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Le Chiffon Rouge
Morlaix
Cette semaine, l’écrivain Joseph Andras brosse pour L’Humanité les portraits de poètes en lutte. Ce lundi, le Salvadorien Roque Dalton, né en 1935, poète traqué, dramaturge et romancier communiste, farouche opposant aux régimes militaires de son temps.
L’écrivain Joseph Andras brosse pour l’Humanité les portraits de poètes en lutte. Aujourd’hui, le Salvadorien Roque Dalton, né en 1935, poète traqué, romancier et dramaturge communiste, farouche opposant aux régimes militaires de son temps.
Qu’est-ce que la poésie ? Question par trop usée, à laquelle il est bon de répondre qu’on ne peut y répondre puisqu’elle est précisément ce que l’on ne saurait dire. Posons-la autrement : qu’est-ce que la poésie pour la bourgeoisie ? Puis convoquons la réponse qu’un poète proposa un jour : « (L)e poète, pour la bourgeoisie, ne peut qu’être :/serviteur,/bouffon,/ou ennemi. » On se figure sans peine les deux premiers ; on lit plus avant pour embrasser la proposition dans son entier : le poète en butte aux détenteurs des moyens de la production sociale n’est salué qu’en « persécutions, prisons, balles ». Pareil sort peut brider la rime. Il est donc des ministres de la Culture pour promouvoir la poésie.
Ce poète refusait que l’on prononçât son nom sa mort venue. Respectons sa volonté puisqu’il n’en manquait pas : se lancer, gueule refaite, dans une guérilla en Amérique centrale pour instaurer le socialisme autorise quelques fantaisies.
On ne naît pas révolutionnaire, on le devient pour ne pas mourir en vain. Ainsi notre homme, fils unique d’une infirmière et d’un bagarreur dont l’histoire conte qu’il aurait traficoté avec Pancho Villa dans quelque interlope affaire d’armes à feu, découvrit-il au Chili que le monde a mauvaise mine car l’humanité n’y existe pas : on n’y connaît que puissants et sans-le-sou. L’étudiant en droit se fit chrétien social à la faveur de ce séjour – de quoi provoquer l’ire de Rivera qui l’eût voulu marxiste. Départ pour l’Union soviétique (l’occasion de rencontrer Nâzım Hikmet en exil), retour au Salvador natal au mitan des années 1950 : il prit alors sa carte au Parti communiste tandis que Cuba rampait en dedans sa forêt. Marxiste, le jeune poète l’était désormais – mais l’être seul, songea-t-il, n’est d’aucun secours : il faut une organisation. « (L)es exclus, les mendiants, les drogués,/les Guanacos fils de la grande pute,/ceux qui purent revenir de justesse/ceux qui furent plus chanceux,/les éternels non identifiés,/les bons à tout faire, à tout vendre,/à manger n’importe quoi/[…] mes compatriotes,/mes frères. »
En ce temps, un militaire libéral avait pris la place d’un collègue tortionnaire ; trois ans plus tard, une junte renverserait le premier avec le concours du second. Le Salvadorien fut arrêté, à plusieurs reprises, et expulsé, pareillement ; il fit grève de la faim et frôla la peine capitale. Ses contemporains s’accordent à brosser un maigrichon rieur, séducteur et bouillonnant, bon footballeur et bon danseur. Se moquant de tout, lui compris. Sérieux sans contredit sous ses dehors cabots. La poésie, pensait-il, « est comme le pain, pour tous ». L’exilé se rendit au Mexique, à Cuba (pour prendre toute la mesure des responsabilités échues au métier d’écrivain : ne pas se voir comme « un Baudelaire marxiste » mais comme « fils d’un peuple d’analphabètes et de pieds-nus »), puis en Tchécoslovaquie (pour apprendre l’assassinat du Che, ange noir crevé d’avoir cru que le courage suffisait). « Au nom de ceux qui lavent les vêtements des autres/(et expulsent de la blancheur la crasse des autres)/[…] J’accuse la propriété privée/de nous priver de tout. »
Au Chili, Allende jurait qu’un socialisme démocratique était possible. Empanadas, vin rouge et costumes d’alpaga. Humanisme, dépassement sélectif du système. Au même endroit par d’autres chemins, avait naguère résumé le barbudo défunt. À l’invitation du gouvernement, le poète s’y rendit l’année qui verrait Pinochet prendre place au palais, bottes souillées du sang de Santiago. Ainsi s’éteignit, un temps, l’espoir d’une transformation radicale sans recours au feu. L’année précédant le coup d’État, un colonel avait supplanté un général à la tête du Salvador ; le poète n’avait pas attendu la défaite d’Allende pour reconnaître le bien-fondé du renversement du pouvoir oligarchique par la lutte armée – peut-être celle-ci renforça-t-elle à ses yeux celui-là. Il fit grief au Parti communiste salvadorien de son manque d’ambition révolutionnaire et souffrit de l’arrestation d’Heberto Padilla, poète tout aussi, soumis à l’autocritique publique par le régime castriste (« La “lune de miel de la Révolution” qui nous avait tant séduits est bien finie », se souviendrait Simone de Beauvoir dans Tout compte fait). Fin 1973, en âge de 38 ans, il rejoignit son pays sous nom d’emprunt – dentition, mâchoire et nez bricolés presqu’à neuf – pour intégrer l’ERP, l’Armée révolutionnaire populaire, fondée un an plus tôt.
