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27 août 2018 1 27 /08 /août /2018 03:34

 

Sergueï Oudaltsov, coordinateur de l’organisation russe « Front de Gauche » et membre actif du comité de campagne du candidat de gauche à la Mairie de Moscou, Vadim Koumine , a été condamné à trente jours de détention administrative pour avoir pris part à une manifestation autorisée contre le projet de « réforme » des retraites du gouvernement russe. Il a depuis entamé une grève de la faim. Cette arrestation arbitraire intervient dans le contexte de mobilisation croissante contre le démantèlement du système de retraites qui restait un des derniers héritages sociaux soviétiques, alors qu’une journée de mobilisation nationale se prépare pour le 2 septembre. Sergueï Oudaltsov se retrouve également en prison alors que la campagne pour les élections municipales de Moscou, qui auront lieu le 9 septembre, voit une candidature inédite de la gauche russe, après des primaires, en la personne de Vadim Koumine, soutenu par le Parti Communiste de la Fédération de Russie, le Front de gauche et des militantes et militants de gauche.

Le PCF exige la libération immédiate de Sergueï Oudaltsov. Il apporte également son soutien fraternel aux militants communistes et de gauche, aux organisations politiques et sociales, aux citoyennes et citoyens russes qui se mobilisent, partout dans le pays, contre la « réforme » des retraites que cherche à imposer le gouvernement Poutine-Medvedev. Il souhaite enfin que la candidature de Vadim Koumine à la Mairie de Moscou rencontre le soutien populaire et citoyen le plus haut le 9 septembre.

 

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26 août 2018 7 26 /08 /août /2018 05:32

La rentrée ouvre la saison budgétaire. C’est toujours un moment difficile pour l’exécutif : celui-ci a invariablement promis des hausses de dépenses pour tel ou tel sujet prioritaire et des baisses de prélèvements à telle ou telle catégorie sociale, le tout en réduisant bien entendu les déficits. C’est au moment d’établir le budget pour l’année suivante qu’il faut trancher ces contradictions.

Cette année, l’équation est encore compliquée pour Emmanuel Macron par le net ralentissement de l’activité économique enregistré au premier semestre et les fortes incertitudes qui pèsent sur les prochains mois dans un contexte international de plus en plus tendu.

A ce stade tous les arbitrages concernant le budget de l’Etat et celui de la Sécurité sociale ne sont pas encore rendus, mais le gouvernement a d’ores et déjà transmis au Parlement en juillet dernier les enveloppes budgétaires maximales prévues pour 2019 pour les différentes missions de l’Etat

Une forte austérité programmée

Niveau des principales enveloppes du budget de l’Etat pour 2019 (en milliards d’euros) et évolution par rapport à 2018 en volume et par habitant (en %)

BUDGET 2019  - LE GOUVERNEMENT PROGRAMME UNE FORTE AUSTERITE (ALTERNATIVES ECONOMIQUES -  GUILLAUME DUVAL – 22 AOUT 2018)

Celles-ci font apparaître qu’une forte austérité est bien programmée par le gouvernement avec une baisse moyenne de 1,4 % en volume et par habitant des budgets des différents ministères, si on prend en compte une inflation de 1,8 % sur l’année et une hausse de 0,4 % de la population.

L’exécutif a prévu des baisses drastiques des budgets consacrés au travail et à l’emploi, à l’agriculture, au logement, à la cohésion territoriale et aux relations avec les collectivités locales

L’exécutif a prévu en particulier des baisses drastiques des budgets consacrés au travail et à l’emploi, à l’agriculture ou encore au logement, à la cohésion territoriale et aux relations avec les collectivités locales.

Pas de quoi favoriser l’indispensable mutation de notre modèle agricole pour qu’il devienne moins destructeur de l’environnement et moins menaçant pour la santé des Français. Pas de quoi non plus limiter la grave crise du logement qui touche toujours les jeunes et les plus pauvres dans les grandes agglomérations. Pas de quoi enfin limiter non plus les inégalités territoriales dont l’aggravation menace la cohésion du pays. 

Certes quelques autres budgets augmentent significativement comme celui de la solidarité : malgré la fameuse sortie sur le « pognon de dingue » dépensé pour les pauvres, le gouvernement privilégie donc finalement les aides sociales plutôt que le soutien à l’emploi dans son budget. Comprenne qui pourra…

Le gouvernement prévoit d’amputer de 2 milliards d’euros le budget de l’emploi pour accroître d’un milliard d’euros le budget de la solidarité et financer le plan de lutte contre la pauvreté

Il prévoit en effet d’amputer de 2 milliards d’euros le budget de l’emploi, avec une nouvelle réduction drastique des emplois aidés, pour accroître d’un milliard d’euros le budget de la solidarité afin de financer notamment le tant attendu plan de lutte contre la pauvreté.

Outre que le compte n’y est pas dans ce jeu de vases communicants, on peut légitimement redouter que les très nombreux chômeurs de longue durée, désormais privés d’emplois aidés, s’en sortent en réalité plus mal demain qu’hier malgré le coup de pouce donné au plan pauvreté pour les assister davantage…

La justice, la défense ou encore l’aide au développement verront également leur enveloppe s’accroître, mais, malgré tous les beaux discours sur la priorité à l’éducation, celles de l’éducation nationale et de l’enseignement supérieur vont baisser au contraire en termes réels l’an prochain. De même, malgré toutes les belles paroles, le budget de l’écologie continuera de stagner l’an prochain en termes réels… 

 

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26 août 2018 7 26 /08 /août /2018 05:30

 

Son nom figure sur les enseignes de nombreux salons de coiffure en France et à l’étranger, mais ses profits ont été rassemblés bien à l’abri des impôts, sur des comptes en Suisse.

Grand patron de l’empire de la coiffure qui porte son nom, Jacques Dessange fait partie de ceux qui ont régularisé leur situation après que leur évasion fiscale via des sociétés écrans a été avérée, selon le Consortium international des journalistes d’investigation (Icij). En 2015, l’opération SwissLeaks avait révélé que le millionnaire âgé de 92 ans avait un compte dans la filiale suisse de HSBC, sur lequel il avait placé jusqu’à 1,6 million d’euros entre 2006 et 2007. L’homme passe pour être une des incarnations françaises du mythe américain de Rockefeller. Né en pleine Sologne, à Souesmes (Loir-et-Cher), où il a gardé des attaches, notamment parmi les grandes propriétés qui la morcellent, il travaille d’abord dans le salon de coiffure paternel. Une fois le certificat d’études en poche et la Seconde Guerre mondiale terminée, il monte à Paris où il se fait remarquer par la suite chez Dior, Coco Chanel et auprès des vedettes de cinéma avec son fameux « coiffé-décoiffé ». Auréolé d’une telle renommée dans le show-business de l’époque, il ouvre rapidement son premier salon, en 1954, près de l’arc de Triomphe, avenue Franklin-D.-Roosevelt, puis un second à Saint-Tropez.

