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La guerre fait rage. C'est la guerre depuis le 27 septembre en République d'Artsakh et elle s'étend à l'Arménie. L'autocrate Ilham Aliyev a lancé les armées de l'Azerbaïdjan à l'assaut de la petite et jeune enclave démocratique du Caucase. Ardemment soutenues par le sanguinaire Recep Tayyip Erdogan, les forces armées azéries sont supplées par des mercenaires djihadistes, recrutés en Syrie, chassés du Rojava où ils se sont tristement distingués. Dès les premières heures de l'offensive, les victimes parmi les civils se comptaient par dizaines. Cette guerre doit être stoppée.
Un cessez-le-feu et un processus de paix sont urgents; nul ne peut prévoir l'étendue des conséquences régionales et internationales dramatiques qui, déjà, se font sentir. Tout doit être mis en œuvre pour que le dialogue politique prenne le pas sur le déchaînement de la violence militaire. Aujourd'hui vendredi 9 octobre, Vladimir Poutine prend l'initiative et invite à Moscou les chefs de la diplomatie arménienne et azerbaïdjanaise à venir y conclure une première trêve.
Beaucoup, avec raison, rappellent les racines anciennes du conflit. Mais cette guerre, puisqu'il faut le rappeler, n'était pas inévitable.
Dans une déclaration publiée, moins d'un an auparavant, le Parti communiste français (PCF), inquiet des bruits de bottes venus de Bakou et des provocations successives du président turc, appelait instamment la France, membre du groupe de Minsk, à ouvrir une perspective politique avant que les armes ne sèment à nouveau la mort: «Parce que cela constituerait une première étape dans un indispensable processus d'apaisement et dans la résolution politique du conflit, le PCF demande instamment au Président de la République de prendre acte du processus démocratique par lequel la population du Haut Karabagh a proclamé la République. Le PCF engage également le gouvernement de la France à agir dans les plus brefs délais pour que la Haute-représentante de l'Union européenne pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, Federica Mogherini, porte avec notre pays cette reconnaissance devant les instances internationales multilatérales. Ces dernières doivent placer les populations du Haut Karabagh, menacées de génocide, sous protection internationale 1.» Rien n'a été fait, ou si peu, si mal, par les membres du groupe de Minsk pour prévenir l'escalade.
En juillet de cette année, des accrochages militaires à la frontière de l'Arménie et de l'Azerbaïdjan illustraient la volonté du président de cette dernière de quitter les pourparlers de paix et de s'imposer par la voie militaire. Mais tout en appelant à respecter le cessez-le-feu de 2016 et à «reprendre le dialogue», la France, notamment, a semblé déjà résignée à ce que la situation dégénère. En toutes connaissances de cause, puisque 6 mois avant, en janvier, elle s'était félicitée de la conclusion d'un joli contrat de vente d'armes avec Bakou.
Des leçons devront en être tirées. En attendant, aujourd'hui, alors que la désolation et la souffrance règnent, seules les vociférations nationalistes se font entendre.
Tandis qu'à Stepanakert et Erevan, les civils tentent de sauver leur vie, tandis que déjà la moité de la population du Haut Karabakh, soit près de 75 000 personnes, ont fui les bombardement vers l'intérieur du pays, que des centaines de réfugiés sont recueillis en Arménie, les rues de la capitale azérie résonnent, elles, d'appels au génocide. Un cauchemar.
Il est de notre devoir d'opposer à la guerre et la haine, un large et massif front de paix, de solidarité et de fraternité pour imposer que les populations bombardées soient placées sous protection internationale et que les armes se taisent.
Le PCF appelle l'ensemble des défenseur.e.s de la paix, des droits humains et du droit international en France, en Europe, en Arménie, en Azerbaïdjan, en Turquie, en Artsakh à s'unir et à agir pour un arrêt des combats et l'ouverture, sous égide l'ONU, de pourparlers de paix.
Monsieur le Président, la France qui a vendu et vend ses armes tant à l'Azerbaïdjan qu'à l'Arménie malgré l'embargo, ainsi qu'à la Turquie depuis des années, contribuant à une sur-militarisation du Caucase et du Moyen-Orient, a aujourd'hui le devoir et la responsabilité de contribuer à ouvrir un véritable chemin de paix car comme l'écrivit Jean Giono: «Il ne suffit pas d'être pacifiste, même si c'est du fond du cœur et dans une farouche sincérité; il faut que ce pacifisme soit la philosophie directrice de tous les actes de votre vie. Toute autre conduite n'est que méprisable lâcheté.»
Lydia SAMARBAKHSH
Responsable du secteur International du PCF
Depuis dix jours, l’Arménie et l’Azerbaïdjan se livrent des combats sans précédent depuis la première guerre du Karabakh, en 1994. Les acteurs et stratégies sont les mêmes.