On ne sait parfois qui, des capitalistes ou des révolutionnaires, est le plus grand ennemi de la révolution ; c’est que les seconds déploient force entêtement à négliger l’unité des premiers. Deux tendances s’affrontèrent au sein de l’armée : le poète redoutait, lui, l’échec de la guérilla sans l’appui des masses. Accusé d’être un révisionniste, un nuisible indocile, un intellectuel petit-bourgeois et un agent de la CIA comme de Cuba (rien moins), il fut exécuté par ses frères le 10 mai 1975. L’homme à la manœuvre basculerait à droite, allant, deux décennies plus tard, jusqu’à prodiguer ses conseils pour mater le Chiapas zapatiste – si le monde manque de vertu, au moins n’est-il pas dénué de logique.
À lire l’ONU, le corps du poète aurait été dévoré par des bêtes errantes aux abords d’un volcan.
« Ne prononce pas mon nom quand tu apprendras que je suis mort./Des profondeurs de la terre je viendrai chercher ta voix. »
Appel contre la nouvelle loi imposée par le chef d'état indien Modi et pour le rassemblement de protestation le 4 janvier à 12h sur le Parvis des Droits de l'homme, la Place du Trocadéro.
Pour les redacteurs de ce texte relayé notamment par par l'écrivaine Shumona Sinha, cette loi est anticonstitutionnelle car pour la première fois depuis l'indépendance de l'Inde, elle recourt à la classification des citoyens indiens sur la base de la religion. Les musulmans y sont particulièrement visés, faisant suite au nettoyage ethnique à leur encontre (1200 musulmans sont assassinés lors de l'attentat de 2002 à Gujarat tandis que Modi était chef du gouvernement local de l'état de Gujarat à l'époque, qui a ouvertement félicité les assassins militants du RSS/BJP). La romancière précise que "les Indiens protestent massivement à travers le pays contre cette loi, contre la politique suprémaciste de Modi qui est membre à vie du RSS, milice fasciste vénérant Hitler, parti-mère du BJP qui est au pouvoir. Les opposants, militants, citoyens subissent de violentes représailles par la police du gouvernement Modi, ils sont gravement blessés, éborgnés, tués sur la voie publique, les campus universitaires sont attaqués par la police, les étudiants surtout de la confession musulmane ainsi que les campus connus pour le mouvement de gauche/communiste sont directement visés et subissent de la violence policière inédite".
Résumé latino-américain *, 26 décembre 2019.
Afin de contrer les partisans de Morales, le nouveau ministre bolivien de l'Intérieur a engagé des agents de contre-insurrection israéliens, arguant que ces derniers sont compétents pour "contrôler les groupes terroristes".
L'influence d '"Israël" en Amérique latine ne date pas aujourd'hui. Si le Venezuela et l'Argentine y ont échappé, c'est parce que la présence de dirigeants de gauche et la vague du chavisme ont entravé les actions des agents de sécurité israéliens.
En ce sens, le journaliste américain Wayne Madsen a écrit dans un article publié le 17 décembre sur le site Alt World qu'avec le renversement des gouvernements progressistes à travers l'Amérique latine et leur remplacement par des régimes néo-fascistes à droite, des conseillers israéliens la contre-insurrection, mieux connue sous le nom de «trafiquants de la mort», est revenue en Amérique latine. Les gouvernements de droite au Brésil, en Bolivie, en Colombie, au Pérou, en Équateur, au Honduras, au Paraguay, au Guatemala et au Chili, désireux de mettre fin à la vague de protestations, ont invité les Israéliens à retourner dans leur pays pour donner des conseils. Certains de ces pays cherchent à dépeupler les régions indigènes d'une manière aussi systématique que le régime israélien l'a fait avec les Palestiniens de Cisjordanie et de Jérusalem-Est.
Pendant la vague socialiste en Amérique latine, les gouvernements progressistes ont soutenu les Palestiniens et évité les relations étroites avec "Israël". Certains dirigeants progressistes, comme Hugo Chavez au Venezuela et Evo Morales en Bolivie, ont rompu les liens avec "Israël" en raison de leurs crimes contre le peuple palestinien à Gaza. Dans le contexte du récent renversement de Morales par un coup d'État militaire de droite et des sanctions américaines à l'encontre du successeur de Chavez, Nicolás Maduro, les commerçants israéliens de contre-insurrection sont fréquemment vus dans les capitales d'Amérique latine, où la droite, et même l'extrême À droite, est arrivé au pouvoir. En utilisant une logique presque talmudique, le gouvernement israélien estime que pour combattre les gouvernements pro-palestiniens qui ont des relations amicales avec l'Iran,
L'héritage de la sécurité israélienne en Amérique latine est un record tristement célèbre qui se traduit par un soutien aux dictateurs génocidaires tels que la dictature argentine ou guatémaltèque. Avec l'avènement du «printemps socialiste» en Amérique latine, les marchands de la mort israéliens y ont fortement réduit leurs activités ou ont cherché de nouvelles perspectives en Afrique, dans les Balkans et en Asie du Sud. Après le renversement de Morales comme le dernier des premiers dirigeants du «printemps socialiste» à tomber en Amérique du Sud, les commerçants de contre-insurrection israéliens ont vu un nouveau marché ouvert lorsque le nouveau ministre bolivien de l'Intérieur, Arturo Murillo, a salué l'aide israélienne de développer les capacités de son escadron de la mort nouvellement formé, le "Groupe antiterroriste", qui, selon lui, vise à combattre les «terroristes». Dans leur langue, les «terroristes» dans ce cas sont des Boliviens fidèles au président déchu Morales, ainsi que des autochtones: les Aymara (l'ethnie Morales) et les Quechua, Chiquitan, Guaraní et Moxenos, explique Wayne Madsen.