MEMBRE DE CETTE CLASSE « QUI NE VEUT PLUS CONTRIBUER À UNE QUELCONQUE SOLIDARITÉ AVEC LES PEUPLES »,

C’est durant ces années-là qu’il s’associe avec d’autres coiffeurs pour créer les salons Jacques Dessange. Un développement dont il sera l’un des principaux bénéficiaires et durant lequel il mettra en place des franchises, en 1975, puis une structure de formation pour adapter les salariés à ses besoins spécifiques. Des salariés qui, par leur travail, créent visiblement les richesses attendues, puisque Jacques Dessange lance sa marque de maquillage dès les années 1990, dont une gamme avec L’Oréal, puis rachète les salons de coiffure Fréderic Moreno, en 2002. Quelques années plus tard, Jacques Dessange possède des enseignes dans près de 45 pays et, s’il s’est brouillé avec son fils sur le partage de leur empire au point que ce dernier (qui dirige Dessange international) a engagé des poursuites contre son père, il n’en demeure pas moins que la fortune familiale est loin d’être sur le déclin.

Alors, quoi de plus naturel pour le coiffeur qui a fait fortune, membre de cette classe « qui ne veut plus contribuer à une quelconque solidarité avec les peuples », comme l’affirment les sociologues Michel Pinçon et Monique Pinçon-Charlot, que de placer son patrimoine là où il peut croître sans entraves ? C’est ainsi qu’il ouvrira le compte client numéroté « 40779 JD », lui-même relié à dix autres comptes bancaires au sein de la banque d’affaires helvétique HSBC.

C’était compter sans sur la pugnacité du lanceur d’alertes Hervé Falciani. Cet informaticien à la HSBC Private Bank a pris tous les risques pour rompre le secret bancaire et rendre publiques les informations auxquelles il a pu avoir accès. Les noms de ceux qui s’adonnaient à l’évasion fiscale ou au blanchiment d’argent, dont celui de Jacques Dessange, ont alors été dévoilés. Un exploit quand on sait qu’en Suisse, « la tendance est au transfert à l’étranger du plus grand nombre possible de renseignements sur le client » (1), pour mieux les dissimuler. Pour avoir fourni des informations aux autorités fiscales, Hervé Falciani a dû fuir en France et a été condamné à de la prison en Espagne. Quant au magnat de la coiffure, s’il dit avoir régularisé sa situation en 2012, la question demeure de savoir où les profits engrangés depuis ont été placés.

 

(1) Séisme sur la planète finance : au cœur du scandale HSBC, Hervé Falciani, La Découverte, 2015.

Olivier Morin

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26 août 2018 7 26 /08 /août /2018 05:28

 

DES CENTAINES D’OFFICIERS NOSTALGIQUES DU FRANQUISME menacent les démocrates, les antifascistes, les partisans d’une République, et d’une nouvelle constitution, tous les militants engagés dans un inégal combat de mémoire, auquel le gouvernement actuel semble plus sensible que les précédents.

Nous avons souvent écrit qu’en Espagne il n’y a pas eu une véritable rupture avec le franquisme, qu’il s’est recyclé, ou enkysté, dans des secteurs comme la banque, la justice, la hiérarchie de l’Eglise, l’armée, et que l’Espagne tôt ou tard le paierait cher... Le « pacte de la transition » amnésique et paraît-il « modélique » , a volé en éclats... Cela ne veut pas dire, en ce qui nous concerne, que l’armée  espagnole actuelle reste globalement franquiste, mais, mais, mais... Traversée par des courants néo-fascistes, pilier de la longue et cruelle dictature, historiquement tournée contre le peuple, elle n’a pas été défranquisée en profondeur. La constitution de 1978 lui attribue un rôle tutélaire démesuré, garante notamment de « l’unité » d’une « Espagne une », d’une « monarchie » parlementaire pourtant illégitime... sans oublier « le libre-échange », inscrit dans le plomb constitutionnel.

 

Il convient de rappeler cette toile de fond pour prendre la mesure de la tempête politique soulevée par le « manifeste » pro-franquiste que viennent de signer et de publier plus de 600 officiers de réserve (181 au départ), militaires de haut rang retraités, qui s’attachent à faire « respecter » et défendre « l’image militaire du soldat Franco », qu’ils dissocient du « Franco politique » (celle-là, il faudra la retenir !!). Faut-il que ces « fachas » soient gênés aux entournures...

 

Ils dressent un panégyrique du « soldat Franco », « loyal », aux ordres des gouvernements, y compris en 1934, note perfide, lorsqu’il fut chargé par le gouvernement « républicain » d’écraser le soulèvement des Asturies... Généraux, colonels, lieutenants colonels, amiraux, menacent tous ceux qui voudraient toucher au système en place.

 

Les nostalgiques mettent en garde contre une « campagne infâme » dirigée contre « le rôle historique » du dictateur sanglant, bourreau de l’Espagne jusqu’à sa mort le 20 novembre 1975. Ils présentent Franco comme le sauveur d’une « Espagne agressée par le communisme international  adopté par le Front Populaire ». Si ce n’est pas du franquisme, cela lui ressemble fort... Selon les sabreurs prêts à ressabrer, le gouvernement voudrait un prétexte pour « cacher l’effondrement actuel de la nation » (allusion claire à la Catalogne) « lancent un appel à réhabiliter « le soldat Franco » contre une gauche « engagée dans une offensive viscérale pour une revanche » ; ils invitent à une réécriture de l’histoire, à ne pas toucher à la minimaliste « loi de Mémoire Historique... ».

 

Franco serait « héritier de la tradition patriotique et militaire espagnole » ; et ils n’ont aucune honte à en appeler à « continuer son œuvre », à « rétablir la vérité historique »... Ils s’opposent à l’exhumation des restes du dictateur et à leur transfert hors du mausolée fasciste du « Valle de los Caídos », entretenu, ne l’oublions pas, aux frais des contribuables.

 

Le gouvernement espagnol, qui a annoncé sa volonté d’avancer dans le devoir de mémoire, n’a cependant pas réagi au défi contre la démocratie avec la vigueur nécessaire.

 

Un officier de l’Armée de l’Air et historien, Flores Dimas Balsalobre, de ceux qui se lèvent dans les grandes tourmentes, vient d’adresser aux factieux une lettre ouverte dans laquelle il les taxe de « nostalgiques du franquisme ». Il rappelle que Franco fut un « criminel de guerre », un « un traître » à la tête d’un régime « de caractère fasciste ».

 

Les officiers factieux ne reculent devant aucun distorsion ; ils ont osé présenter le « Valle de los Caídos » comme un « symbole de réconciliation nationale », alors que le lieu glorifie les « vainqueurs de la Croisade », et que gouvernement et associations veulent enfin en faire un « centre pour la mémoire ».