Les affrontements entre Erevan et Bakou pour le Haut-Karabakh ont repris le 27 septembre. Une offensive militaire lancée par l’Azerbaïdjan a déclenché les plus importants combats depuis la fin de la guerre, en 1994. Ce premier conflit n’a jamais été véritablement éteint ou gelé : en 2016, le pays avait été secoué par une guerre de quatre jours. « On y retrouve exactement les mêmes acteurs, vingt-six ans plus tard, avec les mêmes revendications. Des deux côtés, on se préparait à reprendre les armes, en multipliant les déclarations belliqueuses et les tirs le long de la ligne de front chaque année. Les Arméniens ayant plus à perdre dans la remise en cause du statu quo », note Achot, habitant d’Erevan.
Les prémices de la première guerre débutent en 1988, en pleine perestroïka. Le nouveau dirigeant Mikhaïl Gorbatchev, qui est arrivé à la tête de l’Union soviétique en 1985, se voit confronté à un des premiers mouvements nationalistes. Pétitions, manifestations, l’enclave du Karabakh réclame son rattachement à la République soviétique d’Arménie en votant en février 1988 l’unification. Cette province peuplée en majorité d’Arméniens, qui a été rattachée à l’Azerbaïdjan en 1921 par Staline, dénonce l’attitude de Bakou à son égard. Ce mouvement est soutenu par d’importantes personnalités arméniennes et russes. Mais Gorbatchev refuse d’appliquer le principe d’autodétermination des peuples prévu dans la Constitution soviétique, par peur que cela n’ouvre d’autres demandes. Cette période d’affrontements politiques débouche sur des affrontements ethniques entre pogrom, comme à Soumgaït, contre des Arméniens, et nettoyage ethnique contre les Azéris. Avec l’effondrement de l’URSS, en 1991, naît le premier conflit « indépendantiste ». La république du Haut-Karabakh de l’Artsakh proclame son indépendance en 1992 et entraîne un conflit armé régional. Les deux parties se sont lancées dans une course à l’armement. L’Azerbaïdjan se tourne déjà vers la Turquie.
« Dans les années 1990, on a assisté aux mêmes scènes de maisons détruites soufflées par des tirs de missile ou d’obus, d’immeubles en feu, d’écoles en cendres, d’enfants, de femmes et de personnes âgées qui fuient en désordre les zones des combats dans des vieux bus hors d’âge. Mais aussi de caves et de souterrains sous les maisons abritant à la lueur de maigres bougies ceux qui n’ont pas pu fuir », se remémore le journaliste Jean Royan qui a couvert le conflit. À l’époque, la ville de Stepanakert avait déjà essuyé d’importants tirs d’artillerie. Mais elle était alimentée en eau et en électricité, à la différence d’Erevan. La capitale arménienne, qui avait essuyé un violent séisme en 1988, subissait également un terrible blocus mené par Bakou, la privant de nombreuses choses. « À ces situations dramatiques pour les civils, s’ajoutait à l’époque un flot ininterrompu des réfugiés qui erraient sur les routes, Arméniens d’Azerbaïdjan ou Azéris d’Arménie. Des familles se retrouvaient dans des abris de fortune, dans un dénuement total », poursuit le reporter.
Mais, sur le terrain, la différence est nette entre les deux périodes. Lors du premier conflit, les Arméniens, avec les troupes d’autodéfense du Karabakh soutenues par Erevan, se trouvaient à l’offensive et ont réussi à s’imposer militairement. Aidés par les Russes, ils avaient réussi à se saisir d’une zone tampon autour de l’enclave. Cette fois-ci, Bakou est à l’offensive pour récupérer les territoires azéris, dénonçant l’inertie du groupe de Minsk, créé en 1992 pour trouver une issue diplomatique (dépendant de l’OSCE) et chauffé à blanc par Ankara. Pour l’enseignant-chercheur à Sciences-Po et journaliste Gaïdz Minassian, « la différence réside aussi dans le fait que les deux États (Arménie et Azerbaïdjan) ont fait l’expérience d’un processus de paix, d’un cessez-le-feu même précaire et de discussions diplomatiques. L’autre nuance entre les deux conflits porte sur les équipements militaires beaucoup plus importants et sophistiqués, notamment du côté azéri, et sur un Caucase intégré à la mondialisation ».
Ce nouveau conflit utilise les mêmes méthodes. Le recours à des mercenaires turkmènes ou syriens et l’appui de conseillers militaires sont à l’œuvre du côté azerbaïdjanais via les autorités turques. Leurs forces sont équipées de drones de fabrication israélienne, armes qui n’existaient pas à l’époque du conflit. « En 1991, les Azéris affirmaient que des mercenaires russes appuyaient les troupes arméniennes, qui recevaient des primes pour chaque matériel militaire détruit. Mais les militaires azéris rejetaient toute accusation sur l’appui dans leurs rangs de conseillers turcs, justifiant que de nombreux officiers étaient des anciens d’Afghanistan avec suffisamment d’expérience du terrain… » rappelle Jean Royan.
