Compte-rendu de la réunion du Front de Gauche Morlaix
Mercredi 19 décembre 2012
31 présents
I. Discussion, modification et vote des Statuts du Front de Gauche du Pays de Morlaix. Création de l'association.
Le projet de statut initial avait été rédigé le 10 décembre par un groupe de travail constitué de Babeth G, Christian C, Pierre LS, Ismaël D et Alain D, groupe de travail qui a suivi les orientations définies par l'AG Front de Gauche du 12 novembre 2012 et la réunion de bureau Fdg du 28 novembre.
Les articles 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 10, 11, ont été approuvés à l'unanimité après avoir été parfois légèrement modifiés pour être précisés par rapport au projet initial.
L'article 9 sur « les réunions et modalités de vote » a fait l'objet d'un débat approfondi, déjà amorcé lors de la précédente réunion de bureau du collectif Front de Gauche du 28 novembre.
Nous avons retenu suite à la proposition de Franck S que notre modèle de fonctionnement devait être la démocratie directe plutôt que la démocratie participative, expression plus ambiguë.
Il y a eu consensus entre nous sur l'intérêt de se fixer l'objectif de prendre nos décisions en AG et en bureau par consensus le plus souvent possible. Cela permet de prendre en compte le point de vue de chacun, d'avancer les uns vers les autres, de chercher à se convaincre, à prendre en compte le point de vue des autres, à nous enrichir les uns les autres en nous nourrissant de la réflexion d'autrui, de ne pas créer des logiques d'affrontement entre des « camps », de ne pas créer des « courants » visant à dominer sur les autres.
Patrick LN était partisan de rendre toujours opérant cet idéal régulateur du consensus, en votant le moins souvent possible, et si possible jamais, et en cas de nécessité, en retenant un seuil très haut pour la majorité qualifiée (80 à 90%). Elisabeth G, convaincue par la démonstration de Patrick Le Nan sur l'intérêt de la recherche de consensus pour inaugurer une nouvelle manière de faire de la politique spécifique aux collectifs citoyens du Front de Gauche, a proposé que chaque fois qu'il y aurait un désaccord qu'on ne parviendrait pas à surmonter sur le moment entre nous, on ajourne la prise de décision, jusqu'à ce que l'on puisse trouver un terrain d'entente. Décaler dans le temps la prise de décision permettrait de dépasser la compétition, d'éviter le bras de fer, d'avoir le temps d'échanger et d'aller vers la compréhension de l'autre, d'éviter de se grouper bloc par bloc. Dans la proposition de Babeth, qui n'a pas été inscrite dans les statuts pour se laisser des marges de manoeuvre mais que l'on pourra prendre en compte dans nos règles de fonctionnement, on aurait pu expliciter dans un compte-rendu la logique des positions en contradiction, présentées de manière synthétique ainsi que ce qui les oppose vraiment et ce qu'elle admette en commun, avant de chercher à surmonter ces oppositions et à trouver une solution de compromis les réunions suivantes. Arriver à comprendre ce sur quoi on diverge est un premier pas fait sur la voie du compromis.
Tout le monde a reconnu la valeur des arguments en faveur du consensus et admis que, n'étant pas un parti politique, nous pouvions nous dispenser de nous prononcer sur des questions ne faisant pas accord entre nous (comme le nucléaire) et laisser chacun à ses engagements personnels, associatifs ou partisans, ce qui n'empêche pas de pouvoir en débattre sans chercher forcément à prendre une position collective au terme du débat.
Néanmoins, certains ont fait valoir la nécessité de se prononcer parfois dans l'urgence et le besoin d'empêcher que l'opposition d'une très petite minorité à une proposition approuvée par la grande majorité des membres du Front de Gauche ne paralyse notre activité ou notre capacité à nous positionner publiquement sur des questions importantes, localement notamment. Certains ont fait valoir aussi que la règle du consensus, appliquée de manière stricte, pouvait donnait beaucoup de poids à des minorités de blocage et faire prendre l'ascendant à une minorité refusant l'action voulue par une majorité.
En tout cas, tous ont reconnu qu'il n'y avait pas de règle de vote idéale, parfaitement démocratique et sans inconvénients. Au final, il a été décidé de recourir au vote le moins souvent possible, uniquement quand il est urgent et incontournable de se déterminer malgré une absence de consensus.
En cas de vote, 6 personnes ont préféré que ça soit la règle de la majorité absolue simple qui prévale, 23 personnes qu'on retienne la règle de la majorité qualifiée.