 

Mais l’Espagne d’aujourd’hui n’est plus tout à fait la même qu’alors : 56,4 % des Espagnols, selon les données du « baromètre de la Sexta », pour un sondage réalisé par Invymark, sont favorables à l’exhumation et au transfert des restes de Franco hors du « Valle de los Caídos » alors que 33,8% déclarent y être opposés ; la majorité des électeurs favorables viennent de l’électorat de « Podemos », de « Izquierda unida » et du PSOE. L’opinion publique se prononce également majoritairement pour l’illégalisation (plus de 56% pour, 29,5% contre ; 60,4% des électeurs « populares » rejettent cette illégalisation ainsi que 46,6% des électeurs de « Ciudadanos »), illégalisation de la Fondation Franco, étroitement liée au Parti Populaire de Rajoy et Aznar. Ces revendications, avancées depuis plus de vingt ans par les associations mémorielles, les partis de « gauche », semblent ainsi aujourd’hui trouver un meilleur appui.

 

Il est aussi question d’exproprier la belle et immense demeure et propriété de la famille Franco, connue comme le Pazo de Meiras, « offerte », en fait « volée » par la famille. 68,8% des électeurs sont pour, 22,3% contre.

 

La situation mérite d’être suivie jour après jour ; de nombreux officiers ont engagé un bras de fer contre le peuple espagnol, qui commence à répondre « no pasarán ». La peur peut définitivement changer de camp. La défranquisation totale peut s’accélérer, si les Espagnols s’en mêlent vraiment.

 

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25 août 2018 6 25 /08 /août /2018 05:26

Le politologue Robi Morder analyse le renouvellement des pratiques militantes d’une jeunesse dont la politisation ne rime plus forcément avec l’adhésion à un parti.

Les jeunes sont-ils la classe dépolitisée et désengagée qu’on dépeint ?

Robi Morder Quand les gens parlent de « dépolitisation » des jeunes, ils font référence à des critères anciens d’engagement, à des formes de militantisme comme l’adhésion aux partis ou aux syndicats. Il ne s’agit pas d’une dépolitisation en soi, mais de nouvelles formes d’engagement, plus ponctuelles, moins générales. Beaucoup se tournent vers l’action immédiate de solidarité, de soutien aux sans-papiers par exemple. Ce type d’engagement s’est beaucoup développé dans la jeunesse, mais il n’est pas toujours visible, ou du moins pas de manière aussi spectaculaire que les grandes manifestations ou meetings. Les chiffres sont éloquents : près de la moitié des étudiants sont engagés dans des associations et le sont sur des questions extérieures à l’université. Les formes anciennes de militantisme n’ont pas disparu, mais les répertoires d’action ont changé. Face à ces nouvelles pratiques, les organisations traditionnelles doivent apprendre à faire du nouveau avec du vieux : utiliser Internet tout en ayant recours aux traditionnelles grèves et manifestations. Il ne faut pas abandonner l’ancien, mais bien composer entre différents répertoires.

À quoi est due cette recomposition des formes d’engagement ?

Robi Morder Avec la décentralisation, les décisions et les budgets sont votés au niveau local. Il faut des formes d’action adaptées au niveau local. On assiste donc moins à des grands mouvements nationaux qu’à des mouvements locaux, ce qui donne une impression de multiplication des grèves. Dans le syndicalisme salarié, face à la précarité, les licenciements, l’ancienneté moins grande… le grand enjeu est de recréer du collectif. On ne construit pas des organisations pérennes avec des gens qui viennent à la carte. Pour arriver à réfléchir ensemble, les réunions physiques sont essentielles.

Les choses ont-elles changé depuis l’élection de Macron ?

Robi Morder Son élection n’est qu’un révélateur des changements profonds de notre société. Les politiques mises en place par Macron ont suscité des luttes défensives dans lesquelles les jeunes ont été très présents, mais ça ne concerne qu’une minorité. Il n’y a pas d’adhésion aux valeurs libérales, mais les jeunes se sentent impuissants. C’est pourquoi le gouvernement n’a pas été fragilisé par les mouvements étudiants ou lycéens, ni par la SNCF… La ruse de l’histoire, c’est qu’il l’a été par une affaire de garde du corps. C’est quand on ne s’y attend pas que, parfois, le déclic se réalise… un peu comme en Mai 68 : qui aurait parié que ce serait un rassemblement étudiant au Quartier latin qui mettrait le feu à la plaine ?

Entretien réalisé par Laurène Bureau

 

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25 août 2018 6 25 /08 /août /2018 05:25

 

L’onde de choc de l’intervention militaire à Prague touche durement les communistes français qui cherchaient à trouver une voie médiane à l’échelle mondiale et qui voient interrogée leur perspective stratégique.

Pour le PCF dont l’histoire a été imbriquée avec celle du mouvement communiste international la crise tchécoslovaque en 1968  a été une épreuve majeure qui a marqué durablement son histoire.  Le récent  ouvrage de Roger Martelli, minutieux et très  documenté aborde  cette question et permet de revisiter l’année  1968 comme l’épisode révélateur de la situation du PCF aussi bien en France que sur la scène internationale (1). En fait les événements de l’année 1968 qui ont secoué toutes les forces politiques françaises ont particulièrement marqué le PCF, doublement interpellé par la situation politique nationale et la crise internationale du mouvement communiste. Sous la conduite prudente de son secrétaire général, Waldeck Rochet, le PCF ambitionne alors  de tenir une place médiane dans le mouvement communiste international. Il est un des promoteurs d’une prochaine conférence internationale des partis communistes dans un contexte marqué par l’exacerbation du conflit entre le Parti communiste chinois et le Parti communiste soviétique aux côtés duquel il n’a cessé de se placer. En Europe, marquée par la division en deux camps, plusieurs partis communistes au pouvoir ont pris leurs distances avec l’Union soviétique qui est à la tête de l’organisation militaire du pacte de Varsovie  face à l’Otan sous direction américaine. Outre la Yougoslavie qui, de longue date a  affirmé sa neutralité, la Roumanie et l’Albanie ont adoptés des positions différentes de celles   de l’URSS  dans le domaine diplomatique. Les 5 autres, Pologne, RDA, Bulgarie, Hongrie et Tchécoslovaquie restent soumis  à une influence  étroite  de l’URSS même si celle-ci proclame le respect de leur indépendance. Dès la fin de 1967, en Tchécoslovaquie comme en Pologne, parmi la jeunesse étudiante mais aussi  au sein du  parti communiste s’affirment des critiques contre la persistance des formes staliniennes et pour la démocratisation du fonctionnement de l’Etat et du parti. Le PCF, tout en renouvelant son accord avec  l’universalité du marxisme-léninisme, affirme son attachement au principe de l’indépendance de chaque parti communiste responsable de sa politique nationale.

