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15 février 2021 1 15 /02 /février /2021 16:57
Jean Kervision

Jean Kervision

Gaston Balliot et Jean Kervision en 2019 lors d'une conférence sur la résistance en pays bigouden qui avait réuni 250 personnes à l'initiative du PCF Pays Bigouden

Gaston Balliot et Jean Kervision en 2019 lors d'une conférence sur la résistance en pays bigouden qui avait réuni 250 personnes à l'initiative du PCF Pays Bigouden

 Jean Kervision (au centre) en 2019 lors d'une conférence sur la résistance en pays bigouden qui avait réuni 250 personnes à l'initiative du PCF Pays Bigouden

Jean Kervision (au centre) en 2019 lors d'une conférence sur la résistance en pays bigouden qui avait réuni 250 personnes à l'initiative du PCF Pays Bigouden

Les communistes du Pays Bigouden et les communistes finistériens ont l'immense tristesse de perdre un camarade extraordinaire: Jean Kervision, militant communiste depuis 1945 et fils de militant communiste engagé dans la guerre d'Espagne avec France Navigation, les combats du Front Populaire et la Résistance, instituteur laïque, directeur d'école, militant et responsable syndical au SNI, secrétaire de section du PCF à Guilvinec dans les années 1970,  rédacteur en chef du"Travailleur Bigouden", le journal de la section PCF du Pays Bigouden (tiré entre 10 000 et 20 000 exemplaires à partir de 1966, et ceci pendant 35 ans), ancien secrétaire du comité de Guilvinec-Treffigiat-Plomeur du Secours populaire français, adjoint communiste au Guilvinec dans les années 80. 
 
Jean Kervision est décédé à 93 ans. Il est resté un militant communiste jusqu'au bout, attaché à transmettre la mémoire du parti communiste, de la résistance et du mouvement ouvrier dans le Pays Bigouden, avec son ami et complice Gaston Balliot. Il avait transmis la collection complète du "Travailleur Bigouden" à Gaston Balliot pour qu'il soit numérisé, puis confié au PCF, ainsi que de nombreux autres documents d'archives.
 
Le 14 juin 2019, Jean Kervision avait présenté avec Gaston Balliot à l'initiative de la section PCF du Pays Bigouden une conférence sur la Résistance dans le pays bigouden qui avait été suivie par 250 personnes.
 
Nous rendons un hommage vibrant à l'homme et au militant et transmettons toute notre sympathie à son épouse, sa famille, ses amis, ses proches, ses camarades.
 
Retrouvez les numéros du Travailleur Bigouden;
 
 
KERVISION Jean, Yves, Marie
Né le 29 janvier 1928 au Guilvinec (Finistère) ; instituteur ; militant syndical ; militant communiste dans le Finistère, adjoint au maire du Guilvinec.
 
Son père, marin de la Marine marchande, membre de la CGT, adhéra au Parti communiste en 1934 et en resta membre jusqu’à son décès en 1981. A la demande de la direction du Parti communiste, il navigua sur deux navires de la compagnie France-Navigation et participa au transport maritime des armes acheminées pour les troupes républicaines espagnoles depuis Mourmansk en URSS à Bordeaux et à Honfleur. Engagé dans les FTPF, il participa au siège puis à la libération de la poche de Lorient en 1944. Sa mère était aussi membre de la CGT. Jean Kervision reçut les premiers sacrements catholiques. Élève du lycée de Quimper (1939-1940) puis du cours complémentaire du Guilvinec (1940-1945), il entra à l’Ecole normale d’instituteurs d’Angers (Maine-et-Loire) en 1945. Titulaire du baccalauréat, il commença sa carrière d’instituteur en 1949 à Segré puis revint dans le Finistère en 1950 après son mariage uniquement civil en septembre 1950 à Treffiagat
(Finistère) avec Marianne Quéffelec, fille d’un marin pêcheur, institutrice, future adhérente du Parti communiste français. Le couple eut deux enfants. Il enseigna à Guiller-sur-Goyen dans le canton de Plogastel-Saint-Germain, puis en 1961 devint directeur de l’école de Plomeur dans le canton de Pont-l‘Abbé. Il y resta jusqu’à sa retraite en 1983. Face à la concurrence de l’école catholique, l’école publique passa de deux à huit classes sous sa direction.
 
Kervision adhéra au Syndicat national des instituteurs en 1948. Secrétaire du SNI dans le canton de Plogastel-Saint-Germain (1954-1961) puis dans celui de Pont-l‘Abbé (1962-1981), il fut membre du conseil syndical de la section départementale du SNI de 1956 à 1981, secrétaire-adjoint de la section de 1967 à 1969. Il était aussi secrétaire-adjoint de la sous-section cantonale de la Fédération de l’Éducation nationale. Il fut de 1958 à 1982 élu à la Commission administrative paritaire départementale et au Comité technique paritaire.
 
Kervision adhéra aux Jeunesses communistes en septembre 1944 puis à l’Union de la jeunesse républicaine de France. Il fut secrétaire du cercle de l’école normale. En mars 1945, il adhéra au PCF à l’école normale et fut membre de la cellule communiste de l’école jusqu’en 1949. Il fut par la suite militant communiste dans la section de Plozevet. Il participa en 1955 au stage central organisé par le PCF pour les instituteurs communistes. A partir de 1961, il milita dans la section communiste du Guilvinec et en fut le secrétaire à partir de 1972. Par la suite, il fut secrétaire de la section communiste du Pays bigouden qui regroupait les différentes sections des cantons du Guilvinec et de Pont-l’Abbé. Il entra au comité de la fédération communiste en 1974, y resta jusqu’en 1982 puis présida la commission fédérale de contrôle financier. Il fut le trésorier de l’Association des élus communistes et républicains du Finistère de 1983 à 1989. Il fut
le directeur et le rédacteur en chef du Travailleur bigouden, mensuel puis trimestriel des sections bigoudènes de PCF de sa fondation en 1966 à sa disparition en 1993.
 
Kervision s’investit dans les luttes laïques du département par l’intermédiaire des amicales laïques dans les localités successives où il milita activement avec son épouse. Secrétaire général du Comité départemental d’action laïque, il fut directeur de la revue Action laïque Bretagne. En outre il fut le secrétaire de l’association des parents d’élèves du lycée de Pont-l’Abbé de 1961 à 1968.
 
Kervision fut candidat au Conseil général dans le canton de Pont-l’Abbé en 1979. Il fut élu conseiller municipal et adjoint au maire du Guilvinec de 1983 à 1989.
 
En 2010, Kervision habitait Treffiagat. Toujours militant, il n’eut plus de responsabilités dans le PCF après 2005. Il fut le secrétaire du comité de Guilvinec-Treffigiat-Plomeur du Secours populaire français de 1990 au milieu de l’année 2010. Son épouse en était une des membres actives.
 
Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article107837, notice KERVISION Jean, Yves, Marie par Jacques Girault, version mise en ligne le 18 novembre 2010, dernière modification le 21 février 2013.
 
