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2 mars 2018 5 02 /03 /mars /2018 07:26
Pas vu à la télé: Evasion fiscale: seul le PCF ne prend pas la fuite (Humanité Dimanche, 1er mars)

"Nous avons déposé cette proposition de loi car il y a une forte demande d'aller plus loin", témoigne Fabien Roussel, député PCF du Nord, qui défendait cette loi en commission le 21 février, avant son passage dans l'Hémicycle le 8 mars, à l'occasion de la niche parlementaire communiste. Une loi qui porte sur un point précis: la liste française des paradis fiscaux. C'est le cœur du problème: si les sanctions prévues peuvent être très dissuasives - et elles le sont en France - , elles ne sont que rarement appliquées. Deux causes à cela: des montages financiers qui entravent l'action de la justice, et surtout un manque de réelle volonté politique, symbolisé par le fameux "verrou de Bercy" (seul le ministère peut engager des actions en justice contre les fraudeurs fiscaux). 

La liste française des paradis fiscaux fait la part belle aux petits arrangements et ne comporte que huit pays, pour la plupart des micro-états. La proposition de loi communiste établit donc une liste selon des critères alignés sur ceux de l'Union Européenne, et qui serait réévaluée annuellement par le Parlement. En commission des Finances de l'Assemblée, qui examinait le texte le 21 février, le groupe la République en Marche a finalement voté contre, arguant de la "liberté d'entreprendre" des banques françaises et, surtout, du fait que la prise en compte de ces critères européens aboutirait à l'inscription de pays ... européens. Pas question de froisser nos partenaires, Luxembourg, Malte et Irlande en tête. 

L'autre proposition de loi, soutenue par le sénateur PCF Eric Bocquet, porte, elle, sur la mise en place d'une "COP fiscale" sur le modèle de la COP consacrée à l'environnement, qui permettrait de réunir les Etats afin de lutter efficacement contre l'évasion fiscale. Auteur avec son frère Alain du livre "Sans domicile fisc", le sénateur estime également que la liste française "sans le Panama, sans les Bermudes, n'est pas très crédible". (...)

Benjamin König, L'Humanité Dimanche, 1er mars 2018   

Pas vu à la télé: Evasion fiscale: seul le PCF ne prend pas la fuite (Humanité Dimanche, 1er mars)
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1 mars 2018 4 01 /03 /mars /2018 17:06
D’Afrin à la Ghouta, pourquoi la Syrie est toujours à feu et à sang malgré la défaite de l’Etat islamique (Thomas Clerget, Bastamag - 27 février 2018)

Lu sur le site internet: Bastamag, cet article de synthèse important qui rétablit certaines réalités dans cette guerre atroce et très complexe, avec une multiplicité d'acteurs et de retournements d'alliances.  Pour le Réseau syrien pour les droits de l’homme, entre 80 et 90% des victimes civiles auraient été causées par les forces pro-régime, du fait des bombardements, des actes de tortures et des exécutions.  

(https://www.bastamag.net/D-Afrin-a-la-Ghouta-pourquoi-la-Syrie-est-toujours-a-feu-et-a-sang-malgre-la) 

D’Afrin à la Ghouta, pourquoi la Syrie est toujours à feu et à sang malgré la défaite de l’Etat islamique

PAR 

Malgré l’adoption d’un cessez-le feu à l’Onu, bombardements et combats se poursuivent à la Ghouta, dans la banlieue est de Damas, tandis que l’armée turque combat les kurdes à Afrin. Plus tôt en février, Israël a bombardé des installations iraniennes, et des combats ont également opposé l’armée américaine à des paramilitaires russes. Alors que la défaite de Daesh en Syrie annonçait, pour certains, la « fin de la guerre », la situation y semble en fait plus instable et explosive que jamais. Pourquoi une telle flambée de violences ? Une issue est-elle possible, et sous quelles conditions ? Bastamag décrypte la situation.

Que se passe-t-il en Syrie ? Alors que, depuis la chute d’Alep fin 2016, et plus encore depuis la reprise de Raqqa à l’État islamique (EI) en octobre dernier, l’idée d’une guerre « proche de la fin » prenait la forme d’une évidence pour beaucoup, plusieurs événement viennent rappeler qu’absolument rien n’est réglé. Le raid aérien israélien mené le 10 février contre plusieurs cibles militaires en Syrie, dont plusieurs installations iraniennes, a notamment jeté la stupéfaction, laissant craindre un nouveau changement d’échelle du conflit. Conduite, selon l’État hébreu, suite à l’incursion d’un drone iranien au dessus de son territoire, l’opération s’est soldée par la destruction d’un avion de combat israélien, qui s’est écrasé dans le nord d’Israël après avoir été touché par un missile tiré depuis la Syrie.

Pourquoi cette intervention ? Les visées israéliennes rejoignent ce qui est aujourd’hui la principale préoccupation américaine en Syrie : y contenir la présence croissante de l’Iran, synonyme de constitution d’un « arc » sous domination chiite, de Téhéran jusqu’au Liban [1]. Le pouvoir iranien, plus discret que ses alliés de Damas et de Moscou, n’en a pas moins joué un rôle majeur dans le maintien au pouvoir du régime, via son argent – Téhéran aurait versé, selon l’Onu, entre 6 et 35 milliards de dollars par an à la Syrie entre 2011 et 2015 – et ses combattants, les « Gardiens de la révolution », ainsi qu’une myriade de milices islamistes chiites qui lui sont affiliées. On y trouve en première ligne le Hezbollah libanais, et d’autres combattants en provenance d’Irak, d’Afghanistan ou du Pakistan. Si la Russie est devenue maîtresse des airs depuis 2015, ce sont les milices pro-iraniennes qui tiennent le terrain aux côtés des restes de l’armée syrienne.

Environ un tiers du pays contrôlé par les YPG kurdes

Un autre événement, survenu quelques jours plus tôt mais passé plus inaperçu, confirme la profonde instabilité de la situation. Mercredi 7 février dans l’est de la Syrie (province de Deir-ezzor), l’armée américaine a abattu plusieurs dizaines de mercenaires russes, entre 200 et 300 selon certaines sources, placés à la tête d’une colonne de troupes favorables au régime de Bachar al-Assad. Ils s’apprêtaient à attaquer un site gazier tenu par les Forces démocratiques syriennes (FDS), allié des États-Unis en Syrie [2]. Le lien entre ces mercenaires et le gouvernement russe – qui a officiellement proclamé son retrait de Syrie il y a plusieurs semaines – n’est pas reconnu par le Kremlin, mais leur présence fait partie des moyens toujours engagés par Moscou auprès du régime de Damas. 1500 à 2000 mercenaires russes seraient déployés en Syrie, travaillant pour la société privée Wagner [3].

Du côté des groupes visés par l’attaque, les Forces démocratiques syriennes sont très majoritairement composées des kurdes des « Unités de protection du peuple » (YPG), ainsi que d’autres groupes de combattants syriens. Les FDS sont le principal allié en Syrie de la « coalition internationale » contre l’État islamique emmenée par les États-Unis. Après en avoir expulsé l’EI, elles contrôlent la quasi-totalité du territoire syrien situé à l’est de l’Euphrate, où leurs alliés de la coalition – notamment Washington – ont établi plusieurs positions militaires. Les milices kurdes des YPG contrôlent également les zones de Manbij et d’Afrin au nord, soit au total environ un tiers du territoire syrien, très au delà des régions peuplées par des populations kurdes (voir zones en jaune sur la carte ci-dessous).

A Afrin, l’intervention militaire turque fait les affaires du régime

La zone d’Afrin, dans l’extrêmité nord-ouest de la Syrie, est un autre point chaud révélateur des lignes de fracture qui tenaillent actuellement le pays. Ce canton fait l’objet d’une opération conduite depuis le 21 janvier par l’armée turque – épaulée pardes combattants syriens – et baptisée « Rameau d’olivier ». L’objectif pour Ankara est d’en expulser les YPG kurdes, très lié au Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) que la capitale turque combat sur son propre territoire. La Turquie a toujours refusé l’idée de création d’un pays kurde courant le long de sa frontière, et a déjà annoncé son intention de « nettoyer » ultérieurement les autres régions du nord de la Syrie. Mais à Manbij comme à l’est de l’Euphrate, les combattants kurdes sont toujours soutenus par les forces américaines, qui ont annoncé leur intention de s’y maintenir.

En revanche dans le canton d’Afrin, c’est jusqu’ici la présence de l’armée russe qui préservait les YPG d’une attaque turque. Or, Moscou a décidé d’en retirer ses troupes, laissant le champ libre à la Turquie. Pour quelle raison ? La réponse est suggérée par Piotr Akopov, chroniqueur de Vzgliad, journal proche du Kremlin, dans un texte republié sur la page Facebook officielle de la base militaire russe de Hamimim (repéré par le chercheur Syrien Haid Haid). Il s’agit d’abord, écrit Akopov, d’affaiblir la position des États-Unis en attaquant ses alliés kurdes, mais aussi de« faciliter la reconstruction d’une Syrie unie » – comprendre ici la reprise en main du pays par le régime : « La "menace turque" permanente obligera [les kurdes] à chercher leur place en Syrie. Ils le feront parce que Damas et Moscou peuvent fournir des garanties de sécurité aux Turcs, et parce que leur indépendance ne les protégera pas des "opérations anti-terroristes" d’Ankara. » L’offensive turque, autorisée par Moscou, fait donc les affaires de la Russie comme du régime syrien, qui essaieront – sans garantie de succès – d’en tirer bénéfice.