La raison pour laquelle le ministre de l'Intérieur Murillo a choisi des Israéliens comme conseillers à la sécurité a été révélée dans une interview à Reuters. Il a déclaré: «Ils sont habitués à traiter avec les terroristes. Ils savent comment les gérer. » Murillo, bien sûr, a évoqué la répression brutale du peuple palestinien par "Israël", un record de traitements inhumains que les sociétés militaires et de renseignement israéliennes ont réussi à emballer, avec du matériel et des conseillers, comme un produit d'exportation. L'engagement de Murillo d'établir un État de surveillance de style israélien en Bolivie a été clairement exprimé dans son avertissement à un groupe de militants argentins des droits de l'homme qui sont arrivés en Bolivie pour voir des violations des droits de l'homme de première main contre des membres du «Mouvement vers Socialisme »(MAS), dirigé par Morales,
Murillo a mis en garde les Argentins et les autres militants étrangers, déclarant: «Nous recommandons que ces étrangers nouvellement arrivés fassent attention. Nous vous observons Nous vous suivons. Il n'y a aucune tolérance pour le terrorisme, la sédition ou les mouvements armés. Tolérance zéro ». L'avertissement est presque une copie conforme de l'avertissement émis par Israël aux travailleurs humanitaires internationaux qui ont tenté d'aider les habitants de Gaza, a déclaré Madsen.
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* Source: Al Manar
En exil en Argentine et ciblé par un mandat d’arrêt émis par le nouveau pouvoir, Evo Morales a été nommé par le Mouvement pour le socialisme (MAS) directeur de la campagne pour la prochaine élection présidentielle. Avec Janette Habe Maître de conférences à l’Institut des hautes études de l’Amérique latine, Sarah Pick Membre du comité directeur de France Amérique latine et Maité Pinero journaliste et romancière
Le départ forcé d’Evo Morales de la présidence de la Bolivie est-il le résultat d’un coup d’État ou l’engagement d’un processus de « transition démocratique », comme le présentent les détenteurs du pouvoir civil et militaire actuel en Bolivie ainsi que certains médias ?
Janette Habe
Le fait qu’il y ait eu un coup d’État en Bolivie est indéniable et les affirmations des secteurs qui ont mis en cause sa réalité sèment la confusion. Il y a une polémique à ce propos en France mais également en Amérique latine, parmi les secteurs écologistes les plus mobilisés contre l’extractivisme. Ils mettent en cause le fait qu’il s’agisse d’un coup d’État parce que Evo Morales n’avait pas respecté le résultat du référendum de 2016, qu’il avait perdu, alors qu’il sollicitait un quatrième mandat présidentiel. Mais ni l’armée ni la police n’étaient alors intervenues. En Amérique latine, il y a plusieurs manières de nommer un coup d’État. L’une d’entre elles, c’est de parler de « pronunciamento » lorsque l’armée se « prononce » – intervient – contre le gouvernement en place. C’est exactement ce qui s’est passé. Evo Morales a démissionné le pistolet sur la tempe, lorsque l’armée le lui a « suggéré ». Les erreurs politiques d’Evo Morales ne doivent pas empêcher d’appeler un chat un chat, un coup d’État un coup d’État.
Sarah Pick
Le départ du président Morales est, en effet, un coup d’État maquillé en démission dans un contexte de crise électorale. Profitant des mobilisations liées à la contestation des résultats du scrutin du 20 octobre, du mécontentement croissant d’une partie de la population, ainsi que de l’audit de l’OEA (Organisation des États américains) invalidant les élections, la droite, derrière Carlos Mesa, et l’extrême droite, sous la bannière fascisante de Fernando Camacho, ont organisé des actions de plus en plus violentes et racistes, dont le but était de prendre le pouvoir par la force, loin d’un prétendu souci de démocratie. Quelques heures après le rapport de l’OEA, Evo Morales, sous pression, avait proposé d’organiser de nouvelles élections sous le contrôle de personnalités indépendantes. Pourtant, la droite et l’extrême droite ont rejeté cette proposition de sortie de crise qui aurait pu pacifier le pays. En effet, elles ne souhaitaient pas être de nouveau confrontées à des élections générales contre Morales, élections qu’elles n’ont jamais réussi à gagner depuis 2005. N’ayant pas non plus accepté les politiques de nationalisation et de redistribution du MAS, nourrissant un sentiment de revanche à l’encontre des peuples indigènes et des classes populaires, ces secteurs étaient prêts à entraîner le pays dans une guerre civile et à le jeter dans les bras de l’extrême droite pour démettre Morales. C’est pourquoi, tandis que des commandos fascistes descendaient dans les rues, l’armée et la police ont appelé au départ du président en dépit de sa proposition d’organiser un nouveau scrutin. Evo Morales décida de démissionner afin d’éviter un bain de sang au peuple bolivien. Malgré son départ, le pays n’a pas retrouvé la paix. Depuis le coup d’État, la CIDH (Commission interaméricaine des droits de l’homme) dénonce de graves violations des droits humains.