 
Jean Kervision raconte sa guerre:
 
 
 
KERVISION Jean, Yves, Marie
Né le 29 janvier 1928 au Guilvinec (Finistère) ; instituteur ; militant syndical ; militant communiste dans le Finistère, adjoint au maire du Guilvinec.
 
Son père, marin de la Marine marchande, membre de la CGT, adhéra au Parti communiste en 1934 et en resta membre jusqu’à son décès en 1981. A la demande de la direction du Parti communiste, il navigua sur deux navires de la compagnie France-Navigation et participa au transport maritime des armes acheminées pour les troupes républicaines espagnoles depuis Mourmansk en URSS à Bordeaux et à Honfleur. Engagé dans les FTPF, il participa au siège puis à la libération de la poche de Lorient en 1944. Sa mère était aussi membre de la CGT. Jean Kervision reçut les premiers sacrements catholiques. Élève du lycée de Quimper (1939-1940) puis du cours complémentaire du Guilvinec (1940-1945), il entra à l’Ecole normale d’instituteurs d’Angers (Maine-et-Loire) en 1945. Titulaire du baccalauréat, il commença sa carrière d’instituteur en 1949 à Segré puis revint dans le Finistère en 1950 après son mariage uniquement civil en septembre 1950 à Treffiagat
(Finistère) avec Marianne Quéffelec, fille d’un marin pêcheur, institutrice, future adhérente du Parti communiste français. Le couple eut deux enfants. Il enseigna à Guiller-sur-Goyen dans le canton de Plogastel-Saint-Germain, puis en 1961 devint directeur de l’école de Plomeur dans le canton de Pont-l‘Abbé. Il y resta jusqu’à sa retraite en 1983. Face à la concurrence de l’école catholique, l’école publique passa de deux à huit classes sous sa direction.
 
Kervision adhéra au Syndicat national des instituteurs en 1948. Secrétaire du SNI dans le canton de Plogastel-Saint-Germain (1954-1961) puis dans celui de Pont-l‘Abbé (1962-1981), il fut membre du conseil syndical de la section départementale du SNI de 1956 à 1981, secrétaire-adjoint de la section de 1967 à 1969. Il était aussi secrétaire-adjoint de la sous-section cantonale de la Fédération de l’Éducation nationale. Il fut de 1958 à 1982 élu à la Commission administrative paritaire départementale et au Comité technique paritaire.
 
Kervision adhéra aux Jeunesses communistes en septembre 1944 puis à l’Union de la jeunesse républicaine de France. Il fut secrétaire du cercle de l’école normale. En mars 1945, il adhéra au PCF à l’école normale et fut membre de la cellule communiste de l’école jusqu’en 1949. Il fut par la suite militant communiste dans la section de Plozevet. Il participa en 1955 au stage central organisé par le PCF pour les instituteurs communistes. A partir de 1961, il milita dans la section communiste du Guilvinec et en fut le secrétaire à partir de 1972. Par la suite, il fut secrétaire de la section communiste du Pays bigouden qui regroupait les différentes sections des cantons du Guilvinec et de Pont-l’Abbé. Il entra au comité de la fédération communiste en 1974, y resta jusqu’en 1982 puis présida la commission fédérale de contrôle financier. Il fut le trésorier de l’Association des élus communistes et républicains du Finistère de 1983 à 1989. Il fut
le directeur et le rédacteur en chef du Travailleur bigouden, mensuel puis trimestriel des sections bigoudènes de PCF de sa fondation en 1966 à sa disparition en 1993.
 
Kervision s’investit dans les luttes laïques du département par l’intermédiaire des amicales laïques dans les localités successives où il milita activement avec son épouse. Secrétaire général du Comité départemental d’action laïque, il fut directeur de la revue Action laïque Bretagne. En outre il fut le secrétaire de l’association des parents d’élèves du lycée de Pont-l’Abbé de 1961 à 1968.
 
Kervision fut candidat au Conseil général dans le canton de Pont-l’Abbé en 1979. Il fut élu conseiller municipal et adjoint au maire du Guilvinec de 1983 à 1989.
 
En 2010, Kervision habitait Treffiagat. Toujours militant, il n’eut plus de responsabilités dans le PCF après 2005. Il fut le secrétaire du comité de Guilvinec-Treffigiat-Plomeur du Secours populaire français de 1990 au milieu de l’année 2010. Son épouse en était une des membres actives.
 
Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article107837, notice KERVISION Jean, Yves, Marie par Jacques Girault, version mise en ligne le 18 novembre 2010, dernière modification le 21 février 2013.
Hommage à notre camarade Jean Kervision, décédé à 93 ans, ancien rédacteur en chef du Travailleur Bigouden et adjoint communiste au Guilvinec
L'équipe de rédaction du Travailleur Bigouden dans les années 70 avec Jean Kervision, son rédacteur en chef

L'équipe de rédaction du Travailleur Bigouden dans les années 70 avec Jean Kervision, son rédacteur en chef

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13 février 2021 6 13 /02 /février /2021 07:56
Antisémitisme - Ilan Halimi - 15 ans déjà, mais c’est encore hier pour nous - par Pierre Laurent, président du Conseil National du PCF, sénateur
15 ans déjà, mais c’est encore hier pour nous.
Il y a quinze ans, le calvaire d'Ilan Halimi, enlevé et torturé pendant 24 jours parce que juif se concluait tragiquement par sa mort. A l’époque nous étions consternés par les actions du « gang des barbares », nourries par la haine du juif et des stéréotypes que l’on croyait d’un autre âge.
Nous sommes de celles et ceux qui refusent de concéder tout terrain à la haine du judaïsme et des juifs dans notre pays. L'antisémitisme est un fléau, un délit, qui peut devenir, l'histoire l'a montré, le moteur d'un indicible crime contre l'humanité. Nous l'avons combattu hier pour libérer notre pays du nazisme hitlérien, nous le combattons aujourd'hui et nous le combattrons demain avec la même détermination.Depuis des siècles, la haine des Juifs fait des ravages dans notre pays. Depuis 2006, de l'école Ozar Hatorah à Toulouse jusqu'à l'Hypercacher de la Porte de Vincennes, onze hommes, femmes, enfants ou personnes âgées ont été tuées en France parce que Juives.
Les actes antisémites et les violences racistes sont en augmentation, ici et ailleurs dans le monde. La mort tragique d'Ilan Halimi nous obligent à une détermination sans faille contre l'antisémitisme et contre toute forme de racisme.
Ce drame et ceux qui ont suivis, nous rappellent constamment que nous devons rester mobilisés contre les résurgences de l'antisémitisme et du négationnisme.
Toute violence aujourd'hui faite aux croyant.e.s et faite à celles et ceux d'entre nous qui sont juifs, ou à celles et ceux d'entre nous qui sont musulmans, chrétiens, hindous... demeure pour nous un affront fait à toutes et tous. Nous refusons toute banalisation de l'antisémitisme, du négationnisme, de la haine de l'islam ou de toute croyance, de toute culture ou origine, comme nous refusons de hiérarchiser les racismes, xénophobies, atteintes à la dignité, à la vie, les discriminations dont chacune et chacun d'entre nous peut être la cible.
Nous combattons fermement cette conception monolithique infondée qui classe et hiérarchise les êtres humains, qui reste hermétique aux réalités sociales, aux processus historiques qui font que les cultures se forment et se reforment sans cesse au contact les unes des autres. Il y a quelque chose de profondément morbide chez ceux qui croient que la culture n'est que tradition, alors qu'elle n'est qu'invention.
L'antiracisme nous a construit et a construit le meilleur pour la France. Nous sommes fidèles à cette histoire. L'heure n'est pas à construire des murs qui se retourneront contre toutes et tous.
Au contraire, le meurtre d’Ilan Halimi qui a succombé de ses blessures, il y a 15 ans, nous oblige à rester vigilant pour sa mémoire, pour lutter contre l’antisémitisme, pour une société qui respecte celui qui croit en Dieu (et peu importe son Dieu) comme celui qui n’y croit pas.
🔷 L'UJRE vous invite à vous joindre à l'hommage qui sera rendu à Ilan Halimi, le Dimanche 14 Février, à 14h, au Jardin Ilan Halimi, 54 rue de Fécamp, 75012, Paris 🔷
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13 février 2021 6 13 /02 /février /2021 07:12
Colonialisme. OAS : trois lettres chargées de malheur -  l'historien Alain Ruscio dans l'Humanité, 12 février 2021
Colonialisme. OAS : trois lettres chargées de malheur
Vendredi 12 Février 2021

