, si ce n’est pas dans la forme, les événements du treizième sont émotionnellement proches des nôtres. Et, dans ce cas particulier, aussi dans la forme. Je n’oublierai jamais le jour où, ayant lu dans un journal la féroce destruction de Guernica par les fascistes, je consultai des documents historiques et trouvai une description de la conquête de Guernica par les croisés".

Conclu cinq mois avant le délai fixé, Alexandre Nevski est présenté pour la première fois en public à Moscou le 23 novembre 1938, près de dix ans après le dernier film du réalisateur (L'Ancien et le Nouveau sortit en 1929).

En 1242, les chevaliers de l’ordre teutonique envahissent de l’ouest la Russie bouleversée par les incursions et les dévastations mongoles. Le prince Alexandre Nevski (Nikolaï Tcherkassov) est appelé par le peuple à organiser l’armée qui devra vaincre les Germains. Et tandis que deux soldats russes Vassili Buslaj (Nikolaï Okhlopkov) et Gavrilo Oleksich (Andreï Abrikossov) se disputent le cœur de la belle Olga Danilovna (Vera Ivachova), le condottière parvient à unir le peuple de Nogodorov et d’autres villes aux paysans pauvres de la campagne, pour vaincre dans une bataille épique l’ennemi étranger sur le lac Peïpous, le lac gelé qui s’effondre sous le poids des armures teutoniques.

Bien qu’ Eisenstein le considérait comme son film le plus superficiel et le moins personnel, ou peut-être pour cette raison, Alexandre Nevski fut le plus grand succès du public du réalisateur qui réussit à dessiner non seulement le profil du héros, mais aussi celui d’un peuple entier où le prince n’est pas simplement le souverain, mais une partie homogène... Peu importe si l’histoire ne s’est pas passée comme ça. Impressionnant la scène de la bataille sur la glace, bien 37 minutes de film, dans lequel la comparaison entre les deux armées (blanches et ordonnées les teutoniques, les noirs et les russes désordonnés, inversant les attributs classiques du bien et du mal) devient une comparaison abstraite des masses, des volumes et des lignes.

Aleksandr Nevski est le film qui réhabilite Eisenstein aux yeux de Staline, en évitant son isolement définitif, et, pour cette raison, le réalisateur remporte en février 1939 l’Ordre de Lénine et le Prix Staline.

Eisenstein conçut alors de nouveaux sujets. Il écrivit avec Alexandre Fadeïev Perekop qu’il reconstruirait la poursuite menée par Fruenze en 1920 pour attaquer les "gardes blancs" du baron Wrangel ; il reprend le film déjà projeté sur le condottiere ouzbek Tamerlan qu’il perfectionne avec l’écrivain Pyotr Pavlenko pour en faire une fresque sur l’histoire de l’Asie centrale appelée Bolchoï fergansky kanal (Le Grand Canal de Fergana). La musique fut de nouveau confiée à Prokofiev. Des inspections et des tournages furent effectués, mais le projet fut définitivement abandonné. Les images tournées ont été insérées dans un documentaire projeté le jour de l’ouverture du canal en septembre 1939.

Quelques semaines auparavant avait été signé le tristement célèbre Pacte Molotov-Ribbentrop, le traité de non-agression entre le Reich et l’Union des Républiques Socialistes Soviétiques. Le cinéma en subit les conséquences : Alexandre Nevski est retiré et sa projection interdite.

Par la suite, Eisenstein travailla sur un film sur le poète Alexandre Pouchkine, pour lequel il pensait, comme le montrent certaines annotations de mars 1940, à une utilisation expérimentale de la couleur qui éviterait tout le spectre pour se limiter à quelques couleurs, choisis en fonction des besoins expressifs. Puis il esquissa le scénario Delo Bejlisa (L’affaire Bejlis), tiré du texte théâtral homonyme de Šejnin, centré sur le procès de Menahem Mendel Beilis, accusé de meurtre, qui déclencha une violente vague d’antisémitisme en Russie impériale.

Le 21 novembre 1940, Eisenstein retourne au théâtre, portant sur la scène Die Walküre (La Valkyrie), la deuxième partie de Der Ring des Nibelungen (L’anneau du Nibelungen) de Richard Wagner. Mais un autre Allemand allait engager l’URSS. Hitler, en effet, ne maintint pas le "Pacte" et, à l’été 1941, attaqua l’Union soviétique. Aleksandr Nevski, après dix-huit mois d’oubli, revint dans les salles avec plus de vigueur qu’auparavant, devenant un authentique manifeste antinazi.

Isaac Babel (1930)

Isaac Babel (1930)

L’histoire racontée était celle du jeune Stepok (Viktor Kartashov), pionnier d’une commune agricole, qui dénonce son père violent Samokhin (Boris Zakhava), partisan des koulak, comme auteur d’un incendie provoqué pour saboter la récolte de blé de la communauté. Le jeune homme se bat pour ses idées, mais finalement il est tué par son parent dans une fusillade.

Mais Eisenstein, comme cela avait déjà été le cas pour Que viva México !, ne réussit pas à terminer Le Pré de Béjine. Le 17 mars 1937, Choumiatski ordonne l’arrêt définitif du tournage du film. L’accusation était de ne pas affronter la lutte de classe, mais de développer une lutte élémentaire et presque biblique entre le bien et le mal. Deux jours plus tard, le réalisateur convoqua une conférence de cinéastes qui, dans l’intention de l’intéressé, aurait dû contrecarrer la décision de Choumiatski, mais aucun des participants ne prit la défense d’Eisenstein qui, le 5 avril, fut contraint, comme d’habitude à l’époque stalinienne, de faire son "autocritique" devant la direction de la Mosfilm.

Le matériel tourné de Le Pré de Béjine, coûtant plus de deux millions de roubles, dépassait les cinq heures et, compte tenu des nombreuses modifications, il existait plusieurs versions du film. On ne les verra jamais. Il semble, en effet, qu’un incendie en 1942 à Mosfilm, au début de la Seconde Guerre mondiale, brûla la seule copie existante de Bežin lug, même si on ne comprend pas pourquoi la copie n’a pas été mise en sécurité, avec d’autres, au début de la guerre. En 1962, le réalisateur russe Sergei Ioutkevitch aidé par Naum Kleiman, monta des parties du film gardées jalousement par la femme d’Eisenstein, Pera Attacheva, et plusieurs photos de scène. Le résultat fut un "film photo" d’environ une demi-heure (apparemment il y a aussi une version de 70 minutes) dans laquelle on peut voir, une fois de plus, les dons du réalisateur : des émouvantes images de l’enterrement de la mère du protagoniste, tuée par son père, et la triste fin  où elle voit le jeune Stepok aller à la rencontre de son père, lui arracher son fusil et mourir parmi ses compagnons.

L’homme qui a coûté au réalisateur le film et de nombreux autres projets, Boris Choumiatski, a aussi eu une mauvaise fin. Entre le 8 et le 9 janvier 1938, il est destitué de ses fonctions et arrêté pour avoir saboté le cinéma soviétique. Victime d’une purge stalinienne, il est condamné à mort et fusillé le 29 juillet.

Au contraire, une réhabilitation partielle d’Eisenstein commença. Si Lazare Moïsseïevitch Kaganovitch prononçait : "On ne peut pas faire confiance à Eisenstein. Il a encore balancé des millions de roubles sans rien nous donner [...] parce qu’il est contre le socialisme", le réalisateur fut défendu par Molotov et Ždanov. Le dramaturge Vsevolod Višnevski a admis qu’au Mexique et en URSS "de vrais crimes avaient été commis" et a imaginé avec le cinéaste deux films, malheureusement jamais réalisés : l’un sur la guerre civile espagnole, l’autre sur l’organisation de l’Armée rouge en 1917, d’après un ouvrage du même auteur intitulé "My - ruskij narod" ("Nous, peuple russe").

Mais c’est surtout Staline, bien conscient du talent d’Eisenstein, qui le défendit et lui donna une autre chance. Alors que les tensions grandissent avec l’Allemagne nazie et avec la volonté de promouvoir le culte de sa personnalité, en effet, le chef de l’URSS en janvier 1938 commanda à Eisenstein la réalisation d’un film biographique sur un chevalier russe capable au XIIIème siècle de vaincre les envahisseurs teutoniques, Alexandre Nevski.

Eisenstein commença à travailler sur le nouveau projet avec une nouvelle équipe. Seul Tissė, qui avait entre-temps assuré la photographie d’Aerograd (1935) dirigé par Dovženko, était resté à ses côtés. Pour la première fois, il dirige des acteurs professionnels. Staline souhaite que le rôle de l'acteur principal soit joué par Nikolaï Konstantinovitch Tcherkassov (Saint-Pétersbourg, 27 juillet 1903 - Moscou, 14 septembre 1966). La raison ? Simple : l’acteur était député du Soviet Suprême et pouvait donc "contrôler" le réalisateur. Mais Tcherkassov était aussi un grand interprète, élève de Stanislavsky, il avait été danseur, acteur sur scène et sur grand écran. À signaler Deputat Baltiki (Le député de la Baltique, 1937) de Iossif Kheifitz et Alexandre Zarkhi et Pëtr Perviy (Pierre le Grand, la première partie sortie en 1937, la deuxième en 1938), film monumental de Vladimir Petrov. Sans doute l’acteur le plus talentueux de son époque en Union soviétique...

Pour Alexandre Nevski, le réalisateur, avec sa méticulosité habituelle, étudia et reconstruisit toute une époque à travers des esquisses, préparées par lui-même, qui concernaient les costumes, les armures, les ornements. Il recréa, dans le torride juillet 1938, la bataille qui eut lieu le 4 avril 1242 sur le lac gelé lac Peïpous en utilisant des radeaux pneumatiques et de la glace artificielle. Cette scène, comme le rappelait Tissė, a été filmée "à la vitesse de huit à douze images par seconde, au lieu de vingt-quatre, pour souligner le rythme particulier dramatique de la bataille".

Avec le nouvel opéra Eisenstein, le film sonore (le premier film sonore en URSS est Putyovka v zhizn (Le Chemin de la vie), réalisé par Nicolaï Ekk en 1931. Mais les dialogues approuvés par le Parti étaient faux et propagandistes, donc Eisenstein décida d’enrichir le film avec de la musique, parfaite comme contrepoint aux images. Ces notes ont été spécialement et magnifiquement écrites par Sergueï Prokofiev (Sontsivka, 23 avril 1891 - Moscou, 5 mars 1953) compositeur extraordinaire, accusé comme le réalisateur, de formalisme. Les deux génies devinrent inévitablement amis.

Eisenstein a déclaré à propos du tournage du film : "J’étais profondément conscient de faire un film, qui était d’abord, et surtout, contemporain : la ressemblance était frappante entre les événements décrits dans les chroniques et les récits épiques et les événements de nos jours. En substance, si ce n’est pas dans la forme, les événements du treizième siècle sont émotionnellement proches des nôtres. Et, dans ce cas particulier, aussi dans la forme. Je n’oublierai jamais le jour où, ayant lu dans un journal la féroce destruction de Guernica par les fascistes, je consultai des documents historiques et trouvai une description de la conquête de Guernica par les croisés".

Conclu cinq mois avant le délai fixé, Alexandre Nevski est présenté pour la première fois en public à Moscou le 23 novembre 1938, près de dix ans après le dernier film du réalisateur ("L'Ancien et le Nouveau" sortit en 1929).

En 1242, les chevaliers de l’ordre teutonique envahissent l’ouest de la Russie bouleversée par les incursions et les dévastations mongoles. Le prince Alexandre Nevski (Nikolaï Tcherkassov) est appelé par le peuple à organiser l’armée qui devra vaincre les Germains. Et tandis que deux soldats russes Vassili Buslaj (Nikolaï Okhlopkov) et Gavrilo Oleksich (Andreï Abrikossov) se disputent le cœur de la belle Olga Danilovna (Vera Ivachova), le chevalier parvient à unir le peuple de Nogodorov et d’autres villes aux paysans pauvres de la campagne, pour vaincre dans une bataille épique l’ennemi étranger sur le lac Peïpous, le lac gelé qui s’effondre sous le poids des armures teutoniques.

Bien qu’Eisenstein le considérait comme son film le plus superficiel et le moins personnel, ou peut-être pour cette raison, Alexandre Nevski fut le plus grand succès du public du réalisateur qui réussit à dessiner non seulement le profil du héros, mais aussi celui d’un peuple entier où le prince n’est pas simplement le souverain, mais une émanation du peuple... Peu importe si l’histoire ne s’est pas passée comme ça. Impressionnante, la scène de la bataille sur la glace, 37 minutes de film, dans lequel la comparaison entre les deux armées (blanches et ordonnées les teutoniques, les noirs et les russes désordonnés, inversant les attributs classiques du bien et du mal) devient une comparaison abstraite des masses, des volumes et des lignes.

Aleksandr Nevski est le film qui réhabilite Eisenstein aux yeux de Staline, en évitant son isolement définitif, et, pour cette raison, le réalisateur remporte en février 1939 l’Ordre de Lénine et le Prix Staline.

Eisenstein conçut alors de nouveaux sujets. Il écrivit avec Alexandre Fadeïev Perekop qu’il reconstruirait la poursuite menée par Fruenze en 1920 pour attaquer les "gardes blancs" du baron Wrangel ; il reprend le film déjà projeté sur le condottiere ouzbek Tamerlan qu’il perfectionne avec l’écrivain Pyotr Pavlenko pour en faire une fresque sur l’histoire de l’Asie centrale appelée Bolchoï fergansky kanal (Le Grand Canal de Fergana). La musique fut de nouveau confiée à Prokofiev. Des inspections et des tournages furent effectués, mais le projet fut définitivement abandonné. Les images tournées ont été insérées dans un documentaire projeté le jour de l’ouverture du canal en septembre 1939.

Quelques semaines auparavant avait été signé le tristement célèbre Pacte Molotov-Ribbentrop, le traité de non-agression entre le Reich et l’Union des Républiques Socialistes Soviétiques. Le cinéma en subit les conséquences : Alexandre Nevski est retiré et sa projection interdite.

Par la suite, Eisenstein travailla sur un film sur le poète Alexandre Pouchkine, pour lequel il pensait, comme le montrent certaines annotations de mars 1940, à une utilisation expérimentale de la couleur qui éviterait tout le spectre pour se limiter à quelques couleurs, choisis en fonction des besoins expressifs. Puis il esquissa le scénario Delo Bejlisa (L’affaire Bejlis), tiré du texte théâtral homonyme de Šejnin, centré sur le procès de Menahem Mendel Beilis, accusé de meurtre, qui déclencha une violente vague d’antisémitisme en Russie impériale.

Le 21 novembre 1940, Eisenstein retourne au théâtre, portant sur la scène Die Walküre (La Valkyrie), la deuxième partie de Der Ring des Nibelungen (L’anneau du Nibelungen) de Richard Wagner. Mais un autre Allemand allait engager l’URSS. Hitler, en effet, ne maintint pas le "Pacte" et, à l’été 1941, attaqua l’Union soviétique. Aleksandr Nevski, après dix-huit mois d’oubli, revint dans les salles avec plus de vigueur qu’auparavant, devenant un authentique manifeste antinazi.

Andréa Lauro, 25 mai 2021

 

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Et des articles sur la culture soviétique:

Littérature soviétique - Carnets de guerre de Vassili Grossman (Calmann-Lévy, présenté par Antony Beevor et Luba Vinogradova) - Suivi de Treblinka

Littérature soviétique - Mikhaïl Boulgakov, l'auteur du Maître et Marguerite, un génie baroque à l'époque du Stalinisme (1891-1940)

Communist'Art: Marc Chagall, compagnon de route de la révolution bolchevique

Prokofiev

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Aleksandr Nevski

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17 mai 2021 1 17 /05 /mai /2021 09:04

 

Il s’est dit beaucoup de choses, il s’est tenu beaucoup d’émissions autour du 10 mai dernier à l’occasion du 40ème anniversaire de la victoire de la gauche en 1981, sans jamais dire que celle-ci n’a été possible que par une conjonction de forces, d’aspirations populaires et l’apport considérable du Parti communiste. Je ne peux revenir ici sur l’ensemble de cette période de l’histoire, mais je me sens obligé d’en dire quelques mots.

Cette victoire est d’abord le résultat d’un long processus de luttes sociales et sociétales (parmi lesquelles le grand mouvement de mai 1968), de confrontations politiques dans la société et au sein de la gauche elle-même, de la reconstruction d’un Parti socialiste abandonnant les oripeaux de la vieille SFIO et d’un travail patient des communistes pour l’union populaire et l’union de la gauche.

En 1965 puis en 1974, le PCF choisit l’union et le rassemblement autour d’un candidat commun de la gauche, issu du Parti socialiste. La candidature de Jacques Duclos en 1969 vise également cet objectif et elle est comprise comme telle par un électorat issu de toute la gauche. Celle de Georges Marchais en 1981, porteuse du Programme commun, est nettement une candidature anti-droite (anti-Giscard) tout en ayant l’ambition de créer à gauche un rapport de force favorable à la prise en compte des espoirs des travailleurs. Devancé par François Mitterrand, il réalise cependant un score important, lors de l’élection présidentielle la plus difficile pour les communistes. D’autant plus qu’au niveau international, après les avancées des « révolutions » sur plusieurs points de la planète, on assiste au début de la contre-offensive conservatrice et réactionnaire, fortement teintée d’anticommunisme, avec le reaganisme – le thatchérisme plus près de nous – le tout étant cornaqué par une instance mondiale du capitalisme et de l’impérialisme : la Commission trilatérale.

Cette pression n’était déjà pas sans effet sur F. Mitterrand et le Parti socialiste. Dès la signature du Programme commun, F. Mitterrand dira à l’Internationale socialiste à Vienne qu’il avait signé un programme de gouvernement pour « prendre trois millions de voix au Parti communiste ». Les élections qui suivirent montrèrent que le recul constaté lors du scrutin présidentiel, qui avait pu être attribué à son caractère spécifique et sa dimension de pouvoir personnel, s’inscrivait en réalité de façon durable dans la vie politique française.

La bataille pour l’union du Parti communiste a profité électoralement à toute la gauche, jusqu’en 1978. A partir de 1981, l’union réalisée, c’est au Parti socialiste qu’en est attribué le mérite. Et quand les communistes s’efforcent, tant bien que mal, dans un même mouvement, de préserver, d’amplifier le contenu transformateur des politiques menées et l’union indispensable pour y parvenir, il n’est pas compris par de nombreux progressistes. La période difficile de l’actualisation du Programme commun en 1977 en a témoigné. Rien n’est venu depuis contredire les reculs électoraux du Parti communiste, en dépit de toutes les tentatives qui ont suivi. Sans doute convient-il d’approfondir la réflexion pour en déterminer les causes les plus profondes et radicales, nationales, européennes, internationales et internes au parti lui-même et à la gauche.

Du reste, c’est partout dans le monde que ce phénomène se constate. Cela ne doit cependant pas conduire à minimiser ce qu’a apporté la victoire de l’union de la gauche en 1981. Aujourd’hui encore, les salariés se mobilisent pour en préserver les acquis, mis à mal par les gouvernements qui se sont succédés, par le patronat et l’Union européenne.