La mise en scène d’une réunification du pays

« Selon de nombreux responsables de l’administration kurde syrienne, la Russie a indiqué aux Kurdes d’Afrin qu’ils obtiendraient sa protection s’ils livraient leur région au gouvernement syrien, précise Haid Haid sur le site d’information Middle East Eye.C’est quand la proposition a été refusée que la Russie s’est retirée de la région. »Les derniers développement semblent confirmer ces informations : après la conclusion d’un accord avec le YPG kurde, des milices pro-régime ont tenté d’entrer à Afrin le 20 février. Selon des responsables kurdes, ces dernières sont censées prendre position le long de la frontière turque, s’interposant entre l’armée turque et les combattants kurdes. Elles ont cependant été reçues par des tirs d’artillerie de l’armée turque, les forçant dans un premier temps à faire demi-tour.

Malgré les territoires peu à peu conquis et leur autonomie revendiquée, les YPG kurdes n’ont jamais intensément combattu les forces de Bachar al-Assad aux côtés des groupes de l’opposition. C’est plutôt une non-agression réciproque qui a prédominé entre ces deux parties depuis la révolution de 2011 [4]. Le 20 février dans la soirée, peu de temps après la tentative avortée des forces pro-régime d’entrer à Afrin, des vidéos commençaient néanmoins à circuler sur les réseaux sociaux, affichant les « retrouvailles » de combattants du régime avec des membres des YPG, drapeaux loyalistes [5] mélangés avec les drapeaux kurdes, scandant « uni-uni-uni, le peuple syrien est uni ! », soit... l’un des slogans de la révolution. Comme prévu, Damas veut capitaliser sur l’intervention turque : il s’agit pour le régime de regagner en légitimité en s’affichant comme protecteur des kurdes, et de mettre en scène la réunification d’un pays brisé en morceaux par la guerre.

La Ghouta orientale, faubourg populaire symbole de la révolution

Dans le même temps, le régime accentue l’offensive engagée fin novembre contre la zone rebelle de la Ghouta orientale, faisant pleuvoir un déluge de feu sur les habitants de la grande banlieue est de Damas, dont plusieurs localités avaient déjà subi l’attaque chimique au gaz sarin du 21 août 2013 [6]. Environ 400 000 personnes, dont 50% d’enfants selon l’Unicef, y sont toujours coincées par un siège qui dure depuis plus de quatre ans. La Ghouta, faubourg populaire, ouvrier et agricole, est l’une des zones à avoir très tôt et massivement exprimé son opposition au régime, une dynamique renforcée par la répression des manifestations pacifiques, les exécutions de masse – Amnesty a décrit la prison de Saidnaya, près de Damas, comme un « abattoir humain » –, les viols systématiques, tortures, etdisparitions subis par les activistes et leurs familles. C’est dans ce contexte qu’est apparue à l’été 2011 l’Armée syrienne libre, composée comme à Homs ou dans d’autres villes du pays d’habitants et de déserteurs de l’armée décidés à prendre les armes pour protéger les manifestations [7].

L’opposition a fini par se rendre totalement maître de la Ghouta en 2012. Les relations entre les groupes armés locaux et les habitants se sont depuis tendues, tandis que la faiblesse des moyens de l’ASL – peu aidée par les capitales occidentales face à la puissance de feu du régime – a favorisé les groupes soutenus par les puissances du Golfe et la Turquie, et leur évolution en mouvements se revendiquant d’une idéologie islamiste. Les deux groupes aujourd’hui les plus puissants dans la Ghouta sont Jaych-al-Islam (salafiste non-jihadiste) et Faylaq-al-Rahmane (nationaliste, membre de l’ASL), qui comptent au total environ 10 000 combattants. Plus qu’à une adhésion à leur projet politique, c’est à la capacité de ces groupes – qui ont aussi combattu l’EI et l’ont empêché de s’implanter dans la Ghouta – à tenir tête au régime, qu’est dû leur soutien relatif par la population.

Le seul groupe jihadiste présent à la Ghouta est Hayat Tahrir al-Sham (HTS), créé en 2017 à partir de plusieurs factions dont l’ancien Front al-Nosra [8]. Alors qu’HTS domine la province d’Idlib, son implantation à la Ghouta est très marginale. Le gouvernement syrien en exagère néanmoins la présence pour justifier l’offensive en cours, dont l’objectif est de tirer un trait définitif sur l’une des quatre dernières enclaves tenues par l’opposition, sans doute la plus symbolique, et l’une des plus résilientes.

Assiéger, bombarder, dépeupler : une stratégie bien rodée

Malgré plusieurs tentatives de percées depuis l’automne 2017, l’armée syrienne et les milices chiites qui l’appuient n’ont jamais réussi à pénétrer dans la Ghouta. Les bombardements quotidiens ont démarré à la fin du mois de novembre, franchissant un palier fin décembre, avant de se transformer désormais en pilonnage systématique et indiscriminé par les aviations russe et syrienne et par l’artillerie lourde, ciblant des marchés, des centres de soin débordés par les blessés, des boulangeries, ou encore des immeubles d’habitation. Plus de 500 civils ont été tués pendant les sept premiers jours de cette nouvelle offensive, auxquels s’ajoutent des centaines de morts supplémentaires depuis la fin du mois de novembre. « Il ne faut pas prétendre, alors qu’Assad assiège les civils de la Ghouta orientale et les bombarde sans relâche, y compris leurs hôpitaux, qu’il s’agit d’une guerre : c’est un massacre », a commenté l’ONG Human rights watch. En face, les rebelles ont tiré des roquettes sur Damas tuant, selon les médias officiels syriens, 20 personnes sur la dernière semaine.

Samedi 24 février, le Conseil de sécurité de l’Onu a laborieusement adopté une résolution « demandant », pour des motifs humanitaires, une cessation des combats dans tout le pays « pour au moins trente jours », excluant cependant les opérations menées contre « les groupes terroristes ». Dès le lendemain, l’Iran annonçait que les opérations de « nettoyage » se poursuivraient « dans les banlieues de Damas sous contrôle terroriste ». Les bombardements reprenaient dès le matin, tandis que les forces pro-régime déclenchaient une offensive terrestre. Nouveau rebondissement dans la journée de lundi, qui voyait Moscou « ordonner » une trêve humanitaire quotidienne dans la Ghouta, de 9h à 14h, ainsi que la création de couloirs destinés à évacuer les civils.

Employée précédemment à Alep, à Homs, ou sur des localités longtemps assiégées comme Madaya, la stratégie du régime et de ses alliés, bien rodée, a été analysée et baptisée « We leave or we die » (« Partir ou mourir ») par l’ONG Amnesty international [9]. Son objectif : briser la population pour faire tomber l’opposition armée, puis « négocier » le départ des survivants (civils et combattants), souvent regroupés dans la région d’Idlib. Le déplacement des populations opposées au régime faisant, in fine, partie des objectifs : « Le gouvernement syrien a mis en œuvre une stratégie de sièges, d’homicides illégaux et de déplacements forcés, constate Amnesty. Si l’objectif affiché est de vaincre les combattants de l’opposition, son utilisation cynique de la stratégie "se rendre ou mourir de faim" se traduit par des sièges et des bombardements aux effets dévastateurs (...). Cette attaque systématique et de grande ampleur contre les civils s’apparente à des crimes contre l’humanité. » [10]

La justice, un préalable à toute forme de paix en Syrie

L’actuelle multiplication des violences en Syrie est aussi le reflet d’un processus politique totalement dans l’impasse, à la fois cause et conséquence de la volonté de chacun des acteurs, au premier rang desquels le régime et ses alliés, de pousser leur avantage sur le terrain. De ce point de vue, l’échec récent des négociations de Sotchi les 30 et 31 janvier derniers – boycottées par les principaux groupes de l’opposition en pleins bombardements sur la Ghouta et la province d’Idlib – est un échec pour Moscou. Ayant pris l’avantage sur les scènes diplomatique et militaire depuis son intervention en septembre 2015 afin d’éviter l’effondrement du régime, la Russie comptait transformer l’essai en fixant elle-même le cadre d’une sortie du conflit. Précédemment, les pourparlers d’Astana, réunissant début 2017 Moscou, Istanbul et Téhéran en dehors des discussions menées aux Nations-unies, avaient débouché sur la création de « zones de désescalade », dont faisaient partie les régions d’Idlib et de la Ghouta, cibles depuis d’offensives du régime...

Malgré sept années de souffrances, une issue à la « guerre interminable » en Syrie n’est donc pas en vue. Les estimations fixent le nombre de morts à plus de 500 000 depuis 2011, dont 30 à 40% de civils, auxquels s’ajoutent environ deux millions de blessés. Selon l’Observatoire syrien des droits de l’homme, de même que le Réseau syrien pour les droits de l’homme, entre 80 et 90% des victimes civiles auraient été causées par les forces pro-régime, du fait des bombardements, des actes de tortures et des exécutions. Selon Amnesty international, qui évoque une « politique d’extermination », sur la seule prison de Saidnaya, l’un des nombreux centres de détention du régime, 13 000 personnes auraient été pendues de 2011 à 2015. Chiffres auxquels s’ajoutent, à la même date, au moins 17 000 personnes « mortes dans les geôles syriennes en raison des conditions inhumaines et de la torture ». Des dizaines de milliers de femmes auraient été violées, là encore dans le cadre d’une politique systématique de terreur visant l’opposition [12].

Sur une population qui comptait à l’origine 22 millions d’habitants, 5,4 millions ont dû fuir le pays, tandis que 6,1 millions sont des déplacés internes [13]. Selon l’Onu, une aide médicale urgente est nécessaire pour 13 millions de personnes. Au regard de l’ampleur invraisemblable des crimes commis sur la population, généralement passés au second plan dans les analyses dites « géopolitiques », les appels récurrents à la paix en Syrie pourraient bien ne rester que de vaines paroles, en l’absence de la mise en œuvre d’un véritable processus de justice, et de la condamnation des responsable

 

 

 

Notes

[1L’Iran est la principale puissance chiite – une branche minoritaire de l’Islam aux côtés du sunnisme dominant. Les chiites sont également au pouvoir en Irak, tandis qu’au Liban, dans le cadre d’un système politique multiconfessionnel, le Hezbollah, très proche de l’Iran, est la principale force militaire.