Sous l’égide de Salan, l’Organisation de l’armée secrète voit le jour le 11 février 1961 à Madrid. Après l’échec du putsch d’Alger, elle se livrera à de multiples actes racistes violents et attentats politiques en France et en Algérie.

 

La date du 11 février 1961 n’est certes pas de celles que l’on fête allègrement : ce jour-là, une poignée d’activistes d’extrême droite, bénéficiant du parrainage du général (pas encore ex) Salan, créent une organisation qu’ils affublent de l’appellation d’« armée secrète ». Le lieu ? Madrid, au cœur de l’Espagne franquiste, l’une des dernières dictatures fascistes. Beau symbole.

Deux mois plus tard, le « quarteron de généraux » tente un baroud de déshonneur, le putsch d’avril 1961. Après l’échec pitoyable, que reste-t-il aux derniers partisans de l’Algérie française ? Le terrorisme. De nombreux militaires putschistes (dont Salan, qui deviendra le chef) rejoignent et, plus grave, encadrent l’OAS. Les plasticages, qui avaient commencé bien avant, connaissent un essor. Alger, Bône, Oran, Mostaganem commencent à s’habituer aux explosions. La nouvelle organisation en revendique ouvertement la paternité, avec un slogan qui deviendra célèbre : « L’OAS frappe où elle veut, quand elle veut. » C’est alors une prédiction ou une menace. Cela deviendra vite un programme. Les premiers visés sont les Algériens « musulmans », qui tombent par centaines. Dans les derniers temps de la guerre, des jeunes Européens exaltés les abattront sans sommation, souvent au hasard. Un mot revient en force : « ratonnades ». Les autres victimes sont les Européens, communistes (dans la clandestinité depuis 1955), chrétiens libéraux et même prêtres, socialistes, gaullistes, fonctionnaires loyaux, comme le commissaire principal d’Alger Roger Gavaury, qui n’acceptent pas la terreur, ou même de simples citoyens qui refusent les injonctions de cette OAS.

Au printemps 1961, avant même le putsch, l’organisation, consciente d’être dans une impasse en Algérie, décide de porter le fer dans la plaie : il faut que la métropole, ressentie comme endormie, indifférente, souffre à son tour, pour comprendre le désarroi de l’Algérie française. Dès le 31 mars, Camille Blanc, maire d’Évian, est assassiné. Son seul crime ? Être l’élu de la ville choisie pour entamer des négociations avec le FLN algérien. À partir de l’été, la métropole va vivre au rythme des plasticages, des assassinats. De nouveau, les cibles sont les militants antiguerre en tout premier lieu (le domicile de Sartre et Beauvoir est saccagé, le siège national du PCF est mitraillé), mais aussi les élus gaullistes. Les lecteurs de journaux étaient habitués, depuis 1954, à lire des nouvelles de l’infini malheur de la terre algérienne. Ils sont désormais – dans des proportions évidemment et immensément moindres – à l’affût chaque matin des nouvelles annonçant tel assassinat, telle destruction de local ou d’appartement. Le 8 septembre 1961, une forte charge explose sur un parcours emprunté par le président de Gaulle, à Pont-sur-Seine. L’attentat échoue. Un cruel événement va à ce moment faire littéralement basculer l’opinion. Dans la soirée du 7 février 1962, la petite Delphine Renard, qui habitait l’immeuble où résidait le ministre André Malraux, est victime d’un attentat qui la rendra aveugle. L’image du visage ensanglanté de cette enfant marque l’opinion de façon immédiate, violente. Le lendemain, une manifestation de masse inonde les rues de Paris. Quasiment partout, la police charge avec hargne. À Charonne, c’est pire : neuf manifestants, tous membres de la CGT, huit étant communistes, sont tués.

Rien ne pouvait, évidemment, arrêter le cours des événements qui aboutirent finalement aux accords d’Évian, reconnaissant l’indépendance de l’Algérie. Rien, pas même ce qui était devenu la haine contre de Gaulle (attentat du Petit-Clamart, 22 août 1962, soit cinq mois plus tard). Les chiffres officiels, arrêtés en avril 1962, font état de 15 355 attentats en Algérie, auxquels il faut ajouter des centaines de plasticages en France. Au global, une fourchette de 2 200 à 2 400 morts est généralement admise, dont 80 à 85 % de « musulmans ».

Certes, dans les flots de sang et de douleur que créa la guerre d’Algérie, dans le décompte des centaines de milliers de morts de ce conflit, ce chiffre peut paraître minime. Mais il ne s’est agi, là, non de combattants, mais de victimes, désignées par des comités secrets, tombées sans avoir même eu le temps de se défendre, abattues dans la rue, dans les domiciles, arrachées de cellules de prisons, voire achevées dans des ambulances ou des lits d’hôpitaux.

Il est un autre malheur que les membres de l’OAS ont amplifié. Se prétendant défenseurs des Européens d’Algérie, ils ont précipité leur départ par la multiplication des actes entraînant un torrent de haine entre les communautés. L’OAS se voulait un bouclier, elle fut une épée qui les frappa. Les meilleurs défenseurs des Européens d’Algérie ne furent pas les racistes de l’OAS, mais ceux qui, avec M gr Duval, l’abbé Scotto ou Henri Alleg, prônaient l’égalité et l’amitié entre les communautés.