3 personnes se sont prononcés alors plutôt pour la majorité des 2/3, 23 personnes pour la majorité des ¾, 1 personne pour un seuil plus élevé encore, 4 personnes se sont abstenues.
Il a été précisé qu'en cas de vote à l'assemblée générale, seuls les présents pourraient s'exprimer: on ne donne pas de procuration sauf pour l'assemblée générale extraordinaire (une par personne).
II. Élection des deux co-présidents, du trésorier et du trésorier adjoint.
Pour déposer les statuts de l'association en préfecture et ouvrir un compte, nous avions besoin de représentants officiels de l'association et d'un trésorier, sachant que le CA n'aura pas d'existence réelle et que les seuls instances de décision sont le bureau ouvert à tous et l'assemblée générale, l'association fonctionnant pour l'essentiel sur le principe de la démocratie directe.
Les co-présidents et le trésorier et trésorier adjoint sont élus chaque année.
Pour l'année 2012, les co-présidents sont Michèle Abramovicz et Ismaël Dupont, le trésorier est Christian Corre et la trésorière adjointe est Constance Adigard.
III. Débat sur le projet d'aéroport de Notre-Dame des Landes.
Yann G a introduit le débat en présentant l'historique du projet d'aéroport de Notre-Dame-des-Landes. En 1970, l'intention de créer une grande plate-forme de frêt et d'accueillir le Concorde. En 72, création de la Zone d'Aménagement Différée. Le gel des terres pour empêcher toute forme d'installation et de reprise des fermes par les héritiers. En 1985, on prévoit 5 millions de passagers du transport aérien transitant par Nantes à l'horizon 2010 alors qu'on est aujourd'hui à 3,2 millions de passagers sur l'aéroport de Nantes-Atlantique. Le projet a été réactivé en 2000 sur décision de Lionel Jospin, et on comprend pourquoi: il avait l'oreille plus attentive aux desiderata de messieurs Ayrault et Le Drian voulant laisser leur empreinte sur l'aménagement du territoire du grand Ouest et s'étant entendu pour créer une grande métropole économique connectée Nantes-Rennes. Les arguments en faveur du projet de nouvel aéroport de Notre-Dame des Landes ont évolué dans le temps: attirer des investisseurs, créer de l'activité économique, satisfaire les milieux d'affaires locaux en rendant les communications plus rapides avec le reste de l'Europe. Maintenant que la viabilité économique du site a été clairement mise en cause, on justifie la création de NDDL pour des raisons de sécurité (le survol de l'agglomération nantaise par les avions partant de Nantes Atlantique au sud de Nantes ou y arrivant) et de nuisances sonores, en se basant sur le postulat de l'augmentation indéfinie du trafic de voyageurs, qui rendrait les capacités d'accueil de Nantes-Atlantique insuffisantes à terme. Certains ont même le toupet de justifier le transfert pour des raisons environnementales. Or, on sait que tous les investissements n'ont pas été mis en œuvre pour rénover Nantes-Atlantique, diminuer le bruit et permettre que les avions survolent moins la ville, parce que d'emblée on se situait dans l'optique de la création d'un nouvel aéroport, création coûteuse qu'il fallait justifier. Malgré cela, Nantes-Atlantique est encore utilisé en-deça de ses capacités d'accueil (4 millions de passagers à niveau de confort et de sécurité constants, contre 3,2 millions accueillis chaque année aujourd'hui) et on sait que l'aéroport continuera à fonctionner au moins pour Airbus, ce qui limitera la capacité de l'agglomération nantaise à libérer des terrains pour bâtir de nouveaux logements. Depuis quelques années, on sait que c'est la multinationale Vinci, véritable pieuvre qui rackette déjà les usagers d'autoroute grâce au cadeau fait par l'État sous la droite, qui va hérité du fait d'un généreux partenariat public-privé de la gestion de l'aéroport. Deux des préfets qui ont présidé à la mise en route du projet d'aéroport et à ce partenariat public-privé sont aujourd'hui rétribués par Vinci, comme l'a révélé Médiapart. On est ici en plein conflit d'intérêts.
Tous les intervenants qui se sont ensuite exprimé ont fait part de leur souhait que ce projet d'aéroport de Notre-Dame-Des-Landes soit abandonné par ce qu'il est jugé unanimement dans notre collectif Front de Gauche comme nuisible écologiquement, non prioritaire socialement, dangereux pour l'aménagement du territoire en Bretagne, et trop lié aux lobbies financiers privés.