[2L’événement a été rapporté et a fait l’objet d’enquêtes de la part de nombreux journaux. Par exemple sur le site d’information Middle east eye, mais aussi sur le Guardian, ou encore en France dans Le Monde ou le Figaro.

[3Voir par exemple cet article de l’Independant.

[4Déclenchée en mars 2011, avec d’importantes manifestations pacifiques aux quatre coins du pays, la révolution syrienne a évolué en conflit armé sous l’effet d’une brutale répression des manifestants par le régime, puis en guerre régionale avec l’implication de nombreuses puissances étrangères favorables (Russie, Iran) ou opposées (Turquie, Arabie Saoudite, États-Unis...) au régime de Damas.

[5Le drapeau arboré par le régime de Damas est le drapeau officiel syrien depuis 1980, qui comporte trois bandes horizontales – rouge, blanche, noire, en partant du haut – et deux étoiles. Le drapeau adopté par le mouvement révolutionnaire en 2011 est le drapeau en vigueur à l’indépendance du pays en 1946 : trois bandes – verte (au lieu de rouge), blanche et noire – et trois étoiles rouges, au lieu de deux vertes sur le drapeau du régime.

[6Cette attaque chimique avait tué plus de 1000 personnes et constitué l’un des tournants du conflit.

[7Pour un récit détaillé concernant les premières heures de la révolution, ses grandes manifestations pacifiques et leur répression par le régime, l’expérience de la torture, la création de l’ASL, l’apparition des factions islamistes... lire le bel ouvrage de Majd al-Dik, jeune activiste syrien aujourd’hui réfugié politique en France : A l’est de Damas, au bout du monde. Témoignage d’un révolutionnaire syrien, éd. Don Quichotte (Seuil), 2016 (écrit avec Nathalie Bontemps).

[8Al-Nosra était affilié à al-Qaïda jusqu’en 2016. Aujourd’hui, Al-Qaïda a créé un nouveau groupe dans la province d’Idlib, en concurrence avec HTS au sein de la mouvance jihadiste.

[9Voir ici le rapport complet We leave or we die par Amnesty international.

[10Voir ici une carte interactive des déplacements forcés en Syrie, avant la bataille actuellement engagée à la Ghouta.

[11L’Observatoire syrien pour les droits de l’homme donne un chiffre comparable, soit 2815 personnes tuées dans les bombardements de la coalition internationale au 22/01/18. L’ONG Airways avance une fourchette plus élevée, comprise entre 3481 et 5304 morts au 31/12/17.

[12Une enquête approfondie, menée dans le cadre du projet « Zero impunity » par les journalistes du collectf Youpress Cécile Andrjezewski et Leïla Miñano, avec Daham Alasaad, a également mis en lumière l’existence d’une politique systématisée de viols visant les enfants d’opposants politiques au régime syrien : Les viols d’enfants, l’autre crime de guerre du régime Assad. Cette enquête a également été publiée sur le site d’information Mediapart.

[13Chiffres donnés par l’agence des Nations unies pour les réfugiés (UNHCR).

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1 mars 2018 4 01 /03 /mars /2018 16:47
Lucienne Nayet (photo Le Télégramme)

Lucienne Nayet (photo Le Télégramme)

Résistants et AMIS de la RESISTANCE

-ANACR 29-

Comité du FINISTERE.

Communiqué des Résistants et Amis de la Résistance du Finistère

Quand les néonazis mettent leurs pas dans ceux des assassins.

Le 19 février 2018, à la veille de témoigner devant les classes de 3 ième d'un collège du Finistère, l'une des nôtres, enfant de la guerre, Amie de la Résistance, se découvrait portant l'étoile jaune sur un site néonazi. Une photographie truquée, détournée, accompagnée d'insultes.

Faire porter, même symboliquement, l'étoile jaune à un de ses semblables, c'est le condamner à mort.

En France, en Europe, sous la botte vichyste et nazie, le port de l'étoile jaune conduisait inexorablement à la mort dans les camps d'extermination.

Ils avaient nom Auschwitz, Sobibor...

La victoire des Alliés le 8 mai 1945, le procès des criminels de guerre nazis, la Déclaration universelle des Droits de l'Homme du 10 décembre 1948, promettaient un monde dans lequel «la reconnaissance de la dignité inhérente à tous les membres de la famille humaine et de leurs droits égaux et inaliénables] constituait[ le fondement de la Liberté, de la Justice et de la paix dans le monde.» Plus jamais d'étoile jaune en France, en Europe, dans le monde! Plus jamais! Que les auteurs se réclamant de cette barbarie soient condamnés.

Plus que jamais nous, Résistants et Amis de la Résistance du Finistère, nous témoignerons des désastres auxquels conduit la haine de l'autre. Leur haine ne nous fera pas taire!

Merci à la presse quotidienne qui a relayé notre message. Les Résistants et Amis de la résistance du Finistère

Communiqué de l'ANACR 29 - Ouest-France, 1er mars 2018

Communiqué de l'ANACR 29 - Ouest-France, 1er mars 2018

Lucienne Nayet et Dominique Adenot, maire de Champigny-sur-Marne où est installé le musée de la Résistance Nationale

Lucienne Nayet et Dominique Adenot, maire de Champigny-sur-Marne où est installé le musée de la Résistance Nationale

http://www.champigny94.fr/article/communique-du-maire-4
Dominique Adenot, maire de Champigny, réagit aux attaques racistes contre Lucienne Nayet, ancienne élue de la ville et présidente du réseau des musées de la Résistance Nationale.

Lucienne Nayet, ancienne élue campinoise et présidente du réseau des musées de la Résistance Nationale, était victime le 15 février dernier de très violentes attaques antisémites et de montages photo insultants. Fille d’un déporté mort à Auschwitz, ne devant sa survie qu’au fait qu’elle a été cachée durant les rafles, Lucienne Nayet intervient aujourd’hui auprès des jeunes pour transmettre la mémoire de la Seconde guerre mondiale. Elle était à Champigny en octobre dernier, au côté du maire et du président du conseil départemental, lors du lancement du projet de nouveau Musée de la Résistance Nationale.

Les attaques dont elle a fait l’objet émanent d’un site internet faisant l’apologie des camps d’extermination, hébergé sur un serveur situé à l’étranger mais peut-être réalisé par des rédacteurs vivant en France.

 

Communiqué de Dominique Adenot, maire de Champigny

Champigny révolté par les attaques racistes contre Lucienne Nayet,
Présidente du réseau des Musées de la Résistance Nationale.

 

Il y a quelques jours, mon amie Lucienne Nayet, ancienne élue de Champigny, Présidente du réseau des musées de la Résistance Nationale, a été victime d'ignobles attaques antisémites.

Comme beaucoup d’autres, je lui ai aussitôt fait part de ma répulsion face à un tel déferlement de haine et d’ignominies. Je lui ai renouvelé toute mon amitié et mon soutien dans cette épreuve.

L’Etat français doit intervenir au niveau national et international, afin que toutes les recherches soient entreprises, et que les coupables soient sévèrement punis. Les propos d’une grande lâcheté ont été émis depuis un site néo-nazi hébergé aux Etats-Unis pour contourner la législation française sur les atteintes à l'humanité de caractère raciste et  antisémite. Mais des moyens existent aujourd’hui, et doivent être utilisés, pour trouver et condamner les coupables.

La bête immonde n’est pas morte, son ventre est encore fécond de nazillons qui vomissent toujours leur haine, leurs mensonges, leur négation de l’Histoire et leurs idées fascistes.

C’est bien tout cela qui est en arrière-plan de l’attaque contre la personne de Lucienne Nayet.

Présidente du Musée de la Résistance, elle poursuit, inlassablement, un travail exemplaire de mémoire, en particulier auprès des plus jeunes, dans toute la France, avec ses conférences dans les établissements scolaires.

Je connais Lucienne, son passé marqué par la traque anti-juive, par les crimes de la déportation et de la Shoah, par la Résistance. Je sais que rien ne l’arrêtera dans sa mission pour transmettre son amour de la vie et de la liberté, ses valeurs de paix, de fraternité et d’humanisme.

Cet acte ne fait que redoubler notre fierté d’accueillir le Musée de la Résistance nationale dans notre commune. Il nous conforte dans nos actions pour cultiver, faire s’épanouir nos enfants ; pour que le passé serve aux futures générations pour construire un monde solidaire, de fraternité et de paix.

Dominique ADENOT
Maire de Champigny sur Marne
27 février 2018

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1 mars 2018 4 01 /03 /mars /2018 11:44
Annie Lacroix-Riz

Annie Lacroix-Riz

 Cause commune: le grand capital, de l’entre-deux-guerres à l’Occupation Par Annie Lacroix-Riz (historienne Annie Lacroix-Riz)

Lu sur le site: 

https://histoireetsociete.wordpress.com

De 1922 à 1944, le noyau dirigeant du capital financier opta pour une formule fasciste de gestion directe du pouvoir. Son plan connut un début d’exécution à l’ère Daladier – Reynaud (avril 1938-juin 1940), où la liquidation de fait des institutions parlementaires aligna la France sur le modèle pré-hitlérien allemand (mai 1930-janvier 1933). L’objectif fut pleinement atteint de l’été 1940 à l’été 1944 où, sous la protection de l’occupant allemand et l’apparente houlette de Pétain, Darlan et Laval, le capital financier assura directement le gouvernement de la France.