Maïté Pinero
Quand les chefs de la police et de l’armée ordonnent au président de démissionner, que des milices brûlent les bureaux de vote, les domiciles des ministres et menacent leurs familles, que les militaires – dispensés de responsabilité pénale – répriment à grand renfort de blindés et d’hélicoptères, que cette répression cause 33 morts, des centaines de blessés, plus d’un millier d’arrestations, que des journalistes sont expulsés, attachés à un arbre et fouettés, il s’agit d’un coup d’État. La vraie question est plutôt : pourquoi cela fait-il encore débat ? Un rideau de fer médiatique a couvert la violence, l’agression de la maire Patricia Arce, tondue, aspergée de peinture rouge, réduite à un exemple isolé. Rien sur les autres témoignages comme celui de Viktor Borda, ex-président de l’Assemblée législative, qui a démissionné pour éviter que son frère, aspergé d’essence, soit brûlé vif.
Le MAS s’est entendu avec les forces politiques au pouvoir actuellement pour l’organisation d’une nouvelle élection présidentielle. Quelle est la situation du rapport de forces localement et quelles sont ses lignes de tension ?
Sarah Pick Le premier objectif du gouvernement putschiste a été de s’assurer qu’Evo Morales ne soit pas en mesure de se représenter. À cette fin, un mandat d’arrêt a été émis contre lui juste avant sa démission, l’accusant de sédition et terrorisme. Le gouvernement de facto a également cherché à rendre illégal son parti. Cependant, suite aux importantes mobilisations populaires, une partie du MAS (très largement majoritaire au Parlement) a pu négocier avec le gouvernement et obtenir la garantie de pouvoir se présenter aux prochaines élections à condition qu’Evo Morales ne soit pas candidat. Privé de son leader, le MAS doit désormais se trouver très rapidement un nouveau candidat. Si l’issue des élections, repoussées à février 2020, reste incertaine, leur tenue et les conditions dans lesquelles elles vont se dérouler le sont aussi. Il est à craindre qu’aucune élection ne soit organisée si la droite n’est pas sûre de gagner, par tous les moyens (report du scrutin, arrestations, militarisation, fraude…).
Maïté Pinero L’extrême droite raciste et fondamentaliste a supplanté la droite traditionnelle et présente son candidat, Camacho, leader de l’oligarchie et des Comités de Santa Cruz. En attendant les élections du 20 mars, le gouvernement « de transition démocratique » détruit l’œuvre du précédent. L’oligarchie a déjà récupéré les directions de 68 entreprises publiques et, selon le ministre de l’Économie, la spoliation va s’accélérer. Même renversement en politique étrangère : relations diplomatiques rompues avec le Venezuela, rétablies avec les États-Unis et Israël, renvoi des médecins cubains, retrait du pays de l’Alba, le traité de coopération. Le Movimiento al socialismo est décapité, le président exilé, six ministres privés de laissez-passer, toujours réfugiés à l’ambassade du Mexique à La Paz. Résultat d’une alliance entre syndicats ouvriers et paysans, organisations communautaires, le MAS a perdu des maillons, puisque même un dirigeant de la COB, la centrale ouvrière, avait aussi demandé la démission d’Evo Morales. Tout un symbole, le MAS a regagné ses bases chez les paysans de Cochabamba et y a tenu un mini-congrès qui a élu Evo Morales chef de campagne. Menacé d’arrestation, pourra-t-il revenir pour la diriger ? Le mouvement doit renouer ses alliances dans un contexte de persécution : le gouvernement menace de supprimer le droit de vote à Cochabamba si les organisations paysannes n’acceptent pas sa militarisation.
Janette Habel La démission d’Evo Morales et son départ au Mexique tout d’abord, puis en Argentine, font que le MAS est désarmé. De plus, il est profondément divisé. Le fait qu’il participe aux élections alors que le gouvernement de facto est issu du coup d’État a créé beaucoup de confusion. Une partie du MAS voulait imposer le retour d’Evo Morales. D’autres, plus pragmatiques, ne souhaitaient pas son retour. Ce sont ces derniers qui ont négocié avec le gouvernement intérimaire. Finalement, cette décision a été adoptée parce qu’il n’y avait pas tellement de choix. Le fait qu’Evo Morales n’ait pas respecté le résultat du référendum de 2016 a été, à mon avis, une grave erreur qui a non seulement facilité l’offensive de la droite mais a exacerbé les tensions sociales très fortes au sein des organisations indigènes et paysannes, la base sociale d’Evo Morales. De fait, la droite conservatrice espère gagner les prochaines élections. Luis Fernando Camacho, surnommé le Bolsonaro bolivien, est candidat à la présidentielle, c’est un homme d’affaires, militant d’extrême droite, pentecôtiste dont on dit qu’il est lié à une église évangélique très réactionnaire. « Nous étions dans un moment de faiblesse », a reconnu le vice-président, Garcia Linera. Le MAS est dans une situation difficile. Il a désigné Evo Morales comme directeur de la campagne électorale du MAS, bien qu’il soit réfugié en Argentine. Ce pouvoir intérimaire qui émane de secteurs d’extrême droite, racistes, n’incite pas à beaucoup d’optimisme pour la suite. L’armée et la police ont le pouvoir.