Alain Ruscio

Historien

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11 février 2021 4 11 /02 /février /2021 20:02
Une photo de Maître Lalouët, premier maire communiste de Bretagne et l'un des premiers de France

Une photo de Maître Lalouët, premier maire communiste de Bretagne et l'un des premiers de France

Voici, écrit par Georges Cadiou, et nous le publions dans le "Chiffon Rouge" avec l'aimable autorisation de l'auteur, un dossier qui démontre, à son avis, que Douarnenez ne fut pas la première municipalité communiste de France, ni même de Bretagne où elle est devancée par Huelgoat. Cela n'enlève rien évidemment au rôle important qu'a joué Douarnenez dans les années 20 mais, pour Georges Cadiou, il faut redonner sa place historique au Huelgoat et à Jacques-Louis Lalouët qui, bien qu'ayant quitté le PC assez tôt, garda des liens fraternels avec les communistes finistériens.
En 1925, il fut même l'avocat de Daniel Le Flanchec lors du procès concernant les événements tragiques que connut la ville ! Lalouët défendra aussi de nombreux militants syndicaux et communistes devant les tribunaux, notamment Théophile Kerdraon ! C'est une figure à réhabiliter !
 
Maître Jacques Louis Lalouët, premier maire communiste de Bretagne à Huelgoat - par Georges Cadiou

Une personnalité attachante malheureusement bien oubliée aujourd’hui : Louis Jacques Lalouët, premier maire communiste de Bretagne, l’un des premiers en France

- Par Georges Cadiou, journaliste, écrivain, historien

Le PC vient de fêter ses 100 ans. Dans une certaine indifférence, il faut bien le dire. Mais même s’il n’est plus le parti qu’il a été, il a marqué notre histoire politique, y compris en Bretagne. On lit encore, çà et là, que Douarnenez a été la première municipalité de France à élire un maire communiste, en l’occurrence Sébastien Velly, tapissier de profession. Rien n’est plus faux : il y a eu des maires communistes avant Douarnenez qui n’est même pas la première en Bretagne où elle est devancée par Huelgoat !

Au moment du 18ème Congrès du Parti Socialiste Unifié, Section Française de l’Internationale Ouvrière (SFIO) à Tours, fin décembre 1920, qui doit décider de l’orientation du socialisme français (adhésion ou pas à l’Internationale Communiste), le maire de Douarnenez est Fernand Le Goïc, membre de la SFIO. Le maire du Huelgoat est Lalouët, prénommé Jean Louis Jacques Marie. On disait volontiers Louis et il signait Jacques. Également élu SFIO en décembre 1919, il va, dès 1920, faire le choix de l’Internationale Communiste (le Komintern) créée par Lénine à Moscou en mars 1919, dans la foulée de la Révolution d’Octobre 1917.

Né le 11 février 1890 à Goulien dans le Sud-Finistère, avocat des organisations ouvrières brestoises, blessé et décoré lors de la Guerre de 14-18 qu’il a terminée comme officier, Lalouët était même l’un des dirigeants de la jeune fédération communiste finistérienne dont il était le trésorier. Il était aussi l’un des principaux rédacteurs de Germinal, l’hebdomadaire communiste dont le premier numéro parut le 5 février 1921. Lalouët a écrit plusieurs éditoriaux, signant de son nom ou du pseudonyme de Jacques Misère, sur divers sujets abordés à l’époque (la dictature du prolétariat, la question paysanne …).

Le 9 janvier 1921, dix jours après le verdict du Congrès de Tours qui donne une large majorité à l’adhésion à l’Internationale Communiste, Lalouët est candidat aux élections sénatoriales du Finistère sur la liste communiste, en qualité de maire du Huelgoat. Le Goïc qui est resté à la SFIO, est, en tant que maire de Douarnenez, sur la liste socialiste ! La Une de La Dépêche Brest du 10 janvier 1921 est à cet égard sans ambiguïté.

Rien que ce fait, que je rappelle depuis de nombreuses années dans divers articles ou livres, aurait dû mettre fin à cette légende de Douarnenez, première municipalité communiste de France, une légende née dans les années 1970 et à laquelle il est temps de mettre fin.

L’Humanité, le quotidien fondé par Jaurès, resté aux mains des majoritaires communistes, fait, tout au long des premières semaines de 1921, la liste des élus, notamment les maires, restés fidèles, dixit L’Huma, au vote majoritaire de Tours, face à ceux que le journal désigne comme « les dissidents ». On trouve dans cette liste, et cela ne surprendra personne, de nombreux maires de la région parisienne : Emile Cordon (Saint-Ouen), Jean-Marie Clamamus (Bobigny), André Morizet (Boulogne-Billancourt, c’est l’arrière-grand-père de Nathalie Kosciusko-Morizet, il ira en Russie et en ramènera un livre : « Chez Lénine et Trotski » publié en 1921), Gaston Philippe (Saint-Denis), Henri Sellier (Suresnes). Il y a aussi Albert Sérol (Roanne), Paul Bouthonnier (Périgueux), Emile Clévy (Troyes), Joseph Lasvergnas (Saint-Junien), Jules Nadi (Romans), Frédéric Subra (Mercus-Garrabet dans l’Ariège), Julien Tixier (Donzeil dans la Creuse), Paul Bazin (Petit-Quevilly), d’autres encore dont Lalouët au Huelgoat ! Sébastien Velly n’apparait pas sur ces listes. Pire : il n’est jamais cité par L’Huma tout au long de l’année 1921 ! Avouez que pour quelqu’un présenté aujourd’hui comme le premier maire communiste de France c’est plutôt étrange ! Ouvrons aussi une parenthèse : ceux qui disent que Douarnenez est la première à avoir élu un maire communiste, les autres ayant été élus comme SFIO avant de devenir communistes, donc c’est Douarnenez qui est la première, s’arrangent avec les faits ! Aucun des maires que nous avons cités n’a été mis en minorité par son conseil municipal. Au contraire, ils ont été confortés notamment lors du vote du budget, l’acte municipal fondamental. Mais si on veut absolument se placer sur cette argutie on peut citer Paul Bazin*, le maire du Petit-Quevilly, dans la banlieue de Rouen. Il a choisi l’Internationale Communiste. Il est révoqué pour avoir arboré le 1er mai 1921 le drapeau rouge au fronton de sa mairie ! Il se représente devant les électeurs et est brillamment réélu le 19 juin ! Reconfirmé comme maire communiste par le corps électoral. A Douarnenez, ce ne fut pas le cas. Il y eut aussi des partielles en mai, mais les communistes furent nettement battus. Reprenons donc le fil des évènements fort bien rappelés par Maurice Lucas dans son livre publié en 1975, « Luttes politiques et sociales à Douarnenez, 1890-1925 » :

25 février 1921 : Le Goïc est invalidé comme maire de Douarnenez pour non résidence ! Il est professeur à Nantes. Il y a eu d’autres départs du conseil municipal. Pour désigner un nouveau maire, il faut donc procéder à des élections partielles pour quatre sièges vacants. Celles-ci ont lieu les 8 et 15 mai 1921. Il y a trois listes en lice : une liste socialiste, une liste communiste et une liste de droite. Le Goïc a eu le temps de régulariser sa situation et il peut mener la liste SFIO qui GAGNE CES PARTIELLES ! Elle a trois élus (Le Goïc, Jacquin et Gonidec), la droite en a un (Quinquis, un mareyeur). Les communistes ont été nettement battus dans ces partielles, ils n’ont aucun élu !