Quand, en  janvier 1968, le comité central du Parti communiste Tchécoslovaque destitue Novotny de son poste de secrétaire général du PCT remplacé par Dubcek, le PCF se garde d’une prise  de position. Les mois suivants il reste dans l’expectative et refuse de porter une appréciation positive sur les changements engagés critiquant d’ailleurs de certaines initiatives dans la presse communiste, comme Paul Noirot qui a interviewé Dubcek dans « Démocratie Nouvelle » ou des articles Pierre Daix dans les Lettres Françaises. Mais la position de la direction du PCF évolue. Le 19 avril, Waldeck Rochet apporte un soutien prudent aux réformes engagées par le PCT. Il se félicite que dans son programme d’action celui-ci affirme son engagement pour la démocratie socialiste afin de redresser les erreurs du passé et qu’il ne remette pas en cause les engagements  internationaux du pays. En somme, alors que l’URSS et les autres pays du Pacte de Varsovie marquent leur désapprobation en vers les réformes annoncées par le PCT, le PCF s’estime rassuré par le parti et le gouvernement tchécoslovaques sans approuver pour autant le contenu des différentes réformes.  Du fait de la situation politique en France, il doit surseoir à ses projets de relancer une démarche médiatrice au sein du mouvement communiste international. En juillet, Waldeck-Rochet, tente d’ultimes démarches pour empêcher l’irréparable : il se rend à Moscou le 15 puis à Prague le 19 en préconisant  une solution politique.  Devant  Brejnev il convient de certaines dérives en Tchécoslovaquie mais le dirigeant russe ne veut rien entendre quand il lui déclare qu’une intervention militaire serait une catastrophe pour tout le mouvement communiste. A Dubcek, qui lui reproche d’être influencé par les soviétiques, il prône la prudence. Les dirigeants du PCF veulent voir dans les ultimes rencontres entre la direction soviétique et tchécoslovaques à Cierna  le 1er aout puis à Bratislava le 3 avec les autres partis communistes, le résultat positif de leur démarche. Le BP du PCF, le  5 août, salue la déclaration commune des six partis qui « ont souligné que les  succès du socialisme et du communisme exigent l’application des lois générales du marxisme-léninisme en tenant compte des conditions et particularités nationales ».

Le Bureau Politique du PCF,  réuni en  toute hâte le 21 aout,  « exprime sa surprise et sa réprobation à la suite de l’intervention militaire en Tchécoslovaquie ». Devant le Comité central réuni le lendemain, en  session extraordinaire, Waldeck Rochet reconnaît d’emblée que l’affirmation du désaccord avec le PCUS a suscité des déchirements au sein du PCF. « C’est presque le contraire qui serait anormal car il est vrai que notre Parti, depuis 50 ans, a toujours été aux côtés de l’Union soviétique ». Pour autant la condamnation de l’intervention militaire est réaffirmée ce qui d’ailleurs ne suscite pas au sein du CC d’opposition explicite. La direction du parti, les jours suivants, suscite la  réunion des comités fédéraux et appelle leurs membres à se prononcer sur la décision de la direction du parti. Pour obtenir un très large soutien l’équipe dirigeant équilibre le propos, en atténuant les termes de la condamnation, réaffirmée  désormais comme une désapprobation. De plus le PCF appelle les dirigeants tchécoslovaques, arrêtés et emmenés en URSS, à la discussion avec les dirigeants soviétiques pour déboucher sur une solution politique positive dont le Bureau Politique le 25 août réclame qu’elle s’appuie sur une normalisation de la situation impliquant « le retrait des forces d’intervention ». Les jours suivants, le 27 août puis le 2 septembre, il se félicite que les pourparlers aient débouché sur un accord. De fait, cet accord engage le processus  de normalisation qui entraînera l’année suivante l’éviction de Dubcek et la remise en cause de toutes les réformes démocratiques engagées.

Pour l’heure, le PCF doit affronter au sein du Bureau Politique les critiques portées par Jeannette Vermeersch qui dénonce l’antisoviétisme et par Roger Garaudy qui met en cause le système soviétique en tant que tel. Si le BP repousse les critiques de la veuve de Maurice Thorez il dénonce avec vigueur les thèses  défendues par Garaudy accusé de développer une ligne stratégique étrangère à celle du parti. Pour autant le PCF  doit faire face également aux attaques de certains partis frères, en particulier le SED (parti communiste de RDA) et le PCUS qui par différents canaux, articles de presse et brochures, dénoncent la prise de position du PCF contre l’intervention militaire et la justifient auprès des cadres du parti. Des explications orageuses ont lieu avec les dirigeants soviétiques et ceux de RDA au terme desquelles, Waldeck Rochet et Georges Marchais qui les ont menés en concluent qu’il est urgent de reporter la Conférence Internationale à la tenue de laquelle ils s’employaient depuis des mois. Lorsque le 5 décembre le Comité central se  réunit à Champigny l’unité du parti bien qu’ébranlée a été maintenue et l’organisation n’a pas subi la même hémorragie qu’en 1956 même si  le PCF s’est trouvé en difficulté aussi bien en France qu’au plan international sur sa perspective stratégique et sa vision du socialisme. La résolution finale, préparée par Waldeck Rochet, épaulé par Jean Kanapa, bientôt intitulée le Manifeste de Champigny, esquisse face au « socialisme existant » ce que pourrait être « la voie française au socialisme ». Les événements de Tchécoslovaquie ajoutés à ceux de mai-juin en France venaient de montrer l’urgence d’une avancée…

(1)   Communistes en 1968. Le grand malentendu. Editions sociales, 2018.

 

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25 août 2018 6 25 /08 /août /2018 05:23

 

Entré très jeune au Parti communiste, antifaciste opposé à la dictature slovaque de Jozef Tiso, le premier secrétaire du PCT sera la figure centrale du printemps de Prague, et plus tard le spectateur de la partition du pays.

«Je pense à tout ce que nous aurions pu accomplir pendant ces années et aux avantages qu’en auraient tirés notre pays et le socialisme. » Ainsi répondait Alexander Dubcek au journal communiste italien l’Unita. C’était en 1988, et les autorités tchécoslovaques avaient desserré l’étau sur l’ancien dirigeant du printemps de Prague.

La vie de l’ancien dirigeant communiste se confond avec l’histoire du mouvement ouvrier dans cette partie de l’Europe centrale longtemps dominée par l’Empire austro-hongrois et divisée entre les pays tchèque, directement attaché à Vienne, et slovaque, placé sous la férule de Budapest. Dubcek est Slovaque, mais peu s’en est fallu qu’il ne naquît à Chicago, où vivaient ses parents jusqu’à leur retour au pays, en 1921, quelques mois avant la naissance du jeune Alexander. Un retour provisoire avant un nouveau départ en Kirghizie, puis à Gorki. Jusqu’en 1938, Alexander Dubcek passe une adolescence soviétique.

