C’est un « miracle » embarrassant pour Bruxelles car il repose sur une politique anti-austérité totalement contraire à la doxa économique imposée par la technostructure européenne aux états membres.
Et si les résultats spectaculaires obtenus par le gouvernement de gauche d’Antonio Costa depuis bientôt trois ans se poursuivent, c’est tout le référentiel européen inspiré du modèle allemand qui pourrait s’en trouver bouleversé.
Discrètement donc, car pour la Commission européenne, citer Lisbonne en exemple reviendrait à se désavouer, le Portugal accomplit des prouesses économiques là où la plupart des pays de la zone euro échouent ou touchent aux limites du système.
Le chômage a reculé de 11,1 % à 7,9 %
au début de l’année
Quelques chiffres d’abord : entre 2016 et 2018, le pays a ramené son déficit budgétaire de 2,1 % à 1,5 % de son PIB (3,2 % attendus en France fin 2018). Sur la même période, le taux de chômage a reculé de 11,1 % à 7,9 % au début de l’année, et devrait s’établir à 7 % en 2019.
En 2017, le Produit intérieur brut (PIB) du Portugal a progressé de 2,5 %, contre 1,9 % pour la zone euro et seulement 1,5 % de croissance pour la France. Et que dire de la réindustrialisation de la péninsule, dans les secteurs du textile, de la chaussure ou encore de l’automobile ?
Après avoir investi dans les pays de l’est, à la recherche du main-d’oeuvre bon marché, les industriels relocalisent au Portugal qui garantit une production de qualité et un coût du travail toujours avantageux.
Une coalition de gauche au pouvoir
Pour relancer l’économie, le socialiste Antonio Costa, soutenu par le Parti communiste, les écologistes et la gauche radicale portugaise, a fait le pari d’une politique en rupture totale avec les recommandations de Bruxelles.
C’était d’ailleurs l’une des promesses de la coalition lorsqu’elle était en campagne : « La politique d’austérité suivie ces dernières années a eu pour conséquence une augmentation sans précédent du chômage avec des effets sociaux dévastateurs sur les jeunes et les citoyens les moins qualifiés, ainsi que les familles et les milliers de Portugais au chômage. Elle a été aussi associée à une dévalorisation de la dignité du travail et des droits des travailleurs », pouvait-on lire dans le programme de la gauche, alors dans l’opposition.
Hausse du SMIC et des retraites, renforcement des droits du Travail
A peine élu, le nouveau gouvernement a tenu ses engagements anti-austérité et pris le contre-pied du modèle économique soutenu par Bruxelles.
Le salaire minimum (SMIC) est passé de 530 € à 557 € en 2017 et doit encore être porté à 600 € en 2019. Les pensions de retraite, comme les allocations familiales, ont également été augmentées, tandis que les impôts sur les bas salaires ont été réduits. Le programme de privatisation de services et d’infrastructures mis en œuvre par la droite a été stoppé, tout comme le processus de réduction des salaires des fonctionnaires dont le temps de travail devrait entre porté à 35 heures hebdomadaires.
Les droits du travail ont également été renforcés.
Ni austérité, ni populisme
Après l’avoir longtemps subi, comme la Grèce, l’Espagne ou l’Italie, en échange des prêts du FMI, le Portugal s’est libéré du modèle économique imposé par la Commission européenne. Et en à peine deux ans, il a apporté la preuve qu’entre le système austéritaire modélisé par Bruxelles et la chimère populiste, une troisième voie existe.
Soutenue par un bond remarquable de son tourisme, comme si la chance ne souriait qu’aux audacieux, sa politique de relance de la demande par la hausse du pouvoir d’achat et de la protection des salariés, fonctionne à haut rendement...