Le 22 mai, c’est l’élection du maire par le conseil municipal de Douarnenez un conseil qui comprend 27 élus mais il y aura des absents pour diverses causes. Ce 22 mai, il y a trois tours de scrutin. La situation est très confuse. En fait aucune majorité ne se dégage.

1er tour : Sébastien Velly, candidat communiste, obtient 10 voix et Le Goïc 9. Pas de majorité absolue. On revote.

2ème tour : Le Goïc obtient 10 voix et Velly 8 ! Toujours pas de majorité !

3ème tour : les communistes poussent un nommé Joseph Floch qui obtient 13 voix contre 10 à Le Goïc, mais Floch, notoirement illettré, démissionne aussitôt !

On en reste là, dans une impasse. Le conseil municipal de Douarnenez décide alors, comme la Loi l’exige, de s’en remettre à … la préfecture !

Le 3 juillet 1921, à Quimper c’est la surprise : le conseil de préfecture décide de ne retenir que le premier tour de scrutin, même s’il n’y avait pas de majorité absolue et déclare Velly maire de Douarnenez. On ne saura jamais pour quelles obscures raisons les services préfectoraux ont privilégié un « rouge » comme on disait alors ! Mais le fait est que, au moment où Douarnenez se débattait dans cette affaire, Huelgoat avait un maire communiste en place depuis pratiquement six mois !

La suite allait encore réserver bien des surprises. Comme beaucoup d’autres vite déçus par le mirage bolcheviste, Lalouët prend ses distances avec le PC. Il était franc-maçon et cela n’était pas bien vu alors au PC ! Il avait eu aussi le tort pour certains d’avoir reçu, en tant que maire, dans sa mairie du Huelgoat, au cours d’une grande fête touristique en septembre 1921, Yves Le Trocquer, natif de Pontrieux, le Ministre des Travaux Publics dans un gouvernement qui avait brutalement réprimé les cheminots grévistes au printemps 1920 et le maréchal Foch, qui avait une propriété à Ploujean et que beaucoup considéraient comme l’un des responsables du grand massacre de 14-18, une guerre exécrée par les tenants de l’Internationale Communiste. Lalouët quitte donc le PC, courant 1922, tout en conservant des relations cordiales avec lui, notamment en assurant la défense des militants devant les tribunaux. L’époque était en effet à la répression la plus sévère envers les membres du PC dans plusieurs affaires comme l’occupation de la Ruhr, la guerre du Rif, l’antimilitarisme.

Battu par Le Rumeur, socialiste SFIO, aux élections municipales de 1925 au Huelgoat, Lalouët va ensuite se rapprocher du … mouvement breton. Rappelons que Léonard de naissance avec un père agriculteur né à Plouyé et une épouse native de Plougonven dont les parents étaient commerçants au Huelgoat, Lalouët s’exprimait très bien en breton. Le 11 septembre 1927, il est présent à Rosporden pour la création du PAB, le Parti Autonomiste Breton qui penche alors nettement à gauche avec des hommes comme Maurice Duhamel et Morvan Marchal (l’inventeur du gwenn-ha-du). Par la suite, il ne suivra pas la dérive nationaliste puis fasciste dans les années 30 des tenants du PNB, le Parti National Breton, en premier lieu Olier Mordrel. Après un court passage au parti ADSAO (Debout) de l’abbé Madec, le curé démocrate-chrétien du Relecq-Kerhuon surnommé « Madec-Social », Lalouët qui était toujours avocat à Brest où il défendait notamment les syndicalistes et les militants ouvriers, s’était à nouveau rapproché de la SFIO. En 1935, il figurait sur la liste socialiste aux élections municipales à Brest mais il ne fut pas élu. Il occupait alors de hautes fonctions dans la franc-maçonnerie au sein de L’Heureuse Rencontre. En 1940, il s’engage pour combattre le nazisme. Il est fait prisonnier aux Pays-Bas puis il sera libéré sur l’intervention de … militants bretons ** ! Mais, revenu à Brest, il ne rallia pas les tenants de la Collaboration, rejoignant, au contraire un mouvement de résistance. Il utilisa aussi son poste de traducteur à la Kommandantur où il avait été requis (il parlait très bien l’allemand), pour prévenir les résistants des dangers qu’ils encourraient. Il signait les tracts clandestins qu’il imprimait du nom de … Jacques Misère, son pseudonyme du temps de sa période communiste. Lalouët est décédé à Brest le 24 janvier 1953. C’est Maître Georges Lombard, futur élu brestois, qui prononça son oraison funèbre.

Pendant tout ce temps, Douarnenez confirmait son ancrage communiste, avec la grande grève des sardinières, la venue de Charles, Tillon et de Marcel Cachin, l’élection du fameux Daniel Le Flanchec qui sera grièvement blessé dans un attentat, autrement dit « la geste révolutionnaire » chez les « pen-sardin » ! L’Humanité annonce le décès de Sébastien Velly le 19 juillet 1924. Le quotidien du PC évoque celui qui a fait triompher « dans le grand port breton parmi la population laborieuse des pêcheurs les principes de notre Parti. Il a toujours tenu haut et ferme le drapeau du communisme international. » En février 1925, le conseil municipal de Douarnenez donne le nom de Sébastien Velly à une rue de la ville. L’Humanité du 28 février 1925 relate l’affaire en écrivant que Velly est « le premier maire communiste de Douarnenez ». De Douarnenez, ce qui est vrai mais pas de France, ni même de Bretagne !

Georges Cadiou

  • Né en 1890, le Normand Paul Bazin, révolutionnaire professionnel, quitta le Petit-Quevilly en 1923 pour devenir secrétaire départemental en Ille-et-Vilaine. Ami personnel de Marcel Cachin, il fit alors la connaissance de Charles Tillon avec lequel il milita sur toute la Bretagne. Dans son livre « On chantait rouge », Tillon le présente comme « un grand gaillard sympathique ». A noter que dans ce livre, Tillon parle beaucoup de Douarnenez où il anima la grande grève des sardinières. Il parle surtout du célèbre Le Flanchec et ne cite qu’une fois Velly (qu’il orthographie Vély), sans préciser qu’il aurait été le premier maire communiste de France ! Si cela avait été le cas ne l’aurait-il pas fait ! Mais pour avoir vécu ces évènements de près, il savait que ce n’était pas vrai !