Dès les premiers mois, des réformes de progrès ont été votées et mises en œuvre. Le 1er juillet 1981, une hausse de 20% de l’allocation handicapés, de 25% des allocations familiales et de logement. Le 4 août, la suppression de la Cour de sureté de l’Etat. Le 2 octobre, l’autorisation des radios locales. Le 8 octobre, le blocage des prix, le 9 octobre, l’abolition de la peine de mort, le 15 décembre, l’abrogation de la loi anticasseurs, le 30 décembre création de l’impôt sur la fortune. Le 14 janvier 1982, l’instauration des 39 heures de travail hebdomadaire et de la 5ème semaine de congés payés. Le 13 février, le vote des nationalisations de grandes entreprises et banques. Le 3 mars, la loi de décentralisation. Le 25 mars, l’abaissement de l’âge de la retraite qui passe de 65 à 60 ans puis le vote des lois Auroux pour de nouveaux droits des salariés dans les entreprises.

Les quatre ministres communistes, Charles Fiterman, Anicet le Pors, Jack Ralite et Marcel Rigout, ont pris leur part dans ce bilan impressionnant de tout le gouvernement et de la majorité parlementaire. Avec certains apports particuliers, comme celui de Charles Fiterman qui, à l’opposé de ce qui se fait aujourd’hui, fait transformer les dettes des entreprises concessionnaires d’autoroutes en participations au capital de l’Etat, ce qui les nationalise. L’argent ainsi économisé est réinvesti dans de nouvelles infrastructures. Le chantier de l’A380 est lancé et le ministre d’Etat pousse ainsi à la diversification d’Airbus. Il fait voter la loi des transports intérieurs, premier acte d’un projet écologique pour les transports. Il fait voter une loi ancrant la maîtrise publique des entreprises de transport en contrôlant la concurrence et en obligeant les entreprises du secteur à endosser la responsabilité des coûts sociaux et environnementaux.

Le statut de la SNCF en fait un nouvel établissement public industriel et commercial tout en y renforçant l’emploi. Il met en place le remboursement à 50% de la Carte orange, supprime les deux classes dans le métro et participe au lancement du TGV.


Marcel Rigout, ministre de la formation professionnelle, fait voter la loi du 24 février 1984 portant réforme de la formation professionnelle continue et modifies en ce sens le Code du travail. Elle est complémentaire des lois Auroux que Macron a rendues caduques avec les « lois travail ». Il lance 600 000 contrats nouveaux de formation professionnelle pour des jeunes. 300 000 d’entre eux débouchent sur des contrats à durée indéterminée.


Jack Ralite, ministre de la Santé puis de l’Emploi, supprime le secteur privé à l’hôpital public, lance les centres de santé publics, équipe plusieurs hôpitaux de scanners, abroge la loi de 1938 qui mettait les malades mentaux à l’écart de la société, fait adopter une loi de réorganisation de l’hôpital. C’est lui qui fat supprimer la pénalisation de l’homosexualité. Comme ministre de l’Emploi, il lance les contrats « emploi-formation-production » et permet ainsi de sauver plusieurs petites et moyennes entreprises et leurs emplois.

 

Anicet Le Pors conduit une réforme fondamentale de la fonction publique et du statut en introduisant notamment le droit de grève, la liberté d’opinion, le droit de négociation. Il ouvre la troisième voie d’accès à l’ENA pour des élus, responsables associatifs, des agents des collectivités, des hôpitaux et de la recherche. La fonction publique est étendue aux collectivités locales, aux établissements hospitaliers et de recherche. Le statut général des fonctionnaires se décline avec lui en quatre lois nouvelles.


Ces éléments de bilan, trop souvent sous-estimés, ne peuvent s’inscrire dans le simplisme binaire des mots « échec » ou « succès ». La présence de ministres communistes concrétisait l’état de rapports de force politiques, sociaux, culturels. Trop souvent les concrétisations sont restées comme en suspens car la victoire de la gauche n’a pas été accompagnée d’une mobilisation sociale suffisante pour contrebalancer les pressions d’un contexte international nouveau et la tendance d’importantes fractions du Parti socialiste à revenir aux démons de l’adaptation au capitalisme. Dès le 26 novembre 1981, le ministre des Finances, Jacques Delors, réclame une « pause ». Jusqu’au tournant économique de l’année 1983 qui est sans doute le début de l’affaiblissement des idées de la gauche de transformation économique, sociale, démocratique dans le cadre de l’affaiblissement de l’Etat national au profit des carcans de l’Union européenne et de la mondialisation capitaliste.

 

Cela ne veut évidemment pas dire qu’il faut s’en satisfaire au moment où, aujourd’hui, l’enjeu du post-capitalisme est à l’ordre du jour. Il se pose avec une force accrue car le « tout-capitalisme mondialisé » ne fait qu’aggraver toutes les tares que sécrète ce système inhumain, du développement des inégalités à celui de la pauvreté, de l’épuisement de la planète à celui de la biodiversité, des guerres aux atteintes aux libertés… Les dénoncer, les combattre, pied à pied, est indispensable. Mais reste posée dans son entier l’immense question de l’alternative, de l’engagement dans un processus populaire démocratique mondial d’émancipation humaine. En ouvrir la voie, pour la gauche et l’écologie toutes entières et singulièrement pour le Parti communiste et le Parti socialiste, suppose, me semble-t-il, de prendre la mesure des deux déflagrations qui au XXe siècle les ont atteints l’un et l’autre, l’effondrement du l’URSS et l’échec de la social-démocratie. La tâche est d’autant plus ardue que l’activité politique a, elle-même, été durement atteinte, la désindustrialisation a produit des ravages, les cadenas de l’Union européenne aussi au point de voir tant de nos concitoyens s’en détourner.

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16 mai 2021 7 16 /05 /mai /2021 07:40
Marx et le monde du capital - Par Gabriel Mahéo, Brève introduction à la critique de l'économie politique - La chronique philo de Cynthia Fleury, L'Humanité, 7 mai
Marx et le monde du capital - Par Gabriel Mahéo, Brève introduction à la critique de l'économie politique - La chronique philo de Cynthia Fleury, L'Humanité, 7 mai

Gabriel Mahéo, un ami, est docteur en philosophie et professeur de philosophie dans la région rennaise. Auteur de plusieurs livres de philosophie, déjà, dont un sur Nietzsche, il publie aux éditions Apogée un livre sur l'actualité de Marx issu de ses conférences pour l'université populaire de philosophie de Rennes. La philosophe Cynthia Fleury parlait de cet essai pédagogique et engagé dans L'Humanité le week-end dernier. 

Ismaël Dupont.

La chronique philo de Cynthia Fleury. Fiction et réalité du capital
Vendredi 7 Mai 2021 - L'Humanité
 

Avec 2021, un an de crise sanitaire, de bouleversements socio-économiques mondiaux, de précarisation des uns et des autres, et plus de 50 milliards d’euros annoncés (par le CAC 40) pour les dividendes versés aux actionnaires, soit une augmentation de 42 % par rapport à l’année passée.

Le capital se porte bien. Et encore mieux en France, quand en 2020, au plus fort de la crise, les députés votaient le second projet de loi de finances rectificative, en injectant 20 milliards à destination des grandes entreprises. La brève introduction à la critique de l’économie politique de Gabriel Mahéo dans Marx et le monde du capital (Apogée, 2021) offre une synthèse didactique dudit phénomène. Relire Marx permet de nous rappeler que le capitalisme est dépassable, transitoire, tant cet auteur a dénaturalisé l’économie en la réinscrivant dans l’Histoire. Pour autant, gageons que nous n’avons pas su trouver la manière de le dépasser en produisant un matérialisme historique d’un nouveau genre. Le capitalisme n’est pas un libéralisme au sens où des individus de façon égalitaire mettraient leurs forces en commun pour produire, ou à l’inverse se concurrencer, en somme déploieraient leur liberté d’entreprendre. Le capitalisme se fonde sur un « rapport social », une « inégalité sociale entre deux classes », ceux qui possèdent les moyens de production face à ceux qui ne possèdent que leur force de travail, qu’ils louent sous forme d’un contrat de travail, plus ou moins précaire et précarisant. Au cœur de ce processus, il y a l’exploitation du travail et l’aliénation du travailleur. « Au fur et à mesure que progresse la division du travail, rappelle Mahéo, il s’opère un renversement du rapport du sujet au monde dans lequel il travaille : ce n’est plus la subjectivité du travailleur qui lui confère un sens en aménageant son environnement comme un ensemble de moyens en fonction de l’objectif qu’il poursuit, à l’instar de l’artisan qui compose lui-même l’ordre de son atelier. C’est, à l’inverse, le capital qui ordonne ce monde selon ses propres exigen ces de productivité et contraint dès lors le travailleur à s’y insérer en s’adaptant, dans sa vie subjective, au fonctionnement abstrait d’un cadre qu’il n’a pas choisi. C’est ainsi que l’horizon du monde du travailleur se rétrécit de plus en plus»

La rationalisation, qu’il vaudrait mieux nommer le réductionnisme, ou la décomplexification, et la division du travail achèvent la dynamique mortifère, en volant au travailleur le sens de ce qu’il fait, comme la maîtrise de ce qu’il fait.

Le travailleur devient l’otage d’un milieu hostile qui n’est pourtant rien sans lui. Enfin, indépendamment du capital réel, il y a le capital fictif qui désigne le procédé par lequel est constitué un capital, et calculée sa valeur, à partir des recettes que rapporte l’intérêt d’une créance. Cédric Durand avait publié le Capital fictif (les Prairies ordinaires, 2015) à ce sujet pour montrer comment le capitalisme était un moyen de s’approprier l’avenir des individus, rien de moins.

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15 mai 2021 6 15 /05 /mai /2021 06:56
La dalle gravée de Saint-Bélec en Leuhan (Finistère) - Il y a 4000 ans en Armorique, les premiers cartographes d'Europe - L'Humanité, 6 mai 2021: entretien avec l'archéologue Yvan Pailler
Il y a 4000 ans en Armorique, les premiers cartographes d'Europe
Jeudi 6 Mai 2021

Une dalle de schiste gravée à l'âge de bronze a été découverte dans une tombe de basse Bretagne en 1900. Plus d'un siècle plus tard, les travaux de deux archéologues révèlent qu'elle pourrait être la première carte géographique jamais réalisée sur le continent. Récit.

 

Pionnier de l’archéologie bretonne, Paul du Chatellier (1833-1911) découvre en 1900 une mystérieuse dalle ornée dans le caveau d’un tumulus situé sur la commune de Leuhan, dans le Finistère. Il ne s’aventure pas alors à déchiffrer ce qu’il voit même si le préhistorien s’interroge.

Entre 2150 et 1650 avant l’ère commune

Après sa découverte, cet énorme bloc de schiste – 2,20 mètres de long pour 1,53 de large, 16 centimètres d’épaisseur – a été déplacé plusieurs fois malgré son poids d’une tonne. Et plus d’un siècle après, c’est dans une cave du musée d’Archéologie nationale de Saint-Germain-en-Laye que deux archéologues français, Clément Nicolas et Yvan Pailler, se sont rendus pour la retrouver et commencer un travail qui allait confirmer leur intuition : cette dalle pourrait être une représentation cartographique.

Mieux, comme elle date de l’âge de bronze – entre 2150 et 1650 avant l’ère commune (1) –, elle serait la plus ancienne carte réa­lisée en Europe. Leur enquête archéologique a été publiée début avril dans le « Bulletin de la Société préhistorique française ».

Les premiers enseignements du scanner 3D

La dalle gravée, dite de Saint-Bélec, comporte plusieurs indices qui laissent penser qu’il s’agit bien d’une carte préhistorique. Il y a des motifs qui se répètent et qui sont reliés entre eux par des lignes pour former un réseau, le tout constituant un ensemble cohérent.

Les chercheurs ont étudié la dalle à l’œil nu mais aussi grâce à différentes techniques d’imagerie. Grâce à un scanner 3D, ils se sont rendu compte que les hommes préhistoriques qui avaient gravé ce bloc de pierre avaient utilisé le relief propre de la dalle mais l’avaient aussi modifié à certains endroits.

Pour les archéologues, les graveurs avaient l’intention de restituer le relief environnant. C’est en effet plus simple pour l’esprit humain de représenter les choses qui sont en relief en trois dimensions, et non à plat comme nous en avons aujourd’hui l’habitude, avec les cartes routières par exemple.

La forme triangulaire de la vallée de l’Odet

Pour confirmer leur intuition grandissante, les deux chercheurs se sont rendus sur le terrain. Trouveraient-ils dans le paysage des correspondances avec la représentation de la dalle ? Ce fut le cas. Ils ont retrouvé le réseau hydrographique formé de différents cours d’eau, un massif rectangulaire mais aussi la forme triangulaire de la vallée de l’Odet, qui correspond sur la dalle à la partie gravée en relief.

Pour confirmer la concordance entre les gravures et les éléments paysagers, plusieurs séries d’analyses statistiques de formes et de réseaux ont été réalisées. Elles ont révélé un degré de similarité de 80 %, égal ou supérieur à celui obtenu quand on teste la concordance entre le terrain et les cartes mentales réalisées par des Papous ou des Touareg. De fait, si on constate bien des analogies entre une carte mentale et l’environnement, il y a aussi forcément des décalages.

Pour que la démonstration soit complète, il faudrait maintenant réussir à décoder les signes dessinés sur la dalle. Car une question essentielle reste posée : « Si la dalle de Saint-Bélec est une carte, que signifient les différents symboles ? »

(1) De nombreux scientifiques ont décidé d’utiliser le terme « ère commune », qui permet d’éviter de faire référence à une religion ou une civilisation particulière.
La dalle gravée de Saint-Bélec en Leuhan (Finistère) - Il y a 4000 ans en Armorique, les premiers cartographes d'Europe - L'Humanité, 6 mai 2021: entretien avec l'archéologue Yvan Pailler
Archéologie : comment vivait-on en basse Bretagne à l’âge de bronze ? Entretien avec Yvan Pailler
Jeudi 6 Mai 2021
Marine Cygler - L'Humanité

L'archéologue Yvan Pailler, titulaire de la chaire ArMeRIE (Inrap/UBO), nous raconte la société complexe, très hiérarchisée, sur laquelle régnait les princes d’Armorique des dizaines de siècles avant l’ère commune. Entretien.

 
Comment vivaient les hommes en basse Bretagne à l’âge de bronze ?

Yvan Pailler On imagine une société hiérarchisée en quatre ou cinq strates à la tête de laquelle il y avait les princes d’Armorique, qui régnaient sur des territoires de 600 km2 (20 x 30 km). De fait, autour de la tombe princière, on retrouve quelques tombes avec des poignards, puis des tombes avec seulement une céramique et enfin des tombes beaucoup plus nombreuses sans viatique. C’était essentiellement des agriculteurs et des éleveurs, même si la pêche devait jouer un rôle important sur le littoral, comme l’attestent de nombreuses pêcheries. Pendant 400 ans, cette culture, qui devait bénéficier d’un climat social et géopolitique stable, a rayonné jusqu’en basse Normandie et en Angleterre. Ce qui lie ces trois zones géographiques, c’est la mer. La navigation était très importante dans cette culture. D’ailleurs, il arrive souvent qu’on retrouve, même à plusieurs dizaines de kilomètres des côtes, un lit de sable blanc marin au fond des tombes.

Cette organisation éclaire-t-elle la signification de la carte gravée sur la dalle de Saint-Bélec ?

Yvan Pailler La réalisation d’une carte est une manière de contrôler son territoire. Clément Nicolas et moi pensons que cette carte a été commanditée par un puissant : elle a exactement la taille d’un territoire princier. A priori, c’était un document public, utilisé par le potentat pour gérer son territoire. Le fait qu’elle ait été gravée à plusieurs reprises par agrégation de formes va dans le sens d’un territoire qui évolue avec le temps. Le bris et l’ensevelissement de cette dalle pourraient s’expliquer par la fin et même le rejet de ces élites. Finalement, le dernier prince régnant sur ce territoire des montagnes Noires aurait pu être enterré avec le symbole de sa domination.

La découverte de cette dalle gravée change-t-elle votre regard sur cette société de l’âge de bronze ?

Yvan Pailler De mon point de vue, cela ne change pas grand-chose, car c’était une société complexe, très hiérarchisée, qui devait déjà disposer d’une petite administration. C’est finalement assez logique que ces hommes aient ressenti le besoin de réaliser une carte. Mais les représentations planimétriques attestées sont plus récentes et sont dues aux grandes civilisations classiques, si bien que notre article a suscité des questionnements parmi les archéologues. Certains pensent que les hommes de l’âge de bronze n’étaient pas capables d’être à l’origine d’une carte. Pourtant, on sait que tout un chacun est en mesure de gérer son espace via une carte mentale. Cette dalle gravée représente bien un territoire, même s’il nous reste à en décrypter la légende.

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25 avril 2021 7 25 /04 /avril /2021 09:51
Louis Le Gros - le Block 56 à Buchenwald, block des "invalides" où l'on attérissait après un passage à l'infirmerie, au Revier: Louis Le Gros y voyait une vraie cour des miracles. Cette huile sur toile (1960-1965) de grand format s'appelle "Promiscuité"

Louis Le Gros - le Block 56 à Buchenwald, block des "invalides" où l'on attérissait après un passage à l'infirmerie, au Revier: Louis Le Gros y voyait une vraie cour des miracles. Cette huile sur toile (1960-1965) de grand format s'appelle "Promiscuité"

Les déportés morlaisiens dans les camps nazis pendant la seconde guerre mondiale
Les déportés morlaisiens dans les camps nazis pendant la seconde guerre mondiale
Les déportés morlaisiens dans les camps nazis pendant la seconde guerre mondiale

Morlaix a payé un très lourd tribut au nazisme et à la politique de collaboration de Vichy, avec la déportation dans les camps de concentration et d'extermination de plus de 130 morlaisiens, dont une soixantaine qui y trouvèrent la mort, souvent à un très jeune âge, qu'ils aient été résistants ou otages raflés au hasard.

Selon certains chiffrages (Yves Léon, Bergen-Belsen: survivre aux camps nazis, Skol Vreizh, 2005), 3725 habitants de Bretagne des 5 départements ont été déportés, dont 3285 hommes, 393 femmes, 47 enfants: la moitié simplement de ces déportés ont survécu.  

D'autres peuvent retenir un chiffre encore plus élevé de déportés pour les cinq départements bretons: 4919 sur le site internet "mémoire de guerre".

Parmi eux, 224 juifs, victimes de l'antisémitisme des nazis et de Vichy.

Dans le Finistère, plus de la moitié du millier de déportés (549) est morte dans les camps nazis.

(voir http://memoiredeguerre.pagesperso-orange.fr/deportation/29/p6-list-def.htm, site auquel nous empruntons l'essentiel des données présentes ici).

Dans le Finistère - Sur les 1091 déportés (nés dans le Finistère où y vivant au moment de leur arrestation et de leur déportation) : 549 sont morts (1 sur 2)

A titre de comparaison, dans les Côtes-d'Armor, il y eut 585 déportés, 318 morts en déportation et 267 rapatriés en 1945.

Ces déportés sont passés par les camps de concentration de:

Neuegamme : 148

Buchenwald (centre de l'Allemagne): 100

Dachau (sud de l'Allemagne) : 67

Sachsenhausen (nord de l'Allemagne): 42

Ravensbrück (nord de l'Allemagne): 64

Auschwitz (Pologne): 47

Mathausen (Autriche): 45

Flossenburg (sud de l'Allemagne): 24

Bergen Belsen (nord de l'Allemagne): 25

Dora (sud de l'Allemagne): 19

Autres camps : 228

Dans les Côtes d'Armor , sur 585 des déportés, 401 étaient des résistants, 105 des « politiques », 33 des otages raflés, 12 des « raciaux » (juifs, tsiganes).