IL SERA EXCLU DU PARTI

Revenu en Tchécoslovaquie en 1938, le jeune homme va vivre l’invasion nazie et les crimes de l’État clérico-fasciste de Jozef Tiso en Slovaquie. Il adhère au Parti communiste clandestin, combat dans la Résistance, est blessé lors de l’insurrection en 1944 (son frère Julius est tué). Après la libération, Dubcek gravit les échelons du pouvoir, siège au Parlement et, devenu numéro un du parti en Slovaquie en 1963, ne tarde pas à s’opposer aux éléments conservateurs, proches du secrétaire général, Antonin Novotny. Ironie de l’histoire, Dubcek emporta la partie après avoir invité le secrétaire général du PCUS, Leonid Brejnev, lequel lâcha Novotny, en janvier 1968…

Au lendemain du 21 août 1968, les ­Soviétiques hésitèrent à destituer immédiatement Alexander Dubcek. Ce n’est qu’en avril 1969 que celui-ci cède son poste à Gustav Husak. L’ex-secrétaire général est appelé à présider ­l’Assemblée fédérale. Alors que la contestation pacifique se poursuit – l’étudiant Jan Palach s’immole sur la place Venceslas –, Dubcek sera démis de ses fonctions parlementaires et exclu du Parti communiste. Envoyé en ­Turquie comme ambassadeur, il sera bientôt rappelé. Il occupera jusqu’en 1989 un emploi dans l’administration forestière, à Bratislava.

Lors de la « révolution de velours », en novembre 1989, il apparaîtra aux côtés de Vaclav Havel. Acclamé au cri de « Dubcek na Hrad ! » (Dubcek au Château !), il devra se contenter de la présidence de l’Assemblée. Président du Parti social-démocrate slovaque, il assistera impuissant au processus qui conduira à la partition du pays, qu’il réprouve. Sa mort, le 7 novembre 1992, des suites d’un accident de circulation, alimentera des soupçons chez ses partisans. L’enquête confirmera la thèse accidentelle. Mais sa disparition a privé le pays des Tchèques et des Slovaques d’une grande voix en faveur de l’unité.  J.-P. P.

 

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25 août 2018 6 25 /08 /août /2018 05:22

C’est avec beaucoup de tristesse que nous avons appris le décès de notre amie et camarade Anne DREAN après une longue période de maladie.

Annick est née en 1935 à Grâces dans ce qu’on appelait alors les Côtes du Nord. Son père, militaire de carrière, avait 2 enfants lorsqu’il fut fait prisonnier. Il en aura deux autres après sa libération. Quand il est dégagé des cadres de l’armée, la famille vit une situation difficile.

Bonne élève, Annick obtient son bac à 18 ans en 1953. Mais la situation  familiale rend impossible la continuation des études et elle doit travailler.

En octobre, à 18 ans, quelques mois après son bac, elle est institutrice suppléante et se trouve seule en charge d’une classe unique rurale avec 8 à 10 élèves.

En 1956 elle se marie avec Jean et désormais, jusqu’au bout, leurs vies n’en feront plus qu’une. Françoise et Hélène naitront de cette union.

De 1956 à 1964, au gré des mutations de Jean, elle enseignera à Vitré puis à Saint-Brieuc.

En 1964, Jean qui avait eu quelques ennuis suite à son opposition à la guerre d’Algérie décide d’apporter sa pierre à la construction de l’Algérie indépendante en tant que coopérant. Une nouvelle expérience pédagogique et humaine pour Anne qui bien sûr était de l’expédition :  50 élèves le matin, 50 autres l’après-midi. Une riche expérience de 5 ans dont ils parlaient souvent. Est-ce là qu’elle a pris ce goût du soleil qu’elle aimait tant ?

En 1969 : retour en France à Trappes dans la région parisienne. Enfin en 1972 arrivée à Morlaix. Jean à la gare et Annick au collège du Château, en classe de transition.

C’est là que je la vois pour la première fois. Frappé par son allure, son élégance vestimentaire… jusqu’à la pointe de ses escarpins. En apprenant à la connaître, je ne mettrai pas longtemps à me rendre compte que son élégance humaine était encore plus grande. Son ouverture aux autres, sa tolérance, son refus de condamner à priori, sa disponibilité, son écoute… Il y aurait tant à dire. Bien sûr ce n’était pas une sainte mais une belle femme dans tous les sens du terme.

Le début des années 70 c’était aussi à Morlaix l’activité du GFEN  (Groupe Français d’Education Nouvelle) un mouvement pédagogique qui se donnait comme objectif de lutter contre l’échec scolaire, de créer par la pratique les conditions de la réussite de tous les élèves. De les préparer à l’autonomie et à la citoyenneté aussi. Anne, qui partageait totalement cet objectif, était de ce groupe très actif et y apportait beaucoup.

C’est dans ce groupe GFEN qu’est née l’idée de Kerfraval : une nouvelle école devait être construite sur le plateau Nord-Est pour remplacer les baraques du Launay. Le groupe en fit son objectif : nouvelle architecture, nouvelles ambitions pédagogiques, nouvelles pratiques innovantes et tellement prenantes. J’eus à la construire en tant qu’adjoint aux affaires scolaires. Annick  fut de toutes les étapes depuis le début et jusqu’à sa retraite en 1990 et même au-delà. Active dans toutes les initiatives… et embauchant Jean à l’occasion.   

Anne était catholique pratiquante, en 1975 elle prend la décision d’adhérer au Parti Communiste Français et en fut une adhérente active toujours disponible, toujours souriante même quand les activités étaient telles qu’on aurait aimé que les journées aient plus de 24 heures. Anne était toujours disponible pour les tâches qu’on lui demandait de remplir mais une de celles qu’elle préférait était la participation aux différentes fêtes que le parti organisait. Fête de l’Humanité, de l’Unité, de la Terre… mais surtout du Viaduc le 1er mai à Morlaix où avec Jean, la restauration était  son domaine… et toujours souci de la qualité et du respect des autres, une touche particulière pour l’accueil. Combien de fois leur jardin a t’il été pillé pour que les tables soient fleuries !

Cette adhésion n’a pas éteint la foi d’Annick. Sans doute trouvait-elle dans ses deux engagements une complémentarité dans la lutte nécessaire pour un monde de solidarité et de fraternité débarrassé de toute domination et de toute exploitation où chaque femme, chaque homme, chaque enfant ait le droit à une vie digne et heureuse jusqu’au bout.             

C’est ce combat qu’Annick et Jean ont mené sans relâche avec vaillance et générosité toute leur vie. Valeurs qu’ils ont transmises à leurs enfants et petits- enfants.

 A la fin, la vie d’Annick a été ternie par des problèmes de santé qui n’ont cessé de s’aggraver jusqu’à rendre impossible son maintien à domicile. Jean ne pouvait pas envisager qu’Anne soit seule en EHPAD. Il a donc décidé de l’accompagner à Quimper où ils ont été accueillis dans l’établissement où il réside. Preuve d’amour ultime auquel la vie vient d’écrire le mot fin.