** En 1940, plusieurs nationalistes bretons, notamment André Geffroy (« le Grand Gef »), firent le tour des camps de prisonniers en Allemagne, avec l’aval de Berlin, en vue de recruter des volontaires pour former une « armée bretonne » destinée à « libérer » la Bretagne ! Environ 600 prisonniers bretons reviendront ainsi en Bretagne où, pour la plupart, ils s’évanouiront dans la nature ou prendront des chemins différents. Ce fut le cas de Lalouët (Lire à ce sujet notre livre : L’Hermine et la Croix Gammée).

 

Lire :

Georges Cadiou : L’Hermine et la Croix gammée, le mouvement breton et la collaboration, Editions Mango, Paris, 2001 (réédité en poche par Apogée, Rennes, 2006) ; Emsav, Dictionnaire critique historique et biographique, Le mouvement breton de A à Z, Coop-Breizh, Spézet, 2013. A venir : Marcel Cachin, un Breton émancipé dans les tourments du 20ème siècle, Yoran Embanner, Fouesnant, 2021. Avec Eliane Faucon-Dumont : Huelgoat et les Monts d’Arrée, les rebelles de la montagne, Editions Alan Sutton, Saint-Cyr-sur-Loire, 2008.

Roger Faligot : Brest l’insoumise, Editions Dialogues, Brest, 2016

Jean-Yves Guengant : Brest et la franc-maçonnerie, Editions Armeline, Crozon, 2008 ; Nous ferons la grève générale, Jules Le Gall, les anarchistes et l’anarcho-syndicalisme à Brest et en Bretagne, Editions Jean-Marie-Goater, Rennes, 2019. A venir : une histoire de la franc-maçonnerie maritime chez le même éditeur.

Kristian Hamon : Les nationalistes bretons sous l’Occupation, An Here, Le Relecq-Kerhuon, 2001 (livre réédité par Yoran Embanner).

André Kervella : Brest rebelle, Skol Vreizh, Morlaix, 1998.

Jean-Michel Le Boulanger : Flanchec, 1881-1944, ou l’étrange parcours d’un insoumis, Mémoire de la Ville, Douarnenez, 1997.

Maurice Lucas : Luttes politiques et sociales à Douarnenez, 1890-1925, édité en 1975.

Charles Tillon : On chantait rouge, Robert Laffont, Paris, 1977.

Collections de L’Humanité, Le Cri du Peuple, Germinal, La Dépêche de Brest et L’Ouest-Eclair

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10 février 2021 3 10 /02 /février /2021 17:18
France-Navigation – Une épopée rouge (1/5) - par Gérard Streiff, Communistes, 10 février 2021
France-Navigation – Une épopée rouge (1/5)

1937/1938 : Alors que l’Espagne du Front populaire est victime de la non-intervention, lâchée par Paris et Londres, les communistes mettent sur pied une compagnie maritime pour nourrir et armer les Républicains.

Le service des archives de la ville d’Ivry (piloté par Michele Rault) possède un beau fonds Georges Gosnat (1914/1982), qui fut à la Libération sous-secrétaire d’État à l’Armement puis député, succéd·ant à Maurice Thorez (ainsi que trésorier du PCF). Dans ce fonds il y a un carton intitulé « France-Navigation », deux mots qui désignent une étonnante aventure. 

« France-Navigation » fut une compagnie maritime communiste qui se chargea d’alimenter et d’armer la République espagnole. Deux livres (au moins) racontent cette histoire : À l’ombre des deux T (Thorez et Togliatti), de Giulio Ceretti (Julliard, 1973) et Les brigades de la mer de Dominique Grisoni et Gilles Herzog (Grasset, 1979) ; le lecteur pourra s’y référer avec profit.

Le carton « France-Navigation » comprend notamment plusieurs cahiers grand format qui constituent une sorte de journal de bord de l’aventure de cette société. Des dizaines de pages remplies d’une foultitude de données, toutes inscrites là dans l’urgence, dans un apparent désordre. Ce sont autant d’éléments d’un puzzle dramatique : des noms de bateaux (leur port de départ, leur date d’arrivée, le type de cargaisons), des additions, des rappels, des notes, des pense-bêtes, des conseils à suivre, des rendez-vous à ne pas manquer. Une masse de phrases rapides du genre « Gravelines, 23 avril 38, débarquement terminé, grandes caisses pas par routes, mais tunnel affaissé, réponse du ch de fer demain ». Ce genre d’annotations courent tout au long des années 1937/1938.

Petit rappel : le Front populaire l’emporte en Espagne en février 1936. Cinq mois plus tard, le putsch de Franco marque le déclenchement de la guerre civile. Une coalition internationale menée par la Grande-Bretagne choisit la « non-intervention » en Espagne, la France du gouvernement Blum se plie à ce choix malgré la pression des milieux populaires. Une posture hypocrite alors que le camp fasciste, l’Italie de Mussolini et l’Allemagne de Hitler, va vite ouvertement soutenir les factieux. C’est en fait une manière d’abandonner, d’étrangler le Front populaire espagnol. Une politique lâche, suicidaire qui amorce le processus de la Seconde Guerre mondiale.

Les républicains espagnols appellent à l’aide. La solidarité internationale va se manifester de différentes formes, la plus spectaculaire étant la formation des Brigades internationales. Mais l’Espagne se retrouve victime d’un blocus ; des autorités républicaines souhaitent échapper à ce piège, notamment par la voie maritime. Ce n’est pas sans risque, les franquistes, à mesure qu’ils progressent, contrôlent ou ferment les ports. Et puis des navires de guerre allemands et italiens, des sous-marins surveillent certaines voies de passage. En même temps, l’opération n’est pas impossible non plus : on raconte alors qu’un bateau français vient de réussir à aller à Santander (en Cantabrie) au nez et à la barbe des fascistes.

L’appel de Madrid est entendu. À Paris, le communiste franco-italien -si l’on ose dire - Giulio Ceretti préside alors le Comité international pour l’aide à l’Espagne. Avec le soutien de la direction du PCF, de l’Internationale, il se voit chargé de cette mission : créer de toutes pièces une flottille de bateaux pour approvisionner l’Espagne, ce qui veut dire réunir des hommes, des équipages, des fonds, des technologies dans des délais incroyablement courts.

En deux ans, parti de zéro, la compagnie « France-Navigation » va compter 22 navires et 2 000 marins ; elle va effectuer un total de 227 voyages ! Et multiplier par trente son capital initial.