En tout, dans la Bretagne à 5 départements, les victimes de la déportation :

3725 déportés ; 1895 disparus 50,8 %

Hommes 3285 ; 1699 disparus 51,8 %

Femmes 393 ; 63 disparues 16 %

Enfants 47 ; 33 disparus 70,2 %

 

Plaque commémorative aux 60 otages Morlaisiens à la base du kiosque à musique, sur l'ancienne place Thiers de Morlaix, devenue place des Otages devant la mairie

Plaque commémorative aux 60 otages Morlaisiens à la base du kiosque à musique, sur l'ancienne place Thiers de Morlaix, devenue place des Otages devant la mairie

Le Télégramme de Brest et de l'Ouest - 26 décembre 1944

Le Télégramme de Brest et de l'Ouest - 26 décembre 1944

Le Télégramme de Brest et de l'Ouest - 27 décembre 1944

Le Télégramme de Brest et de l'Ouest - 27 décembre 1944

La mémoire de Morlaix retient le souvenir douloureux des soixante otages raflés le 26 décembre 1943 et dont 54 (après 5 évasions) seront finalement déportés par les Allemands après l'attentat contre le foyer du soldat allemand dans les salons Quiviger rue de Brest dans la nuit du 24 décembre 1943.

Témoignage d'un ancien déporté de Buchenwald, Un déporté comme les autres, de Michel Lacour-Gaet, Editions SPES (cité dans l'album du Musée de Morlaix, 26 décembre 1943. Louis Le Gros - Otage déporté de Morlaix): 

"Il arriva un soir un convoi d'environ cinquante jeunes garçons de Morlaix. Nous leur demandâmes de quelle prison ils sortaient, ils nous répondirent: tout simplement de chez nous. Les Allemands, un matin, avaient procédé à une grande rafle et sans raison autre que celle d'envoyer de jeunes Français à la mort les avaient expédiés le surlendemain à Compiègne". 

Voici à propos de ce sinistre événement le récit d'Yves Tanné, un des déportés morlaisiens survivants, recueilli par Danielle Ropars:

«  Le soir de Noël 1943, j’ai voulu me rendre chez des amis à Morlaix et partager avec eux, pour célébrer cette fête comme il se doit, la charcuterie confectionnée avec le cochon que nous venions de tuer au Kermeur. J’étais donc à Morlaix le 24 décembre, lorsqu’un attentat eut lieu contre le Foyer du Soldat, situé dans les anciens salons Quiviger, rue de Brest. Une grenade, jetée de la rue Gambetta, traversa la verrière et explosa au milieu de la piste de danse. En représailles, le 26 décembre au matin, les Allemands organisent une rafle et arrêtent tous les hommes valides, âgés de 15 à 40 ans. Parmi les 500 personnes arrêtées, ils choisissent, au hasard, 60 otages. Comme je n’avais pas de papiers, j’ai tout de suite été retenu. Nous avons été parqués entre la Mairie et le port de Morlaix, conduits à pied vers le terrain d’aviation, où nous avons été enfermés dans un grand hangar. Le docteur Mostini est nommé par les Allemands responsable du groupe, ce qui nous retient de nous échapper, car il serait immédiatement fusillé. Le 2 janvier 1944 au matin, des camions nous conduisent à la gare, par la rue Gambetta, où toute la population s’est rassemblée pour nous dire au revoir. Nous sommes jetés dans des wagons à bestiaux, une vingtaine par wagon, les portes sont poussées et fermées, le train siffle et c’est le départ pour une destination inconnue » (Morlaix Tu-pe-tu, http://www.danielleropars.com/la_rafle.html).

Le 26 décembre 1944, Télégramme de Brest et de l'Ouest:

Anniversaire d'un Noël Tragique:

Il y a un an, les Allemands prenaient 60 otages à Morlaix et les déportaient

Heureux ceux qui vont pouvoir passer chez eux, en famille, ce premier Noël à la Libération. Que ces privilégiés pensent aux absents: aux soldats qui sont tombés pour leur pays, aux prisonniers, aux combattants de tous les fronts, aux déportés civils qui, souvent, sans raison, ont été arrachés à leurs foyers; aux infortunés sinistrés de nos villes martyres.

Nous ne saurions laisser passer ce Noël 1944 sans évoquer le sort malheureux des otages morlaisiens que les boches arrêtèrent le 26 décembre 1943, après avoir semé la terreur dans toute notre ville.

UNE GRENADE EXPLOSE

On se souvient que le 24 décembre 1943, vers 20h30, un inconnu lança de la rue Gambetta une grenade qui fut jetée dans les salons Quiviger, rue de Brest, siège du "Soldatenheim". Six militaires allemands furent blessés.

C'était un attentat absolument inutile, qui fut et qui est encore sévèrement critiqué.  

Il amena de la part des boches, des représailles tout à fait disproportionnées avec la gravité des faits. Ne pouvant découvrir le coupable de l'attentat, qui se réduisait, somme toute, à peu de chose, les nazis, selon leur méthode habituelle, s'en prirent à toute la population; ils frappèrent des innocents. 

Le 26 décembre, au matin, de nombreux S.S et parachutistes allemands, armés jusqu'aux dents, se répandirent dans les rues de Morlaix. Ils opéraient sous les ordres du capitaine Kruger, chef de la Gestapo de Rennes.

Dès 7 heures, les soldats teutons se firent ouvrir à coups de crosses de fusils et à coups de bottes les portes des maisons de la rue de Brest. Les soudards perquisitionnèrent ainsi dans toutes les maisons, emmenant les hommes et les jeunes gens de 16 à 40 ans, avec leur poste de TSF, lorsqu'ils en possédaient un.

Vers 8h30, les soldats allemands s'introduisirent chez Me Le Hire, avocat, rue Gambetta. Ils prétendirent, dit-on, y avoir trouvé quelques cartouches de chasse. En spécialistes, ils mirent le feu à l'immeuble, sans permettre à ses occupants d'emporter le moindre objet. Ils interdirent aux pompiers de combattre le sinistre et arrêtèrent Me Le Hire, Mlle Le Hire et son fiancé. 

Le fiancé de Mlle Le Hire fut relâché, mais Me Le Hire, bien que malade, et sa fille, furent emprisonnés: l'un pendant, près de deux mois, l'autre, durant quelques semaines.

Pendant ce temps, la rafle se poursuivait dans le centre de la ville: rue Gambetta, rue Carnot, rue du Mur, rue d'Aiguillon, Grand'Rue, rue de Paris, rue Basse, rue Haute, Place Emile Souvestre, Thiers, Cornic, de Viarmes, etc.

LA RAFLE

Dans toute la ville, c'était un défilé continuel d'otages, se rendant avec leurs appareils de TSF au lieu de rassemblement, place Thiers, sous la garde de soldats armés de mitraillettes ou de fusils, baïonnette au canon. 

Prévenus à temps, des jeunes gens, des hommes susceptibles d'être arrêtés, réussirent à s'enfuir ou se cacher.

Vers midi, près de 600 hommes se trouvaient entassés dans les abris de la place Thiers. Il était interdit de s'approcher d'eux.  (à suivre)

Le 27 décembre 1944, Télégramme de Brest et de l'Ouest:

Tous les hommes arrêtés passèrent alors individuellement devant le capitaine Kruger qui, après les avoir interrogés et après avoir examiné leur identité, les répartit en trois groupes: à droite, ceux qui allaient être libérés; à gauche, les otages, et au centre, ceux qui étaient tenus en réserve comme otages supplémentaires, en cas de besoin. 

L'officier de la Gestapo fixait son choix avec une brutalité et une morgue révoltantes. Il désigna M.Petit, parce qu'il n'était pas rasé et qu'il exerçait la proffesssion de coiffeur! Il relâcha tous les hommes qui étaient employés dans des entreprises travaillant pour l'armée allemande. 

60 OTAGES INNOCENTS

Finalement 60 jeunes hommes furent retenus comme otages. Il y avait parmi eux 30 ouvriers ou employés appartenant à des entreprises privées et 30 étudiants, commerçants, fils de commerçants, etc. Deux de ces otages, les jeunes Caën et du Rusquec, étaient des enfants de 16 ans. 

Le capitaine Kruger pris encore cinq autres otages qui classa à part et à qui il fit mettre les menottes.

Les appareils de TSF des otages furent confisqués. Tous les autres hommes arrêtés furent relâchés et remportaient leurs postes.

Parmi les otages, se trouvait M. le docteur Mostini, ancien prisonnier de guerre libéré. C'est à lui que nous avons demandé de nous relater les évènements qui vont suivre: 

A 13h30, nous dit le docteur Mostini, on nous a fait mettre en rangs pour monter au terrain d'aviation de Ploujean. Rendus au camp, on nous a mis dans une baraque, sur deux rangs, gardés par des Allemands armés de mitraillettes. Nous sommes restés debout trois heures durant. On nous avait prévenus que nous étions prisonniers et que toute tentative d'évasion serait sévèrement punie. J'ai alors été désigné comme responsable du groupe. En ma qualité de médecin, j'ai demandé que soit libérés 4 ou 5 otages qui étaient malades et dont l'un d'eux avait eu une crise d'asthme, en venant à l'aérodrome, mais ma proposition a été rejetée. (...)"   

 

On est début 1944, un an et quelques quatre mois plus tard seront libérés les prisonniers suppliciés des camps de concentration nazis. Mais chaque semaine est une épreuve dans les conditions de vie infernales où ils ont été plongés par les nazis et trente-quatre déportés de cette rafle sur cinquante-neuf ne reviendront pas des camps de concentration.

Cinq otages morlaisiens déportés étaient parvenus à s'enfuir le 22 janvier 1944 lors du transport vers l'Allemagne dans un convoi qui amenait 2005 prisonniers de Compiègne vers Buchenwald. Au cours de ce transport, quatorze prisonniers en tout parvinrent à s'enfuir à Vitry-le-François (51), Blesme (51) et Revigny (55). Les évadés finistériens du transport parti le 22 janvier 1944 à 8h30 de la gare de Compiègne étaient le docteur Georges Mostini, 33 ans, Marcel Bricaud, 21 ans, Jean Cozanet, 27 ans, François Le Bail, 22 ans, Jacques Le Flamand, 20 ans. Le 21 janvier, au camp de transit de Royal-Lieu, où 3000 hommes attendent leur déportation en Allemagne, le Docteur Mostini avait réuni les Otages et les avait déliés du serment de Ploujean, et annoncé que pour sa part, il profiterait de toutes les opportunités pour tenter l'évasion. Il avait récolté des adresses dans l'Est, le Nord, et la Belgique, qu'il avait distribué aux Otages. A Vitry le François, dans la Marne, au matin du 22 janvier 1944, après la feuille, un boulanger communiste offre au docteur Mostini une boule de pain dans laquelle il avait dissimulé, à l'insu de ce dernier, une scie à métaux. Le Flamanc et Mostini ont alors scié, par une fente, la tige du cadenas extérieur retenant la porte du wagon, ainsi que les barbelés disposés en croix sur le châssis.  

Voici le récit, publié par Danielle Ropars, que Yves Tanné fait de ce voyage atroce de 2 jours et 2 nuits entre le camp de transit de Compiègne et Buchenwald dans des wagons à bestiaux :

« Le train nous conduit à Compiègne, où convergent les trains venant de toute la France et d’où partent ceux qui emmènent les déportés vers les camps de concentration. Là, j’ai demandé le motif de mon arrestation. Réponse : élément anti-allemand, nuisible à l’Allemagne. On nous fait monter dans des wagons à bestiaux. Nous sommes 110 par wagon, à moitié debout, à moitié assis, appuyés les uns aux autres, constamment bousculés. De la paille comme litière. Un bidon de 200 litres pour les besoins naturels. Très vite le bidon se remplit et dégorge sur la paille. Une secousse le renverse et nous voilà sur du fumier pour le reste du voyage, qui va durer deux jours et deux nuits. Nous prenons peu à peu conscience de ce qui nous attend.

Nous avons une boule de pain et un saucisson pour toute nourriture. Rien à boire. Or, la soif est plus difficile à endurer que la faim. Nous en sommes à lécher la buée des parois. Nous changeons de place à tour de rôle pour pouvoir soulager la souffrance provoquée par la soif. A Trèves, on nous donne une espèce de bouillie, faite avec de l’eau et de la farine, mais de toute façon, il nous est impossible d’avaler quoi que ce soit.

Nous sommes comptés. Dans un wagon, il y a des absents. Ils se sont évadés. Parmi ceux-ci, Marcel Bricaud, Jean Cozanet, Jacques Le Flamand, François Le Bail, Georges Mostini, qui nous avait auparavant déliés de notre engagement envers lui, et nous avait encouragés à nous sauver. Furieux, les SS maltraitent ceux qui sont restés, leur enlèvent leurs vêtements et les répartissent avec brutalité, tout nus, dans les autres wagons. Nous sommes donc encore plus à l’étroit. La promiscuité rend les hommes angoissés, nerveux et prêts à se battre entre eux. Quand le train s’arrête enfin, nous sommes fatigués à l’extrême, hébétés, assoiffés. Nos vêtements sont maculés d’excréments. On relève cinq morts étalés sur le fumier de notre wagon. Deux hommes ont perdu la raison. Si, en plus, nous avions eu la chaleur de l’été, c’eut été une hécatombe. La dégradation psychologique et physique a été très rapide ».

Quand les otages morlaisiens déportés arrivent nus et considérablement affaiblis entassés dans leur wagons à bestiaux (130 par wagon) à Buchenwald le 24 janvier 1944, "au comité d'accueil, matraques à la main, flanqués de chiens, les SS ouvrent les portent. Volées de coups de crosse, de nerfs de boeufs, de bâtons. Aboiements, cris de douleurs, injures. Schnell! Schnell! Les hommes descendent comme des fous. Direction l'Effertenkammer, les bâtiments administratifs" (Louis Le Gros)

Cinquante-quatre otages morlaisiens arrivent donc à Buchenwald le 26 janvier 1944 et sur ces cinquante-quatre raflés et effectivement déportés, souvent jeunes (la plupart ont entre 18 et 24 ans) seuls 22 reviendront des camps de concentration, 32 seront morts dans les camps.

A l'arrivée au camp de Buchenwald, sur la grille d'entrée du camp, ces mots d'un cynisme sans borne: "Jeden Das Seine": A chacun son dû...

 

Morlaix - la rafle du 26 décembre 1943 et la déportation des Otages - racontée dans le Télégramme de Brest et de l'0uest un an plus tard, à partir du 26 décembre 1944

déportés à Buchenwald - Louis Le Gros

déportés à Buchenwald - Louis Le Gros

Les déportés morlaisiens dans les camps nazis pendant la seconde guerre mondiale
Monument des déportés de Flossenbürg au cimetière du père Lachaise à Paris- inauguré le 8 octobre 1988  (photo Ismaël Dupont) - Monument d'hommage aux déportés du camp de concentration nazi de Flossenbürg ( dix otages morlaisiens raflés le 26 décembre 1943 y sont morts: en tout 13 déportés morlaisiens mourront à Flossenbürg, sur 31 qui y transiteront)

Monument des déportés de Flossenbürg au cimetière du père Lachaise à Paris- inauguré le 8 octobre 1988 (photo Ismaël Dupont) - Monument d'hommage aux déportés du camp de concentration nazi de Flossenbürg ( dix otages morlaisiens raflés le 26 décembre 1943 y sont morts: en tout 13 déportés morlaisiens mourront à Flossenbürg, sur 31 qui y transiteront)

Monument d'hommage aux victimes des camps de concentration nazi de Buchenwald et de Dora: 5 déportés morlaisiens sont morts à Dora, 12 à 14 à Buchenwald. Monument inauguré le 5 avril 1964   La sculpture en bronze de Louis Bancel (ancien résistant du Vercors), installée sur une dalle de granit par l’architecte M. Romer (déporté à Buchenwald), rassemble dans une composition saisissante un groupe de trois déportés. La maigreur des trois hommes témoigne de la déchéance physique où conduit le système concentrationnaire. L’attitude de chacun des déportés renvoie à une symbolique précise: souffrance (homme renversé, figé dans la mort), solidarité (homme soutenant son compagnon), résistance et dignité (homme debout face à ses bourreaux).

Monument d'hommage aux victimes des camps de concentration nazi de Buchenwald et de Dora: 5 déportés morlaisiens sont morts à Dora, 12 à 14 à Buchenwald. Monument inauguré le 5 avril 1964 La sculpture en bronze de Louis Bancel (ancien résistant du Vercors), installée sur une dalle de granit par l’architecte M. Romer (déporté à Buchenwald), rassemble dans une composition saisissante un groupe de trois déportés. La maigreur des trois hommes témoigne de la déchéance physique où conduit le système concentrationnaire. L’attitude de chacun des déportés renvoie à une symbolique précise: souffrance (homme renversé, figé dans la mort), solidarité (homme soutenant son compagnon), résistance et dignité (homme debout face à ses bourreaux).

Monument de Dachau au Père Lachaise: un camp où 7 déportés morlaisiens vécurent le martyre

Monument de Dachau au Père Lachaise: un camp où 7 déportés morlaisiens vécurent le martyre

Monument d'hommage aux déportés de Ravensbruck, le camp où fut déportée Germaine Tillon, et où souffrirent au moins douze déportés morlaisiens: 120 000 femmes, dont 6600 françaises, et 20 000 hommes furent déportés à Ravensbrück, 60 000 déportés au moins y périrent)  Sculptés par Emile Morlaix dans le granit, deux énormes avant-bras surgissent d’un chaos rocheux devant un mur aux blocs parfaitement taillés.  L’ensemble traduit la brutalité et l’oppression à la fois organisées et arbitraires de l’univers concentrationnaire. Les poignets sont liés en signe d’asservissement.  Une des mains, qui retombe vers le sol, évoque l’affaiblissement et la mort de nombre de déportées.

Monument d'hommage aux déportés de Ravensbruck, le camp où fut déportée Germaine Tillon, et où souffrirent au moins douze déportés morlaisiens: 120 000 femmes, dont 6600 françaises, et 20 000 hommes furent déportés à Ravensbrück, 60 000 déportés au moins y périrent) Sculptés par Emile Morlaix dans le granit, deux énormes avant-bras surgissent d’un chaos rocheux devant un mur aux blocs parfaitement taillés. L’ensemble traduit la brutalité et l’oppression à la fois organisées et arbitraires de l’univers concentrationnaire. Les poignets sont liés en signe d’asservissement. Une des mains, qui retombe vers le sol, évoque l’affaiblissement et la mort de nombre de déportées.

Plus d'une centaine de déportés morlaisiens sont passés par plusieurs camps de sinistre mémoire:

Flossenbürg :  31 déportés morlaisiens y ont transité - au moins 13 déportés morlaisiens y sont morts

(Le camp de Flossenbürg Le KL Flossenbürg ouvre en mai 1938, près de Weiden, non loin de la frontière actuelle entre l’Allemagne et la République tchèque. Plus de 115 000 détenus (dont 16 000 femmes) sont passés dans le camp central et dans ses 95 Kommandos. 70 000 sont morts. Flossenbürg fournit de la main-d’œuvre aux entreprises de l’Allemagne centrale. Le camp, pratiquement vidé de tous ses détenus, évacués depuis plusieurs jours, est libéré par des troupes américaines le 23 avril 1945. Plus de 4500 Français et 950 Françaises sont passés par Flossenbürg. Aucun n’est arrivé directement de France, tous sont passés par au moins un autre camp).