Le bilan de la première guerre a atteint les 30 000 morts et plus d’un million de réfugiés en Azerbaïdjan et en Arménie. Un cessez-le-feu est signé à Moscou le 16 mai 1994, Bakou acceptant l’arrêt des combats pour éviter une déroute. Erevan obtient le contrôle de l’ancienne région autonome du Haut-Karabakh et des territoires adjacents. Cela représente jusqu’à 14 % du territoire de l’ancienne République soviétique d’Azerbaïdjan. « Le rôle de la Turquie a également évolué. Ankara a souhaité casser ce processus de paix pour s’afficher, comme sur d’autres dossiers, comme un acteur incontournable dans ce conflit au même titre que la Russie. Est-ce dans le groupe de Minsk ou dans un autre format avec la Russie ? » interroge Gaïdz Minassian, auteur du livre les Sentiers de la victoire. Aujourd’hui, on déplore déjà plus de 300 morts.
Prix Nobel de la paix 2018 pour son travail de réparation des femmes victimes de viol en RDC, le docteur Denis Mukwege se bat pour la fin de l’impunité dans son pays.
Denis Mukwege Gynécologue et prix Nobel de la paix 2018
Depuis quinze ans, plus de 40 000 femmes ont été soignées par vos équipes alors qu’une paix a officiellement été signée en RDC en 2003. Où en est cette guerre quasi oubliée ?
Denis Mukwege La situation politique, sécuritaire et humanitaire est très grave, pourtant nous percevons un effet de fatigue et une certaine lassitude de la communauté internationale, malgré le fait que la situation humanitaire est encore l’une des plus tragiques au monde, notamment en termes de personnes déplacées (plus de 5 millions) et alors que climat sécuritaire et politique reste très préoccupant et volatil. Sur le plan politique, les élections de 2018, qui ont eu lieu après deux ans de retard, n’ont été ni transparentes ni régulières, et les institutions d’appui à la démocratie telles que la Cour constitutionnelle et la Commission électorale ont perdu leur légitimité et leur crédibilité. Au niveau sécuritaire, il existe toujours plus d’une centaine de milices qui sèment la terreur dans de nombreuses régions. Un récent rapport du Bureau conjoint des Nations unies pour les droits de l’homme en République démocratique du Congo (RDC) s’alarme de la détérioration de la situation des droits humains dans les provinces en conflit, en particulier en Ituri, au Nord et au Sud Kivu, mais aussi au Tanganyika, et a documenté plus de 4 000 violations et atteintes aux droits de l’homme sur l’ensemble du territoire de la RDC au cours du premier semestre de l’année 2020, parmi lesquelles on compte un bilan humain très lourd de plus 1 300 morts ! Chez nous, les chiffres ne diminuent pas du tout. Rien qu’au mois d’août, au niveau de mon hôpital à Panzi et dans les centres hospitaliers que nous gérons dans le Nord et le Sud Kivu, nous avons reçu 248 victimes de violences sexuelles, ce qui fait en moyenne 8 par jour. Pourtant, nous pensons que le chemin de la paix existe, et il passera par la justice, par une gouvernance démocratique et un commerce transparent et responsable des minerais.
Votre ancien hôpital, celui de Lemera, a été la cible d’une violente attaque en 1996, que s’est-il passé ?
Denis Mukwege Le 6 octobre 1996, le monde dans lequel j’avais commencé ma vie professionnelle s’est écroulé : plus de 35 de mes patients et des membres du personnel soignant de l’hôpital de Lemera, dans la province du Sud Kivu, ont été sauvagement massacrés. Cette date restera pour toujours gravée dans ma mémoire et marque le début de la première guerre du Congo (1996-1998) et des atrocités de masse commises dans notre pays. Les troupes de l’Alliance des forces démocratiques pour la libération du Congo (AFDL) qui se présentaient comme des « libérateurs », dirigées par Laurent Désiré Kabila et soutenues par le Rwanda commencèrent leur marche à travers le pays pour en chasser les Hutus et mettre fin à l’ère du maréchal Mobutu. Ce crime de guerre commis à l’hôpital de Lemera est répertorié dans le rapport Mapping des Nations unies parmi les violations graves des droits de l’homme et du droit international humanitaire commises en RDC entre 1993 et 2003. Vingt-quatre ans après ce massacre, rien n’a été fait pour rendre justice aux victimes et à leur famille, ni pour honorer la mémoire de ceux qui reposent dans une fosse commune sans la moindre plaque commémorative. C’est inacceptable.
Depuis, vous avez été vous-même victime de plusieurs tentatives d’assassinat. Pouvez-vous nous raconter de quelle manière votre vie a été menacée ?