À l’origine de ce petit miracle, on trouve donc Giulio Ceretti (1903/1985), communiste italien chassé de son pays par le fascisme, militant de l’Internationale, devenu membre de la direction du PCF sous le nom de Pierre Allard (à la Libération de l’Italie, il deviendra ministre à Rome) ; Auguste Dumay (1888/1955) ex-secrétaire de la Fédération des marins de Marseille, chef mécanicien qui jouera un rôle clé dans l’armement des bateaux (voir sa longue bio dans le « Maîtron » où on dit de lui que c’était « un vieux militant de l’Internationale des marins, une tête de lard, un homme terrible mais un révolutionnaire ») ; Simon Pozner, qui apporte ses compétences d’homme d’affaires, intime du banquier rouge (et suédois) Olof Aschberg, qu’on dit lui proche des « finances soviétiques » et par ailleurs oncle de l’écrivain Vladimir Pozner (Simon Pozner trouvera la mort à Auschwitz) ; et Georges Gosnat (1914/1982), tout jeune officier qui devient secrétaire général (puis directeur) de France-Navigation ; il a 23 ans.

Gérard Streiff

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10 février 2021 3 10 /02 /février /2021 17:16
Margot Caudan, 101 ans, adhérente du PCF, a reçu la Légion d’honneur - par Philippe Jumeau, secrétaire départemental du PCF Morbihan-  Communistes
Margot Caudan, 101 ans, adhérente du PCF, a reçu la Légion d’honneur

Dans le Morbihan, il se trouve que deux adhérents du PCF ont eu 100 ans en 2020, comme notre parti : Eugène Crépeau, ancien maire d’Hennebont, et Marguerite (dite Margot) Caudan, qui dès l’âge de 15 ans fut une combattante antifasciste. Celle qui fut une résistante de la première heure a reçu le samedi 30 janvier la médaille de la Légion d’honneur à Plouhinec (56) des mains du sous-préfet de Lorient.

Au cours de cette cérémonie, elle a pris soin de dire : « Je ne suis pas pour les décorations individuelles. J’ai longtemps hésité à accepter de recevoir la Légion d’honneur. Je la reçois aujourd’hui pour tous mes amis résistants qui n’ont pas eu la chance d’assister à la Libération, à la capitulation de l’Allemagne nazie. Quand on agit selon sa conscience, ce n’est pas pour des décorations. »

Née dans le 20e arrondissement de Paris en 1920, elle côtoya alors des familles de réfugiés qui la rendirent sensible à l’injustice qui frappait ses amis de l’époque. Elle adhère en 1935 aux JC puis à l’Union des jeunes filles de France (UJFF). En 1936, elle consacre l’essentiel de ses activités pour l’aide à l’Espagne républicaine. Le décret prononçant la dissolution du PCF fera qu’elle sera arrêtée en avril 1940, alors qu’elle n’était mariée que depuis 8 jours. L’immense pagaille qui règne à Bordeaux, où elle avait été transférée, lui permet d’être libérée sans trop savoir pourquoi !

En cette période plus que troublée, il fallait à Margot et ses camarades une bonne dose d’optimisme et d’inconscience pour tenter d’agir contre l’occupant nazi et son auxiliaire « l’Etat Français » de Pétain, au vu de la disproportion des forces en présence. Si des actes de sabotage isolés eurent lieu, Margot et son mari choisirent une arme qui a fait ses preuves en nombre de périodes historiques : l’écrit. Sollicités par Henriette Schmidt (de la direction clandestine du PCF), il leur fut confiée une petite imprimerie, une ronéo afin de sortir des tracts. Le premier tirage fut l’appel à la manifestation place de l’Etoile le 11 novembre 1940 ; puis viendront des tirages de l’Humanité, de l’Avant-Garde.

Fernand Grenier trouva refuge chez Marguerite, mais suite à l’arrestation de plusieurs dirigeants, la plongée dans la clandestinité totale fût impérative. Margot assure alors des liaisons entre les mouvements politiques de résistance, transporte documents, faux papiers, matériel pour explosifs, messages oraux… Arrêtée une seconde fois en 1944, elle fût libérée en août de la même année et rejoignit alors les FFI pour la libération de Paris.

Cette « entrée en résistance » de Margot comme de très nombreuses et méconnues femmes contribua à la défaite de l’Allemagne hitlérienne. Pour autant, à aucun moment de sa vie Margot ne se considéra et encore aujourd’hui comme une « ancienne combattante ». Tout au long de sa vie professionnelle, de sa retraite, elle a continué le combat. S’indigner et résister toujours, résume pleinement le combat de Margot, que chaque année nous avons le bonheur de croiser au stand de la section de Port-Louis lors de la fête de l’Humanité Bretagne ! Elle a, à de très nombreuses reprises, témoigné auprès des jeunes générations de ses engagements dans la Résistance en intervenant dans les collèges et lycées du Morbihan.

Samedi elle a conclu son propos en rappelant qu’il fallait plus que jamais « dire non à l’inacceptable, et que l’on aura besoin de se réunir parce que le danger fasciste ne s’est pas du tout effacé. »

Margot est une camarade exemplaire de modestie, d’humilité, le tout allié à de profondes convictions, qui continue de participer à la vie de sa section. Sa fidélité au PCF est très forte car elle aime à dire souvent : « Je n’ai pas toujours été d’accord avec le PCF mais je n’ai pas trouvé mieux ! »

Le contexte sanitaire n’a pas permis aux camarades du Morbihan d’organiser un temps convivial pour montrer à Margot notre affection sincère et fraternelle (l’édition 2020 de la Fête de l’Humanité Bretagne ayant été annulée). Nous ne pouvons que souhaiter le faire pour ses 101 ans !

Philippe Jumeau

secrétaire départemental du PCF Morbihan

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10 février 2021 3 10 /02 /février /2021 08:52

 

 

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9 février 2021 2 09 /02 /février /2021 09:10
Le 7 février 1962, l'Organisation armée secrète (OAS), organisation d'extrême-droite pro-Algérie française, fait exploser plusieurs bombes dans Paris visant des personnalités publiques (André Malraux, un sénateur communiste, des journalistes...).
Pas de morts mais des blessés graves dont une petite fille de 4 ans. L'émotion est vive. Le PCF, suivi par d'autres organisations de gauche, appelle à une manifestation à Paris le lendemain 8 février 1962 contre l'OAS et pour la fin de la guerre d'Algérie.
La manifestation est interdite par le préfet de police de Paris, un certain Maurice Papon. La police charge violemment les manifestants ; parmi ceux qui essaient de se réfugier dans la bouche de la station de métro. Neuf personnes trouvent la mort, étouffées ou à cause de fractures du crâne)

 

Les 9 victimes, dont le plus jeune avait 16 ans, étaient membres du PCF et de la CGT. Leurs obsèques le 13 février 1962 sont suivies par une foule immense : cordon ininterrompu de République au Père Lachaise.

 

Vidéo Antenne 2

Cérémonie pour les 9 victimes de Charonne (8 février 1962) 

Film Cinéarchives sur la guerre d'Algérie.

Ce film comporte onze séquences - toutes ne sont pas identifiés - notamment sur des manifestations de rue à Paris contre la Guerre d'Algérie et - des scènes de répressions contre algériens et français. Ces documents ont été tournés en France, en Algérie et en Tunisie entre 1958 et 1962.