Buchenwald : au moins 28 déportés morlaisiens y ont été détenus (mais Buchenwald a certainement servi de camps de transit pour d'autres) - de 12 à 14 déportés morlaisiens y meurent

(Le KL Buchenwald ouvre en juillet 1937, près de Weimar. Près de 240 000 détenus sont immatriculés à Buchenwald, dont 30 000 femmes, et près de 60 000 y meurent. Le camp compte plus de 130 Kommandos qui fournissent de la maind’œuvre aux industries de l’Allemagne centrale. En novembre 1938, Buchenwald est le principal lieu de détention des juifs arrêtés après la «nuit de cristal ». Durant la guerre, il accueille des prisonniers de marque pouvant servir d’otages. En 1945, arrivent un millier d’enfants juifs transférés du camp d’Auschwitz. Début avril 1945, les SS évacuent une grande partie des détenus. Les troupes américaines entrent à Buchenwald le 11 avril 1945, quelques heures après qu’une insurrection lancée par le Comité international clandestin eut libéré le camp. Ouvert en septembre 1943, le camp de Dora, situé près de la ville de Nordhausen, est d’abord un Kommando de Buchenwald. Il est associé à la construction des tunnels destinés à abriter les usines souterraines de fabrication des fusées V1 et V2. Les conditions de travail et de vie sont particulièrement terribles. En octobre 1944, Dora, Ellrich et d’autres Kommandos sont séparés administrativement de Buchenwald et sont rattachés au nouveau KL Mittelbau. Dans les dernières semaines, la masse des détenus est évacuée vers Bergen-Belsen ou Ravensbrück. Les troupes américaines entrent dans un camp presque vide le 11 avril 1945. 40 000 déportés sont passés à Dora, 25500 sont morts, dont 11000 lors des évacuations. Environ 26 000 Français sont passés à Buchenwald et dans ses Kommandos. Plus de la moitié meurt, notamment à Dora. En juin 1944, le Comité des intérêts français (CIF), dirigé par Frédéric-Henri Manhès, Marcel Paul et Jean Lloubes, est reconnu par le Comité international clandestin de résistance mis en place durant l’été 1943. Son action permet de soutenir le moral des Français et d’en sauver certains, sans pouvoir éviter la mort de beaucoup d’autres. Le Comité des intérêts français participe à l’insurrection libératrice du camp Source: Association Française pour la Mémoire de la Déportation).

Dora : 18 déportés morlaisiens y sont passé - au moins 5 déportés morlaisiens y meurent

Ravensbruck : 12 déportés y ont transité et ont été détenus dans ce camp de concentration essentiellement dédié aux femmes.

Bergen Belsen : 9 - au moins 7 déportés morlaisiens y meurent

Mathausen : 8

Kassel : 7

Dachau : 7

(Le camp de Dachau Le KL Dachau ouvre dès mars 1933, près de Munich, quelques semaines après l’arrivée au pouvoir des nazis. Environ 200000 détenus sont immatriculés dans le camp central et dans les 160 Kommandos. Près de 76 000 y meurent. Dachau fournit de la main d’œuvre pour les entreprises d’Allemagne du Sud. Le camp est libéré le 29 avril 1945 par des troupes américaines, alors qu’une partie des détenus a été évacuée dans les jours précédents. Dachau est le lieu d’internement de catégories particulières de détenus: les prêtres arrêtés sont regroupés dans le camp à partir de 1941-1942; des personnalités y sont placées sous surveillance afin de servir d’otages. Environ 12500 Français sont passés à Dachau, dont 6000 déportés directement depuis la France et 2100 prisonniers de guerre ou travailleurs arrêtés dans le Reich).

Auschwitz : 7 déportés morlaisiens

Reinbach : 6

Hradischko/Moldau: 5

Ellrich: 4

 

Les déportés morlaisiens qui ont survécu aux camps nazis:

Parmi les otages (22) :

Jean Ambroise, né le 1er décembre 1924 à Morlaix (19 ans lors de son arrestation), libéré à Hradiskko le 8 mai 1945.

Claude Bervoas, né le 18 novembre 1926 à Morlaix (17 ans lors de son arrestation)

Yves Bescam, né le 8 août 1922 à St Thégonnec (matricule 43 173). Autres lieux de déportation : Jena et Leitmeritz où il est libéré en mai 1945.

Jean Bourbigot : né le 13 février 1923 à Beuzec-Conq (29). (matricule 42615). Autres lieux de déportation : Dora, Ravensbrück. Il est libéré le 30 avril 1945.

Emile Cadiou : né à Morlaix le 1er mai 1914 (29 ans lors de son arrestation). Domicilié à Morlaix. Déporté de Morlaix le 2 janvier puis transféré de Compiègne vers le KL Buchenwald le 22 janvier 1944.

Georges Caën, le plus jeune des otages, 16 ans -né le 4 juillet 1928 à Brest, libéré le 11 avil 1945 à Buchenwald.

Gilles Cam, né le 25 septembre 1924 à Plourin-les-Morlaix (19 ans lors de son arrestation). Libéré le 8 mai 1945 à Kaplice.

Pierre Collober née le 11 avril 1919 à Plouyé. Déporté à Compiègne le 22 janvier 1944 vers le KL Buchenwald (Matricule 43 043). Autres lieux de détention : Laura, Dachau et Allach où il est libéré le 30 avril 1944.

Albert Guichen : né le 12 mai 1925 à Morlaix. (Matricule 42 886). Autres lieux de déportatio : Dora, Ravensbrück. Il est libéré en mai 1945

François Herrou, né le 29 juillet 1925 à Morlaix. Déporté de Compiègne le 22 janvier 1944 vers le KL Buchenwald (matricule 42 952). Autres lieux de déportation : Dora, Ravensbrück, Machow. Il est libéré début 1945 à Plau.

Henri Kerinon né le 21 novembre 1924 à Douarnenez (Matricule 43 042). Revenu des camps.

Louis Kervellec né le 17 juilet 1926 à Morlaix (Matricule 42 134). Revenu des camps

Raoul de l'estang du Ruquec (Duresquec), né le 30 septembre 1927 à Morlaix (16 ans lors de son arrestation). Déporté à Buchenwald, Mauthausen.

Victor Le Goff né le 23 octobre 1920 à Brest (Matricule 42 698). Autre lieu de déportation : Dora, Ravensbrück. Revenu des camps

Louis Le Gros né le 20 août 1916 à Plougasnou (27 ans lors de son arrestation). Auteur d’œuvres d'art représentant les camps nazis, réalisées en déportation et après.

Jacques Mazé : né le 26 avril 1923 à Sizun. Revenu des camps

Jean Moreau né le 4 novembre 1924 à Morlaix (19 ans lors de son arrestation. Buchenwald, Langenstein.

Jacques Quintin, né le 30 décembre 1925 (18 ans au moment de son arrestation). Buchenwald, transféré à Ravensbrück le 3 juin 1944.

Léon Picart, né le 12 avril 1903 à Plouvorn. (matricule 41 507). Autres lieux de déportation ; Ravensbrück, Dora, Bergen-Belsen où il est libéré le 15 avril 1945.

Léon Rivoalen 

Albert Sénéchal, né le 9 décembre 1910 à Brest (matricule 42 081). Autre lieu de déportation : Dachau. Revenu des camps.

Paul Simon, né le 20 août 1912 à Brest (matricule 42 390). Revenu des camps

Yves Tanné, né le 4 octobre 1924 à Plougonven (matricule 43 011). Autres lieux de déportation : Flossenburg, Hradischko/moldau. Revenu des camps. Il décède le 26 octobre 2011.

Théophile Thomas : né le 2 février 1924 à Plourin. (matricule 42 462). Autre lieu de déportation : Flossebbürg. Revenu des camps

Jean Trolez : né le 2 juin 1922 à Beuzec-Conq (29). Autres lieux de déportation : Dora, Dachau. Il est libéré le 29 avril 1945 à Dachau.

Autres déportés morlaisiens rescapés (en dehors des otages):

André Bellec : né le 18 février 1921 au Havre (76). Domicilié à Locquénolé au moment de son arrestation, il est incarcéré à la prison Jacques Cartier à Rennes. Il y reste juqu'au 23 juin 1944, date à laquelle il est transféré à Compiègne puis, le 15 juillet 1944 vers le KL Neuengamme. Lieux de déportation : Hambourg, Bremen (Brême), Osterort, Politz, Wöbbelin, Schandelah. Revenu.

Jean Bellec : né le 14 mai 1926 à Ploujean. Domicilié à Lantic au moment de son arrestation le 15 octobre 1943 par la gendarmerie d'Etables (22, suite à une attaque de la Poste de Lantic. Il faisait partie d'un groupe de résistants dirigé par Jean Audouin. Il est déporté de Rennes début août 1944 vers belfort, puis est transféré vers Neuengramme le 29 août 1944. (Matricule 43 601). Autres lieux : Hambourg, Sandbostel.

Augustine Bonnemaison, née le 28 août 1915 à Bolazec. Domiciliée à Morlaix au moment de son arrestation. Déportée le 15 août 1944 vers le KL Ravensbrück (Matricule 57 459). Autres lieux de déportation : Leipzig, Schönefeld-Leipzig. Elle est libérée à Polenz.

200 déportées bretonnes passèrent par Ravensbrück, 55 d'entre elles périrent dans les camps nazis. La plus jeune avait 21 ans, la plus âgée 78 ans.

« Ce transport, l’un de ceux qui emportèrent le plus grand nombre de déportés vers l’Allemagne soit 548 femmes vers Ravensbruck et 1654 hommes vers Buchenwald , aurait dû quitter Paris le 12 août mais une grève des cheminots retarda le départ. De plus les sabotages dans la Gare de L’Est par la Résistance, dans la nuit du 12 au 13 août, conduisirent les nazis à former le convoi en gare de Pantin, les prisonniers étant extraits des prisons de Fresnes et du Cherche Midi ainsi que des forts de Romainville et de Compiègne dans la matinée du 15 août. La durée du trajet de la soirée du 15 jusqu’au 21 août fut provoquée, d’une part par des tentatives d’évasion que les SS encadrant le transport réprimèrent par des exécutions, et d’autre part, par diverses interventions de la Croix Rouge et du Consul de Suède à Paris, Raoul Nording. Ce dernier était parvenu à obtenir un accord des autorités militaires allemandes pour avoir, sous sa « protection », les prisonniers du convoi, démarches qui furent toutes rejetées par le SS chef du train. Toutefois, à Bar Le Duc, le 19 août, la Croix Rouge obtint la libération de trois femmes et d’un prêtre polonais malade.
Arrivées à Ravensbrück,
le 21 août 1944, la plupart des femmes furent transférées dans des Kommandos extérieurs, notamment ceux d’ Abteroda où étaient fabriqués des explosifs, Markkleberg, où étaient fabriqués des leviers d’ailes d’avion pour la firme Junkers, Rechlin pour la construction d’un terrain d’aviation et Torgau, où se trouvait une usine de fabrication de munitions et d’ explosifs » (http://www.resistances-morbihan.fr/ravensbruck-3/).

Marcel Briand : né le 24 mai 1910 à St Martin des Champs. Domicilié à Sauderneau au moment de son arrestation. Arrêté le 20 décembre 1943 à Plerguer, il est déporté à Comùpiègne le 27 janvier 1944 vers le KL Buchenwald (Matricule 43 699). Autres lieux de déportation ; Dora, Ellrich, Blankeburg où il est rapatrié en avril 45.

Emile Brodin : né le 28 mars 1898 à Ambrières. Domicilié à St Martin des Champs au moment de son arrestation. Déporté à Compiègne le 23 juin 1943 vers le KL Buchenwald 5matricule 14 716). autres lieux de déportation : Karshagen/ Peenemüde, Dora, Lublin

François Corbel né le 21 juin 1912 à Plourin. Domicilé à Morlaix au moment de son arrestation. Il est déporté des prisons de la zone occupée vers celles du Reich le 18 novembre 1943. Son parcours : Karlsruhe, Rheinbach, Kassel. Rapatrié le 26 avril 1945.

Désiré Gardaz né le 5 novembre 1918 à Morlaix. Domicilié à Paris au moment de son arrestation. Il est déporté de Compiègne le 16 avril 1943 vers le KL Mathausen (matricule : 27141). Son parcours : Wiener Neustadt, Buchenwald (le 30 octobre 1943. Matricule 30 535), Dora. Revenu des camps.

Odette Hamon née le 31 août 1916 à Morlaix, célibataire, domiciliée à Tertre-de-la-Villette en Ploufragan (22), arrêtée en août 1943 pour « menées anti-nationales ». Elle est déportée de Paris, gare de l'est, le 18 avril 1944 vers le KL Ravensbrück (matricule 35 368). Revenue des camps.

Jean Herry : né le 5 septembre 1905 à Plourin les Morlaix. Déporté à Compiègne le 6 avril 1944 vers le KL Mauthausen (matricule 62547). Revenu des camps.

Alphonse Le Bihan : né le 30 juillet 1921 à Plourin. Domicilié à Morlaix au moment de son arrestation. Il est déporté le 4 août 1941. Son parcours : Kassel, Rheinbach, Sieburg. Il est libéré le 10 avril 1945 à Siegbourg.

Roger Le Corre : né le 23 mars 1918 à Ploujean. Arrêté à Guernesey en tentant de rejoindre l'Angleterre par la mer. Lieux de déportation : Kassel, Rheinbach, Kassel, Strau. Evadé lors de l'évacuation du camp le 23 avril 1943.

Marie Lecomte : née le 27 mars 1905 à Morlaix. Domiciliée à Morlaix au moment de son arrestation. Elle est déportée le 15 août 1944 de Pantin vers le KL Ravensbrück (matricule 57 577). autres lieux de déportation : Torgau, Königsberg, Leimeritz où elle est libérée.

Jean Lelay : né le 25 juillet 1921 à Morlaix. Arrêté à Guernesey en tentant de rejoindre l'Angleterre sur une barque. Lieux de déportation : Kassel, Rheinbach, Siegburg. Libéré le 10 avril 1945 à Siegburg.

Yves Lemoigne : né le 6 mars 1926 à St Martin des Champs. Arrêté le 2 mars 1942 à Rennes. Déporté le 4 juin 1942. Convoi parti de Paris, gare de l'est, et arrivé à Hinzert le 5 juin 1942, matricule 4249. Libéré le 8 mai 1945 à Hischberg (Kommando du KL Gross Rosen). Autres lieux de déportation : prison de Breslau, prison de Scweidnitz, prison de Willitch.

Christiane Le Scornet : née le 6 août 1927 à Morlaix. Domiciliée à Morlaix au moment de son arrestation. Elle est déportée le 15 août 1944 de Pantin vers le KL Ravensbrück (matricule 57582). son parcours : Torgau, Königsberg, Mathausen où elle est libérée le 22 avril 1945 par la Croix Rouge.

Marie Mesguen Le Roy : née le 9 mai 1907 à St Martin des Champs. Arrêtée à Morlaix. Elle est déportée de Paris, gare de l'est, vers Sarrebrück Neue Bremm le 18 juillet 1944 . Elle est libérée à la frontière germano-suisse par la Croix Rouge le 9 avril 1945.

Jeanne Moguérou / Rosant : née le 13 novembre 1943 à Morlaix. Arrêtée à Panly (76), elle est déportée de Paris, gare de l'est, le 18 avril 1944 vers le KL Ravensbrück (matricule 35 429).

Jean Mona : né e 15 août 1922 à Morlaix. Il est déporté dans les prisons du Reich. Son parcours ; arrivé au KL Buchenwald le 4 novembre 1944 (matricule 78 340).

Jean Mons : né le 15 août 1922 à Morlaix. Arrêté à Lille, déporté à Bad-Sazungen. Autres lieux de déportation : Mein, Untermassfeld, Weimar, Buchenwald, Schömberh, Westeregeln. Libéré le 4 mai 1945.

André Noizet : né le 30 mars 1898 à Plourin les Morlaix. Arrêté à St Menehoud. Il est déporté de Compiègne le 18 juin 1944 vers le KL Dachau (matricule 72 811). Autre lieu de déportation : Allach, où il est libéré le 30 avril 1945.

Jean Papin : né le 22 octobre à Morlaix. En 1941, il s'installe comme médecin à Mamers (Sarthe). En octobre 1941, il entre en résistance (réseau Buckmaster). Arrêté par la Gestapo le 29 avril 1944, il est déporté de Compiègne le 4 juin 1944 vers le KL Neueungamme (matricule 33888). Autres lieux de déportation : Auschwitz, Mauthensen, Melk, Ebensee d'où il est rapatrié le 5 mai 1945. Officier de la Légion d'Honneur. Médaille de la résistance. Croix de guerre. Décédé le 9 mai 2009.

Laurent Parc : né le 24 juillet 1921 à Morlaix. Il fut déporté le 4 août 1941. Son parcours : Kassel, Rheinbach, Sieburg, Han, Hameln. Il fut rapatrié le 4 avril 1945 à Hamelin.

Jean Prigent : né le 10 novembre 1912 à Morlaix. Membre des Corps Francs Vengeance du Finistère. Déporté le 2 ou 3 août 1944 vers Belfort. Transféré de Belfort à Natzweiler le 26 août 1944 (matricule 24 020). Autres lieux de déportation : Dachau, Haslach, Vaihingen. Rapatrié le 7 avril 1945 à Vaihingen. Déporté et revenu.

Louis Quéguiner : né à Morlaix le 12 mai 1923. Arrêté à Guernesey en tentant de rejoindre l'Angleterre par mer. Lieux de déportation : Kassel, Sarrebruck, Frankenthal. Libéré le 20 avril 1943 à Frankenthal.

Jean Rolland : né le 27 mars 1921 à Morlaix. Responsable d'un groupe de résistance, il participe à la rédaction et à l'impression de journaux clandestins, héberge des FTPF, forme des groupes de jeunes, sabote du matériel SNCF, collecte des vivres et de l'argent pour les internés politiques. Il est arrêté le 2 mars 1942 à Rennes, il est déporté de Compiègne le 22 mars 1944 vers le KL Mauthausen. Il est libéré le 5 mai 1945 à Linz III. Décédé en juillet 2015.

Pierre Ropars : né le 26 juin 1917 à Morlaix. Incarcéré à la prison Jacques Cartier à Rennes. Il y reste jusqu'au 23 juin 1944, date à laquelle il est transféré à Compiègne puis, le 2 juillet 1944, vers le KL Dachau (matricule 77 362) Autre lieu de déportation : Neckarelz. Libéré des camps en avril 1945.

Les déportés morlaisiens dans les camps nazis pendant la seconde guerre mondiale

Les déportés morlaisiens qui ont survécu aux camps nazis:

Parmi les otages du 26 décembre 1943 (22) :

Jean Ambroise, né le 1er décembre 1924 à Morlaix (19 ans lors de son arrestation), libéré à Hradiskko le 8 mai 1945.

Claude Bervoas, né le 18 novembre 1926 à Morlaix (17 ans lors de son arrestation)

Yves Bescam, né le 8 août 1922 à St Thégonnec (matricule 43 173). Autres lieux de déportation : Jena et Leitmeritz où il est libéré en mai 1945.

Jean Bourbigot : né le 13 février 1923 à Beuzec-Conq (29). (matricule 42615). Autres lieux de déportation : Dora, Ravensbrück. Il est libéré le 30 avril 1945.

Emile Cadiou : né à Morlaix le 1er mai 1914 (29 ans lors de son arrestation). Domicilié à Morlaix. Déporté de Morlaix le 2 janvier puis transféré de Compiègne vers le KL Buchenwald le 22 janvier 1944.