Ma dernière rencontre avec Annick a eu lieu au DOURDUFF, le long de la rivière. Elle était encore valide et nous avons échangé quelques instants. Toujours soucieuse des autres. C’est cette image que je veux garder d’elle. Avec la volonté, avec ses camarades et Jean, bien sûr, de continuer à mener le combat pour les valeurs qu’elle a toujours défendues.

Alain DAVID

 

_____________________________________________________________

 

Hélène et Jean-Pierre, sa fille et son gendre, remercient de tout coeur toutes les personnes qui se sont associées à notre douleur.
Votre présence, vos messages, vos fleurs nous ont été précieux pour surmonter le départ de Maman.
Le combat continue pour, peut-être, voir un jour naître ce monde de paix et de justice dont Maman rêvait et pour lequel elle se battait aux côtés de Papa, ainsi qu'à vos côtés.
Merci.

Hélène et Jean-Pierre".

 
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24 août 2018 5 24 /08 /août /2018 05:48

 

L’onde de choc de l’effondrement meurtrier du viaduc Morandi dépasse les frontières italiennes. En France, un audit (en lien ci-dessous) pointe la vétusté avancée du réseau routier national tandis que l’état des autoroutes privatisées interroge.

Alors que Gênes, groggy, tente de sortir de la torpeur après l’effondrement meurtrier du viaduc Morandi, l’état de vétusté des infrastructures routières et autoroutières italiennes est mis au banc des accusés. La chute des investissements globaux consacrés aux réseaux routiers dans le pays est en cela éclairante : ils sont passés de plus de 13 milliards d’euros en 2007 à un peu plus de 5 milliards en 2015 (selon les chiffres compilés de l’OCDE).

Mais loin de se borner aux frontières italiennes, l’onde de choc de la catastrophe questionne les politiques de maintenance des infrastructures routières de l’ensemble des pays européens. Et si Sofia vient d’annoncer le lancement d’une campagne titanesque de rénovation simultanée de tous les ponts délabrés de Bulgarie, en France, le ministère des Transports planche pour la rentrée sur un projet de loi de programmation des infrastructures.

30 % DES 12 000 PONTS DU RÉSEAU ROUTIER NATIONAL SONT À RÉPARER

À cette occasion, un audit sur l’état du réseau routier non concédé (hors autoroutes privatisées), commandé par l’exécutif et dont les conclusions, rendues fin juillet, sont passées quasi inaperçues, prend aujourd’hui une tout autre envergure. Il révèle, entre autres, que 30 % des 12 000 ponts que compte le réseau routier national sont à réparer et que 7 % d’entre eux – soit 252 ouvrages – présentent même un « risque d’effondrement ». Plus généralement, le rapport, qui juge le réseau routier « vieillissant et dégradé » dans son ensemble, indique que plus de 2 000 kilomètres de routes nationales sont gravement endommagés. En conclusion, les auteurs de l’audit estiment à 1,3 milliard d’euros annuels le montant moyen des dépenses à prévoir pour la régénération du réseau public. Pour 2018, l’État a seulement alloué une enveloppe de 800 millions d’euros à la rénovation de cette partie du réseau.

Mais si ces chiffres sont révélateurs d’une « dégradation importante et inexorable des routes nationales », estime la CGT, ils ne concernent pas les 9 158 kilomètres d’autoroutes privatisées en 2006 gérés en concession par 18 sociétés privées qui cumulent, en 2017, plus de 10 milliards d’euros de chiffre d’affaires. C’est d’ailleurs sur une autoroute concédée à la société italienne Autostrade per l’Italia (filiale du groupe Atlantia) que la catastrophe de Gênes s’est produite (voir encadré).

L’ÉTAT GÉNÉRAL DES AUTOROUTES CONCÉDÉES SE DÉTÉRIORE

En France, selon les chiffres de l’Association des sociétés françaises d’autoroutes (Afsa), 1,49 milliard d’euros ont été investis en 2017 sur le réseau privé par l’ensemble des sociétés concessionnaires, dont 143 millions d’euros « consacrés à l’entretien des infrastructures et à la sécurité », précise l’organisme. Des investissements en baisse (près de 2 milliards d’euros en 2011), inversement proportionnels à l’augmentation des bénéfices pour les concessionnaires. Conséquence, l’état général des autoroutes concédées se détériore, à un rythme certes moins rapide que celui du réseau national. Ainsi, un rapport d’information de la commission de l’Aménagement du territoire et du Développement durable du Sénat, reprenant les données sur la période 2001-2015, pointait dès 2017 que « si la proportion des autoroutes en très bon état de surface est restée relativement stable, autour de 65 %, celle des autoroutes en bon état de surface a diminué, passant de 31 % en 2011 à 18 % en 2013. En conséquence, la proportion du réseau autoroutier dont l’état est plus ou moins dégradé a augmenté, de 5 % à 16 % ».

En revanche, poursuit le rapport sénatorial, la proportion des ouvrages d’art – dont les ponts – qui nécessitent des « réparations structurelles » est, elle, passée de 8 % en 2011 à 4 % en 2015. Malgré le mauvais état constaté des infrastructures autoroutières privatisées, l’État a rallongé en 2015 la durée des contrats de concession. À l’époque, la Cour des comptes avait d’ailleurs épinglé l’indulgence de la puissance publique envers des concessionnaires devenus tout-puissants. Et les sages de relever que « l’État n’a pas jugé utile de subordonner l’ouverture des négociations relatives aux contrats de plan au respect par les concessionnaires de leurs obligations de base en matière d’entretien du réseau ».

En lien

 l'audit remis au ministère des transport qui dénonce l'état accablant des routes 

 

 

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24 août 2018 5 24 /08 /août /2018 05:46

Au-delà des guerres et de la complexité géopolitique, les pays du Moyen-Orient sont frappés de plein fouet par les changements climatiques. Les températures en particulier ne cessent de grimper. Le Koweït détient depuis 2016 le record mondial de chaleur avec 54 °C, mais cela pourrait bientôt ne plus représenter une anomalie.

Koweït, envoyé spécial.– Il est presque midi et les ombres s’amenuisent au point de disparaître. Le thermomètre extérieur de la voiture de location ne cesse de grimper. Cela fait plus d’une demi-heure qu’il oscille autour de 48 °C. Je bifurque sur une piste non goudronnée pour me rapprocher le plus possible de la station météorologique de Mitribah, avant de me heurter à un grillage qui en interdit l’accès au public. Non pas qu’il y ait beaucoup de visiteurs dans ce coin de désert koweïtien. Sauf peut-être ceux qui veulent se rendre compte de ce que cela fait de parvenir au point le plus chaud jamais enregistré sur terre : 54 °C le 22 juillet 2016.