Quelle a été l’implication de la communauté internationale et de la France dans la garantie de l’État de droit et de la démocratie en Bolivie ?
Sarah Pick La communauté internationale n’a pas été garante de l’État de droit et de la démocratie en Bolivie. Au contraire. Si elle avait été prompte à dénoncer le refus du président Morales de reconnaître les résultats du référendum de 2016, elle a refusé de reconnaître le coup d’État à son encontre : un deux poids, deux mesures qui joue la carte de la déstabilisation pour défendre ses intérêts économiques. Au lieu de qualifier les événements de coup d’État, la France et l’Europe se sont prononcées en faveur du gouvernement intérimaire. Quant à l’OEA, sous influence des États-Unis, depuis plusieurs mois, elle cachait mal son impatience de voir partir Evo Morales. Déjà en mai 2019, son secrétaire regrettait de ne pas posséder les outils institutionnels pour empêcher Evo Morales de se présenter aux élections. L’audit de l’OEA, rouage important dans le coup d’État, a été depuis remis en cause par différents organismes, comme le CEPR (Center for Economic and Policy Research), qui en réfutent les conclusions et les accusations de fraudes à l’encontre de l’ancien président indigène.
Janette Habel Le New York Times a caractérisé ce qui s’est passé en Bolivie comme un coup d’État. L’ancien président du gouvernement espagnol José Luis Zapatero a dénoncé « le scandaleux coup porté au président bolivien. Demander à un président élu constitutionnellement de quitter le pouvoir ne peut être un acte de démocratie ». Certains gouvernements latino-américains ont fait de même. Le gouvernement français n’a pas condamné le coup d’État. L’ambassadeur de l’Union européenne (UE) Leon de la Torre s’est réuni avec la présidente autoproclamée Jeanine Añez en proposant la médiation de l’UE afin que « la Bolivie puisse organiser le plus tôt possible des élections crédibles ». Quant à la stratégie américaine, elle vise à déstabiliser les gouvernements progressistes en Amérique latine. On l’a vue à l’œuvre au Brésil avec Lula et Dilma Rousseff. Elle est plus habile que celle utilisée par le passé. On se souvient des agissements de la CIA lors du coup d’État militaire au Chili. Il s’agit aujourd’hui pour Washington d’instrumentaliser des procédures qui peuvent être institutionnelles ou juridiques pour atteindre ses objectifs. C’est une stratégie qui est, pour ainsi dire, plus « intelligente » qu’auparavant.
Maïté Pinero L’Union européenne – et avec elle la France –, qui avait reconnu Juan Guaido, président autoproclamé du Venezuela en janvier 2019, a franchi un palier dans le reniement de la démocratie. Reconnaître un gouvernement « de facto » entérine un rapport de forces imposé par les armes et sanctifié par la Bible. Signe des temps, alors que nos ambassadeurs se posaient en médiateurs, pas un ministre pourchassé n’a cru trouver la sécurité dans une ambassade européenne, comme au Chili en 1973. Deux mensonges masquent le coup d’État. Le premier, c’est celui de « la fraude » électorale, prétexte de l’OEA, fraude démentie par trois instituts de recherche et une centaine d’experts. Silence de l’UE et de la France. Le second, c’est la dissimulation de la violence. La Commission des droits de l’homme de l’ONU, la CIDH, les juges et avocats argentins, horrifiés par les témoignages recueillis, réclament une enquête internationale. Silence de l’UE et de la France. La fraude à la démocratie a eu lieu, une autre se prépare. Pourquoi l’UE reviendrait-elle sur son attitude puisque le coup d’État a réussi ? La seule solution est de l’y contraindre, de lever le voile sur la nature du gouvernement « de facto » et les reniements de l’UE et de la France. Notre propre avenir est en jeu, car le scénario bolivien peut se reproduire partout. En plus du fait que la réputation de l’Europe des Lumières, jusqu’ici ancrée en Amérique latine, est en cendres. La reconnaissance du coup d’État est un coup d’État contre cette mémoire commune.
Entretiens croisés réalisés par Jérôme Skalski
Sortir de la nasse du repli national
Chaque pays européen vit sous le joug d’un marché aux voleurs qui demande à chaque peuple un sacrifice en fonction de données inégalitaires fondées sur le moins disant. Pour exemple, les Grecs sont les éternels punis et ceux qui, en Allemagne notamment, on la chance d’arriver jusqu’à la retraite se retrouvent souvent dépouillés.
Le mouvement social français a le mérite d’exister et c’est bien, mais il serait bon qu’il ne s’arrête pas aux frontières. Les « expert » de la Macronie cherchent dans les pays du nord de l’Europe les exemples qui pourraient rassurer Margot, mais cela ne convainc et c’est heureux. Il y a certes ici et là des mouvements sociaux mais c’est chacun à son rythmes, dans un contexte que ne connaissent pas les autres. Est-ce à dire qu’il faudrait que tout le monde suive le rythme français ?
Certainement pas, mais il existe une Confédération européenne des syndicats dans laquelle la CGT essaie de bousculer les choses. Il serait bon qu’elle ne reste pas la grande muette pour l’ensemble des citoyens européens hormis les spécialistes de la convivialité intersyndicale européenne qui confrontent leurs analyses et leurs points de vue.