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8 février 2021 1 08 /02 /février /2021 18:23
Ouest-France, 7 février 2021 - Bel article dans le Ouest-France de dimanche: un siècle de communisme dans les Cotes d'Armor. Et l'histoire continue de d'écrire dans un département ou les communistes ont encore une influence électorale et une implantation réelles.

Ouest-France, 7 février 2021 - Bel article dans le Ouest-France de dimanche: un siècle de communisme dans les Cotes d'Armor. Et l'histoire continue de d'écrire dans un département ou les communistes ont encore une influence électorale et une implantation réelles.

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6 février 2021 6 06 /02 /février /2021 06:00
Margot Caudan, militante communiste, résistante, reçoit la Légion d'honneur à 101 ans (Articles Ouest-France et Télégramme)
Marguerite Caudan, juste après-guerre à Paris, à l'âge de 25 ans (Photo Collection Margot Caudan)

Marguerite Caudan, juste après-guerre à Paris, à l'âge de 25 ans (Photo Collection Margot Caudan)

Margot Caudan parmi ses amies de l'Union des Jeunes Filles de France, qu'elle a contribué à créer, à Paris, dès 1937 (Photo Collection Margot Caudan)

Margot Caudan parmi ses amies de l'Union des Jeunes Filles de France, qu'elle a contribué à créer, à Paris, dès 1937 (Photo Collection Margot Caudan)

Margot Caudan, centenaire et résistante de toujours (Le Télégramme, Sophie Prévost, 12 février 2020)

A lire, ce très beau portrait de Margot Caudan, sous la plume de Sophie Prévost, une journaliste bien connu des Morlaisiens, en dernière page du Télégramme, avec un témoignage de Philippe Jumeau, secrétaire départemental du PCF Morbihan. Une centenaire qui témoigne sur une des pages des plus glorieuses du communisme, la résistance populaire a Paris avec ses camarades de l'ujff (union des jeunes filles de France) dont plusieurs d'origine juive. Communiste et militante, elle l'est restée jusqu'à aujourd'hui, modeste, vivante, soucieuse de transmettre des valeurs de solidarité et d'antifascisme aux jeunes générations. Un exemple! Merci au Télégramme et à Sophie Prévost de lui avoir rendu cet hommage.

 

Margot Caudan, centenaire et résistante de toujours

Elle aura 100 ans ce mercredi 12 février 2020. Communiste de la première heure, résistante de toujours, Marguerite Caudan, dite Margot, n’oublie jamais de témoigner. À Plouhinec (Morbihan), la jeunesse est son amie !

Le Télégramme, Sophie Prévost, 12 février 2020

Jean, baskets et beau sourire : c’est d’un pas léger que Margot Caudan ouvre la porte de sa longère pleine de livres, à Plouhinec (Morbihan). Ce 12 février 2020, elle a 100 ans et 85 ans d’adhésion au Parti communiste. Un record dont n’est pas peu fier le Lanestérien Philippe Jumeau. « Marguerite (tout le monde l’appelle Margot) a six mois de plus que l’ancien maire d’Hennebont Eugène Crépeau. Nous avons la chance inédite d’avoir deux centenaires dans nos rangs, l’année des 100 ans du PC ! ».

Margot a défié les fascistes à 14 ans et failli être déportée deux fois !

« Si Eugène a été le militant politique, Margot Caudan est notre militante du quotidien. Une femme d’une modestie incroyable, qui beurrait encore les sandwichs à la dernière fête de l’Huma à Port-Louis. Elle qui a défié les fascistes à 14 ans et failli être déportée deux fois ! », témoigne le secrétaire de la fédération PC du Morbihan.

Témoigner, inlassablement

Ses faits de résistance à l’Allemagne nazie et au gouvernement de Vichy, de 1939 à 1944, Margot Caudan en parle beaucoup depuis quelques mois. « On est de moins en moins nombreux à pouvoir témoigner, alors j’y vais. Je suis un peu dure de la feuille, mais quand les jeunes viennent me trouver, je ne peux rien leur refuser ! ».

Devant des lycéens rennais le 21 novembre 2019, avec des collégiens alréens en décembre, ou encore en petit comité, chez elle, ce dimanche 9 février 2020, avec sept élèves du collège Jean-Lurçat de Lanester venus l’interroger dans le cadre du Concours national de la Résistance et de la Déportation : la Plouhinécoise est sur tous les fronts.

Missions dangereuses et clandestinité

Ce week-end encore, elle a raconté sa jeunesse dans le XIe arrondissement de Paris, aux côtés de réfugiés juifs d’Europe centrale, son « engagement naturel » aux Jeunesses communistes, la création de l’Union des Jeunes Filles de France (UJFF), sa rencontre avec son mari, Louis.

Huit jours après leur mariage, en avril 1940, Marguerite Caudan est arrêtée pour son appartenance à l’UJFF, avant d’être libérée, dans la pagaille de l’exode, un mois plus tard. « Je ne suis pas entrée en résistance, car j’y étais déjà ! », plaisante aujourd’hui la presque centenaire. Chargée avec Louis d’une imprimerie clandestine, elle connaîtra les missions dangereuses (transport de faux papiers ou de matériaux pour explosifs) et encore la prison de juin 1943 à août 1944. Une trentaine de ses codétenues finiront en Déportation. D’autres seront fusillées. Un voile passe sur le regard pétillant de la vieille dame : « On n’attache pas d’importance aux petites choses, après ça ».

Engagez-vous !

« Margot est notre meilleure ambassadrice et une bonne amie. Elle aime les gens. Avec elle, toutes les portes s’ouvrent ! », assure à son tour la présidente de l’Association nationale des anciens combattants du pays d’Auray, Maryline Le Sauce. Car Bretonne, Marguerite Caudan l’est devenue il y a dix ans seulement. Si elle a quitté la région parisienne à 90 ans, c’est pour rebondir après le décès, en 2004, de son cher époux Louis. « Il était natif d’Hennebont, on a toujours aimé le coin. Je suis aussi revenue par admiration pour cette communauté de la danse bretonne, glisse-t-elle. La varappe, le ski, le tai-chi, j’ai dû arrêter. Mais la danse bretonne, ça ne me fatigue pas ! ».

Après la guerre, Margot Caudan a fait carrière comme responsable du comité d’entreprise de Renault à Boulogne-Billancourt. Elle s’y est occupée des enfants des autres. « Moi, je n’ai pas réussi à en avoir… », élude-t-elle dans un soupir. Sa vie de militante l’a amenée « à combattre l’Indochine, le Vietnam, l’Algérie ». Dans le communisme, « tout ne m’a pas toujours plu », avoue-t-elle. « Mais pour l’instant, je n’ai pas trouvé mieux ! ». A l’heure de ses 100 ans, Margot Caudan s’entretient des gilets jaunes, de la réforme des retraites comme de la montée des extrémismes. Elle cite Bertolt Brecht : « Le ventre est encore fécond, d’où a surgi la bête immonde ». Et aux jeunes, elle dit et redit, comme Stéphane Hessel avant elle : " Engagez-vous ! "

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