Le plan d’assassinat de la République par le noyau dirigeant du capital financier

La solution fasciste est couramment décrite comme « contre-révolution préventive » contre un péril rouge qui aurait épouvanté les classes dirigeantes, notamment en Italie et en Allemagne (Pierre Milza, Les fascismes,1991). De fait, après leurs rudes émotions de 1917-1919 (1920 au plus tard), celles-ci perçurent partout, France incluse, que la révolution n’aurait hors de Russie aucune chance à court ou moyen terme. Si haïe et « assiégée », de sa naissance à sa mort, qu’eût été la « forteresse » soviétique, ce n’est pas le péril révolutionnaire qui incita le noyau dirigeant du capital financier à abattre des structures politiques qu’il contrôlait pourtant presque autant que l’économie. La Banque de France, club de la haute banque privée, exerçait en effet depuis sa naissance (1802) – cadeau de Bonaparte aux bailleurs de fonds de son coup d’État du 18 brumaire – un pouvoir dictatorial sur tous les gouvernements, monarchique, impérial ou républicain, par l’octroi ou le refus de ses « avances ». « Rois, parlements, presse, […] armée, Église […] meilleurs élèves des grandes écoles », etc., trancha un observateur de 1942 ou 1943, sont « depuis un demi-siècle complètement passés sous le contrôle du haut patronat. [L]es hommes politiques, les ministres, les vénérables des loges et les secrétaires de syndicats, cela ne pèse pas lourd devant le Comité des Forges et le Comité des houillères », qui, avec « les “Deux Cents Familles” » [les 200 plus gros actionnaires de la Banque de France], achètent « la moitié des hommes publics importants ». La longue liste des secteurs par eux contrôlés s’achevait sur le rejet, d’apparence provocatrice, du distinguo entre « démocraties » et États fascistes : « L’État d’aujourd’hui n’est rien devant les trusts. Ni l’État de Lebrun [président de la République depuis 1931], de Daladier, de Paul Reynaud [présidents du Conseil d’avril 1938 à juin 1940], ni l’État de Pétain ni de Laval ni ceux de Mussolini, de Hitler ou de Roosevelt. Derrière tous les rois, chefs d’État et ministres, il y a le haut patronat, dont le public ne connaît pas les chefs, qui n’aiment pas à se faire connaître » (rapport reproduit par les RG de la Sûreté nationale, août 1943).

Pourquoi donc ce « haut patronat français » décida-t-il, si peu après sa si fructueuse victoire de 1918, de balayer une république aussi bonne fille que l’était le nouveau régime pour son homologue allemand ? Seulement par haine des Soviets, auxquels il ne pardonnait pas de lui avoir « fermé l’accès des matières premières » de l’ancien empire : « l’or, le fer, le cuivre, le charbon, le pétrole, etc. », seule vraie « patrie [du…] haut patronat international » ? Malgré l’obsession antisoviétique des vrais décideurs français de l’entre-deux-guerres, « Moscou » n’explique pas seule le « plan d’action […] pour la France » qu’ils conduisirent autour du noyau de « ce que l’on appel[ait] les “Deux cents familles” ».

L’organisation d’une « synarchie »

Une douzaine de personnes s’organisèrent en 1922 en club politique, autoqualifié de « synarchie », pour liquider la république. Car, si obligeante que fût celle-ci, elle n’allait jamais assez vite en besogne, entravée par les moyens de défense des détenteurs de revenus non-monopolistes, ouvriers, fonctionnaires, paysans, petite bourgeoisie capitaliste, partis ouvriers ou de « gauche », syndicats, parlement, dont les décisions, lentes et trop molles, faisaient perdre tant de temps et d’argent. Certes, les bailleurs de fonds patronaux faisaient élire et guidaient de nombreux députés et la quasi-totalité des sénateurs. Mais l’obligation pour ces élus de se faire réélire ralentissait leur exécution de « l’assainissement financier », maître mot de la Banque de France, synonyme de verrouillage de tous les revenus autres que ceux de la haute banque et de la grande industrie.

Ce cénacle financier, grand prêteur à l’Italie, qu’il avait entraînée contre son gré dans la guerre récente, prônait pour ce gros débiteur une formule politique à poigne. Elle seule contraindrait le peuple italien à accepter les conditions impitoyables du remboursement dictées depuis la fin du conflit, solution que les créanciers internationaux, français inclus, firent triompher avec Mussolini fin octobre 1922. « Le haut patronat » français, comme tous ses pairs, britanniques et américains inclus, ne cessa d’exalter le modèle italien avant de trouver (en 1933) la formule politique, meilleure encore, adaptée au règlement de l’énorme « dette [extérieure] » allemande.

« Les milieux financiers rêvaient d’un nouveau système de “synarchie”, c’est-à-dire de gouvernement de l’Europe selon les principes fascistes par une fraternité internationale de financiers et d’industriels. »

Quand la synarchie se fonda, elle était dominée (et le resta) par « la banque Worms, […] grande organisatrice des gouvernements de Vichy », par le mystérieux « groupe de Nervo », employeur de Du Moulin de Labarthète (financier des ligues fascistes de l’entre-deux-guerres puis chef du cabinet civil de Pétain), par la Banque d’Indochine et par l’industrie lourde (avec Peyerimhoff, chef du Comité des Houillères), et des obligés du Comité des Forges dominé par François de Wendel et Schneider. Ces gens financèrent et guidèrent, 1° toutes les ligues fascistes, liées à l’Action française, matrice du fascisme née de la lutte contre Dreyfus, puis 2° la Cagoule dans laquelle, sans disparaître, elles se regroupèrent depuis le tournant de 1935. Leurs ligues essaimaient depuis la victoire fugace, en avril 1924, du Cartel des Gauches du radical Édouard Herriot, qui avait promis l’impôt sur le capital et la laïcité en Alsace-Moselle, mais capitula d’emblée devant le Mur d’Argent.

Dans les années 1920, la synarchie, banque Worms en tête, reine de cette spécialité, conquit et forgea le personnel indispensable au bon fonctionnement de sa future dictature : issu de l’École libre des Sciences politiques, inspection des Finances en tête, sans préjudice du Conseil d’État, et des grandes écoles, Polytechnique au premier chef sans oublier l’École normale supérieure et l’École centrale, ce personnel fournissait déjà les cadres de l’État – et, du côté de l’inspection des Finances, ceux de la haute banque –, après un stage étatique plus ou moins bref. Ces hauts fonctionnaires civils issus d’un sérail dominé par « Sciences Po », et les généraux cléricaux et factieux, détestaient la république et « ne la serv[ai]ent qu’à contrecœur », déplora Marc Bloch dans son Étrange Défaite de 1940.

Le noyau économique dirigeant de la synarchie s’étoffa dans les années 1930. Il était surtout constitué de hauts lieutenants du grand capital, que « le public » ne connaîtrait (si peu) que comme ministres ou assimilés sous Vichy : dans la petite cinquantaine de noms du « rapport sur la synarchie » d’Henri Chavin (un des prédécesseurs de René Bousquet au secrétariat général à la police) de juin 1941 figurent ces non-élus devenus gouvernants, presque tous liés à la banque Worms : tel son directeur général, l’inspecteur des Finances Jacques Barnaud, mais aussi Pierre Pucheu (ancien normalien devenu « directeur des services d’exportation du Comptoir sidérurgique de France et administrateur des Établissements Japy »), François Lehideux (directeur général de la Société anonyme des Usines Renault), Jean Bichelonne (X-Mines, « sorti major de Polytechnique », directeur général de « la Société métallurgique Senelle-Maubeuge »), le polytechnicien Jean Berthelot (ancien chef de l’exploitation du réseau ferré (Paris-Ouest), un des dirigeants de la SNCF, fief synarchiste, sous l’Occupation), les inspecteurs des Finances Jacques Guérard (porté en 1938 à la tête des assurances Worms, administrateur de Japy) et Paul Baudouin (directeur général puis président de la Banque d’Indochine), etc. ; et, seul à n’avoir pas « pantouflé », l’inspecteur des Finances Yves Bouthillier, pilier de l’administration des Finances puis son ministre auprès de Reynaud puis de Pétain.

« Le noyau économique dirigeant de la synarchie s’étoffa dans les années 1930. Il était surtout constitué de hauts lieutenants du grand capital, que “le public” ne connaîtrait (si peu) que comme ministres ou assimilés sous Vichy. »

Un fort ralliement de « gauche » à Pétain

La crise aiguisa la « stratégie du choc » (Naomi Klein) contre les salaires et autres revenus pesant sur le niveau des profits. Elle aviva l’impatience de la synarchie à l’égard du régime, qui décidément l’importunait : ainsi quand, à l’été 1931, il fallut attendre quelques semaines que l’État, même avec le docile Flandin aux Finances, acceptât de prendre à sa charge (celle du contribuable) les coûteuses décisions de la Banque de France sur le règlement de la dette extérieure allemande. Elle l’obligea aussi à étendre son recrutement au-delà des grandes écoles, condition nécessaire pour séduire une partie des masses radicalisées. Elle puisa de notables soutiens dans la gauche anticommuniste, politique (SFIO et radicaux), syndicale (CGT de Jouhaux), franc-maçonne : c’est cet efficace travail de sape qui explique un fort ralliement de « gauche » à Pétain ; mais il est si méconnu de ceux qui négligent les archives originales qu’ils opposent une gauche largement antisémite et « collabo » à une droite vichyste patriote et résistante (comme dans les thèses de Simon Epstein).