Denis Mukwege Dans un monde d’inversion de valeurs, où la manipulation et les mensonges sont légion, dire la vérité, dénoncer la violence et les massacres, et réclamer la fin de l’impunité nous exposent en effet à diverses menaces et intimidations. Le 26 octobre 2012, j’ai échappé de justesse à une tentative d’assassinat. Ma famille a été séquestrée et mon gardien et ami de toujours est d’ailleurs mort en cherchant à me sauver la vie. Plus récemment, notre plaidoyer pour la justice transitionnelle dérange ceux qui ont intérêt à maintenir le chaos organisé en RDC et qui cherchent à éluder la justice et leurs responsabilités. J’ai reçu divers messages menaçants, ainsi que mon épouse et certains proches collaborateurs.
Le conflit en RDC est considéré comme le plus meurtrier depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, et vous tentez de mettre en lumière ces crimes en exhumant le rapport Mapping, rendu public en 2010. Comment expliquez-vous cette indifférence de la communauté internationale ?
Denis Mukwege Aucune famille, aucune communauté n’a été épargnée par ces décennies de conflit armé. Il faut briser ce cycle de la violence et de l’impunité. Personne ne peut dire que l’on ne sait pas ce qu’il se passe en RDC. La communauté internationale y est largement présente depuis des décennies. Les sources d’information crédibles et fiables ne manquent pas. Jour après jour, mois après mois, année après année, de nouvelles violations des droits humains sont documentées, rapportées et analysées. L’absence de mise en œuvre des recommandations formulées dans le rapport Mapping est particulièrement choquante quand on connaît l’ampleur et la gravité des crimes commis. Il faut se souvenir que, même avant sa sortie, des pays incriminés dans le rapport ont fait de fortes pressions pour que ce dernier ne soit pas publié. Nous saluons le courage de la Haut-Commissaire des Nations unies en fonction à l’époque, Me Navi Pillay, d’avoir néanmoins publié le rapport en 2010, mais nous déplorons l’absence de réaction de la communauté internationale et ce système de à « deux poids, deux mesures » qui lui fait perdre toute crédibilité face aux injustices de notre monde.
Paul Kagame a violemment réagi à la publication du rapport Mapping, et accuse ses auteurs de vouloir transformer le Rwanda de pays victime en pays bourreau. Comprenez-vous cette colère de Kigali ?
Denis Mukwege Nous pensons que seule une justice indépendante et impartiale est habilitée à établir les chaînes de responsabilités militaires et politiques pour les crimes graves répertoriés dans le rapport Mapping. Personne ne cherche à minimiser la gravité du génocide rwandais, mais chacun doit répondre de ses actes. Des crimes graves ont aussi été commis en RDC par toute une série d’acteurs étatiques et non étatiques, congolais et étrangers. De nombreuses armées étrangères, y compris celles du Rwanda et de l’Ouganda, sont intervenues sur le territoire congolais. Ces mêmes pays ont téléguidé des milices en RDC. Ces faits sont documentés et connus de tous. Chacun doit faire face à ses responsabilités.
La diplomatie américaine en RDC vient d’affirmer soutenir « les efforts visant à obtenir justice et à mettre fin à l’impunité », en se référant explicitement à ce même rapport Mapping. Avez-vous le sentiment que vos efforts sont en train de changer concrètement la situation ?
Denis Mukwege Les lignes commencent, en effet, à bouger. L’ambassadeur Hammer est venu nous rendre visite à l’hôpital de Panzi récemment et a réaffirmé que les États-Unis soutiennent les efforts visant à obtenir justice et à mettre fin à l’impunité en RDC. Il faut saisir ce « momentum », et nous sommes avant tout très inspirés par le réveil de la population congolaise, qui s’engage avec de plus en plus de conviction pour exiger que la justice soit rendue. À l’occasion des dix ans de la publication du rapport Mapping, le 1er octobre 2020, des manifestations pacifiques ont eu lieu à Bukavu, à Goma et dans de nombreux endroits du pays, et même en Europe, à Paris, à Bruxelles et à Genève, ce qui nous donne beaucoup d’espoir. Nous sommes encore au début de ce processus de justice transitionnelle, qui, nous l’espérons, nous amènera de la dictature à la démocratie et de la guerre à la paix.
À la tête d’une fortune de 28 milliards d’euros, la dynastie nordiste n’a pas la main légère sur les suppressions de postes. Alors que le richissime clan accélère la réorganisation de ses entreprises de la distribution, les salariés floués montent au créneau. Nos explications.
Les uns ont décidé de faire entendre leur colère ce jeudi devant le siège d’Auchan à Croix (Nord), alors que 1 475 salariés de l’enseigne risquent de perdre leur emploi. Les autres, calfeutrés dans leurs grandes maisons à 300 mètres de la frontière belge, font profil bas. Habituée à la discrétion, la grande famille des Mulliez est aujourd’hui épinglée de toute part, et son Association familiale (AFM), qui regroupe plus de 700 cousins actionnaires, plus que jamais pointée du doigt pour ses pratiques sociales d’un autre temps. Leur nom n’est peut-être pas familier, il se cache pourtant derrière plusieurs centaines d’enseignes, parmi lesquelles le géant de la grande distribution, Décathlon, Leroy Merlin, Kiabi, Boulanger ou encore Flunch. « Il n’y a pas d’équivalent en termes de taille et d’organisation », résume Bertrand Gobin, journaliste indépendant spécialiste des Mulliez.