Georges Caën, le plus jeune des otages, 16 ans - né le 4 juillet 1928 à Brest, libéré le 11 avril 1945 à Buchenwald.

Gilles Cam, né le 25 septembre 1924 à Plourin-les-Morlaix (19 ans lors de son arrestation). Libéré le 8 mai 1945 à Kaplice.

Pierre Collober née le 11 avril 1919 à Plouyé. Déporté à Compiègne le 22 janvier 1944 vers le KL Buchenwald (Matricule 43 043). Autres lieux de détention : Laura, Dachau et Allach où il est libéré le 30 avril 1944.

Albert Guichen : né le 12 mai 1925 à Morlaix. (Matricule 42 886). Autres lieux de déportatio : Dora, Ravensbrück. Il est libéré en mai 1945

François Herrou, né le 29 juillet 1925 à Morlaix. Déporté de Compiègne le 22 janvier 1944 vers le KL Buchenwald (matricule 42 952). Autres lieux de déportation : Dora, Ravensbrück, Machow. Il est libéré début 1945 à Plau.

Henri Kerinon né le 21 novembre 1924 à Douarnenez (Matricule 43 042). Revenu des camps.

Louis Kervellec né le 17 juilet 1926 à Morlaix (Matricule 42 134). Revenu des camps

Raoul de l'estang du Ruquec (Duresquec), né le 30 septembre 1927 à Morlaix (16 ans lors de son arrestation). Déporté à Buchenwald, Mauthausen.

Victor Le Goff né le 23 octobre 1920 à Brest (Matricule 42 698). Autre lieu de déportation : Dora, Ravensbrück. Revenu des camps

Louis Le Gros né le 20 août 1916 à Plougasnou (27 ans lors de son arrestation). Auteur de superbes œuvres d'art représentant la vie dans les camps nazis et ses camarades de captivité, réalisées en déportation et après.

https://musee.ville.morlaix.fr/wp-content/uploads/2015/08/Mus%c3%a9e-Morlaix_dossier-presse_exposition_Louis-Le-Gros_Otages_26-oct-13-25-janv-14.pdf

Jacques Mazé : né le 26 avril 1923 à Sizun. Revenu des camps

Jean Moreau né le 4 novembre 1924 à Morlaix (19 ans lors de son arrestation. Buchenwald, Langenstein.

Jacques Quintin, né le 30 décembre 1925 (18 ans au moment de son arrestation). Buchenwald, transféré à Ravensbrück le 3 juin 1944.

Léon Picart, né le 12 avril 1903 à Plouvorn. (matricule 41 507). Autres lieux de déportation ; Ravensbrück, Dora, Bergen-Belsen où il est libéré le 15 avril 1945.

Léon Rivoalen

Albert Sénéchal, né le 9 décembre 1910 à Brest (matricule 42 081). Autre lieu de déportation : Dachau. Revenu des camps.

Paul Simon, né le 20 août 1912 à Brest (matricule 42 390). Revenu des camps

Yves Tanné, né le 4 octobre 1924 à Plougonven (matricule 43 011). Autres lieux de déportation : Flossenburg, Hradischko/moldau. Revenu des camps. Il décède le 26 octobre 2011.

Théophile Thomas : né le 2 février 1924 à Plourin. (matricule 42 462). Autre lieu de déportation : Flossebbürg. Revenu des camps

Jean Trolez : né le 2 juin 1922 à Beuzec-Conq (29). Autres lieux de déportation : Dora, Dachau. Il est libéré le 29 avril 1945 à Dachau.

 

Autres déportés morlaisiens rescapés

(en dehors des otages):

 

André Bellec : né le 18 février 1921 au Havre (76). Domicilié à Locquénolé au moment de son arrestation, il est incarcéré à la prison Jacques Cartier à Rennes. Il y reste juqu'au 23 juin 1944, date à laquelle il est transféré à Compiègne puis, le 15 juillet 1944 vers le KL Neuengamme. Lieux de déportation : Hambourg, Bremen (Brême), Osterort, Politz, Wöbbelin, Schandelah. Revenu.

Jean Bellec : né le 14 mai 1926 à Ploujean. Domicilié à Lantic au moment de son arrestation le 15 octobre 1943 par la gendarmerie d'Etables (22, suite à une attaque de la Poste de Lantic. Il faisait partie d'un groupe de résistants dirigé par Jean Audouin. Il est déporté de Rennes début août 1944 vers Belfort, puis est transféré vers Neuengramme le 29 août 1944. (Matricule 43 601). Autres lieux : Hambourg, Sandbostel.

Augustine Bonnemaison, née le 28 août 1915 à Bolazec. Domiciliée à Morlaix au moment de son arrestation. Déportée le 15 août 1944 vers le KL Ravensbrück (Matricule 57 459). Autres lieux de déportation : Leipzig, Schönefeld-Leipzig. Elle est libérée à Polenz.

200 déportées bretonnes passèrent par Ravensbrück, 55 d'entre elles périrent dans les camps nazis. La plus jeune avait 21 ans, la plus âgée 78 ans.

« Ce transport, l’un de ceux qui emportèrent le plus grand nombre de déportés vers l’Allemagne soit 548 femmes vers Ravensbruck et 1654 hommes vers Buchenwald , aurait dû quitter Paris le 12 août mais une grève des cheminots retarda le départ. De plus les sabotages dans la Gare de L’Est par la Résistance, dans la nuit du 12 au 13 août, conduisirent les nazis à former le convoi en gare de Pantin, les prisonniers étant extraits des prisons de Fresnes et du Cherche Midi ainsi que des forts de Romainville et de Compiègne dans la matinée du 15 août. La durée du trajet de la soirée du 15 jusqu’au 21 août fut provoquée, d’une part par des tentatives d’évasion que les SS encadrant le transport réprimèrent par des exécutions, et d’autre part, par diverses interventions de la Croix Rouge et du Consul de Suède à Paris, Raoul Nording. Ce dernier était parvenu à obtenir un accord des autorités militaires allemandes pour avoir, sous sa « protection », les prisonniers du convoi, démarches qui furent toutes rejetées par le SS chef du train. Toutefois, à Bar Le Duc, le 19 août, la Croix Rouge obtint la libération de trois femmes et d’un prêtre polonais malade.
Arrivées à Ravensbrück,
le 21 août 1944, la plupart des femmes furent transférées dans des Kommandos extérieurs, notamment ceux d’ Abteroda où étaient fabriqués des explosifs, Markkleberg, où étaient fabriqués des leviers d’ailes d’avion pour la firme Junkers, Rechlin pour la construction d’un terrain d’aviation et Torgau, où se trouvait une usine de fabrication de munitions et d’ explosifs » (http://www.resistances-morbihan.fr/ravensbruck-3/).

Marcel Briand : né le 24 mai 1910 à St Martin des Champs. Domicilié à Sauderneau au moment de son arrestation. Arrêté le 20 décembre 1943 à Plerguer, il est déporté à Compiègne le 27 janvier 1944 vers le KL Buchenwald (Matricule 43 699). Autres lieux de déportation ; Dora, Ellrich, Blankeburg où il est rapatrié en avril 45.

Emile Brodin : né le 28 mars 1898 à Ambrières. Domicilié à St Martin des Champs au moment de son arrestation. Déporté à Compiègne le 23 juin 1943 vers le KL Buchenwald 5matricule 14 716). autres lieux de déportation : Karshagen/ Peenemüde, Dora, Lublin

François Corbel né le 21 juin 1912 à Plourin. Domicilé à Morlaix au moment de son arrestation. Il est déporté des prisons de la zone occupée vers celles du Reich le 18 novembre 1943. Son parcours : Karlsruhe, Rheinbach, Kassel. Rapatrié le 26 avril 1945.

Désiré Gardaz né le 5 novembre 1918 à Morlaix. Domicilié à Paris au moment de son arrestation. Il est déporté de Compiègne le 16 avril 1943 vers le KL Mathausen (matricule : 27141). Son parcours : Wiener Neustadt, Buchenwald (le 30 octobre 1943. Matricule 30 535), Dora. Revenu des camps.

Odette Hamon née le 31 août 1916 à Morlaix, célibataire, domiciliée à Tertre-de-la-Villette en Ploufragan (22), arrêtée en août 1943 pour « menées anti-nationales ». Elle est déportée de Paris, gare de l'est, le 18 avril 1944 vers le KL Ravensbrück (matricule 35 368). Revenue des camps.

Jean Herry : né le 5 septembre 1905 à Plourin les Morlaix. Déporté à Compiègne le 6 avril 1944 vers le KL Mauthausen (matricule 62547). Revenu des camps.

Alphonse Le Bihan : né le 30 juillet 1921 à Plourin. Domicilié à Morlaix au moment de son arrestation. Il est déporté le 4 août 1941. Son parcours : Kassel, Rheinbach, Sieburg. Il est libéré le 10 avril 1945 à Siegbourg.

Roger Le Corre : né le 23 mars 1918 à Ploujean. Arrêté à Guernesey en tentant de rejoindre l'Angleterre par la mer. Lieux de déportation : Kassel, Rheinbach, Kassel, Strau. Evadé lors de l'évacuation du camp le 23 avril 1943.

Marie Lecomte : née le 27 mars 1905 à Morlaix. Domiciliée à Morlaix au moment de son arrestation. Elle est déportée le 15 août 1944 de Pantin vers le KL Ravensbrück (matricule 57 577). autres lieux de déportation : Torgau, Königsberg, Leimeritz où elle est libérée.

Jean Lelay : né le 25 juillet 1921 à Morlaix. Arrêté à Guernesey en tentant de rejoindre l'Angleterre sur une barque. Lieux de déportation : Kassel, Rheinbach, Siegburg. Libéré le 10 avril 1945 à Siegburg.

Yves Lemoigne : né le 6 mars 1926 à St Martin des Champs. Arrêté le 2 mars 1942 à Rennes. Déporté le 4 juin 1942. Convoi parti de Paris, gare de l'est, et arrivé à Hinzert le 5 juin 1942, matricule 4249. Libéré le 8 mai 1945 à Hischberg (Kommando du KL Gross Rosen). Autres lieux de déportation : prison de Breslau, prison de Scweidnitz, prison de Willitch.

Christiane Le Scornet : née le 6 août 1927 à Morlaix. Domiciliée à Morlaix au moment de son arrestation. Elle est déportée le 15 août 1944 de Pantin vers le KL Ravensbrück (matricule 57582). son parcours : Torgau, Königsberg, Mathausen où elle est libérée le 22 avril 1945 par la Croix Rouge.

Marie Mesguen Le Roy : née le 9 mai 1907 à St Martin des Champs. Arrêtée à Morlaix. Elle est déportée de Paris, gare de l'est, vers Sarrebrück Neue Bremm le 18 juillet 1944 . Elle est libérée à la frontière germano-suisse par la Croix Rouge le 9 avril 1945.

Jeanne Moguérou / Rosant : née le 13 novembre 1943 à Morlaix. Arrêtée à Panly (76), elle est déportée de Paris, gare de l'est, le 18 avril 1944 vers le KL Ravensbrück (matricule 35 429).

Jean Mona : né e 15 août 1922 à Morlaix. Il est déporté dans les prisons du Reich. Son parcours ; arrivé au KL Buchenwald le 4 novembre 1944 (matricule 78 340).

Jean Mons : né le 15 août 1922 à Morlaix. Arrêté à Lille, déporté à Bad-Sazungen. Autres lieux de déportation : Mein, Untermassfeld, Weimar, Buchenwald, Schömberh, Westeregeln. Libéré le 4 mai 1945.

André Noizet : né le 30 mars 1898 à Plourin les Morlaix. Arrêté à St Menehoud. Il est déporté de Compiègne le 18 juin 1944 vers le KL Dachau (matricule 72 811). Autre lieu de déportation : Allach, où il est libéré le 30 avril 1945.

Jean Papin : né le 22 octobre à Morlaix. En 1941, il s'installe comme médecin à Mamers (Sarthe). En octobre 1941, il entre en résistance (réseau Buckmaster). Arrêté par la Gestapo le 29 avril 1944, il est déporté de Compiègne le 4 juin 1944 vers le KL Neueungamme (matricule 33888). Autres lieux de déportation : Auschwitz, Mauthensen, Melk, Ebensee d'où il est rapatrié le 5 mai 1945. Officier de la Légion d'Honneur. Médaille de la résistance. Croix de guerre. Décédé le 9 mai 2009.

Laurent Parc : né le 24 juillet 1921 à Morlaix. Il fut déporté le 4 août 1941. Son parcours : Kassel, Rheinbach, Sieburg, Han, Hameln. Il fut rapatrié le 4 avril 1945 à Hamelin.

Jean Prigent : né le 10 novembre 1912 à Morlaix. Membre des Corps Francs Vengeance du Finistère. Déporté le 2 ou 3 août 1944 vers Belfort. Transféré de Belfort à Natzweiler le 26 août 1944 (matricule 24 020). Autres lieux de déportation : Dachau, Haslach, Vaihingen. Rapatrié le 7 avril 1945 à Vaihingen. Déporté et revenu.

Louis Quéguiner : né à Morlaix le 12 mai 1923. Arrêté à Guernesey en tentant de rejoindre l'Angleterre par mer. Lieux de déportation : Kassel, Sarrebruck, Frankenthal. Libéré le 20 avril 1943 à Frankenthal.

Jean Rolland : né le 27 mars 1921 à Morlaix. Responsable d'un groupe de résistance, il participe à la rédaction et à l'impression de journaux clandestins, héberge des FTPF, forme des groupes de jeunes, sabote du matériel SNCF, collecte des vivres et de l'argent pour les internés politiques. Il est arrêté le 2 mars 1942 à Rennes, il est déporté de Compiègne le 22 mars 1944 vers le KL Mauthausen. Il est libéré le 5 mai 1945 à Linz III. Décédé en juillet 2015.

Pierre Ropars : né le 26 juin 1917 à Morlaix. Incarcéré à la prison Jacques Cartier à Rennes. Il y reste jusqu'au 23 juin 1944, date à laquelle il est transféré à Compiègne puis, le 2 juillet 1944, vers le KL Dachau (matricule 77 362) Autre lieu de déportation : Neckarelz. Libéré des camps en avril 1945.

Voici les otages morlaisiens qui ont perdu leur vie en déportation (32 sur 54) :

Morts à Buchenwald : neuf otages

Bizien Guéguen

Georges Le Coz, né le 28 août 1925, décédé le 9 février 1945 (à Buchenwald?)

Michel Martin, né le 28 avril 1924 à Morlaix, décédé le 9 février 1945 (à Weimar)

Roger Marzin (Weimar)

Henri Le Rumeur, né le 30 octobre 1920, 24 ans, y meurt le 29 août 1944.

Jean Nédelec, né le 6 décembre 1922 à Morlaix, décédé le 19 mars 1944 à l'âge de 21 ans.

Paul Rumen, né à Morlaix le 8 janvier 1988, y décède à 56 ans le 8 mars 1944.

Guy Pape, né le 22 juillet 1925 à Morlaix, 18 ans, « un magnifique athlète », meurt un mois après son arrivée à Buchenwald le 9 février 1944.

Joseph Plassart, né le 13 avril 1919 à Plourin les Morlaix, passé par Ravensbrück

"Le camp de Buchenwald est libéré par les Américains le 12 avril 1945. Le 13 avril 1945, horrifiés par la vision qui s'offre à eux, les Américains ordonnent à la population de Weimar, autorités civiles en tête, de visiter le camp. Le spectacle est édifiant: partout des cadavres, des morts-vivants, des épaves humaines. Ils défilent devant nous, un mouchoir sur le visage. Quelques jours après, départ des camions de la mission papale. Eisenach, Francfort, Paris, enfin, gare de l'Est. Direction l'hôpital de la Salpétrière où nous séjournons trois semaines. Puis Morlaix. Pour la plupart d'entre eux, les Otages sont déjà arrivés, les familles des disparus ont été prévenues. Le long, l'interminable et sanglant périple s'achève" (Louis Le Gros, otage déporté de Morlaix, rescapé, qui a admirablement témoigné de l'enfer concentrationnaire nazi dans ses peintures et dessins pleins d'humanité et de sens de l'observation). Louis Le Gros avait échappé à une marche de la mort dans une plaine enneigée à Flössberg, où, accusés de sabotage, des centaines de prisonniers de Buchenwald marchèrent pieds nus par colonnes de cinq pendant des heures sous les coups des SS.   

Morts à Flossenbürg : 10 otages morlaisiens meurent dans ce camp de concentration.

Théophile Chauvel, né le 5 mai 1924 à Plourac'h, y décède le 27 novembre 1944 à 20 ans.

François Créach, né le 16 juillet 1925 à Morlaix

Joseph Huet, né le 21 août 1923, y décède le 14 août 1944

Jacques Kerné, 18 ans, y meurt le 6 mars 1945 après être passé par Hradischko.

Roger Larher, 21 ans, le 9 mars 1944

Marcel Lemaire, otage morlaisien de 19 ans né le 14 septembre 1924 à Paris, décède le 8 mai 1944 à Flossenbürg, probablement assassiné froidement après avoir été blessé par un wagon dans une carrière, selon le témoignage glaçant d'Yves Tanné:

« Flossenburg Le 15 février 1944, nous partons pour Flossenburg, entassés à trente prisonniers dans un wagon, par un froid glacial. Sur les conseils des anciens prisonniers, nous avons dansé toute la nuit, sans nous arrêter, dos à dos, pour nous réchauffer et aussi pour rester éveillés, car celui qui s’écroulait pour dormir, ne se relevait pas.
A Flossenburg, nous avions à travailler dans une carrière dans laquelle les Allemands faisaient sauter les mines, sans nous prévenir de nous mettre à l’abri. Il y a donc eu des morts, à la suite des explosions. Nous devions charger un wagon, placé sur un plateau, au bord d’un ravin. Travail inutile et éreintant, qui aurait pu être évité, car il suffisait de jeter directement nos pelletées de sable dans le ravin. Trop simple. L’ordre était de remplir le wagon, puis de le vider dans le ravin. Il arrivait souvent que le wagon descende dans le ravin. Il fallait alors le remonter à la force des poignets sous les coups des kapos. L’expérience nous avait appris qu’il ne fallait pas entourer les bras ou les mains de la corde qui tirait le wagon. Le risque était d’être emporté avec le wagon dans sa descente. Marcel Lemaire avait négligé ce conseil, il fut entraîné derrière le wagon qu’il voulait retenir et eut les os brisés. Il fut relevé, emmené au camp. Il hurlait de douleur. Le lendemain matin, deux Morlaisiens l’aidèrent à se lever pour aller au comptage avant d’aller au chantier. A l’appel, Marcel avait du mal à se tenir debout, malgré le soutien de ses deux camarades. Le kapo passe et bastonne le groupe. Marcel tombe. Nous ne l’avons plus revu. Pour survivre, il fallait essayer de ménager ses forces, et être sur ses gardes à tout instant.

Georges Le Roy, décède à 24 ans le 21 juillet 1944 dans le Kommando du camp de Flossenbürg, (usines Messerschmit à Johannegeorgenstadt) 

Jean Simon, 32 ans, y décède le 13 juillet 1944 après être passé par Ravensbrück, Flossenbürg.