De ce volet du recrutement témoignent deux personnages importants, tant avant-guerre (surtout pour le premier) que sous l’Occupation : le socialiste Charles Spinasse, qui apporta au chef idéologique des synarques, Jean Coutrot, autre employé de la banque Worms, un sérieux coup de main dans l’investissement de l’appareil d’État quand son ami Léon Blum en fit, en 1936-1937, son ministre de l’Économie nationale ; et le socialiste et syndicaliste CGT René Belin, lieutenant-successeur du secrétaire général Jouhaux, que son traitant depuis le début des années 1930, Jacques Barnaud, transforma en potiche ministérielle sous Vichy. L’effort aboutit même à la conquête d’un des dirigeants du PCF, Jacques Doriot, qui, espéraient ses mentors, pourrait (en apparence) diriger un parti de masse fasciste : en liaison avec les futurs occupants, fort intéressés à la chose, les synarques lui édifièrent en juillet 1936 un parti, le Parti populaire français ; son Bureau politique, originalité pour un parti censément né du terreau populaire de Saint-Denis, fut peuplé de synarques importants, dont Pucheu. Dès 1934, la synarchie choisit la formule qui offrirait une façade civile et militaire à son pouvoir direct : Laval – Pétain (alors ministres respectifs des colonies et de la guerre). Ce choix, définitif, résista à tous les aléas des six années menant la France à la Débâcle et au putsch de juillet 1940.

« Sous la protection du Reich vainqueur et pillard, Vichy, à un degré qu’on ne peut soupçonner sans consultation des fonds originaux, permit au capital financier d’exercer sans intermédiaire le pouvoir gouvernemental. »

Vichy : les synarques ministres ou l’exercice direct du pouvoir

Sous la protection du Reich vainqueur et pillard, Vichy, à un degré qu’on ne peut soupçonner sans consultation des fonds originaux, permit au capital financier d’exercer sans intermédiaire le pouvoir gouvernemental. En témoigne un commentaire du 7 janvier 1942 du diplomate américain Anthony Joseph Drexel Biddle Jr sur le conseil des ministres de Pétain et Darlan (après Laval, juillet – décembre 1940 et avant Laval, avril 1942 – août 1944), avis d’autant plus intéressant que cet ambassadeur auprès de divers pays occupés représentés à Londres appartenait aussi aux milieux financiers : « Nombre d’entre eux avaient de longue date des liens d’affaires importants et intimes avec les intérêts allemands et rêvaient encore d’un nouveau système de “synarchie”, c’est-à-dire de gouvernement de l’Europe selon les principes fascistes par une fraternité internationale de financiers et d’industriels. Laval était depuis longtemps lié à ce groupe. Darlan, bien qu’il ne fût pas de leur monde, était assez intelligent pour se les associer. S’ils adoraient Laval, ils servaient Darlan, comme ils auraient servi quiconque jouait le jeu. » Au sommet de ce groupe « ne portant d’attention qu’à la défense de [leurs] intérêts » trônaient « de nombreuses grandes banques […] : la Banque nationale pour le commerce et l’industrie (qui était par excellence le groupe de Laval), la Banque d’Indochine (dont Baudouin était le chef), la Banque de Paris et des Pays-Bas. Mais celle qui s’identifiait particulièrement au régime Darlan était la banque Worms et Cie » comme le montrait « un bref examen du conseil des ministres et des secrétaires d’État ».

Des membres de « la clique Worms », Biddle n’exclut que quatre « hommes de Pétain » (en se trompant : ceux-ci étant de longue date liés à la synarchie, tel Joseph-Barthélémy, ministre de la Justice, chef cagoulard, qui avait requis de lâcher l’alliée tchécoslovaque dans un article du 12 juin 1938 dans Le Temps, organe du Comité des Forges) : « Pierre Pucheu (Intérieur) et Yves Bouthillier [Finances] étaient des membres de la clique Worms. Le général Bergeret (secrétaire d’État à l’aviation) était classé par les uns dans l’entourage personnel de Pétain, par les autres dans le groupe Worms. Lui excepté, les secrétaires d’État étaient à un homme près associés à la même clique ». Au « groupe Worms » appartenaient aussi « un grand nombre de fonctionnaires subalternes (surtout les secrétaires généraux) », parmi lesquels Bichelonne : secrétaire général puis, d’avril 1942 à août 1944, ministre de la Production industrielle, il dirigeait aussi le Travail, dont Hubert Lagardelle fut le titulaire officiel entre le départ de la potiche précédente, René Belin, en avril 1942, et le sien, en novembre 1943.

« Pratiquement tout ministère ou secrétariat touchant les affaires économiques était aux mains d’un homme ou d’un autre de la clique Worms. » (d’après un des trois rapports – janvier, mars 1942, novembre 1943 – sur la banque Worms cités par William Langer dans Our Vichy gamble, Amden, Archon Books, 1965, p. 168-169).

Malgré des retraits liés, depuis 1942, aux mutations du rapport de forces militaire et de politique général mais aussi à la certitude de la défaite allemande, cette maîtrise fut maintenue jusqu’au bout. Elle fut symbolisée par Bichelonne, personnage emblématique de la baisse de 50 % du salaire réel des ouvriers et employés sous l’Occupation, et au moins autant par Jacques Guérard. Resté inconnu du public, cet « homme de sang » fut, comme secrétaire général de Laval de son retour à la Libération de Paris, le maître du gouvernement français et le principal interlocuteur de l’occupant.

*Annie Lacroix-Riz est historienne. Elle est professeur émérite d’histoire contemporaine à l’université Paris 7.

 

Dans le grand patronat: les yeux de Chimène pour Hitler (L'Humanité spécial Front Populaire, entretien avec Annie Lacroix-Riz)

 

Louis Renault n'a pas attendu l'occupation allemande pour être prêt à collaborer. En 1935, il rencontrait Hitler

Louis Renault n'a pas attendu l'occupation allemande pour être prêt à collaborer. En 1935, il rencontrait Hitler

Une explication historique de la montée irrésistible du fascisme et du nazisme que l'on entend bien peu aujourd'hui et qui ouvre des perspectives de compréhension, avec quelques échos renvoyant à notre présent...

Syndicats liquidés, communistes et sociaux-démocrates enfermés à Dachau ou Buchenwald, Gestapo omniprésente. Le régime nazi offrait des possibilités inespérées d'exploitation des ouvriers.

La célèbre formule "Plutôt Hitler que le Front Populaire" est quelque fois interprétée comme un ralliement du patronat français au fascisme face à "la peur des rouges". Une manière de la justifier ou de l'atténuer?

Annie Lacroix-Riz: Le modèle social nazi, qui permet de faire travailler les ouvriers 16 heures par jour six jours par semaine sans autorisation administrative, et les prive de partis, de députés, de syndicats et de droit de grève, a enthousiasmé le patronat international (Etats-Unis inclus, qui avaient tant investi dans le Reich depuis la décennie 1920). Il avait séduit d'emblée le patronat français qui, au surplus, se heurte à une forte résistance ouvrière entre 1934 et 1938. Il voit dans le modèle social allemand un motif de plus à ne pas faire la guerre au Reich, qui, lui, la fera. Car, l'occupant une fois sur place, tout ira mieux, comme le claironnent nombre de patrons à leurs ouvriers grévistes en 1936-1937, tel le président de l'imprimerie Lang: "Hitler viendra mettre de l'ordre en France!". Ce qui se fait chez Lang et ailleurs depuis l'été 1940, je l'ai montré dans Industriels et banquiers français sous l'occupation.

Le grand patronat français fait donc non seulement le choix de l'Allemagne mais aussi le choix de Hitler avant le Front Populaire?

Annie Lacroix-Riz: C'est un pan essentiel de l'histoire du fascisme français de l'entre-deux guerres. Car, fondamentalement, c'est son principal intérêt, le fascisme écrase les salaires et les salariés. Il a séduit les milieux d'affaires parce qu'il empêche les détenteurs de revenus non monopolistes de se défendre, qu'ils se soient battus auparavant ou pas: les ouvriers allemands ont été dociles... En France, ils se défendent, y compris sur le plan du Parlement, soumis à réélection tous les quatre ans, forcément sensible aux électeurs. En outre, le système parlementaire, même contrôlé par le capital financier, retarde l'exécution de ses décisions de plusieurs semaines, mois ou années. Les fonds de police attestent précisément comment, à partir de 1922, s'organise, sous la férule de la "synarchie", le mouvement fasciste en France, comment le capital financier finance les "ligues". A l'extérieur, l'impérialisme français a les mêmes goûts. Il est notoire, depuis le début des années 1930, que Skoda, c'est à dire Schneider, soutient Hitler et son auxiliaire en Tchécoslovaquie, le chef du "parti des Sudètes", Konrad Henlein. Pourquoi? Parce que seul un régime fasciste brisera le mouvement ouvrier, interdira les grèves, verrouillera les salaires en laissant grimper les prix industriels et les "opportunités" bancaires, donc les profits des grands groupes. Cette orientation s'accentue avec la crise. Elle donne au capital français, qui adore le fascisme italien (et adorera Franco), les yeux de Chimène pour le nazisme, en toute connaissance de cause sur son bellicisme, son racisme et son antisémitisme criminels.

Le Front populaire est quelquefois accusé d'avoir précipité la défaite de la France face à l'Allemagne. Qu'en est-il?

Annie Lacroix-Riz: La caractéristique remarquable de l'entre-deux-guerres pour l'impérialisme français, et dans une certaine mesure aussi, pour l'impérialisme britannique, c'est que, de manière plus caricaturale qu'avant la Première Guerre Mondiale, de très fortes rivalités inter-impérialistes sont compensées par la tendance des impérialismes affaiblis ou dominés de céder aux exigences de l'impérialisme dominant. La Grande-Bretagne se soumet à l'impérialisme américain, et à l'impérialisme allemand aussi, comme la France. Londres tente le compromis européen jusqu'au bout, et sur l'Autriche, sur la Tchécoslovaquie après l'avoir fait sur l'Espagne (zone d'intérêts décisifs). Ce qui fait reculer l'impérialisme britannique, c'est qu'il n'arrive pas à trouver sur la question coloniale de compromis qui permettrait aux Allemands, comme il le leur avait déjà proposé (en vain) en 1912, de s'emparer des empires français, belge, portugais, en épargnant l'anglais. Le Reich veut tout. C'est ce qui explique que, à partir du printemps 1938, Anthony Eden qui a été un grand apaiseur jusqu'alors, se retourne (comme Churchill avant lui) et abandonne le Foreign Office à Halifax, symbole de l'aplatissement. C'est la ligne Chamberlain-Halifax qui, du côté français, l'emporte du début à la fin.