Leur pactole de 28 milliards d’euros, qui les hisse en sixième position des plus grandes fortunes françaises, ne les empêche toutefois pas de tailler lourdement parmi leurs effectifs. À Auchan, si la surprise du PSE est minime, la désillusion reste grande. Depuis 2019, les travailleurs en sont à leur troisième réduction d’effectifs. « Le climat est très anxiogène », constate Gérald Villeroy, délégué syndical central CGT des magasins au rossignol. Et le dernier épisode, annoncé en septembre alors que les salariés ont continué à travailler au plus fort de la crise sanitaire, a achevé d’entamer le moral des employés. Chez Alinéa, placé en redressement judiciaire en mai dernier, 992 personnes ont été mises à la porte. Dans les magasins historiques de la famille Phildar, 125 salariés sur 211 sont laissés sur le carreau.
Une douche froide pour les milliers de travailleurs employés par la richissime famille, qui accusent les cousins actionnaires d’avoir sauté sur l’épidémie pour se délester de leurs personnels. Si le prétexte et l’arme du crime sont tout trouvés, grâce à l’ordonnance de mai 2020 qui permet à des patrons de reprendre leur propre entreprise, ces plans sociaux à répétition font toutefois partie d’une manœuvre au long cours dont les associés ne se sont jamais cachés.
« Leur stratégie a toujours été de se séparer des entreprises qui perdent de l’argent avant qu’elles ne fassent trop de mal », analyse l’économiste Benoît Boussemart. Les magasins de laine, qui ne séduisent guère plus depuis des années, ou l’Ikea français, qui fait pâle figure face à la concurrence depuis dix ans, ont donc été des victimes privilégiées. Alors que le modèle des grands ensembles commerciaux, sur lequel les Mulliez ont bâti leur fortune, s’essouffle, Auchan était sans surprise le prochain sur la liste. « Environ 90 % de leurs actifs reposent sur ce modèle des centres commerciaux, construit autour d’un hypermarché. Mais entre la vente en ligne, le regain d’intérêt pour les commerces de proximité et les circuits courts, ce fonctionnement n’a plus vraiment la faveur des consommateurs », indique Bertrand Gobin. « Les modes de consommation ont évolué, il y a une forte demande des actionnaires pour générer du cash et leur seule variable d’ajustement est le personnel », abonde le cégétiste Gérald Villeroy. La direction de l’enseigne, qui évoque un « plan de transformation », ne semble pas démentir.
Le principe de l’Association familiale Mulliez, c’est “tous dans tout”. Tous les associés sont solidaires des différents groupes, en investissant un peu partout, mais les salariés n’en profitent pas.
Bertrand Gobin, journaliste indépendant
Du côté des travailleurs licenciés, la justification peine à convaincre, et l’horizon d’un repositionnement dans une des très nombreuses enseignes de la dynastie Mulliez s’est dilué dans la complexité de l’organisation des sociétés. L’Association familiale Mulliez a en effet toujours refusé de se voir officiellement constituée comme un groupe. « Le principe de l’AFM, c’est “tous dans tout”. Tous les associés sont solidaires des différents groupes, en investissant un peu partout, mais les salariés n’en profitent pas », note Bertrand Gobin. La myriade d’enseignes des Mulliez est en effet organisée dans un schéma plus qu’opaque de holdings et surholdings, rendant l’ensemble incompréhensible pour les salariés et surtout, rendant les différentes marques strictement indépendantes les unes des autres. Impossible donc pour un salarié d’Auchan licencié de prétendre à un poste à Decathlon ou Leroy Merlin, les véritables locomotives de la famille. « On veut absolument faire reconnaître l’AFM comme un vrai groupe. Pendant le confinement, il y a eu des solidarités entre marques, des salariés de Norauto sont venus filer un coup de main à Auchan. Il faut aller jusqu’au bout de la démarche et empêcher les licenciements », martèle le syndicaliste Gérald Villeroy.
Si les Mulliez se vantent d’accorder à leurs licenciés de généreuses conditions de départ, les cousins milliardaires semblent tout de même loin de porter leurs travailleurs dans leur cœur. « Ils sont pragmatiques, ils se laissent guider par les résultats », assure le spécialiste Bertrand Gobin. Les comptes de la famille, qui ont gonflé de 27 % en six ans, ne contrediront pas leur démarche. Mais les salariés de toutes les enseignes de la dynastie Mulliez, réunis ce jeudi auprès de leurs collègues d’Auchan, sont bien déterminés à faire changer d’avis leurs richissimes patrons.