Ismaël D a mis en avant le fait que dans un contexte d'augmentation continue sur le long terme du coût du carburant et surtout d'import très fort du transport aérien sur le réchauffement et le dérèglement climatique, parier sur une augmentation continue du trafic aérien, ce qui est le présupposé des promotteurs du projet NDDL, est une folie. On ne peut pas se dire favorable au développement durable, à la prise en compte sérieuse de la crise écologique, et favoriser un nouvel essor de l'aérien. Il faut au contraire pour faire face aux défi climatique supprimer les compagnies low-costs, taxer davantage le transport aérien, et développer considérablement en contrepartie le ferroviaire pour transporter les voyageurs et les marchandises à bas coût, sans miser simplement sur le TGV mais surtout sur les lignes de proximité et le train et le bus bon marché, vraiment démocratiques. On ne peut pas tout subordonner à la croissance économique, à la prospérité de quelques entreprises. Par ailleurs, il y a une autre dimension inquiétante dans ce projet de Notre-Dame-des-Landes, outre les partenariats publics-privés aventureux pour la collectivité et les deniers publics qui auraient pu être investis pour des projets socialement et écologiquement plus utiles, c'est la volonté de métropolisation, de création d'une grande métropole économique Nantes-Rennes marginalisant l'arrière-pays breton et entraînant à terme la suppression des aéroports de l'ouest breton. Veut-on de cet aménagement du territoire misant tout sur le développement non maîtrisée des grandes agglomérations au nom de la mise en concurrence des territoires dans un contexte d'économie globalisée plutôt que d'organiser l'égalité d'accès des territoires aux services essentiels?
Franck S a démontré que le projet d'aéroport de Notre-Dame des Landes était néfaste au regard de plusieurs enjeux: 1. la réduction des gaz à effet de serre pour contrer le dérèglement climatique 2. la nécessité de conserver des zones humides pour la biodiversité et des terres agricoles pour relocaliser l'économie et la production agricole, développer des circuits courts: tous les 7 ans, c'est l'équivalent d'un département français en terres agricoles qui disparaît. La construction de l'aéroport reviendrait à rendre inutilisables 2000 hectares de terres. 3. ce projet n'a pas fait l'objet d'une véritable concertation démocratique à travers une consultation de la population digne de ce nom. Le fait que les responsables politiques qui portent ce projet aient été réélus n'est pas un argument car ils n'ont pas été élus sur ce projet précisément. 4. On donne les clefs du développement, de la gestion des infrastructures à Vinci plutôt que de développer d'authentiques services publics.
Christian C a mis en avant l'inutilité de ce projet coûteux car Nantes-Atlantique satisfait déjà les besoins existants dans des conditions tout à fait acceptables et il y a possibilité d'améliorer l'aéroport existant à moindre coût écologique et financier.
Alain R a montré que ce projet était typique d'une conception technocratique dépassée de l'aménagement du territoire, avec la croyance à des projets d'infrastructure miracles résolvant tous les problèmes d'aménagement du territoire pour le grand ouest. Les assemblées et les représentants élus ne sont bien souvent que des chambres d'écho de ces projets pharaoniques des aménageurs du territoire. Avec Notre-Dame des Landes, le développement économique s'arrête aux portes de la Bretagne. Que devient l'arrière-cour de la Bretagne? Ce qui est réservé au Morbihan, au Finistère, c'est le développement du tourisme. Le TGV est là pour le faciliter mais quid des gens qui vivent dans le centre et l'ouest de la Bretagne? Le port du Diben est symptomatique aussi d'une vision d'une développement de la Bretagne basée sur une activité à dominante touristique, et on n'envisage pas d'accueillir n'importe quels touristes, mais surtout les plus fortunés au bénéfice desquels se font les investissements publics. Sur ce projet de Notre-Dame des Landes, le déficit démocratique est complet: ces questions ne sont jamais venus à l'ordre du jour pour les régionales.
Nicole L a dénoncé une politique globale de déréglementation du transport aérien dont Notre-Dame des Landes et sa cession à Vinci sont les derniers développements. Il y a parallèlement un développement anarchique des compagnies low-costs sous prétexte de gagner en concurrence. Notre-Dame des Landes ne créera pas d'emplois: il y aura juste transfert des emplois. Son utilité, c'est de renforcer Vinci, un monstre qui s'infiltre partout. Il faut voir tout ce qui a déjà été privatisé dans les aéroports parisiens. Il y a là une manne financière que Vinci va pouvoir récupérer. Il y a une seule question que Nicole se pose: est-ce qu'on peut toujours envisager sereinement un abandon de l'aéroport de Notre-Dame des Landes si par contrat l'Etat devrait alors rembourser 11 millions d'euros par an à Vinci jusqu'en 2060?