Entretien réalisé par Jérôme Skalski

Lire aussi: 

 

Venise Gosnat, alias Georges, inter-régional responsable de la résistance communiste en Bretagne (décembre 1940- décembre 1942)

Leur drôle de guerre contre les rouges: septembre 1939- mai 1940: La persécution des communistes par le gouvernement Daladier après le pacte germano-soviétique (Pierre Juquin, Aragon un destin français, tome 2)

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1 mars 2018 4 01 /03 /mars /2018 07:44
Education: les lycéens veulent l'égalité d'accès aux études: appel à une journée d'action le 15 mars (L'Humanité)

L’intersyndicale lycéenne appelle à une journée d’action le 15 mars prochain, face aux réformes du bac et de l’accès à l’université, qui risquent de creuser les inégalités,

Va-t-on vers un système d’accès à l’enseignement supérieur de plus en plus inégalitaire ? C’est la conviction des organisations lycéennes réunies hier en intersyndicale pour appeler à une journée d’action le 15 mars prochain. Dans leur ligne de mire, la réforme du bac et la loi sur l’orientation et la réussite des étudiants (ORE), qui introduit une forme de sélection à l’entrée à l’université par le biais des prérequis exigés par la plateforme d’inscription Parcoursup. « Cette modification du bac s’emboîte dans Parcoursup puisqu’elle introduit au niveau du lycée des spécialités qui seront ensuite nécessaires à l’entrée à l’université », détaille Thomas Le Corre, porte-parole du Syndicat général des lycéens (SGL).

Le problème, c’est que ces spécialités ou options ne seront pas également accessibles à tous. « Parce qu’elles sont coûteuses à mettre en place et qu’il n’y a pas de moyens spécifiques dégagés, certaines options qui seront valorisées par des universités ne seront accessibles que dans les lycées cotés des centres-villes, voire dans le privé. Cela va créer une inégalité avec les lycéens des établissements ruraux et des périphéries, qui risquent de se trouver face à des options limitées au moment de leur entrée à l’université », renchérit Lisa Belabed, porte-parole de la Fidl. Autre sujet d’inquiétude, la multiplication des options « risque de favoriser les élèves qui seront les mieux armés, ceux dont les parents vont comprendre le système et seront à même de faire des choix stratégiques pour aller vers les filières les plus cotées », s’alarme Lina N’gazi, secrétaire nationale de l’Union nationale lycéenne-Syndicale et démocratique (UNL-SD).

Tous appellent à une journée d’action pour empêcher la mise en application de la loi et regrettent l’occasion perdue par le gouvernement : « C’est une réforme qui ne change pas le système, ne réfléchit pas sur la pédagogie et ne cherche pas à faire progresser les élèves, résume Clara Jaboulay, présidente de l’Union nationale lycéenne (UNL). Son seul objectif, c’est de savoir comment on va sélectionner à l’entrée à l’université. »

Journaliste rubrique Société
Education: les lycéens veulent l'égalité d'accès aux études: appel à une journée d'action le 15 mars (L'Humanité)

Parcours sup: le sénateur communiste Pierre Ouzoulias dénonce un "coup d'Etat insupportable" (Public Sénat)

Réforme des universités et du lycée- entretien avec Glenn Le Saout, un étudiant engagé, président de la FIDL Bretagne

 

Universités, Parcours-Sup: la sélection faute de moyens, les jeunes méritent mieux ! (PCF)

Mobilisation plan étudiants le jeudi 15 février: c'est des moyens dont nos facs ont besoin! (UEC, Mouvement de la Jeunesse Communiste de France): tous concernés, tous mobilisés!

Les jeunes méritent mieux !

Un nouveau dispositif d’inscription dans l’enseignement supérieur se met en place, Parcours sup le Parlement n’a pas encore adopté la loi sur « l’orientation et la réussite des étudiants » que le gouvernement entend l’appliquer ou plutôt l’imposer aux universités, aux enseignants-chercheurs aux étudiants et aux lycéens.

Or, il y a bien urgence à s’occuper de l’enseignement supérieur : sa situation est catastrophique. En témoigne le « tirage au sort » des bacheliers pour s’inscrire dans les filières de leur choix, qui a légitimement suscité l’indignation cet été. Sélection sociale effrénée, échecs importants en licence, formations tronquées faute de moyens, budgets notoirement insuffisants, concurrence stérile entre filières et établissements, restructurations incessantes renforçant les pouvoirs centraux, démocratie universitaire vidée de son sens… à cette situation, il faut une réponse de progrès social, scientifique, pédagogique.

Il faut une ambition : que chacun puisse développer au maximum ses capacités, que les connaissances soient largement diffusées et appropriées dans la société, que le pays se dote des plus hautes qualifications pour ses travailleurs.

Ce n’est pas celle du président des riches et de son gouvernement. En permettant à toutes les filières de trier les bacheliers, en prétendant ouvrir la possibilité de parcours personnalisés mais sans moyens nouveaux pour les universités, en prévoyant d’imposer une orientation non choisie aux étudiants recalés sur leurs vœux, le projet de loi va entériner les inégalités dans le supérieur. Il n’organisera dans les faits qu’un immense désordre et instaurera des obstacles institutionnels nouveaux à l’accès à l’enseignement supérieur dont le baccalauréat doit rester le premier grade et la seule condition d’accès. Cette loi accélérerait la mise en place du système « à plusieurs vitesses » qui est le projet de la droite et du MEDEF depuis longtemps.

Avec ce projet, quelques universités mieux loties attireraient les « meilleurs » éléments, tandis que les autres seraient condamnées à accompagner les plus défavorisés... à moyens constants voire en baisse alors que le nombre d’étudiants ne cesse de grandir. Avec comme conséquences inéluctables,  la dégradation du service public national d’enseignement supérieur et de recherche.

Cette politique remet profondément en cause le mouvement initié dans la deuxième moitié du XXe siècle de démocratisation de l’accès à l’enseignement supérieur. Les gouvernements et les instances européennes ont prétendu bâtir une société de la connaissance, en fait leurs choix réels restreignent sa diffusion, frappant particulièrement les enfants des milieux populaires, déjà largement sous représentés dans le système scolaire et le supérieur. La loi sur la sélection à l’université participe de la même logique que celle de la réforme du baccalauréat, individualisant les parcours et triant les jeunes dès leur plus  jeune âge. Elle s’insère dans le projet global que mène Macron d’adaptation aux besoins du capital financier.

Construire une alternative à cette politique est à l’ordre du jour pour tous les progressistes

Garantir le libre accès à l’université à tous les bacheliers, promouvoir et développer les capacités humaines sans limites a priori, assurer les moyens financiers et humains nécessaires à cette ambition… c’est nécessaire et possible !

Notre ambition progressiste vise à élever le niveau de formation et de qualification dans toute la société, en partageant les savoirs dans l’enseignement supérieur, et en libérant la recherche des logiques de rentabilité à court terme. Elle viserait à former de façon exigeante des jeunes qualifiés, des citoyens éclairés et des individus émancipés. Cette politique doit se baser sur un service public national, seul à même de promouvoir une ambition commune sur le long terme.

Les communistes mettent à la disposition de toutes les forces, de toutes les personnes engagées dans la lutte contre ce projet de loi et pour la transformation de l’enseignement supérieur leurs réflexions, leurs questionnements et les propositions construites au fil des luttes et par les parlementaires communistes. Ils vous proposent que nous rencontrions et tracions ensemble les voies de l’alternative, pour substituer aux logiques libérales celle de la défense et du développement des biens communs.

C’est tous ensemble que nous pourrons construire un nouvel avenir d’émancipation humaine

Marie-George Buffet: A l’Assemblée nationale, avec les députés communistes Marie-George Buffet : « je voterai résolument contre ce texte qui, loin d’apporter des solutions pragmatiques aux difficultés de l’université, impose une vision régressive de l’enseignement supérieur sans s’attaquer aux véritables problèmes».

Marie-George Buffet: A l’Assemblée nationale, avec les députés communistes Marie-George Buffet : « je voterai résolument contre ce texte qui, loin d’apporter des solutions pragmatiques aux difficultés de l’université, impose une vision régressive de l’enseignement supérieur sans s’attaquer aux véritables problèmes».

L’argent existe et les moyens pour une telle politique existent et doivent être mobilisés.

• 110 000 étudiants nouveaux dans les 5 dernières années et le budget par étudiant a baissé de 10%.

 Il faudrait au minimum un milliard d’euros pour l’augmentation du nombre d’étudiants chaque année.

 Cadeaux faits aux ultra-riches : 3 milliards € de baisse de leur Impôt sur la fortune.

 Crédit Impôt Recherche : 5 milliards €.

 CICE, impôt sur les sociétés… des cadeaux aux entreprises par milliards sans effet sur l’emploi et l’économie

 évasion fiscale : 80 milliards €..

 

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1 mars 2018 4 01 /03 /mars /2018 07:29
Voilà un dirigeant de gauche européen qui conjugue l'élégance morale, les principes politiques progressistes, le refus du libéralisme et de l'austérité et la capacité de rassemblement et d'invention

Voilà un dirigeant de gauche européen qui conjugue l'élégance morale, les principes politiques progressistes, le refus du libéralisme et de l'austérité et la capacité de rassemblement et d'invention

THOMAS LEMAHIEU
MARDI, 27 FÉVRIER, 2018
L'HUMANITÉ

Dans un discours attendu, le dirigeant travailliste demande que son pays puisse rester dans l’union douanière. Mais, afin d’éviter toute dérégulation, il réclame un droit de regard sur les éventuelles négociations des accords de libre-échange.