Paul Tanguy, né le 30 août 1919 à Morlaix, décède à 24 ans le 26 mars 1944

Jean Therene, né le 6 juillet 1917 à Brest, décède le 15 novembre 1944 à 27 ans

A propos du camp de concentration de Flossenburg en Bavière (sud de l'Allemagne) : camp construit par un Kommando de Dachau en 1938, 96 000 prisonniers y transitèrent, dont 30 000 y trouvèrent la mort. On estime à 5 344, dont 965 femmes, le nombre de Français passés par ce camp avant avril 1945. Parmi les 4475 hommes recensés, au moins 2400 sont décédés. Le travail imposé tourne toujours autour de deux grands axes : d’une part l’industrie de l’armement, et en particulier de l’aéronautique avec des usines Messerschmitt (le Kommando du camp de Flossenbürg qui fait travailler les esclaves des nazis pour l'usine d'aviation Messerschmit s'appelle Johanngeorgenstadt), et d’autre part les travaux dans les carrières de granit, le forage de tunnels et d’usines souterraines.

« Flossenburg Le 15 février 1944, nous partons pour Flossenburg, entassés à trente prisonniers dans un wagon, par un froid glacial. Sur les conseils des anciens prisonniers, nous avons dansé toute la nuit, sans nous arrêter, dos à dos, pour nous réchauffer et aussi pour rester éveillés, car celui qui s’écroulait pour dormir, ne se relevait pas.
A Flossenburg, nous avions à travailler dans une carrière dans laquelle les Allemands faisaient sauter les mines, sans nous prévenir de nous mettre à l’abri. Il y a donc eu des morts, à la suite des explosions. Nous devions charger un wagon, placé sur un plateau, au bord d’un ravin. Travail inutile et éreintant, qui aurait pu être évité, car il suffisait de jeter directement nos pelletées de sable dans le ravin. Trop simple. L’ordre était de remplir le wagon, puis de le vider dans le ravin. Il arrivait souvent que le wagon descende dans le ravin. Il fallait alors le remonter à la force des poignets sous les coups des kapos. L’expérience nous avait appris qu’il ne fallait pas entourer les bras ou les mains de la corde qui tirait le wagon. Le risque était d’être emporté avec le wagon dans sa descente. Marcel Lemaire avait négligé ce conseil, il fut entraîné derrière le wagon qu’il voulait retenir et eut les os brisés. Il fut relevé, emmené au camp. Il hurlait de douleur. Le lendemain matin, deux Morlaisiens l’aidèrent à se lever pour aller au comptage avant d’aller au chantier. A l’appel, Marcel avait du mal à se tenir debout, malgré le soutien de ses deux camarades. Le kapo passe et bastonne le groupe. Marcel tombe. Nous ne l’avons plus revu. Pour survivre, il fallait essayer de ménager ses forces, et être sur ses gardes à tout instant.

Mort à Dachau (premier camp de concentration nazi ouvert dès 1933 près de Munich en Bavière : 30 000 personnes y périrent): un otage morlaisien y meurt

André Féat, né le 20 octobre 1916 à Morlaix, pasteur assistant, membre du Parti Socialiste clandestin, décède à 29 ans le 3 avril 1945 à Dachau après être passé par Flossenbürg.

Morts à Hradischko/Moldau (Kommando de travail en Tchécoslovaquie): six otages y succombent 

Jean Cabon né le 4 février 1919 à Brest, mort le 3 ou 5 mai 1945

Jean-Marie Guyader, né le 26 septembre 1918 à Morlaix, a été tué le 11 avril 1945 par les jeunes hitlériens à Hradishko après être passé par Flossenburg et Janowitz.

Marcel Hingant né le 25 avril 1924 à Rouen, meurt du typhus le 26 juin 1944, 6 mois après son début de déportation, à Hradischko, camp de concentration à 20 kilomètres de Prague, où il avait été envoyé en mars après Flossenbürg en même temps que Yves Tanné.

Jean Houel Castel, né le 25 août 1909 à Morlaix, à 34 ans, le 21 avril 1945, « a été tué d’une balle dans la nuque, dès qu’il est tombé, sans pouvoir se relever, dans une tranchée anti-chars, sous le poids d’un bloc de pierre qu’il transportait sur le dos » (Yves Tanné).

Michel Penther, né le 16 novembre 1924 à Morlaix, y décède le 7 ou le 10 janvier 1945 à 24 ans.

René Petit, né le 23 septembre 1911 à Rochefort en terre, y décède à 33 ans.

Jean-Marie Guyader et Jean Houel Castel ont été abattus pendant la marche de la mort qui a eu lieu au moment des trois jours d'enfer liés à l'arrivée imminente de la IIIe Armée Américaine au camp de travail de Hradischko en Tchécoslovaquie. C'était les 9, 10, 11 avril 1945. René Petit est mort dans un wagon à la veille de la libération. Michel Penther et Marcel Huigant sont morts d'épuisement au Revier, l'infirmerie du camp. François Pouliquen lui est décédé à Morlaix quelques jours après. 

Ont été rescapés de Hradischko: Jean Ambroise, Jean-François Guyader, Gilles Cam, Thomas, Yves Tanné et Léon Rivoalen.  

 

Morts à Dora (sud de l'Allemagne) :

François Le Gall, otage morlaisien né à Plougonven le 9 janvier 1922, y décède le 23 mars 1944, à l'âge de 22 ans.

A propos du Camp de concentration de Dora (sud de l'Allemagne):

Cent premiers déportés débarquent à Dora le 23 août 1943 au lendemain d'une réunion entre Hitler, Himmler et Speer où on décide d'y construire à vitesse accélérée les armes secrètes, les fusées V2. 60 000 déportés à Dora, 30 000 n'en revinrent pas.
« Il n'y avait pas d'installation dans le premier tunnel creusé, sinon, alentour, quelques tentes et une guérite de bois pour la garde SS. Les galériens des fusées travaillaient sans cesse au péril de leur vie (sans compter le sadisme des SS et des Kapos. Ce tunnel, au début, ils le perçaient, l'agrandissaient, l'aménageaient, presque sans outils, avec leurs mains. Les transports de pierre et de machine étaient faits dans des conditions épouvantables. Le poids des machines était tel que ces hommes, à bout de force, d'énergie, ces squelettes ambulants, mouraient souvent écrasés sous leurs charges. La poussière ammoniacale brûlait les poumons. La nourriture ne suffisait pas à permettre la vie organique la plus végétative. Les déportés trimaient dix-huit heures par jour (douze heures de travail, six heures de formalités et de contrôles). Ils dormaient dans le tunnel. On creusa des alvéoles : 1024 prisonniers affalés dans ces alvéoles étagées sur quatre hauteurs et sur une longueur de 120 mètres. Les déportés ne voyaient le jour qu'une fois par semaine, à l'occasion de l'appel du dimanche. Les alvéoles étaient continuellement occupés, l'équipe de jour chassant l'équipe de nuit et vice versa. Des ampoules électriques, très faibles, éclairaient des images de cauchemar. Il n'y avait pas d'eau potable. On se jetait où on pouvait trouver de l'eau, et où, par exemple, goutte à goutte, se rassemblaient les condensations. On lapait liquide et boue d'un qu'un SS tournait le dos, car il était interdit de boire l'eau non potable. Dans le tunnel, froid et humidité étaient intenses. L'eau qui suintait des parois provoquait une moiteur écœurante et permanente. Transis, nous avions l'impression que nos corps décharnés moisissaient vivants. Des prisonniers devinrent fous, d'autres eurent les nerfs saccagés quand l'installation progressa : le vacarme inouï qui régnait fut une des causes de ces dérèglements – bruit des machines, bruit des marteaux- piqueurs, de la cloche de la locomotive, explosions continuelles, le tout résonnant et repercuté en échos sans fin par le monde clos du tunnel. Pas de chauffage, pas de ventilation, pas le moindre bac pour se laver : la mort pesait sur nous par le froid, des sensations d'asphyxie, une pourriture qui nous imprégnait. Quant aux chiottes, ils étaient faits de fûts coupés par le haut sur lesquels une planche était installée. Ils étaient placés à chaque sortie des rangées d'alvéoles où nous couchions. Souvent quand des SS apercevaient un déporté assis sur la planche, ils le fixaient, ricanaient, s'approchaient et, brusquement, le précipitaient dans le fût. Alors, c'était des déchaînements de joie. La farce était trop drôle. Irrésistible ! Jamais ces messieurs n'avaient tant ri. D'autant que tous les déportés souffraient de dysentrie… Alors, recouvert de merde, partout, du crâne aux pieds, sans mot dire, le pauvre type partait, plus désespéré que jamais ; il partait rejoindre son alvéole, sa file de bagnards ; il allait empester ses copains, se vautrer dans la poussière pour se nettoyer, car il n'avait aucun moyen de se laver… C'est à Dora que les déportés commencèrent à comprendre le silence des anciens de Buchenwald, les regards de compassion adressés à ceux qui partaient. Ils savaient, les anciens, qu'on ne revenait que mort de Dora. Et l'on revenait mort pour être engouffré dans un four crématoire. Car au début il n'y avait pas de Krematorium à Dora. Par camions, on transportait les cadavres – certains n'étaient pas encore complètement des cadavres – à Buchenwald (...). Ce n'est qu'en mars 1944 que les baraquements furent terminés. A Dora, le travail était toujours au-delà du concevable, mais les reprouvés pouvaient au moins déserter le tunnel durant les six heures de repos qui leur étaient accordées. Par contre, à l'autre bout du tunnel, à Ellrich, où les travaux étaient moins avancés parce que commencés plus tard, les déportés se trouvaient dans les mêmes conditions que leurs camarades des premiers mois à Dora . Vinrent, en janvier 1945, de nouveaux officiers et soldats SS qui avaient été évacués du camp d'Auschwitz. Les assassins n'interrompirent pas leurs besognes. Des juifs survivants arrivèrent aussi d'Auschwitz, mais dès septembre 1944. »
Jean Michel, Dora. Dans l'enfer du camp de concentration où les savants nazis préparaient la conquête de l'espace (Jean-Claude Lattès, 1975)

Mort à Nordhausen, annexe de Dora (sud de l'Allemagne) :

Pierre Huon, né le 19 juin 1925 à Paris, décédé le 8 avril 1944 (Nordhausen)

Bernard Ravazet

Auguste Traon, né le 15 octobre 1910, y meurt à 34 ans le 31 mars 1945

Mort à Theresienstadt (Terezin) en Tchécoslovaquie:

François Le Jeune

Otages décédés dans d'autres camps:  

Louis Castel, né le 24 mai 1923 à Morlaix,  décède à Janowitz ou Olbramovice 21 ans le 4 mai 1945 après être passé avant par le camp de Flossenbürg.

Georges Le Roy décède à Johanngeorgenstadt

Louis Maltret décède à Johannegeorgenstadt

Daniel Pinaquy: décède à Wittstock

L'expérience terrible de la déportation dans les camps nazis a été vécue par d'autres morlaisiens que ces otages raflés fin décembre 1943 :

Des déportés domiciliés au moment de leur arrestation à Morlaix, Saint Martin des Champs ou Plourin-les-Morlaix en dehors de ces otages déportés dans le convoi du 22 janvier 1944 suite à la rafle qui a suivi l'attentat contre le foyer du soldat allemand, dont 5 femmes, dont une femme juive, Esther Levy, née le 2 février 1911 à Constantinople, déportée sans retour par le convoi n°66 de Drancy à Auschwitz le 20 janvier 1944. David Selinger, le propriétaire du magasin de vêtement « L'Ours blanc » de la rue Gambetta à Morlaix a lieu aussi été déporté (après son arrestation le 9 à 10 octobre), et le docteur d'origine roumaine Ihil Perper exerçant à Brasparts, puis à Plounéour Menez, et sa famille (sa femme et ses 3 enfants), ont été arrêtés par la gendarmerie de Morlaix sur ordre de la préfecture avant de partir pour Drancy, puis pour Auschwitz.

Parmi ces 34 déportés, 18 sont morts en camp de concentration ou d'extermination, plus d'un sur deux:

Morts à Buchenwald (centre de l'Allemagne):

Jean-Marie Coat ( le 4 mars 1945, il avait 24 ans)

André Kerguinou (le 10 février 1944, il avait 40 ans)

Joseph Tanguy (le 21 mai 1944, à 62 ans)

Jean Nedelec (le 19 mars 1944, à 21 ans)

François Porzier (le 30 janvier 1945, à 50 ans)

Alexandre Marzin (dans le transfert entre Buchenwald et Dachau, le 10 avril 1945, à l'âge de 39 ans)

Morts à Flossenbürg (sud de l'Allemagne):

Pierre Bourhis (le 6 février 1945, il avait 22 ans)

Paul Tanguy (en mars 1944, à 25 ans)

François Tanguy(mort le 15 septembre 1944, à 48 ans)

Mort à Mathausen (nord de l'Autriche)

195 000 européens sont morts à Mauthausen dont le morlaisien:

Charles Cahon (le 22 avril 1943, il avait 22 ans)

Morts à Ellrich:

Adrien Bourhis (le 12 ou 15 décembre 1944, il avait 39 ans)

Guillaume Le Bars (le 19 septembre 1944, il avait 45 ans)

Morts à Bergen-Belsen (nord de l'Allemagne):

Louis Maltret (27 ans)

Mort à Chelesse, en Tchécoslovaquie:

Hervé Manach (le 29 septembre 1944, à 22 a

Gazé à Harteim:

Gabriel de Kergariou (le 3 août 1944, il était né à St Martin des Champs

Mort à Hambourg – Neuengramme (nord de l'Allemagne):

55 000 européens sont morts à Hambourg-Neuengamme dont le morlaisien:

Yves Prigent (le 7 janvier 1945, il avait 60 ans)

Mort à Lubenec:

François Mel (le 28 avril 1945, à 23 ans)

En tout, ce sont donc plus de 100 morlaisiens (plus de 130 sur la plaque d'hommage au monument aux morts Place Traoullen, mais nous n'avons pas retrouvé le parcours de ces 130 déportés) de naissance et/ou de résidence qui ont souffert le martyre ou sont morts dans les camps nazis (les traitements inhumains des camps ont été responsables de la mort d'au moins 57 d'entre eux).

Plus de 100 déportés morlaisiens sont passés par plusieurs camps de sinistre mémoire:

Flossenbürg : pour 31 d'entre eux - au moins 13 déportés morlaisiens y meurent

Buchenwald : au moins 28 (mais Buchenwald a certainement servi de camps de transit pour d'autres) - de 12 à 14 déportés morlaisiens y meurent

Dora : 18 - au moins 5 déportés morlaisiens y meurent

Ravensbruck : 12

Bergen Belsen : 9 - au moins 7 déportés morlaisiens y meurent

Mathausen : 8

Kassel : 7

Dachau : 7

Auschwitz : 7

Reinbach : 6

Hradischko/Moldau: 5

Ellrich: 4

L'expérience terrible de la déportation dans les camps nazis a été vécue par d'autres morlaisiens que ces otages raflés fin décembre 1943 :

Des déportés domiciliés au moment de leur arrestation à Morlaix, Saint Martin des Champs ou Plourin-les-Morlaix en dehors de ces otages déportés dans le convoi du 22 janvier 1944 suite à la rafle qui a suivi l'attentat contre le foyer du soldat allemand, dont 5 femmes, dont une femme juive, Esther Levy, née le 2 février 1911 à Constantinople, déportée sans retour par le convoi n°66 de Drancy à Auschwitz le 20 janvier 1944. David Selinger, le propriétaire du magasin de vêtement « L'Ours blanc » de la rue Gambetta à Morlaix a lieu aussi été déporté (après son arrestation le 9 à 10 octobre), et le docteur d'origine roumaine Ihil Perper exerçant à Brasparts, puis à Plounéour Menez, et sa famille (sa femme et ses 3 enfants), ont été arrêtés par la gendarmerie de Morlaix sur ordre de la préfecture avant de partir pour Drancy, puis pour Auschwitz.

Parmi ces 34 déportés, 18 sont morts en camp de concentration ou d'extermination, plus d'un sur deux:

Morts à Buchenwald (centre de l'Allemagne):

Jean-Marie Coat ( le 4 mars 1945, il avait 24 ans)

André Kerguinou (le 10 février 1944, il avait 40 ans)

Joseph Tanguy (le 21 mai 1944, à 62 ans)

Jean Nedelec (le 19 mars 1944, à 21 ans)

François Porzier (le 30 janvier 1945, à 50 ans)

Alexandre Marzin (dans le transfert entre Buchenwald et Dachau, le 10 avril 1945, à l'âge de 39 ans)

Morts à Flossenbürg (sud de l'Allemagne):

Pierre Bourhis (le 6 février 1945, il avait 22 ans)

Paul Tanguy (en mars 1944, à 25 ans)

François Tanguy (mort le 15 septembre 1944, à 48 ans)

Mort à Mathausen (nord de l'Autriche)

195 000 européens sont morts à Mauthausen dont le morlaisien:

Charles Cahon (le 22 avril 1943, il avait 22 ans)

Morts à Ellrich:

Adrien Bourhis (le 12 ou 15 décembre 1944, il avait 39 ans)

Guillaume Le Bars (le 19 septembre 1944, il avait 45 ans)

Morts à Bergen-Belsen (nord de l'Allemagne):

Louis Maltret (27 ans)

Mort à Chelesse, en Tchécoslovaquie:

Hervé Manach (le 29 septembre 1944, à 22 a

Gazé à Harteim:

Gabriel de Kergariou (le 3 août 1944, il était né à St Martin des Champs

Mort à Hambourg – Neuengramme (nord de l'Allemagne):

55 000 européens sont morts à Hambourg-Neuengamme dont le morlaisien:

Yves Prigent (le 7 janvier 1945, il avait 60 ans)

Mort à Lubenec:

François Mel (le 28 avril 1945, à 23 ans)

En tout, ce sont donc plus de 100 morlaisiens (plus de 130 sur la plaque d'hommage au monument aux morts Place Traoullen, mais nous n'avons pas retrouvé sur internet le parcours de ces 130 déportés) de naissance et/ou de résidence qui ont souffert le martyre ou sont morts dans les camps nazis (les traitements inhumains des camps ont été responsables de la mort d'au moins 57 d'entre eux).

Plus de 100 déportés morlaisiens sont passés par plusieurs camps de sinistre mémoire:

Flossenbürg : pour 31 d'entre eux - au moins 13 déportés morlaisiens y meurent

Buchenwald : au moins 28 (mais Buchenwald a certainement servi de camps de transit pour d'autres) - de 12 à 14 déportés morlaisiens y meurent

Dora : 18 - au moins 5 déportés morlaisiens y meurent

Ravensbruck : 12

Bergen Belsen : 9 - au moins 7 déportés morlaisiens y meurent

Mathausen : 8

Kassel : 7

Dachau : 7

Auschwitz : 7

Reinbach : 6

Hradischko/Moldau: 5

Ellrich: 4

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25 avril 2021 7 25 /04 /avril /2021 06:45
Le camp de concentration pour femmes de Ravensbrück

Le camp de concentration pour femmes de Ravensbrück

Message pour la journée nationale du Souvenir des Victimes et des Héros de la Déportation

Dimanche 25 avril 2021

76 ans après le retour des derniers déportés libérés, le souvenir de la déportation demeure dans notre mémoire collective et ne doit pas s’effacer. Ce que furent les camps d’extermination et de concentration nazis et l’horreur vécue par les millions d’êtres humains qui en furent victimes, n’est pas une simple page documentaire de l’histoire du XXe siècle.

L’humanité y a été atteinte dans ce qu’elle a de plus sacré. Des êtres humains étaient catégorisés en surhommes et sous-hommes, leurs vies jugées «dignes ou indignes d’être vécues» sur décision d’un État qui avait érigé en programme politique sa conception raciste et eugéniste du monde et l’a portée à son paroxysme dans l’univers concentrationnaire.