C’est au début du XXe siècle qu’a débuté l’empire des Mulliez, avec la création des filatures de Saint-Liévin, proches de Roubaix, dans le Nord, par l’arrière-arrière-grand-père Louis. L’argent gagné a été réinvesti et a donné naissance à de grandes pointures de la distribution, comme Phildar et Auchan. En 1955, les héritiers décident de fonder l’Association familiale Mulliez, pour gérer les intérêts financiers grandissants des sociétés. La règle pour y être associé, encore valable aujourd’hui : être un Mulliez de sang ou d’alliance. Si l’empire familial a des allures de success-story et que les cousins actionnaires sont érigés en héros de l’entreprenariat, l’économiste Benoît Boussemart tempère : les associés ont aussi su exploiter leurs travailleurs à coups de faibles rémunérations et de contrats précaires.
Pour faire grandir leur fortune, les propriétaires d’Auchan sont aussi devenus experts en optimisation fiscale et ont franchi la frontière. Entretien.
Marco Van Hees Député du PTB, spécialiste des questions fiscales
Marco Van Hees Cela fait des années que je travaille sur les grandes fortunes présentes en Belgique. Pour les exilés fiscaux français, c’est une destination particulièrement prisée, quasiment au même titre que la Suisse. Et les Mulliez sont le cas le plus emblématique des exilés français présents sur notre sol. Ils y vivent depuis plusieurs décennies.
Marco Van Hees Ils habitent rue Reine-Astrid, à Néchin, juste à côté de la frontière. Cette rue a même été rebaptisée « avenue des Mulliez » par les habitants du coin ! Pour la petite histoire, tous les Mulliez logent au côté pair de la rue, pour profiter de l’exposition plein Sud… En mai 2019, nous avions mené une action commune avec le PCF dans la ville, pour braquer les projecteurs sur cette situation. J’ai eu l’occasion de discuter avec le maire socialiste de la commune, il s’accommode visiblement très bien de leur présence.
Marco Van Hees Au départ, il s’agissait d’échapper à l’impôt sur la fortune (ISF) et à la taxation des plus-values financières. La suppression de l’ISF chez vous n’a pas entamé l’attractivité de notre pays pour autant : il est toujours très utile d’habiter en Belgique pour échapper à toutes sortes de taxes. Par exemple, les holdings bénéficient d’un traitement de choix : sauf exception, on ne taxe pas les plus-values sur actions, qu’elles soient détenues par des personnes physiques ou des sociétés. Nous disposons également du système des RDT, c’est-à-dire les revenus définitivement taxés, qui est une déclinaison belge du régime mère-fille : lorsqu’une société reverse des dividendes à sa maison mère, ce n’est pas taxé. Même chose pour les plus-values en cas de revente de participations. Patrick Mulliez, frère du fondateur de l’enseigne, détient une holding ici. Il y a quelques années, elle avait réalisé 373 millions d’euros de bénéfices, pour un impôt de… 2 euros ! La plupart du temps, le chiffre est de zéro.
Marco Van Hees Cela fait des années que nous réclamons la création d’un véritable impôt sur les millionnaires. À force de taper sur le clou, on a fini par convaincre les socialistes et les écolos (appartenant à la coalition au pouvoir – NDLR), de mettre la question à l’ordre du jour. Mais on voit bien que la droite veut vider cet impôt de sa substance, pour en faire une taxe placebo. Pourtant, les sommes en jeu sont considérables. D’après nos calculs, un impôt sur les grandes fortunes pourrait ramener 8 milliards d’euros, en sachant que la fortune cumulée des 1 % les plus riches atteint les 500 milliards d’euros ! La taxe étudiée par le gouvernement ne rapporterait que 150 à 350 millions d’euros, autant dire qu’il y a de la marge… Il faudrait par ailleurs des mesures en matière de taxation des grandes sociétés, avec une suppression de l’ensemble des niches fiscales. Nous avons besoin, enfin, d’une politique européenne beaucoup plus ferme avec les paradis fiscaux. L’Union européenne possède des paradis fiscaux redoutables – Luxembourg, Pays-Bas, Irlande, Malte, ou Belgique, dans une moindre mesure. Tous ces pays taxent très peu les multinationales. Il faut absolument en finir avec cette impunité.
Entretien réalisé par Cyprien Boganda
La fiscalité mise en place depuis 2017 a fait exploser les revenus du capital des 0,1 % les plus riches.
Voilà une étude qui pourrait hâter la disparition de France Stratégie au profit du nouvellement créé commissariat au Plan, confié à François Bayrou, sans doute plus fidèle au pouvoir macronien. L’organisme placé auprès du premier ministre pour « évaluer, anticiper, débattre et proposer » les politiques publiques a publié ce jeudi un rapport qui démontre, s’il fallait encore une preuve, que la politique fiscale mise en place par Emmanuel Macron depuis le début de son quinquennat est au service des foyers fiscaux les plus riches, qui en ont bien profité.