Il ne s’agit pas de critiquer une direction syndicale ou une autre, mais de considérer qu’une lutte nationale dans un pays d’Europe doit déjà être connue et appréciée à sa juste valeur par les autres peuples et servir non pas de modèle mais de point d’appui pour des luttes convergentes.
La question des retraites est un exemple d’école pour ce genre d’exercice parce que notre pays qui avait une certaine avance sur bien d’autres sur le sujet est mis en demeure de se plier au moins disant européen. Donc si nous perdons, c’est toute l’Europe qui se trouve mise en demeure de rester au bas niveau et de mettre les vieux dans les mouroirs, de Malaga à Helsinki.
Les Français qui vivent à l’étranger se rendent compte du décalage entre les rythmes des mouvements sociaux et le vivent souvent eux-mêmes. Cela met de l’eau au moulin d’une préoccupation essentielle pour que les choses bougent dans un monde ficelé par les besoins de la finance et qu’il faut libérer. Ce qui s’est passé notamment en Grèce, lorsque le monde du travail de ce pays a été abandonné par les autres, chaque pays peut le vivre à un moment donné de son histoire. Certes il y a parfois des syndicats qui, comme les dockers, ont des liens privilégiés avec d’autres syndicats et qui peuvent comprendre les enjeux, mais cela reste limité à une corporation dépendante du commerce international à un niveau direct, donc limité.
Lorsque Marine Le Pen essaie de se placer en défenseur de la veuve et de l’orphelin, voire du retraité par les temps qui courent, il va sans dire, comme l’a bien fait sentir Philippe Martinez, que le mouvement social ne doit pas s’embarrasser des champions du repli, même s’ils ont le vent en poupe. Pour les initiés de la vie politique et sociale, cela s’entend, mais pour le citoyen dit « ordinaire » qui se pose des questions en n’ayant à sa portée que l’information officielle des médias en boucle, c’est un piège redoutable. Il faut donc faire le lien entre le bien être des citoyens français et les autres sous peine de se retrouver en forteresse assiégée avec de minces chances de gagner les combats essentiels.
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A l’occasion des 30 ans de la chute du Mur de Berlin et de la fin de la RDA, conférence-débat avec Saskia HELLMUND, qui nous parla de la RDA « ex Allemagne de l’Est » où elle est née et a vécu sa jeunesse et étudié, sur la base des deux livres qu’elle a déjà publiés:
– La fille qui venait d’un pays disparu
– Pays perdu, pays choisi. Journal d’une jeune Allemande de l’est (chez Skol Vreizh)
Saskia est née en 1974 en RDA et a fait des études d’histoire à Leipzig, Berlin et Paris. Après un doctorat sur la médiation culturelle transfrontalière, elle a enseigné à la Sorbonne. Depuis 2012, elle est installée en Bretagne, dans la Baie de Morlaix. L’été, y travaille comme guide touristique et guide de randonnée, l’hiver, elle enseigne sa langue maternelle à l’UCO de Guingamp. En ce moment, elle prépare la création d’une pièce de théâtre sur la chute du Mur vue de l’Est.
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A l’occasion des 30 ans de la chute du Mur de Berlin et de la fin de la RDA, conférence-débat avec Saskia HELLMUND, qui nous parla de la RDA « ex Allemagne de l’Est » où elle est née et a vécu sa jeunesse et étudié, sur la base des deux livres qu’elle a déjà publiés: – La fille qui venait d’un pays disparu – Pays perdu, pays choisi. Journal d’une jeune Allemande de l’est (chez Skol Vreizh) Saskia est née en 1974 en RDA et a fait des études d’histoire à Leipzig, Berlin et Paris. Après un doctorat sur la médiation culturelle transfrontalière, elle a enseigné à la Sorbonne. Depuis 2012, elle est installée en Bretagne, dans la Baie de Morlaix. L’été, y travaille comme guide touristique et guide de randonnée, l’hiver, elle enseigne sa langue maternelle à l’UCO de Guingamp. En ce moment, elle prépare la création d’une pièce de théâtre sur la chute du Mur vue de l’Est.
Les réformes des retraites instaurées voilà plus de 15 ans ont grevé le système par répartition, faisant fondre le montant des pensions. Au point que l’indigence des retraités est devenue outre-Rhin l’un des sujets les plus sensibles du débat public.
« J e me fais un sang d’encre. Je ne dors plus la nuit. » La Berlinoise Inge Vogel, qui travaille encore pour quelques mois dans une société spécialisée dans le matériel paramédical, s’apprête à prendre sa retraite. « J’ai plein de projets et je sais que je ne manquerai pas d’activités diverses dans le domaine politique ou culturel », précise-t-elle pour bien indiquer que ce n’est pas du blues classique du nouveau retraité dont elle souffre. Non l’angoisse d’Inge Vogel tient au brutal décrochage annoncé de son niveau de vie dès lors qu’elle sera pensionnée. À l’aube de sa cessation d’activité, Inge (66 ans) touche un salaire correct, environ 2 500 euros net par mois. Ce revenu va être réduit de plus de la moitié, compte tenu de l’évolution outre-Rhin du taux de remplacement (la différence entre le dernier salaire net et le montant de la première pension). Ce qui va ramener ses revenus à environ 1 200 euros, soit tout juste au-dessus du niveau du salaire minimum. « Et je ne suis pas la plus à plaindre », lâche la bientôt ex-salariée. Quelqu’un payé aujourd’hui 1 500 euros net – « ce n’est malheureusement pas une rémunération exceptionnellement basse ici », précise Inge – ne va plus percevoir qu’un peu plus de 700 euros par mois pour ses vieux jours. « Une misère. » Et l’ex-assistante médicale ne mentionne même pas le cas de ses compatriotes innombrables qui ne toucheront pas le taux plein car ils n’auront pas accompli les exigibles 45 à 47 annuités.