Des hommes, des femmes et des enfants ont été envoyés dans des centres d’extermination ou dans des camps de mort lente, par un système qui niait leur appartenance à l’espèce humaine et s’employait à leur faire perdre conscience de leur propre humanité.

Pourtant,dans les pires circonstances, beaucoup ont su résister à la terreur et à la déshumanisation par la force de l’esprit et la solidarité. Leur engagement et leur combat sont un exemple à suivre. Il nous faut aujourd’hui encore résister à de nouvelles formes de fanatisme et de barbarie qui entendent promouvoir une vision raciste de l’humanité et détruire la liberté et la démocratie par la terreur.

De nouvelles menaces nous rappellent la communauté de destin qui unit l’humanité au-delà des différences culturelles, ethniques ou religieuses et des antagonismes idéologiques,politiques ou économiques.

Face à ces périls, l’espoir réside dans l’engagement de tous et en particulier des jeunes générations, à l’exemple des déportés, au service de la liberté et vers des formes nouvelles de résistance et de solidarité.À tous les déportés, victimes des génocides ou de la répression, nous rendons aujourd’hui un hommage solennel, et nous saluons respectueusement leur mémoire.

Ce message a été rédigé conjointement par La Fédération Nationale des Déportés, Internés, Résistants et Patriotes (FNDIRP), La Fondation pour la Mémoire de la Déportation (FMD) et les Associations de mémoire des camps nazis, L’Union Nationale des Associations de Déportés Internés de la Résistance et Familles (UNADIF-FNDIR)

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25 avril 2021 7 25 /04 /avril /2021 06:44
la famille Perper arrêtée à Plounéour-Menez: Ihil, Roza, Odette, Sonia, un destin tragique parmi les 76 000 déportés Juifs déportés de France reconstitué par Marie-Noëlle Postic.

la famille Perper arrêtée à Plounéour-Menez: Ihil, Roza, Odette, Sonia, un destin tragique parmi les 76 000 déportés Juifs déportés de France reconstitué par Marie-Noëlle Postic.

Lire aussi: 

Les déportés morlaisiens dans les camps nazis pendant la seconde guerre mondiale

 

Persécutions et déportations des juifs du Finistère

« Sur les traces perdues d'une famille juive en Bretagne » (Coop Breizh, 2007)

Marie-Noëlle Postic, dans un livre rare et attendu, une enquête passionnée et méticuleuse, reconstitue dans cet essai paru chez Coop Breizh en 2012 le destin terrible d'Ihil Perper, médecin juif d'origine roumaine, 34 ans, exerçant à Plounéour-Ménez, avec sa femme Sonia, originaire de Bessarabie aussi, leurs filles Roza et Odette, et leur nourrisson Paul, arrêtés par la gendarmerie de Morlaix sur ordre des autorités allemandes dans la nuit du 9 au 10 octobre 1942. M. Diebolt sur initiative de la Gestapo de Paris donna l'ordre d'arrêter 11 juifs, dont Ihil Perper. Ce sont huit familles qui sont arrêtées les 9 et 10 octobre dans le Finistère : Adolphe et Rosa Menner, ainsi commerçants brestois, réfugiés à La Roche-Maurice, la famille Perper, Benjamin et Ella Segaler de Plouénan, David Selinger, ancien propriétaire du magasin de fourrure « L'Ours Blanc » à Morlaix, Ella Fried, artiste peintre résidant à Beuzec-Conq, Eugénie Krouto, la famille Sternlicht, domiciliée à Huelgoat.

Ces arrestations font suite à la rafle du Vel'd'Hiv des 16 et 17 juillet 1942 planifiée par le secrétaire général de la police au ministère de l'Intérieur, Bousquet : 8 160 arrestations à Paris (13 152 pendant tout le mois de juillet 1942). Le 22 août 1942, Bousquet adressait un télégramme aux préfets de région : « Le chef du gouvernement tient à ce que vous preniez personnellement en main le contrôle des mesures décidées à l'égard des israélites étrangers (…) D'autre part dans les jours qui suivront l'opération projetée, je vous demande de faire procéder à des vérifications d'identité extrêmement sévères afin de libérer totalement votre région de tous les Juifs étrangers ».

Le 8 juillet 1942, le sous-préfet de Brest avait adressé un télégramme « confidentiel » au préfet du Finistère : « J'ai l'honneur de vous informer qu'au cours de la conférence tenue ce matin à mon cabinet, M. Guillet, commissaire de police, chef de la sûreté à Brest, m'a fait connaître qu'il avait été avisé par la police des Autorités d'Occupation que tous les Juifs de 16 à 45 ans, des deux sexes, seraient arrêtés dès demain ».

L'horreur dissimulée dans la langue policée de l'administration. Marie-Noëlle Postic nous fait redécouvrir à partir des archives la complicité de l'administration, de la police et de la gendarmerie, de l'ordre des médecins, des maires désignés par Vichy, des journalistes de la presse collaborationniste (Dépêche de Brest en tête), dans les persécutions antisémites.

Les persécutions contre les Juifs en France ont procédé par étapes, selon une logique inexorable de progression dans l’infamie, elles procèdent autant d'un plan de l'extrême-droite française qui parvient au pouvoir avec le Maréchal Pétain, et qui était déjà violemment xénophobe et antisémite dans les années 20-30, que d'une commande nazie.

Le 16 août 1940, l'exercice de la médecine est interdit aux étrangers. Cette mesure vise aussi et peut-être d'abord les juifs d'origine étrangère, comme Ihil et Sonia Perper, juifs roumains qui ont fuit les persécutions antisémites du régime fasciste en place en Roumanie en 1927 et ont étudié la médecine à la faculté de Nancy avant qu'Ihil s'installe à Brasparts comme médecin en 1935. Dans le Finistère, le docteur Max Garfinkel, d'origine russe mais français par mariage, qui dirige le Sanatorium de Guervenan à Plougonven, ne sera interdit d'exercice qu'en août 41, où les Juifs de nationalité françaises sont aussi interdits de profession médicale. Le docteur Garkinkel est défendu par le Sénateur qui préside le conseil de surveillance de l'hôpital qui proteste de ses bons états de service pour mater le personnel syndiqué à la CGT échauffé par les élus du Front Populaire et remettre de l'ordre dans l'établissement !

Le 27 septembre 1940 commence le recensement des juifs, c'est à dire, selon ce statut raciste, tous ceux qui ont deux grands-parents juifs au moins.

Le 28 février 1941, on recense les juifs étrangers et on établit un fichier qui sera très utile plus tard pour arrêter et déporter les juifs étrangers.

Le 26 avril 1941, les juifs sont interdits d'exercer toute profession commerciale et des administrateurs provisoires sont chargés d'aryaniser les affaires et commerces des Juifs. David Selinger qui a un magasin de vêtements dans la rue Gambetta à Morlaix (« L'ours blanc ») verra ainsi son magasin vendu de manière contrainte à vil prix, récupéré par un profiteur, un commerçant brestois, tandis que ses avoirs et son argent en banque sera bloqué quelques semaines plus tard (loi du 22 juillet 1941 sur le gel des avoirs des juifs). Tout est fait pour affamer les Juifs de France, les réduire à la misère avant de les déporter.

Le 7 février 1942, interdiction est faite aux Juifs de sortir de leur domicile entre 20 h et 6 heures du matin.

Et le 29 mai 1942, la 8e ordonnance allemande rend le port de l'étoile jaune obligatoire. A cette occasion, le vicaire de l'église Saint-Mathieu à Morlaix intervient en faveur d'Emeric Korn, juif d'origine hongroise, peintre en bâtiment, très bon ailier au Stade Morlaisien, en le défendant en ces termes : « M. Korn, jeune marié et père de deux enfants, appartient à une catégorie d'artisans (…) dont l'existence humble et droite se passe en dehors de toutes les ambitions et combinaisons plus ou moins douteuses. Mobilisé au 71e régiment d'infanterie, il a accompli son devoir avec modestie et courage et ne mérite aucunement d'être assimilé à des coreligionnaires avec lesquels il a perdu tout contact et dont il n'a jamais pratiqué la religion ». Le commissaire général aux questions juives refusera d'exempter Emeric Korn du port de l'étoile jaune et finalement, le 10 septembre 1943, Emeric Korn quittera Morlaix pour une destination inconnue.

Il ne fera donc pas parti des Juifs finistériens déportés à la suite d'une arrestation dans le département où après l'avoir quitté. 46 Juifs finistériens au moins selon Marie-Noëlle Postic ont été déportés : 14 hommes, 19 femmes, 3 jeunes de moins de 19 ans, et 10 enfants de moins de 15 ans, parmi eux 1/3 de déportés juifs de nationalité française, 2/3 de déportés juifs de nationalité étrangère. Sur ces 46 déportés, deux survivront seulement : Judith Segoura et Hedwig Arnstein.

Pour l'année 1942, 14 Juifs finistériens sont déportés à Auschwitz à partir de Drancy : Ella et Benjamin Segaler, David Selinger, le fourreur de Morlaix, Jacob et Eugénie Krouto, Rosa et Adolphe Menner, Ella Fried, Jeanne et Marylise Khan arrêtés à Angers, Herta Zand, coiffeuse à Brest, Feigel et Liliane Bernstein, Joseph Levy, jeune brestois de 17 ans.

Toutes les personnes arrêtés en même temps que les Perper seront déportés par le convoi 40, du 4 novembre.

En 1943, ce sont 14 Juifs finistériens qui sont déportées, 8 à Auschwitz, et 6 à Sobidor, dont la famille Perper.

Dans les premiers mois de 1944, 18 personnes, Juifs finistériens, seront déportées à Auschwiz , d'abord le 20 janvier, dont la jeune Esther Levy, née à Constantinople, couturière à Morlaix, les marchands ambulants Jacques et Judith Signura (nés à Smyrne en Turquie grecque) d'Ergue Armel, Carmona Gerson de Landerneau, la commerçante brestoise Marie Rosenbaum, la famille Hervé de Treboul et la famille Gabaï de Quimper.

« Ces adultes déportés, commente Marie-Noëlle Postic, sont commerçants, marchands, ambulants, coiffeuses, horloger, architecte, fourreur, tricoteur, artiste peintre, comptable, couturières, antiquaire, ouvrière en fourrure, médecin, ils n'occupent pas « des postes assez importants dans le commerce, la banque pou l'industrie » comme l'écrit le rédacteur de l'Heure bretonne, (le journal des autonomistes collaborateurs bretons), ils sont simplement représentatifs de la société urbaine française de l'époque ».

« Il est frappant de noter, ajoute plus loin Marie-Noëlle Postic, que l'on retrouve pour le Finistère, département comptant fort peu de Juifs, environ les mêmes pourcentages d'arrestations et de déportations (un peu plus d'un quart de la communauté) et de survivants des camps (environ 4 % des déportés) qu'à l'échelle nationale ».

La famille Perper sera gazée au camp d'extermination de Sobibor après avoir été gardée 5 mois à partir du 15 octobre 1942 à Drancy, qui servit de camp de transit et de concentration pour 67 000 juifs de France avant leur déportation.

Quelque temps avant son arrestation, le fils de gendarme et résistant Jean Kerdoncuff avait tenté d'alerter le docteur Perper sur les risques d'arrestation qu'il encourait, lui indiquant des caches à Commana et Saint-Sauveur. Mais le docteur Perper se sentait relativement à l'abri et en sécurité dans le bourg excentré de Plounéour-Ménez.

« Ces mêmes 9 et 10 octobre 1942, plusieurs personnes sont arrêtées à Brest, Plouénan, Morlaix, Beuzec, Douarnenez ; seize selon le chef d'escadron Sauts, commandant de la gendarmerie du finistère, rompant compte au préfet du département de l'exécution de sa mission ».

En 1939, selon les recherches de Marie-Noëlle Postic, les français ou étrangers d'origine juive étaient au nombre de 142 dans le Finistère : 6 dans l'arrondissement de Châteaulin, 16 dans celui de Morlaix, 80 dans l'arrondissement de Brest. Le journal collaborationniste de Yann Fouéré La Bretagne de juillet 1942 avance le chiffre de 151 pour le Finistère, celui des cinq départements bretons (Finistère, Côtes-du-Nord, Ille-et-Vilaine, Morbihan et Loire-Inférieure) s'élevant à 1437.

Coop Breizh, 2007, 12,50€

Coop Breizh, 2007, 12,50€

Une enquête remarquable et plus exhaustive de Marie-Noëlle Postic, publiée en 2013 (13,90€ chez Coop Breizh)

Une enquête remarquable et plus exhaustive de Marie-Noëlle Postic, publiée en 2013 (13,90€ chez Coop Breizh)

Emeric Korn, juif hongrois du Stade Morlaisien persécuté pendant l'occupation mais qui parviendra à s'enfuir (Marie-Noëlle Postic, Ouest-France - Hors-série Guerre et Libération dans le Finistère, 2014)

Emeric Korn, juif hongrois du Stade Morlaisien persécuté pendant l'occupation mais qui parviendra à s'enfuir (Marie-Noëlle Postic, Ouest-France - Hors-série Guerre et Libération dans le Finistère, 2014)

Interview de Marie-Noëlle Postic, Ouest-France - Hors-série Guerre et Libération dans le Finistère, 2014

Interview de Marie-Noëlle Postic, Ouest-France - Hors-série Guerre et Libération dans le Finistère, 2014

Alfred Le Guellec et Augustine Le Guellec, justes de Douarnenez (Ouest-France - Hors-série Guerre et Libération dans le Finistère, 2014)

Alfred Le Guellec et Augustine Le Guellec, justes de Douarnenez (Ouest-France - Hors-série Guerre et Libération dans le Finistère, 2014)

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25 avril 2021 7 25 /04 /avril /2021 06:42
Morlaix - la rafle du 26 décembre 1943 et la déportation des Otages - racontée dans le Télégramme de Brest et de l'0uest un an plus tard, à partir du 26 décembre 1944
Morlaix - la rafle du 26 décembre 1943 et la déportation des Otages - racontée dans le Télégramme de Brest et de l'0uest un an plus tard, à partir du 26 décembre 1944
Morlaix - la rafle du 26 décembre 1943 et la déportation des Otages - racontée dans le Télégramme de Brest et de l'0uest un an plus tard, à partir du 26 décembre 1944
Morlaix - la rafle du 26 décembre 1943 et la déportation des Otages - racontée dans le Télégramme de Brest et de l'0uest un an plus tard, à partir du 26 décembre 1944

Dans les exemplaires des Télégramme de Brest et de l'Ouest du mardi 26 décembre 1944 et du mardi 27 décembre (archives Pierre Le Rose), un journal départemental de deux pages recto verso (40 cm sur 30 cm) avec des articles et annonces bien tassées, toutes les nouvelles du département réunies en même temps, avec le sport au verso, voici un article en feuilleton que nous faisons redécouvrir au lecteur du Chiffon Rouge sur l'épisode tragique de la détention des otages morlaisiens un an plus tôt, le 26 décembre 1943, otages qui étaient toujours déportés à Buchenwald et dans les camps de concentration des régions contrôlées par le Reich alors que notre région était libérée de l'occupant.

Cet article est d'autant plus poignant que les familles, amis des Otages et les Morlaisiens ne savent pas où ils se trouvent ni s'ils sont encore vivants. Bien sûr, nous laissons à l'auteur de l'article son appréciation sur l'inutilité de l'attentat, c'était aussi l'avis de la presse collaboratrice et conservatrice avant la Libération, et d'une grande partie des Morlaisiens, évidemment, surtout compte tenu du prix exorbitant payé avec la violence de la répression, mais la lutte armée et le harcèlement contre l'occupant avaient aussi une utilité dans la Résistance, évidemment, même si le prix à payer fut très lourd, pour les résistants, les otages. 

 

Le 26 décembre 1944, Télégramme de Brest et de l'Ouest:

Anniversaire d'un Noël Tragique:

Il y a un an, les Allemands prenaient 60 otages à Morlaix et les déportaient

Heureux ceux qui vont pouvoir passer chez eux, en famille, ce premier Noël à la Libération. Que ces privilégiés pensent aux absents: aux soldats qui sont tombés pour leur pays, aux prisonniers, aux combattants de tous les fronts, aux déportés civils qui, souvent, sans raison, ont été arrachés à leurs foyers; aux infortunés sinistrés de nos villes martyres.

Nous ne saurions laisser passer ce Noël 1944 sans évoquer le sort malheureux des otages morlaisiens que les boches arrêtèrent le 26 décembre 1943, après avoir semé la terreur dans toute notre ville.

UNE GRENADE EXPLOSE

On se souvient que le 24 décembre 1943, vers 20h30, un inconnu lança de la rue Gambetta une grenade qui fut jetée dans les salons Quiviger, rue de Brest, siège du "Soldatenheim". Six militaires allemands furent blessés.

C'était un attentat absolument inutile, qui fut et qui est encore sévèrement critiqué.  

Il amena de la part des boches, des représailles tout à fait disproportionnées avec la gravité des faits. Ne pouvant découvrir le coupable de l'attentat, qui se réduisait, somme toute, à peu de chose, les nazis, selon leur méthode habituelle, s'en prirent à toute la population; ils frappèrent des innocents. 

Le 26 décembre, au matin, de nombreux S.S et parachutistes allemands, armés jusqu'aux dents, se répandirent dans les rues de Morlaix. Ils opéraient sous les ordres du capitaine Kruger, chef de la Gestapo de Rennes.

Dès 7 heures, les soldats teutons se firent ouvrir à coups de crosses de fusils et à coups de bottes les portes des maisons de la rue de Brest. Les soudards perquisitionnèrent ainsi dans toutes les maisons, emmenant les hommes et les jeunes gens de 16 à 40 ans, avec leur poste de TSF, lorsqu'ils en possédaient un.

Vers 8h30, les soldats allemands s'introduisirent chez Me Le Hire, avocat, rue Gambetta. Ils prétendirent, dit-on, y avoir trouvé quelques cartouches de chasse. En spécialistes, ils mirent le feu à l'immeuble, sans permettre à ses occupants d'emporter le moindre objet. Ils interdirent aux pompiers de combattre le sinistre et arrêtèrent Me Le Hire, Mlle Le Hire et son fiancé. 

Le fiancé de Mlle Le Hire fut relâché, mais Me Le Hire, bien que malade, et sa fille, furent emprisonnés: l'un pendant, près de deux mois, l'autre, durant quelques semaines.

Pendant ce temps, la rafle se poursuivait dans le centre de la ville: rue Gambetta, rue Carnot, rue du Mur, rue d'Aiguillon, Grand'Rue, rue de Paris, rue Basse, rue Haute, Place Emile Souvestre, Thiers, Cornic, de Viarmes, etc.

LA RAFLE

Dans toute la ville, c'était un défilé continuel d'otages, se rendant avec leurs appareils de TSF au lieu de rassemblement, place Thiers, sous la garde de soldats armés de mitraillettes ou de fusils, baïonnette au canon. 

Prévenus à temps, des jeunes gens, des hommes susceptibles d'être arrêtés, réussirent à s'enfuir ou se cacher.

Vers midi, près de 600 hommes se trouvaient entassés dans les abris de la place Thiers. Il était interdit de s'approcher d'eux.  (à suivre)

Le 27 décembre 1944, Télégramme de Brest et de l'Ouest:

Tous les hommes arrêtés passèrent alors individuellement devant le capitaine Kruger qui, après les avoir interrogés et après avoir examiné leur identité, les répartit en trois groupes: à droite, ceux qui allaient être libérés; à gauche, les otages, et au centre, ceux qui étaient tenus en réserve comme otages supplémentaires, en cas de besoin. 