Toujours est-il qu’en ce jour de la mi-juin 2018, je n’ai croisé personne dans les environs. J’arrête la voiture sur le bas-côté, j’attends quelques minutes et je vérifie le thermomètre de bord. Ce n’est pas un instrument de mesure fiable, mais il offre une approximation. Il affiche 51 °C. J’ouvre la portière et je sors de l’habitacle climatisé. Il fait indubitablement chaud mais, aujourd’hui, l’humidité n’est pas trop prononcée, donc la chaleur se fait moins écrasante.

Le corps humain agit comme un échangeur thermique élaboré qui s’attache à maintenir une température constante, oscillant d’à peine un degré, entre 36,5 °C et 37,5 °C. Lorsque la chaleur extérieure conduit à une hausse de la température interne, le corps se met alors à transpirer : en s’évaporant, la sueur provoque un refroidissement qui permet de rétablir la valeur normale autour de 37 °C. Le problème démarre en cas d’exposition prolongée à de hautes températures. L’échangeur thermique qu’est la peau commence à faiblir et fonctionne moins bien. Il faut alors se reposer, chercher de l’ombre ou un endroit frais. Si cela s’avère possible, pas de souci, le corps revient à sa température normale et la peau récupère.

Malheureusement, un des phénomènes auxquels sont confrontés les pays du golfe Persique est la chaleur élevée continue. Autrement dit, la température ne baisse plus suffisamment, en particulier la nuit, pour offrir le répit nécessaire au corps humain. Cette année, fin juin 2018, Quriyat, une ville dans le sultanat d’Oman, a décroché le titre de ville avec la plus forte température minimale : pendant 24 heures consécutives, le thermomètre n’est pas descendu en dessous de 42,6 °C.

Un être humain confronté à de telles conditions, qui n’a plus la possibilité de retrouver pour quelques heures une température plus raisonnable, c’est-à-dire inférieure à 37 °C, se met alors à dysfonctionner. Les pores de la peau ne parviennent plus à réguler correctement la transpiration. Même lorsque le climat est humide et que l’on continue à transpirer abondamment, l’évaporation ne refroidit plus. Boire ne soulage plus la soif. La température corporelle se met alors à augmenter.

À partir de 40 °C, le corps cherche à refroidir la peau en détournant le sang vers les capillaires, rationnant les autres organes vitaux. Le cerveau n’est plus alimenté correctement et, en langage parlé, « on perd la tête ». Les dégâts commencent à devenir irrémédiables. Le cœur pompe et pompe encore du sang jusqu’à épuisement, conduisant à un arrêt cardiaque. On nomme cela une « attaque de chaleur ».

Au bout d’une dizaine de minutes dans le désert koweïtien chauffé à blanc, je regagne l’habitacle de mon véhicule et je quitte la zone de Mitribah. À une heure de route vers le sud, Koweït City, ses hôtels, ses villas, ses bureaux et ses centres commerciaux climatisés à un frisquet 20 °C permettent d’échapper à la fournaise environnante. Mais à une soixantaine de kilomètres vers le nord se situe la deuxième ville d’Irak, Bassora : plus de 2,5 millions d’habitants et, en dépit de son statut de capitale économique irakienne, une pauvreté écrasante, de fréquentes coupures d’électricité, et des services quasi inexistants. Comment ses habitants font-ils pour résister à une chaleur comparable, à quelques degrés près, à celle de Mitribah ?

Les 54 °C de Mitribah ne seront bientôt plus une anomalie

On a coutume de dire que les vagues de chaleur provoquent la mort invisible des gens invisibles : les pauvres, les personnes âgées, les nourrissons, ceux qui vivent seuls. L’épisode de chaleur d’août 2003 en France, qui a vu le thermomètre grimper d’environ 5 °C au-dessus de la moyenne saisonnière, incarne l’exemple typique : une surmortalité de 15 000 décès a fini par être comptabilisée, mais il a fallu plusieurs mois pour établir ce bilan et, pendant les semaines de canicule, le phénomène a été soit ignoré soit minimisé. Les plus vulnérables à la chaleur sont ceux que la société ignore le plus et, bien souvent, leur mort est mise sur le compte de leur âge, de leur santé ou de leurs conditions de vie, alors qu’elle est la conséquence directe d’une augmentation de la chaleur et d’une absence de possibilité de mitiger celle-ci.

Si les vagues de chaleur n’étaient qu’un phénomène météorologique récurrent, mais rare, il suffirait de s’en accommoder en haussant les épaules : « Il fait chaud, et alors ? Ça va passer ! » Le souci est bien évidemment que notre compréhension du climat et des changements qui l’affectent ne nous permet plus cette insouciance. Non, ça ne va pas passer. Bien au contraire, cela va se multiplier. Rien que sur la dernière décennie, des vagues de chaleur « anormales » se sont produites en Russie (2010), en Amérique du Nord (2012), en Australie (2012-13) ou en Chine (2013).

Dans ce contexte, le Moyen-Orient est un cas à part. Il y fait déjà chaud, et cela va s’aggraver. Au point de rendre difficilement vivable une région qui l’était déjà péniblement. Selon l’Institut Max-Planck, d’ici à 2050, les températures estivales en Afrique du Nord et au Moyen-Orient vont augmenter deux fois plus vite que la moyenne planétaire, et les épisodes de « chaleur extrême » au-delà de 46 °C seront cinq fois plus nombreux qu’au début du XXIe siècle, quand ils se produisaient en moyenne seize jours par an.

Les 54 °C de Mitribah ne seront bientôt plus une anomalie. L’Iran et l’Irak ont presque atteint une telle température en 2017, à quelques dixièmes de degré près. Toutes ces mesures ne prennent pas en compte l’humidité, qui joue un rôle important. Par exemple, une combinaison de 46 °C et de 50 % d’humidité, un taux assez fréquent dans les régions côtières du golfe Persique (surtout quand la chaleur accélère l’évaporation de la mer), permet à un être humain en bonne santé de fonctionner pendant six heures. Au-delà de cette durée, le corps est confronté aux symptômes décrits précédemment. Pour une personne affaiblie ou de constitution fragile, quelques heures d’exposition aboutissent à la mort. Selon une étude parue dans la revue Nature, si rien n’est entrepris pour atténuer les changements climatiques, la plupart des villes du golfe Persique dans la seconde moitié du siècle atteindront régulièrement 45 °C, avec des pointes à 60 °C à Koweït City, par exemple.