Examiné dans le rapport publié ce jeudi, l’effet miroir entre les réformes fiscales de 2013 (« barémisation » des prélèvements sur les revenus du capital, instaurant une plus grande progressivité de l’impôt) et de 2017 (fin de l’ISF et mise en place du prélèvement forfaitaire unique – PFU –, ou flat tax, capant les prélèvements sur les revenus du capital) fait particulièrement mal au pouvoir en place. La note démontre qu’à la forte baisse de distribution de dividendes (de 22 milliards en 2012 à 13 milliards en 2013) sous Hollande a succédé une explosion de ces versements sous Macron : + 14 milliards d’euros en 2017, + 23 milliards en 2018. Or, deux tiers de ces dividendes ont été captés par les 0,1 % des plus riches et un tiers par les 0,01 % d’ultra-riches. Avant 2017, ces plus aisés étaient certes déjà bien servis en revenus financiers, mais dans une moindre proportion : la moitié des dividendes étaient concentrés sur les 0,1 % et un « petit » quart sur les 0,01 %.
« Plusieurs éléments laissent clairement penser que la forte hausse des dividendes reçus par les ménages en 2018 est en partie causée par la réforme du PFU, même si cet effet causal n’est pas encore scientifiquement et formellement établi », indique France Stratégie. Autre élément à charge contre l’actuelle politique fiscale, le rapport « n’observe aucun effet significatif » de la flat tax « sur l’investissement de ces entreprises », tout comme aucun effet négatif significatif n’avait été établi sur l’investissement après la réforme de 2013. La transformation de l’impôt sur la fortune (ISF) en impôt sur la fortune immobilière (IFI), laissant ainsi de côté les revenus du capital financier, ainsi que la création de la flat tax, reposait pourtant sur cet argument d’investissement des plus riches dans l’économie réelle et son effet induit, le fameux ruissellement. « Les levées de fonds de capital-investissement auprès des investisseurs particuliers plafonnent depuis 2016, après une forte progression de 2010 à 2016 », note ainsi froidement France Stratégie.
Journée nationale d’action des élus et militants communistes dans toute la France. Dans 60 départements , comme ici à Valenciennes, nous avons demandé des masques gratuits, des ouvertures de lits et des embauches dans nos hôpitaux. Notre pays est riche mais la pauvreté augmente! Nos TPE, PME, nos communes ont besoin d’être soutenu à 100%. Notre industrie peut relocaliser et créer des emplois. La Nation tout entière doit se mobiliser !
Dans près de soixante départements, le Parti communiste a organisé de nombreux rassemblements ce week-end pour exiger des actes concrets du gouvernement pour l’emploi comme la santé.
Valenciennes, Toulouse, Paris, envoyés spéciaux.
« Masqués mais pas muselés ! » Le mot d’ordre lancé par le PCF en plein confinement, pour les manifestations au balcon du 1er Mai, s’est invité dans la rue ce week-end. Une formule lancée par Fabien Roussel, le secrétaire national de la formation, depuis Valenciennes (Nord), où s’est tenu samedi matin un rassemblement, parmi une centaine dans 60 départements. « Le PCF se mobilise dans toute la France devant les préfectures, les sièges du Medef, les hôpitaux pour porter des revendications locales, demander plus de moyens pour faire face à la crise sanitaire mais aussi pour dénoncer des plans de licenciements terribles », explique le député du Nord. « Nous voulons aussi alerter sur la pauvreté qui augmente de 30 à 40 %. Alors que la France est la 5e puissance mondiale, c’est inacceptable », s’indigne-t-il, rappelant que la priorité de son parti n’est pas pour l’heure aux « élections mais à l’action, à porter les revendications de nos concitoyens à mieux vivre et à faire face à la crise ».
« On nous enlève tous nos droits, tous les plaisirs de la vie, sous prétexte de garder la ’’chance de travailler’’. Mon mari est chez Bombardier et du fait de la fusion avec Alstom, ses chèques-vacances, ses primes sont reniés », explique Sylvie Vallini parmi les militants et élus qui, malgré les nouvelles restrictions entrées en vigueur le matin même, ont tenu à être présents dans la sous-préfecture du Nord.
À ses côtés, Nathalie travaille pour les services sociaux de la commune d’Onnaing et constate chaque jour « que le nombre de demandes d’aide alimentaire augmente. On voit des travailleurs dont le salaire n’est pas suffisant pour subvenir aux besoins de leur famille », déplore-t-elle, alors que selon Émile Vandeville, le secrétaire de l’union locale CGT, la situation se dégrade à vue d’œil. « Des PSE sont en train de se mettre en place, avec un patronat qui demande aux salariés soit plus de flexibilité, avec une augmentation du temps de travail et une baisse de salaires, soit des suppressions d’emplois. Dans le secteur, SKF prévoit des licenciements, et Auchan, ici, c’est une vingtaine d’emplois en moins », détaille le syndicaliste avant de se joindre à la délégation reçue en sous-préfecture, où de nombreuses propositions – de la gratuité des masques à la mise en place de dispositifs de contrôle des aides aux entreprises – sont exposées. « Le gouvernement met sur la table 570 milliards d’euros d’argent public, nous demandons tout simplement qu’ils servent à lutter contre la pauvreté et la misère, à créer des emplois et à donner enfin les moyens à nos hôpitaux de faire face », résume Fabien Roussel.