Des mesures ressemblant à celles déployées par Emmanuel Macron
L’extension de la pauvreté chez les seniors et la perspective généralisée de retraites peau de chagrin provoquent un tel traumatisme dans la société allemande que ces thèmes figurent parmi les sujets les plus sensibles, régulièrement en première ligne du débat public. Les réformes lancées en 2002 et 2005 par l’ex-chancelier Gerhard Schröder furent présentées comme « le seul moyen de sauvegarder » le système et singulièrement la retraite de base par répartition dont l’écrasante majorité des Allemands demeure tributaire aujourd’hui. Encouragement fiscal aux plus riches à souscrire des assurances privées, amélioration de la compétitivité d’entreprises qui crouleraient sous les « charges sociales », instauration d’un indice dit de « durabilité » (Nachhaltigkeit) permettant de faire évoluer la valeur du point sur lequel est calculé le montant des retraites versées par les caisses légales (Gesetzliche Kassen) par répartition, allongement de la durée du travail et report à 67 ans de l’âge de départ à taux plein : la panoplie des mesures adoptées par le gouvernement SPD-Verts de l’époque ressemble à s’y méprendre à celle déployée aujourd’hui par Emmanuel Macron pour justifier sa réforme. Jusqu’aux éléments de langage sur « la nécessité absolue de moderniser le système ».
Pour se faire une idée des effets pratiques à moyen terme de la réforme des retraites d’Emmanuel Macron, il suffit ainsi de jeter un œil de l’autre côté de la frontière. Le bilan social des transformations allemandes, plus de quinze ans après leur entrée en vigueur, est dévastateur. La part des retraités allemands, précipités sous le seuil de pauvreté, a explosé. 16,8 % des seniors sont touchés aujourd’hui. Un retraité allemand sur deux – soit quelque 8,6 millions de personnes – doit survivre avec une pension inférieure à 800 euros par mois. Une enquête prospective publiée en septembre dernier par l’institut de recherche économique de Berlin (DIW) montre que plus d’un retraité sur 5 (21,6 %) sera misérable à l’horizon 2039. Et cette estimation est sans doute très optimiste puisque les auteurs de l’étude ont choisi de se baser sur la poursuite bon an mal an de la conjoncture économique favorable de ces dernières années (avec taux de chômage réduit).
L’introduction de la retraite Riester par capitalisation, présentée comme le troisième pilier du « modèle » germanique, a profondément ébranlé le système de base par répartition. Les placements réalisés par les citoyens généralement les plus aisés, attirés par d’alléchantes incitations fiscales, ont mécaniquement asséché les ressources des caisses légales qui organisent le financement solidaire des retraites par les cotisations des salariés actifs. Le manque à gagner sera d’autant plus conséquent qu’une partie des fonds est déjà drainée vers les retraites « maison » des entreprises, particularité ancienne du « modèle » et deuxième pilier du système reposant sur la capitalisation. Sachant qu’à ce titre seule une minorité de salariés appartenant le plus souvent aux plus grands groupes bénéficie aujourd’hui d’une rente complémentaire digne de ce nom.
La peur que le passage au troisième âge rime avec un rapide déclassement social, hante toute une société. Si bien que la question s’impose outre-Rhin depuis plusieurs années tout en haut du débat public. La grande coalition a dû bricoler des pare-feu en catastrophe pour éviter un emballement de la mécanique enclenchée par les réformes. On a suspendu d’ici à 2025 l’effet de l’indexation de la valeur du point de la retraite par répartition sur le montant des pensions en bloquant jusqu’à cette date à 48 % un taux de remplacement. Celui-ci avait dégringolé de plus de 10 % sur les dix dernières années.
Les travailleur pauvres grossissent le flot des retraités miséreux
CDU et SPD se sont mis aussi laborieusement d’accord sur l’introduction d’une retraite plancher (Grundrente), une revalorisation des pensions soutenue par l’État pour qu’elles atteignent le niveau des… minima sociaux (de 600 à 900 euros par mois). La mesure est censée éviter à nombre de retraités pauvres de prendre le chemin humiliant du bureau d’aide sociale pour toucher un complément de revenu pour accéder au minimum vital. Beaucoup préfèrent en effet effectuer n’importe quel petit boulot plutôt que d’avoir à mendier une aide. Là encore les chiffres des études les plus récentes sont aussi éloquents qu’effarants : plus d’un million de seniors, souvent âgés de plus de 70 ans, sont contraints aujourd’hui d’exercer des « mini-jobs » pour survivre. Soit une hausse d’environ 40 % sur dix ans. On les voit de plus en plus fréquemment dans les rues allemandes, ombres furtives qui distribuent des prospectus publicitaires, portent des journaux à domicile ou ramassent à la sauvette des canettes de verre ou de plastiques à la terrasse des cafés dans l’espoir de récupérer des consignes pratiquées sur ces produits outre-Rhin un maximum de centimes.