Yann G a fait valoir qu'il y avait toujours un espoir de casser comme frauduleux le contrat signé entre l'Etat, les collectivités et Vinci.
Jean-Luc LC a rappelé que Gérard Perron, maire d'Hennebont et conseiller général, candidat du Front de Gauche aux Régionales, avait pris position contre l'aéroport de Notre-Dame des Landes en disant que d'autres aéroports comme celui de Lorient pourraient très bien se charger du frêt que l'on voulait organiser à partir de NDDL et que c'était un projet nuisible socialement et écologiquement, un nouveau coup dur pour l'agriculture paysanne.
Alain D a dit que pour lui, le fond du problème, c'est un problème d'aménagement du territoire. Une volonté de créer des grandes métropoles avec des arrières-pays sans vigueur propre. Un bipole Nantes-Rennes: le tout formant un seul ensemble comme dans les grandes villes américaines. C'est tout l'avenir du territoire qui est en train de se décider. Or, il n'y a jamais eu de débat sur ce choix de politique métropolitaine qui n'est pas assumé lors des élections. Ce projet participe d'un déni de démocratie. Ses dimensions écologiques et agricoles sont aussi à prendre en compte car les effets sont loin d'être positifs. Autre dimension: le coût faramineux de tout cela. Il faut se demander quelles dépenses ne seront pas faites dès lors en faveur de la population. Il est incroyable que des élus fassent le choix d'un partenariat public privé sur 55 ans d'exploitation: la responsabilité de ce blanc seing donné à une multinationale n'incombe pas qu'aux technocrates. A part Brest, tous les autres aéroports seront impactés en Bretagne par la création de NDDL et pas probablement beaucoup seront fermés. Tout l'avenir des ¾ du pays est remis en cause: tout se passera autour de ces grandes métropoles internationales qui pompent toutes les subventions, tous les investissements, une partie de plus en plus grande de la population. La question que nous devons nous poser, c'est quel type de société veut-on mettre en place à travers cela, au-delà de la simple question de l'utilité de ce nouvel aéroport? Dans cette affaire là, trop importante, un passage en force n'est pas acceptable. Il faut peser pour qu'il y ait un vrai débat, que toute la population soit concernée, qu'elle intègre ce débat. Il faut prendre en compte la globalité du problème.
Franck S a fait état de l'intérêt qu'il a ressenti à partager l'expérience des collectifs contre l'aéroport et de soutien aux zadistes. S'y retrouvent pleins de gens différents qui inaugurent des formes politiques et de lien social nouvelles, expérimentales, qui gardent ce qui rassemble et non ce qui oppose.
Yann G a rappelé que les bénéfices économiques de l'aéroport de Notre-Dame des Landes avaient été remis en cause par un collectif d'experts au service des élus sceptiques sur ce projet. C'est pourquoi aujourd'hui l'argument économique est mis au second plan par rapport aux problèmes de sécurité et de nuisance sonore, certainement surévalués.
Nous avons décidé d'apporter concrètement notre appui à ceux qui luttent contre le passage en force du projet par un communiqué dans la presse pour exprimer la position du Front de Gauche Morlaix, par un argumentaire publié sur internet, par une contribution de solidarité aux opposants à Notre-Dame des Landes, par le travail de ceux qui le souhaitent au sein de la coordination morlaisienne contre l'aéroport de Notre-Dame des Landes, par un article dans le premier numéro du journal du Front de Gauche qui devrait paraître à la rentrée.
Alain Rebours, Yann Guéméné et Franck Simonnet se chargent de la préparation de déclaration publique sur Notre-Dame des Landes.
Prochaine AG du Front de Gauche du pays de Morlaix (ouverte à tous les citoyens qui veulent travailler avec nous) : le mercredi 16 janvier à 18h, 2, Petite Rue de Callac à Morlaix.
A l'ordre du jour:
- tour de parole sur la situation politique
- débat sur l'enjeu du logement et des transports dans le cadre des élections municipales et de l'intercommunalité, débat introduit par Hervé P.
- Point sur notre activité (campagne pour la proportionnelle, contre l'austérité).