Accusé depuis des mois d’entretenir l’ambiguïté sur la sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne (Brexit), Jeremy Corbyn, le dirigeant du Parti travailliste, a tracé, hier, dans un discours particulièrement attendu à Coventry, une voie bien différente de celle de Theresa May. Coincée par les éléments les plus acharnés du Parti conservateur, sur une ligne ouvertement ultralibérale avec des relents xénophobes, la première ministre peine à définir une position claire et nette face aux 27 États membres de l’UE. Mais au sein du gouvernement, ses ministres multiplient les ballons d’essai : en quittant le marché unique et l’union douanière, ils entendent mettre fin, au nom de leur lutte contre l’immigration, à la liberté de circulation des personnes, mais pas à celle des capitaux et des biens, et lancer le pays dans une concurrence fiscale effrénée avec ses voisins. Quand David Davis, par exemple, promet la main sur le cœur que le Brexit n’ouvrira pas une « dystopie à la Mad Max », difficile de ne pas entendre, derrière la dénégation un peu grossière, les gargouillis des estomacs des traders à la City ! Idem quand son collègue chargé du commerce promet de négocier des traités de libre-échange, dérégulant plus encore le marché du travail et ouvrant à la concurrence les derniers services publics, comme la santé !

Pour les travaillistes, désormais solidement amarrés à la ligne antilibérale et anti-austérité qui a fait le succès de Jeremy Corbyn lors des dernières élections législatives, il faut sortir des « fantaisies idéologiques » des conservateurs. Leur dirigeant plaide pour que le résultat du référendum soit respecté, que le Royaume-Uni sorte bel et bien de l’Union européenne, mais en restant dans l’union douanière. C’est, selon Corbyn, la seule manière d’éviter le retour, redouté vingt ans après le début du processus de pacification, d’une frontière divisant l’Irlande entre le Sud et le Nord et d’assurer que l’industrie britannique n’ait pas à payer de droits de douane… À ses yeux, c’est aussi une manière de conjurer toutes les tentations d’abaisser, pour des raisons de dumping, les normes en vigueur en matière de droits sociaux et de protection de l’environnement.

Loin des conservateurs, qui, n’imaginant le monde que comme une vaste zone de libre-échange, se rêvent déjà en promoteurs de nouveaux accords comme le traité transatlantique (TTIP), les travaillistes sont prêts, dit leur leader, à renoncer à une souveraineté de ce type sur les négociations internationales, mais ils réclament qu’un Royaume-Uni demeurant membre de l’union douanière soit associé, sous une forme encore à inventer, aux éventuelles négociations commerciales entre l’Union européenne et d’autres interlocuteurs.

« Ils essaient de transformer le pays en un paradis fiscal »

À rebours des zélateurs de ces accords, tant dans l’Union européenne qu’au Royaume-Uni, le but affiché par Corbyn est d’empêcher précisément toute course à la dérégulation et à de nouvelles privatisations. « Les conservateurs veulent utiliser le Brexit pour pousser les feux sous la fusée des insécurités et des inégalités inhérentes à notre système économique actuel, accuse Jeremy Corbyn. En nous entraînant dans une spirale de dérégulation, ils essaient de transformer la Grande-Bretagne en un paradis fiscal avec des bas salaires, des droits rognés et des services publics réduits à néant par les coupes budgétaires. » Non sans avoir insisté sur le sort des ressortissants des pays de l’UE au Royaume-Uni, toujours dans l’incertitude près de deux ans après le référendum sur le Brexit, Corbyn se veut très clair sur l’immigration. « Ce ne sont pas les migrants qui tirent les salaires vers le bas, ce sont les mauvais patrons qui taillent dans les payes et le mauvais gouvernement qui organise l’opposition entre les travailleurs et qui veut affaiblir les organisations syndicales. »

Rubrique Monde
Face aux utopies ultralibérales de May, Corbyn trace la voie d'un autre Brexit (Thomas Lemahieu, L'Humanité, 27 février 2018)
Face aux utopies ultralibérales de May, Corbyn trace la voie d'un autre Brexit (Thomas Lemahieu, L'Humanité, 27 février 2018)
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1 mars 2018 4 01 /03 /mars /2018 07:25
Communiqué du collectif Liberté pour Salah Hamouri du pays de Morlaix (28 février 2018)

Communiqué du collectif « Liberté pour Salah Hamouri » du Pays de Morlaix

Incarcéré depuis le mois d’août 2017 sans qu’aucune charge ne soit retenue contre lui, l’avocat franco-palestinien, Salah Hamouri vient de voir sa détention administrative prolongée de quatre mois renouvelables, par le ministre israélien de la Défense, Avigdor Liberman.

Le gouvernement israélien poursuit dans la voie de l’injustice la plus absolue, méprisant les nombreuses voix qui en France comme à l’internationale réclament la libération de notre compatriote. Parfaitement inacceptable, cette décision renvoie aussi les autorités françaises à leurs responsabilités.

Comment expliquer que la France ait obtenu la libération du journaliste Lou Bureau emprisonné par la Turquie et qu’elle ne puisse exiger du gouvernement israélien qu’il libère Salah Hamouri ?

L’impression que pèse un « deux poids, deux mesures », dès qu’il est question d’Israël et qu’au nom de l’illusoire nécessité de maintenir le dialogue, la France ne fait que conforter la politique extrémiste des dirigeants israéliens persiste. Défendre Salah Hamouri, citoyen français et Palestinien de Jérusalem, demande d’exiger avec force sa libération, et pas simplement de « l’espérer » timidement comme le faisait encore le ministre des Affaires étrangères lors d’un récent débat à l’Assemblée nationale.

Le collectif « Liberté pour Salah » du Pays de Morlaix, soutenu par 19 associations, partis, syndicats et réseaux de solidarité reste plus que jamais solidaire de Salah Hamouri et de sa famille.

Il appelle les citoyenn-es et les élu-es à renforcer la pression pour qu’enfin le gouvernement français et le Président Macron agissent de manière résolue pour obtenir la libération de Salah Hamouri.

Des représentant-es du collectif seront de nouveau sur le marché dès samedi matin à partir de 10h 30 pour continuer le travail d’information de l’opinion publique.

Quand le droit et la justice sont bafoués d’une telle manière, il convient que les citoyen-nes se fassent entendre.

http://libertepoursalah.fr

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1 mars 2018 4 01 /03 /mars /2018 07:19
Jeudi 1er mars, 18h place de la Résistance à Quimper, 18h: Mobilisation pour le respect du droit d'asile et contre le projet de loi asile-immigration Collomb (LDH)

Pour le droit d'asile, rassemblement jeudi 1er mars à 18h place de la Résistance à Quimper

 

Communiqué de la section du pays de Quimper du PCF

 

Les communistes du pays de Quimper appellent celles et ceux qui ont à cœur l’humain et la solidarité, à participer au rassemblement organisé par la Ligue des Droits de l’Homme jeudi 1er mars à 18h place de la Résistance à Quimper pour le respect du droit d’asile.

La loi « Asile-immigration » présentée la semaine dernière par le ministre de l’Intérieur Gérard Collomb, met en effet gravement en cause les droits humains et les valeurs dont se réclame notre pays.

Le jour où ce projet de loi a été dévoilé, suscitant de toute part des réactions indignées, était celui de la commémoration de l’exécution de Missak Manouchian et des membres du réseau de « L’affiche rouge », ces « étrangers et nos frères pourtant », immortalisés par Aragon, qui ont donné leur vie pour la libération de la France de l’occupation nazie. Tout un symbole...

Déjà aujourd’hui la situation des migrants en France est préoccupante : l’accès au droit d’asile est fortement restreint par les procédures de Dublin, la protection des mineurs isolés n’est pas assurée, contrairement aux conventions internationales sur les droits des enfants, et la machine à expulser tourne à plein : pour la seule année 2016 notre pays a expulsé à lui seul autant de migrants que l’Allemagne et la Grande-Bretagne réunies ! Quant aux bénévoles qui leur apportent une aide humanitaire, ils sont poursuivis pour délit de solidarité, et l’action des associations est entravée.

Il y a en France proportionnellement à la population 2 fois moins de réfugiés qu’en Suisse, 4 fois moins qu’en Suède, 50 fois moins qu’au Liban. Et que dire de l’Italie ou de la Grèce !

Pourtant le projet de loi gouvernemental vise à durcir encore plus leurs conditions d’accueil.

Tout y est prévu pour accroître le nombre de déboutés du droit d’asile, amplifier les expulsions et les accélérer : réduction des délais pour le dépôt de la demande d’asile, certains pouvant même être déboutés avant que la cour chargée d’examiner leur dossier ait pu le faire, réduction à 15 jours du délai de recours, alors qu’il est de 2 mois pour un justiciable ordinaire, non-obligation de notifier la décision par courrier recommandé...

Des mesures de privation de liberté renforcées, jusqu’à 135 jours en centre de rétention, sont mises en place à l’égard de personnes n’ayant commis aucun délit, dont le seul tort est d’avoir cherché en France, pays réputé comme étant celui des Droits de l’Homme, un refuge contre la guerre, les persécutions, la misère...

Est-ce cela l’équilibre entre fermeté et humanité dont se vante Emmanuel Macron ?

Cette loi est indigne de notre pays, elle doit être retirée.

C’est l’exigence que porteront les parlementaires communistes lors de la discussion du projet de loi, pour un droit des étrangers et de l'asile à la hauteur des valeurs humanistes de solidarité et de fraternité de notre pays.

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1 mars 2018 4 01 /03 /mars /2018 07:03
SNCF - Cette mort sur ordonnances - Jean-Emmanuel Ducoin, l'Humanité, mercredi 28 février
Cette mort sur ordonnances...
 
 
Toute contre-réforme de choc conduisant à une grande marche arrière des droits est précédée et accompagnée par une propagande massive...
 