L'officier de la Gestapo fixait son choix avec une brutalité et une morgue révoltantes. Il désigna M.Petit, parce qu'il n'était pas rasé et qu'il exerçait la proffesssion de coiffeur! Il relâcha tous les hommes qui étaient employés dans des entreprises travaillant pour l'armée allemande. 

60 OTAGES INNOCENTS

Finalement 60 jeunes hommes furent retenus comme otages. Il y avait parmi eux 30 ouvriers ou employés appartenant à des entreprises privées et 30 étudiants, commerçants, fils de commerçants, etc. Deux de ces otages, les jeunes Caën et du Rusquec, étaient des enfants de 16 ans. 

Le capitaine Kruger pris encore cinq autres otages qui classa à part et à qui il fit mettre les menottes.

Les appareils de TSF des otages furent confisqués. Tous les autres hommes arrêtés furent relâchés et remportaient leurs postes.

Parmi les otages, se trouvait M. le docteur Mostini, ancien prisonnier de guerre libéré. C'est à lui que nous avons demandé de nous relater les évènements qui vont suivre: 

A 13h30, nous dit le docteur Mostini, on nous a fait mettre en rangs pour monter au terrain d'aviation de Ploujean. Rendus au camp, on nous a mis dans une baraque, sur deux rangs, gardés par des Allemands armés de mitraillettes. Nous sommes restés debout trois heures durant. On nous avait prévenus que nous étions prisonniers et que toute tentative d'évasion serait sévèrement punie. J'ai alors été désigné comme responsable du groupe. En ma qualité de médecin, j'ai demandé que soit libérés 4 ou 5 otages qui étaient malades et dont l'un d'eux avait eu une crise d'asthme, en venant à l'aérodrome, mais ma proposition a été rejetée. (...)"   

 

 

 

 

Louis Le Gros  Morlaix a payé un très lourd tribut au nazisme et à la politique de collaboration de Vichy, avec la déportation dans les camps de concentration et d'extermination d'un peu plus de 100 morlaisiens, dont 57 qui y trouvèrent la mort, souvent à un très jeune âge, qu'ils aient été résistants ou otages raflés au hasard.

Louis Le Gros Morlaix a payé un très lourd tribut au nazisme et à la politique de collaboration de Vichy, avec la déportation dans les camps de concentration et d'extermination d'un peu plus de 100 morlaisiens, dont 57 qui y trouvèrent la mort, souvent à un très jeune âge, qu'ils aient été résistants ou otages raflés au hasard.

La mémoire de Morlaix retient le souvenir des cinquante-neuf otages raflés le 26 décembre 1943 et déportés par les Allemands après l'attentat contre le foyer du soldat allemand dans les salons Quiviger rue de Brest dans la nuit du 24 décembre 1943.

Voici à propos de ce sinistre événement le récit d'Yves Tanné, un des déportés morlaisiens survivants, recueilli par Danielle Ropars:

« Le soir de Noël 1943, j’ai voulu me rendre chez des amis à Morlaix et partager avec eux, pour célébrer cette fête comme il se doit, la charcuterie confectionnée avec le cochon que nous venions de tuer au Kermeur. J’étais donc à Morlaix le 24 décembre, lorsqu’un attentat eut lieu contre le Foyer du Soldat, situé dans les anciens salons Quiviger, rue de Brest. Une grenade, jetée de la rue Gambetta, traversa la verrière et explosa au milieu de la piste de danse. En représailles, le 26 décembre au matin, les Allemands organisent une rafle et arrêtent tous les hommes valides, âgés de 15 à 40 ans. Parmi les 500 personnes arrêtées, ils choisissent, au hasard, 60 otages. Comme je n’avais pas de papiers, j’ai tout de suite été retenu. Nous avons été parqués entre la Mairie et le port de Morlaix, conduits à pied vers le terrain d’aviation, où nous avons été enfermés dans un grand hangar. Le docteur Mostini est nommé par les Allemands responsable du groupe, ce qui nous retient de nous échapper, car il serait immédiatement fusillé. Le 2 janvier 1944 au matin, des camions nous conduisent à la gare, par la rue Gambetta, où toute la population s’est rassemblée pour nous dire au revoir. Nous sommes jetés dans des wagons à bestiaux, une vingtaine par wagon, les portes sont poussées et fermées, le train siffle et c’est le départ pour une destination inconnue »

(Morlaix Tu-pe-tu, http://www.danielleropars.com/la_rafle.html).

On est début 1944, un an et quelques mois plus tard (trois ou quatre) seront libérés les prisonniers suppliciés des camps de concentration nazis. Mais chaque semaine est une épreuve dans les conditions de vie infernales où ils ont été plongés par les nazis et trente-quatre déportés de cette rafle sur cinquante-neuf ne reviendront pas des camps de concentration.

Cinq otages morlaisiens déportés étaient parvenus à s'enfuir le 22 janvier 1944 lors du transport vers l'Allemagne dans un convoi qui amenait 2005 prisonniers de Compiègne vers Buchenwald. Au cours de ce transport, quatorze prisonniers en tout parvinrent à s'enfuir à Vitry-le-François (51), Blesme (51) et Revigny (55).

Les évadés finistériens du transport parti le 22 janvier 1944 de Compiègne étaient le docteur Georges Mostini, 33 ans, Marcel Bricaud, 21 ans, Jean Cozanet, 27 ans, François Le Bail, 22 ans, Jacques Le Flamand, 20 ans.

Voici le récit, publié par Danielle Ropars, que Yves Tanné fait de ce voyage atroce entre le camp de transit de Compiegne et Buchenwald dans un wagon à bestiaux :

« Le train nous conduit à Compiègne, où convergent les trains venant de toute la France et d’où partent ceux qui emmènent les déportés vers les camps de concentration. Là, j’ai demandé le motif de mon arrestation. Réponse : élément anti-allemand, nuisible à l’Allemagne. On nous fait monter dans des wagons à bestiaux. Nous sommes 110 par wagon, à moitié debout, à moitié assis, appuyés les uns aux autres, constamment bousculés. De la paille comme litière. Un bidon de 200 litres pour les besoins naturels. Très vite le bidon se remplit et dégorge sur la paille. Une secousse le renverse et nous voilà sur du fumier pour le reste du voyage, qui va durer deux jours et deux nuits. Nous prenons peu à peu conscience de ce qui nous attend.

Nous avons une boule de pain et un saucisson pour toute nourriture. Rien à boire. Or, la soif est plus difficile à endurer que la faim. Nous en sommes à lécher la buée des parois. Nous changeons de place à tour de rôle pour pouvoir soulager la souffrance provoquée par la soif. A Trèves, on nous donne une espèce de bouillie, faite avec de l’eau et de la farine, mais de toute façon, il nous est impossible d’avaler quoi que ce soit.

Nous sommes comptés. Dans un wagon, il y a des absents. Ils se sont évadés. Parmi ceux-ci, Marcel Bricaud, Jean Cozanet, Jacques Le Flamand, François Le Bail, Georges Mostini, qui nous avait auparavant déliés de notre engagement envers lui, et nous avait encouragés à nous sauver. Furieux, les SS maltraitent ceux qui sont restés, leur enlèvent leurs vêtements et les répartissent avec brutalité, tout nus, dans les autres wagons. Nous sommes donc encore plus à l’étroit. La promiscuité rend les hommes angoissés, nerveux et prêts à se battre entre eux. Quand le train s’arrête enfin, nous sommes fatigués à l’extrême, hébétés, assoiffés. Nos vêtements sont maculés d’excréments. On relève cinq morts étalés sur le fumier de notre wagon. Deux hommes ont perdu la raison. Si, en plus, nous avions eu la chaleur de l’été, c’eut été une hécatombe. La dégradation psychologique et physique a été très rapide ».

Cinquante-quatre otages morlaisiens arrivent donc à Buchenwald le 26 janvier 1944 et sur ces cinquante-quatre raflés, souvent jeunes (la plupart ont entre 18 et 24 ans) seuls vingt reviendront des camps de concentration.

Morts à Buchenwald : neuf otages

Bizien Guéguen

Georges Le Coz, né le 28 août 1925, décédé le 9 février 1945 (à Buchenwald?)

Michel Martin, né le 28 avril 1924 à Morlaix, décédé le 9 février 1945 (à Weimar)

Roger Marzin (Weimar)

Henri Le Rumeur, né le 30 octobre 1920, 24 ans, y meurt le 29 août 1944.

Jean Nédelec, né le 6 décembre 1922 à Morlaix, décédé le 19 mars 1944 à l'âge de 21 ans.

Paul Rumen, né à Morlaix le 8 janvier 1988, y décède à 56 ans le 8 mars 1944.

Guy Pape, né le 22 juillet 1925 à Morlaix, 18 ans, « un magnifique athlète », meurt un mois après son arrivée à Buchenwald le 9 février 1944.

Joseph Plassart, né le 13 avril 1919 à Plourin les Morlaix, passé par Ravensbrück

Morts à Flossenbürg : 10 otages morlaisiens meurent dans ce camp de concentration.

Théophile Chauvel, né le 5 mai 1924 à Plourac'h, y décède le 27 novembre 1944 à 20 ans.

François Créach, né le 16 juillet 1925 à Morlaix

Joseph Huet, né le 21 août 1923, y décède le 14 août 1944

Jacques Kerné, 18 ans, y meurt le 6 mars 1945 après être passé par Hradischko.

Roger Larher, 21 ans, le 9 mars 1944

Marcel Lemaire, otage morlaisien de 19 ans né le 14 septembre 1924 à Paris, décède le 8 mai 1944 à Flossenbürg, probablement assassiné froidement après avoir été blessé par un wagon dans une carrière, selon le témoignage glaçant d'Yves Tanné:

« Flossenburg Le 15 février 1944, nous partons pour Flossenburg, entassés à trente prisonniers dans un wagon, par un froid glacial. Sur les conseils des anciens prisonniers, nous avons dansé toute la nuit, sans nous arrêter, dos à dos, pour nous réchauffer et aussi pour rester éveillés, car celui qui s’écroulait pour dormir, ne se relevait pas.
A Flossenburg, nous avions à travailler dans une carrière dans laquelle les Allemands faisaient sauter les mines, sans nous prévenir de nous mettre à l’abri. Il y a donc eu des morts, à la suite des explosions. Nous devions charger un wagon, placé sur un plateau, au bord d’un ravin. Travail inutile et éreintant, qui aurait pu être évité, car il suffisait de jeter directement nos pelletées de sable dans le ravin. Trop simple. L’ordre était de remplir le wagon, puis de le vider dans le ravin. Il arrivait souvent que le wagon descende dans le ravin. Il fallait alors le remonter à la force des poignets sous les coups des kapos. L’expérience nous avait appris qu’il ne fallait pas entourer les bras ou les mains de la corde qui tirait le wagon. Le risque était d’être emporté avec le wagon dans sa descente. Marcel Lemaire avait négligé ce conseil, il fut entraîné derrière le wagon qu’il voulait retenir et eut les os brisés. Il fut relevé, emmené au camp. Il hurlait de douleur. Le lendemain matin, deux Morlaisiens l’aidèrent à se lever pour aller au comptage avant d’aller au chantier. A l’appel, Marcel avait du mal à se tenir debout, malgré le soutien de ses deux camarades. Le kapo passe et bastonne le groupe. Marcel tombe. Nous ne l’avons plus revu. Pour survivre, il fallait essayer de ménager ses forces, et être sur ses gardes à tout instant.

Georges Le Roy, décède à 24 ans le 21 juillet 1944 dans le Kommando du camp de Flossenbürg, (usines Messerschmit).

Jean Simon, 32 ans, y décède le 13 juillet 1944 après être passé par Ravensbrück, Flossenbürg.

Paul Tanguy, né le 30 août 1919 à Morlaix, décède à 24 ans le 26 mars 1944

Jean Therene, né le 6 juillet 1917 à Brest, décède le 15 novembre 1944 à 27 ans

 

A propos du camp de concentration de Flossenburg en Bavière (sud de l'Allemagne) : camp construit par un Kommando de Dachau en 1938, 96 000 prisonniers y transitèrent, dont 30 000 y trouvèrent la mort. On estime à 5 344, dont 965 femmes, le nombre de Français passés par ce camp avant avril 1945. Parmi les 4475 hommes recensés, au moins 2400 sont décédés. Le travail imposé tourne toujours autour de deux grands axes : d’une part l’industrie de l’armement, et en particulier de l’aéronautique avec des usines Messerschmitt (le Kommando du camp de Flossenbürg qui fait travailler les esclaves des nazis pour l'usine d'aviation Messerschmit s'appelle Johanngeorgenstadt), et d’autre part les travaux dans les carrières de granit, le forage de tunnels et d’usines souterraines.

Mort à Dachau (premier camp de concentration nazi ouvert dès 1933 près de Munich en Bavière : 30 000 personnes y périrent): un otage morlaisien y meurt

André Féat, né le 20 octobre 1916 à Morlaix, pasteur assistant, membre du Parti Socialiste clandestin, décède à 29 ans le 3 avril 1945 à Dachau après être passé par Flossenbürg.

Morts à Hradischko/Moldau (Kommando de travail en Tchécoslovaquie): six otages y succombent

Jean Cabon né le 4 février 1919 à Brest, mort le 3 ou 5 mai 1945

Jean Guyader, né le 26 septembre 1918 à Morlaix, a été tué le 11 avril 1945 par les jeunes hitlériens à Hradishko après être passé par Flossenburg et Janowitz.

Marcel Hingant né le 25 avril 1924 à Rouen, meurt du typhus le 26 juin 1944, 6 mois après son début de déportation, à Hradischko, camp de concentration à 20 kilomètres de Prague, où il avait été envoyé en mars après Flossenbürg en même temps que Yves Tanné.

Louis Houel, né le 25 août 1909 à Morlaix, à 34 ans, le 21 avril 1945, « a été tué d’une balle dans la nuque, dès qu’il est tombé, sans pouvoir se relever, dans une tranchée anti-chars, sous le poids d’un bloc de pierre qu’il transportait sur le dos » (Yves Tanné).

Michel Penther, né le 16 novembre 1924 à Morlaix, y décède le 7 ou le 10 janvier 1945 à 24 ans.

René Petit, né le 23 septembre 1911 à Rochefort en terre, y décède le 3 ou le 30 mai 1944 à 33 ans.

Morts à Dora (sud de l'Allemagne) :

François Le Gall, otage morlaisien né à Plougonven le 9 janvier 1922, y décède le 23 mars 1944, à l'âge de 22 ans.

Mort à Nordhausen, annexe de Dora (sud de l'Allemagne) :

Pierre Huon, né le 19 juin 1925 à Paris, décédé le 8 avril 1944 (Nordhausen)

Bernard Ravazet

Auguste Traon, né le 15 octobre 1910, y meurt à 34 ans le 31 mars 1945

Mort à Theresienstadt (Terezin) en Tchécoslovaquie:

François Le Jeune

Otages décédés dans d'autres camps:

Louis Castel, né le 24 mai 1923 à Morlaix, décède à Janowitz ou Olbramovice 21 ans le 4 mai 1945 après être passé avant par le camp de Flossenbürg.

Georges Le Roy décède à Johanngeorgenstadt

Louis Maltret décède à Johannegeorgenstadt

Daniel Pinaquy: décède à Wittstock

 

 


Les déportés morlaisiens qui ont survécu aux camps nazis:

Parmi les otages (22) :

Jean Ambroise, né le 1er décembre 1924 à Morlaix (19 ans lors de son arrestation), libéré à Hradiskko le 8 mai 1945.

Claude Bervoas, né le 18 novembre 1926 à Morlaix (17 ans lors de son arrestation)

Yves Bescam, né le 8 août 1922 à St Thégonnec (matricule 43 173). Autres lieux de déportation : Jena et Leitmeritz où il est libéré en mai 1945.

Jean Bourbigot : né le 13 février 1923 à Beuzec-Conq (29). (matricule 42615). Autres lieux de déportation : Dora, Ravensbrück. Il est libéré le 30 avril 1945.

Emile Cadiou : né à Morlaix le 1er mai 1914 (29 ans lors de son arrestation). Domicilié à Morlaix. Déporté de Morlaix le 2 janvier puis transféré de Compiègne vers le KL Buchenwald le 22 janvier 1944.

Georges Caën, le plus jeune des otages morlaisiens, 16 ans, dont Louis Le Gros fera le portrait à partir d'une photo d'identiré donnée le 22 mai 1945 dans le train de Paris à Morlaix, de retour des camps.

Gilles Cam, né le 25 septembre 1924 à Plourin-les-Morlaix (19 ans lors de son arrestation). Libéré le 8 mai 1945 à Kaplice.

Pierre Collober née le 11 avril 1919 à Plouyé. Déporté à Compiègne le 22 janvier 1944 vers le KL Buchenwald (Matricule 43 043). Autres lieux de détention : Laura, Dachau et Allach où il est libéré le 30 avril 1944.

Albert Guichen : né le 12 mai 1925 à Morlaix. (Matricule 42 886). Autres lieux de déportatio : Dora, Ravensbrück. Il est libéré en mai 1945

François Herrou, né le 29 juillet 1925 à Morlaix. Déporté de Compiègne le 22 janvier 1944 vers le KL Buchenwald (matricule 42 952). Autres lieux de déportation : Dora, Ravensbrück, Machow. Il est libéré début 1945 à Plau.

Henri Kerinon né le 21 novembre 1924 à Douarnenez (Matricule 43 042). Revenu des camps.

Louis Kervellec né le 17 juilet 1926 à Morlaix (Matricule 42 134). Revenu des camps

Raoul de l'estang du Ruquec (Duresquec), né le 30 septembre 1927 à Morlaix (16 ans lors de son arrestation). Déporté à Buchenwald, Mauthausen.

Victor Le Goff né le 23 octobre 1920 à Brest (Matricule 42 698). Autre lieu de déportation : Dora, Ravensbrück. Revenu des camps

Louis Le Gros né le 20 août 1916 à Plougasnou (27 ans lors de son arrestation). Auteur d’œuvres d'art représentant les camps nazis, réalisées en déportation et après.

Jacques Mazé : né le 26 avril 1923 à Sizun. Revenu des camps

Jean Moreau né le 4 novembre 1924 à Morlaix (19 ans lors de son arrestation. Buchenwald, Langenstein.

Jacques Quintin, né le 30 décembre 1925 (18 ans au moment de son arrestation). Buchenwald, transféré à Ravensbrück le 3 juin 1944.

Léon Picart, né le 12 avril 1903 à Plouvorn. (matricule 41 507). Autres lieux de déportation ; Ravensbrück, Dora, Bergen-Belsen où il est libéré le 15 avril 1945.

Léon Rivoalen

Albert Sénéchal, né le 9 décembre 1910 à Brest (matricule 42 081). Autre lieu de déportation : Dachau. Revenu des camps.

Paul Simon, né le 20 août 1912 à Brest (matricule 42 390). Revenu des camps

Yves Tanné, né le 4 octobre 1924 à Plougonven (matricule 43 011). Autres lieux de déportation : Flossenburg, Hradischko/moldau. Revenu des camps. Il décède le 26 octobre 2011.

Théophile Thomas : né le 2 février 1924 à Plourin. (matricule 42 462). Autre lieu de déportation : Flossebbürg. Revenu des camps

Jean Trolez : né le 2 juin 1922 à Beuzec-Conq (29). Autres lieux de déportation : Dora, Dachau. Il est libéré le 29 avril 1945 à Dachau.

 

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Les déportés morlaisiens dans les camps nazis pendant la seconde guerre mondiale

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