Au Koweït justement, la température moyenne a déjà gagné entre 1,5 °C et 2 °C depuis 1975, une progression plus forte qu’ailleurs sur le globe. Le niveau des précipitations (125 mm) est resté identique, mais au lieu d’être étalé sur toute l’année, il est atteint au cours de brusques phénomènes orageux, auxquels succèdent de longues périodes de sécheresse. Les tempêtes de sable et de poussière se sont également accrues en intensité. « Elles sont moins nombreuses qu’avant, mais beaucoup plus puissantes, explique Hussain al-Sarraf, un mathématicien spécialisé dans la modélisation du climat. On se focalise à juste titre sur les température, mais c’est tout l’environnement qui va changer pour nous au Koweït : la force et le sens des vents, l’humidité des sols, le niveau de la mer qui augmente. »

Assis à 22 h 30 dans un gigantesque centre commercial de luxe au centre de Koweït City, où toutes les boutiques sont ouvertes et où il est presque nécessaire de mettre un pull pour résister aux assauts de la climatisation alors qu’il fait 42 °C à l’extérieur, Hussain al-Sarraf balaie les environs de la main : « On peut très bien supporter 55 °C : nous vivons essentiellement à l’intérieur de nos maisons, de nos bureaux et dans nos voitures. Mais est-ce économiquement viable ? Les gens en sont conscients, mais ils préfèrent ignorer la question. »

Koweït City est une ville nord-américaine au milieu du désert : des banlieues étendues reliées par des autoroutes à huit voies et des gratte-ciel en verre. C’est-à-dire un urbanisme complètement inadapté aux lieux. Quand on regarde de vieilles photos de la ville au mitan du XXe siècle, avant le boom pétrolier, on voit des bâtiments de deux ou trois étages densément construits, avec des rues étroites, des venelles et des cours intérieures, érigés en bois et en pierre. Cette architecture cultivait l’ombre et la circulation d’air, elle réduisait les distances à parcourir et utilisait des matériaux préservant la fraîcheur. Tout le contraire d’aujourd’hui.

« Est-il nécessaire de régler le thermostat sur 18 °C, comme cela se fait fréquemment au Koweït ? »

Les immeubles de bureaux entièrement en verre à Koweït City, Doha ou Dubaï composent de formidables panoramas urbains concurrençant les skylines de New York ou Hong Kong. Mais ils sont une folie, dans un pays où le soleil les transmute en fours. Aujourd’hui, 10 % de la consommation d’électricité mondiale sert à alimenter des climatiseurs ou des ventilateurs, et ce chiffre doit être encore plus élevé dans les nations du golfe Persique qui ont à la fois les moyens et les ressources énergétiques pour installer des systèmes de refroidissement partout. En 2030, c’est-à-dire demain, un tiers du pétrole du Koweït (10 % des réserves mondiales) servira à produire de l’électricité et de l’eau, à travers les usines de dessalement, très gourmandes en énergie, qui fournissent la quasi-totalité de l’eau du pays. On voit bien le serpent qui se mord la queue…

Face à ces scénarios, qu’est-ce qui est fait ? Eh bien, pas grand-chose. Nasser Abulhassan, fondateur du cabinet d’architectes Agi, essaie de promouvoir des bâtiments plus petits, mieux orientés et moins gourmands en énergie. De son propre aveu, il n’est pas toujours bien reçu quand il dévoile ses plans à ses clients : « On me demande souvent : mais pourquoi les fenêtres ne sont-elles pas plus grandes ? Pourquoi n’y a-t-il pas plus de place dans les bureaux individuels ? Même quand on leur explique les gains économiques, les gens ont du mal à l’accepter. Alors on leur demande : de quoi avez-vous vraiment besoin ? Est-il nécessaire de régler le thermostat sur 18 °C, comme cela se fait fréquemment au Koweït, ou est-ce que vous vous sentez bien à 26 °C ? Essayez de petites ouvertures et vous verrez que vous aurez besoin de moins de lampes, car l’œil humain s’accommode. »

Bien qu’il conçoive des édifices, Nasser Abulhassan estime que les solutions à ce problème de surconsommation dépassent le simple cadre de l’architecture ou de l’urbanisme. « Nous devons avoir une approche holistique, qui prenne en compte les problèmes de réglementation – aujourd’hui par exemple, la luminosité minimale dans les bâtiments est fixée par les fabricants d’ampoules électriques –, de sociabilité – voulons-nous vivre éloignés les uns des autres ? –, de cohérence – nous sommes devenus bons pour recycler les bouteilles d’eau en plastique, mais nous continuons à aller les acheter en voiture au supermarché – et de choix politiques. Le Koweït est un pays providence, qui subventionne ses citoyens. Par conséquent, il est très difficile de les rendre responsables quand ils payent leur eau, leur essence ou leur électricité trois fois rien. »

Mais le Koweït est également un pays où 70 % de la population est composée de travailleurs migrants venus d’Asie, du Maghreb et d’autres régions du Moyen-Orient. Or ces gens-là ne sont à la fois pas « subventionnés » (ou bien moins) et ils sont les premières victimes des conséquences du changement climatique. Ce sont eux qui s’agitent en plein air sur les chantiers, dans les jardins, comme vendeurs de rue ou gardiens de parking. La législation interdit désormais le travail en extérieur entre midi et 16 heures, mais il n’est pas rare de constater que son respect laisse à désirer. Il suffit de se promener dans Koweït City pour observer des ouvriers du bâtiment œuvrant à toute heure de la journée, cherchant l’ombre d’un mur ou d’un échafaudage.

« Vu les systèmes de sous-traitance en cascade et la réglementation sur les permis de séjour qui régissent les relations de travail au Koweït, personne n’ose jamais se plaindre », confie Omar, le représentant d’un collectif (informel) d’ouvriers égyptiens sur le site d’un futur gratte-ciel de la capitale. « Personne ne recense leur nombre, mais il y a des centaines de morts chaque année sur les chantiers : des accidents bien sûr, mais aussi beaucoup d’ouvriers qui décèdent de coups de chaleur. On nous dit : il est mort de crise cardiaque parce qu’il était de faible constitution ou de déshydratation parce qu’il n’a pas assez bu, mais nous savons très bien que ce sont les conditions de travail avec la température qu’il fait ! »

Contrairement à ce que l’on pourrait penser en se fiant aux images spectaculaires de grimpeurs himalayens décédés lors d’une ascension ou en se focalisant sur les efforts déployés pour aider les SDF en hiver, on meurt assez peu de froid dans le monde aujourd’hui. Il suffit de protéger son corps du contact avec l’air et le sol en rajoutant des couches de vêtements et de se mouvoir pour échapper à l’hypothermie. La chaleur, en revanche, est un « tueur silencieux », qui provoque des dizaines voire des centaines de milliers de décès chaque année, mais que l’on a du mal à comptabiliser.

Même nu, même à l’ombre, même sans bouger, même avec de l’eau en quantité suffisante, si la température élevée ne baisse pas et si l’on n’a pas accès à une pièce relativement fraîche, la mort approche en quelques heures. Dans ces circonstances, la solution actuelle à une telle situation – la climatisation – ne fait que contribuer au problème, aggravant les causes du changement climatique. Avec toutes ses réserves de pétrole, le Moyen-Orient est directement confronté à ce paradoxe : sa richesse des soixante-dix dernières années condamne sa vie sur place dans les cinquante prochaines.

 

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