Cette pauvreté qui se répand si massivement chez les seniors allemands n’est pas sans lien avec l’extrême précarité imposée à de nombreux salariés par les lois Hartz de dérégulation du marché du travail. Lancées au même moment que les réformes des retraites, elles ont été présentées de la même façon qu’elles comme une étape majeure pour propulser « la compétitivité » (financière) des firmes allemandes. Les travailleurs pauvres, ou ceux dont la carrière a été entrecoupée de longues périodes de travaux sous-rémunérés et le plus souvent exonérés de cotisations sociales, contribuent évidemment à faire grossir le flot des retraités miséreux. Là encore, le parallèle avec la logique macronienne est frappant. L’aménagement au forceps du Code du travail décidé au début du quinquennat accroît la précarité, ce qui va accentuer l’appauvrissement programmé de la majorité des salariés par la réforme française des retraites.
Les effets contre-productifs des réformes antisociales engagées outre-Rhin au début de la décennie 2000 deviennent de plus en plus manifestes. L’apparition d’une société cloisonnée, devenue très inégalitaire, où « l’ascenseur social ne fonctionne plus », est dénoncée de plus en plus régulièrement dans les travaux de plusieurs économistes. Un handicap profond qui n’est pas sans lien avec l’entrée en stagnation, depuis quelques mois, de la première économie de la zone euro.
Bruno Odent
Quatre ans d’emprisonnement et 10 millions d’euros d’amende. C’est la peine requise, le 16 décembre à Paris, par le Parquet national financier (PNF) contre Rifaat Al Assad, oncle du dictateur syrien Bachar Al Assad.
Quatre ans d’emprisonnement et 10 millions d’euros d’amende. C’est la peine requise, le 16 décembre à Paris, par le Parquet national financier (PNF) contre Rifaat Al Assad, oncle du dictateur syrien Bachar Al Assad. À la tête d’un empire immobilier en Europe, l’homme est un ancien ponte du régime syrien, persona non grata à Damas depuis 1984 et un coup d’État manqué contre son propre frère (le père de l’actuel dictateur). En France, le PNF l’accuse d’avoir frauduleusement bâti une fortune immobilière, à hauteur de 90 millions d’euros. Un joli trésor qui compte deux hôtels particuliers, une quarantaine d’appartements des beaux quartiers parisiens, un château et plusieurs haras dans le Val-d’Oise. Le PNF a réclamé la confiscation de l’intégralité de ces biens. Le magot proviendrait, selon les magistrats, de fonds syriens détournés et détenus par des sociétés luxembourgeoises gérées par les proches du prévenu. Cy. C.
Les 100 plus grosses entreprises d’armement ont vu leur chiffre d’affaires progresser de 4,6 % en 2018. La France s’accapare 5,5 % des parts de marché.
Cocorico ! C’est dans un bien triste classement que la France se hisse au quatrième rang des nations : celui des ventes d’armes. Le Sipri (Stockholm International Peace Research Institute) vient de rendre son rapport annuel sur les 100 premières entreprises productrices d’armement en 2018 (1). Il apparaît que la France détient 5,5 % des parts de marché (23,2 milliards de dollars, soit 21 milliards d’euros), un chiffre en hausse de 2,4 % par rapport à l’année précédente.
Sur les 100 principaux négociants d’armes dans le monde, on compte six firmes françaises : Thalès (pour 9,5 milliards de dollars) ; Safran (3,2 milliards) ; Naval Group (2,2 milliards) ; Dassault Aviation (2,9 milliards) ; CEA (2,3 milliards) et Nexter (1,1 milliard).
Sur ce terrain, la France se situe derrière le Royaume-Uni (8,4 %) et la Russie (8,6 %). Les États-Unis, eux, se placent en première position : ses entreprises voient leur chiffre d’affaires grimper de 7,2 % en 2018 grâce à la politique de l’administration Trump. Ils s’arrogent, eux, 59 % de ces parts de marché, soit 246 milliards d’euros. En 2015, l’ONU estimait que 267 milliards de dollars annuels suffiraient à éradiquer la faim dans le monde d’ici 2030.
Le rapport montre que le marché de l’armement est en pleine expansion : il a augmenté de 4,6 % en 2018, avec un chiffre d’affaires de 420 milliards de dollars pour les seules 100 plus grosses entreprises du secteur. Cela représente plus ou moins le PIB de l’Autriche en 2017, le 27e pays le plus riche au monde.
Les entreprises d’aviation tirent leur épingle du jeu. Lockheed Martin, qui produit les F-35 américains, voit son activité armement progresser de 5,2 % ; Boeing de 5,7 %. Bien qu’avionneur civil, 29 % des ressources de cette entreprise américaine proviennent de son activité militaire. Le groupe transeuropéen Airbus a un chiffre d’affaires en matière d’armes qui grimpe de 9 % et le français Dassault, fabriquant de Rafale, augmente ses ventes d’armes de 30 %.
Les entreprises russes profitent d’une hausse des dépenses militaires domestiques. Elles bénéficient également du succès des systèmes de défense antiaériens S-400, déployés ces dernières années en Syrie ou en Turquie.
On relève par ailleurs dans ce rapport que l’augmentation des dépenses militaires d’Ankara bénéficie à son complexe militaro-industriel. Deux entreprises turques qui intègrent le top 100 mondial ont vu leur chiffre d’affaires bondir de 22 % sur l’année dernière.