«Privilégiés»: les mots de la doxa libérale ont la vie dure et collent comme le sparadrap du capitaine Haddock. Nous avons l’habitude des campagnes mensongères, qui polluent l’espace public. Martelez, il en reste toujours quelque chose… Les médias dominants et toute la cohorte des experts afférents s’en donnent à cœur joie pour dire leur mépris des salariés de la SNCF, au fil de leur credo qu’ils répètent comme les prières d’un chapelet. C’est bien sûr «à cause» des syndicats et du «statut» des employés que la SNCF va mal. Les voilà donc, ces «privilégiés» de cheminots, agités comme des chiffons rouges. Cela ne vous rappelle rien? Que n’entend-on pas à propos des «salauds de pauvres», des «chômeurs fainéants», des «grévistes preneurs d’otage», des «fonctionnaires assistés»? Trois décennies de matraquage idéologique et de diffusion en boucle d’un catéchisme antisocial. Le but: obtenir la résignation du plus grand nombre. Toute contre-réforme de choc conduisant à une grande marche arrière des droits est précédée et accompagnée par une bataille des représentations, bref, une propagande massive qui vise à préparer les esprits au démantèlement des politiques sociales et à la destruction progressive du modèle français de solidarité…
 
SNCF: cette mort sur ordonnances… La mise en cause du rail tricolore est emblématique de la méthode employée pour porter un coup décisif à un grand service public. Une privatisation qui ne dit pas son nom, doublée d’un autoritarisme politique sans bornes. L’exécutif ne manque pas d’air: le Code du travail, la formation professionnelle, l’apprentissage, l’assurance-chômage, l’hôpital, l’immigration, le baccalauréat, la SNCF, bientôt la justice, l’audiovisuel, la Constitution, etc. Macron, c’est la version française du fameux Tina (There is no alternative) de Thatcher. La feuille de route est bel et bien une attaque globale d’ampleur historique. La riposte des syndicats de la SNCF s’annonce à la hauteur de l’enjeu. La bataille de l’opinion en faveur des services publics, elle, commence à peine en vérité. Elle ne sera pas moins décisive.
 
[EDITORIAL publié dans l’Humanité du 28 février 2018.]
SNCF - Cette mort sur ordonnances - Jean-Emmanuel Ducoin, l'Humanité, mercredi 28 février

Lire aussi dans l'Humanité du 28 février: 

Les syndicats "preneurs d'otage": 

Les mots ont un sens. C'est le sens de l'échange, lundi, sur le plateau de David Pujadas à LCI, entre le journaliste François de Closets et le syndicaliste de SUD rail Bruno Poncet. 

Le premier a attaqué avec la vieille rengaine habituelle: "Quand on pense que les cheminots conserveront leur statut, c'est scandaleux de même envisager de prendre dans ces conditions les Français en otage". 

Le syndicaliste a répondu calmement, sur la sécurité que représente le statut des cheminots pour les usagers. Avant de reprendre:

"N'employez jamais le mot de preneur d'otage. Vous ne savez pas ce que c'est. Moi, j'ai été pris en otage pendant une heure et demie, je peux vous garantir que ça n'a rien à voir avec (le fait) d'être bondé dans une voiture de voyageurs quand il y a une grève", a t-il lancé. Et d'ajouter: "Moi j'ai été au Bataclan. Donc, moi, aujourd'hui, les discussions de preneurs d'otage et de terroristes, je sais ce que c'est. Alors, autour de cette table, où on parle de statut de cheminot, je trouve que c'est un peu déplacé"

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1 mars 2018 4 01 /03 /mars /2018 06:54
Quinze jours de grève pour défendre le droit d'asile (Michel Henry, Médiapart - 28 février 2018)
Quinze jours de grève pour défendre le droit d’asile
 PAR MICHEL HENRY

La Cour nationale du droit dasile est chargée dexaminer les recours des demandeurs déboutés par lOfpra. En grève depuis le 13 février pour l’amélioration de leurs conditions de travail, ses agents sopposent aussi au projet de loi asile et immigration, qui ne ferait que renforcer la logique comptable qui les accable. 

 

Ils ne veulent plus de la « justice expéditive » dans laquelle la Cour nationale du droit dasile (CNDA) a, selon eux, basculé. Une dérive que le futur projet de loi sur lasile et limmigration, avec ses délais de recours raccourcis, devrait encore aggraver. Cest pourquoi les agents de la CNDA sont en grève depuis le 13 février (lire leur communiqué), soutenus par les avocats. Pour linstant, le mouvement na pas atteint ses objectifs, notamment celui de faire baisser la charge de travail.

Chargée dexaminer les recours des demandeurs dasile déboutés par lOffice français de protection des réfugiés et des apatrides (Ofpra), la CNDA est la juridiction administrative la plus rapide et la plus « productive » de France, rappellent les grévistes. En 2017, elle a rendu 47 814 décisions (5 000 de plus quen 2016), dans un délai moyen de cinq mois et six jours, soit deux fois plus vite quen 2010.

Les grévistes dénoncent un système entré depuis la loi de 2015 dans une « logique comptable » qui vise avant tout « le raccourcissement des délais de jugement ». La Cour, qui siège à Montreuil (Seine-Saint-Denis), a ainsi organisé lan dernier 3 607 audiences, dont chacune a traité 13 affaires (voir son rapport annuel).

Selon lintersyndicale, les rapporteurs qui y préparent les dossiers sont « presque à 90 % des contractuels » en CDD de trois ans renouvelables. Ils font valoir que cest la seule juridiction à fonctionner avec des contractuels en grande majorité, « comme si des policiers étaient trois ans en CDD puis partaient ailleurs », déplore Delphine Lecombe, de lintersyndicale SIPCE-CGT-FO, qui dénonce « une juridiction OVNI ».

« Notre responsabilité est importante », relève Delphine Lecombe, qui affirme gagner 1 790 euros net avec près de trois ans dancienneté. Les rapporteurs sestiment pris dans une politique du chiffre qui nest plus tenable, étant soumis à un objectif annuel de 325 dossiers quils voudraient voir baisser à 275. Cette cadence les amène à rédiger « deux à trois rapports par jour », qui doivent analyser la cohérence interne du récit du demandeur et présenter létat du danger quil court dans son pays dorigine. Sils ne se prononcent plus sur le sort à réserver à la demande, les rapporteurs peuvent laisser poindre leur préférence, mais les juges ne les suivent pas forcément. La CNDA a délivré l’an dernier 8 006 décisions de protection, soit 16,8 %. Les autres recours ont été rejetés.

Agents administratifs, les rapporteurs réclament dêtre intégrés à la formation de jugement, avec la création dun corps spécifique. Pour linstant, ils assistent au délibéré et rédigent le projet de décision mais nont aucun pouvoir. « Il doit être mis fin à cette situation baroque qui place le véritable “expert” du dossier sans voix décisionnaire », estiment les grévistes. Pour eux, il importe aussi de « stabiliser » les effectifs des rapporteurs, « dont lancienneté moyenne à la Cour nexcède pas deux ans », et de sinterroger sur la « qualité » des jugements rendus. La plupart des 287 juges officiant à la CNDA sont des vacataires venus dautres juridictions, dont « une partie na jamais exercé dans le domaine de lasile auparavant ».

Daprès les grévistes, un quart du personnel (composé de 400 agents environ, dont la moitié de rapporteurs) suit le mouvement, ce qui, selon eux, permet dempêcher la grande majorité des audiences. Mais leur direction  – qui na pas répondu à Mediapart – jouerait le « pourrissement ». Mardi soir 27 février, le mouvement a été reconduit pour 24 heures. « Le dialogue se poursuit », affirme le Conseil d’État, qui chapeaute la CNDA, en précisant que « sept réunions de travail » ont eu lieu avec les syndicats.

Lautre cible du mouvement, cest le projet de loi asile et immigration. Il accroîtrait la tension, en imposant « un délai moyen de traitement global de six mois » au total pour lOfpra et la CNDA, ce qui laisserait « seulement quatre mois, ou moins » à la Cour dappel pour étudier les dossiers. Or, sans cela, la CNDA est déjà sous pression. En 2017, elle a enregistré 53 581 recours, soit une augmentation de 34 % en un an.

Parallèlement, toujours avec ce projet qui multiplie les obstacles à lasile, le délai pour déposer un recours après un rejet de l’Ofpra passerait d’un mois à quinze jours, ce qui « revient clairement à nier le droit de recours » des demandeurs d’asile, dénonce un rapporteur (lire sa lettre ouverte dans le Club de Mediapart ).

Autre objet dinquiétude, près de 30 % des décisions de la CNDA sont rendues sur simple ordonnance : pour ces rejets, aucune audience na eu lieu, les juges estimant les dossiers insuffisants. Ce taux augmente dannée en année. Il a presque doublé depuis 2014, où il était de 17 %, selon lintersyndicale. Cette évolution la préoccupe, tout comme elle préoccupe les avocats du réseau Elena, spécialisés en droit dasile, qui, très remontés contre le projet de loi, sont également en grève.

« Déjà, tout est fait pour que les demandeurs ne viennent plus sur le territoire français, assure Me Olivier Chemin, qui préside Elena. Et sils ont accès tout de même à la procédure, on va juger de plus en plus vite, souvent par ordonnance. » Il craint des cadences de plus en plus « infernales », avec des délais de recours réduits. « On est une terre dasile et on fait tout pour que les demandeurs ne viennent pas déposer leur dossier ! », déplore lavocat.

Me Chemin a signé une lettre à Emmanuel Macron dans Libération pour dénoncer les régressions que provoquerait la future loi, avec cette conséquence : « En multipliant les obstacles à l’exercice du droit d’asile, vous fabriquez par milliers des “rejetables”, des “fantômes”, ceux-là mêmes dont vous souhaitez pourtant vouloir maîtriser le flux. »

 

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