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Près de 900 kilomètres plus au sud, le PCF a choisi, pour faire entendre ce message, de se rassembler devant l’agence Air France, implantée au cœur de Toulouse depuis 1945 et refaite à neuf il y a deux ans. Un lieu symbolique : la compagnie aérienne en a annoncé la fermeture au printemps prochain. « Air France reçoit 7 milliards d’aides de l’État et veut supprimer 7 500 postes ! », s’insurge Pierre Lacaze, conseiller municipal PCF. « Les salariés des sites toulousains sont inquiets pour le présent et l’avenir, confie Jean-Claude Chazottes, retraité d’Air France. Alors qu’une réduction du temps de travail à 32 heures et un retour à la retraite à 60 ans permettraient des embauches, notamment de jeunes. »
Participent aussi à l’initiative, parmi les militants communistes, des salariés de l’aéronautique et de l’agroalimentaire. Michel Molesin, salarié d’Airbus, rappelle que l’avionneur européen veut supprimer 5 000 emplois en France alors que son carnet de commandes est plein à craquer. « Il y a une crise sanitaire et le patronat en profite à mort ! », dénonce-t-il. Selon lui, la situation du constructeur aéronautique est loin d’être catastrophique : « En septembre, Airbus a livré 57 appareils, c’est-à-dire que la production est revenue à 80 % de son niveau de septembre 2019. »
La précarité, en revanche, gagne bel et bien du terrain, constate Luc Ripoll, retraité depuis à peine quelques jours d’une entreprise agroalimentaire : « On assiste à une baisse de la consommation alimentaire. Même le bio connaît une décroissance ! Des gens manquent de moyens pour accéder à une alimentation de qualité. » Dans un tel contexte, « le plan de relance ne doit pas financer les suppressions d’emplois alors que les grands groupes ont de la trésorerie », ajoute Pierre Lacaze. La veille, Jean Castex, en déplacement officiel à Toulouse et accompagné de plusieurs ministres, a annoncé l’arrivée de 111 policiers supplémentaires dans la Ville rose. « Mais il faut aussi embaucher dans les hôpitaux et les Ehpad, poursuit le responsable PCF. On manque de lits. Quand Macron dit que ce n’est pas un problème de moyens mais d’organisation, il prouve qu’il est coupé de la population. »
Dans le 12e arrondissement de Paris, c’est justement devant l’hôpital Saint-Antoine que le PCF a appelé à manifester pour soutenir le système public de santé et exiger des recrutements. « De l’argent pour l’hôpital public, pas pour le capital ! » peut-on lire sur les pancartes brandies. Après la première vague de l’épidémie, Aïcha Accoun, infirmière et secrétaire CGT à Saint-Antoine, se dit « blessée et exténuée ». Un état de fait dû au manque criant de moyens : « On demande l’ouverture de lits mais déjà qu’ils arrêtent d’en fermer et de mutualiser les services ! » Camille, orthophoniste dans un hôpital parisien, ne veut pas « y laisser (sa) santé en soignant celle des autres ». Mais, faute d’embauches massives, « c’est ce qui est en train de se passer », souffle celle qui pointe également les difficultés qu’ont les soignants pour se loger, particulièrement à Paris. « Arrêtez d’applaudir et venez nous soutenir dans la rue le 15 octobre », harangue Isabelle, soignante à l’hôpital Trousseau.
Dans la capitale, la situation sanitaire est particulièrement préoccupante, et surtout antérieure à la crise du Covid-19. « Depuis 2016, c’est 3 000 suppressions de postes à l’AP-HP », enrage Igor Zamichiei, secrétaire fédéral du PCF Paris. Les hôpitaux ont besoin de personnel ? « Prérecrutons des jeunes pour former le personnel de santé de demain », propose Léon Deffontaines, secrétaire général des JC. Plus largement, les communistes parisiens demandent, outre des recrutements et une hausse des salaires de 300 euros, un moratoire sur les groupements hospitaliers de territoire en Île-de-France. Nicolas Bonnet-Oulaldj, président du groupe PCF au conseil de Paris, veut aussi construire un « réseau de centres municipaux de santé » dans le but de « désengorger les services d’urgences ».
Pour les communistes, ces rassemblements ne sont « qu’un début », appelé à se poursuivre sur les réseaux sociaux comme sur le terrain. « Notre priorité est de construire des mobilisations avec les salariés et dans les quartiers », assure Pierre Lacaze à Toulouse. Le combat se mènera aussi au Parlement. À l’occasion de l’examen du projet de loi de finances, « on se battra, promet la sénatrice Michelle Gréaume depuis Valenciennes. L’argent destiné à soutenir les entreprises doit faire l’objet de contreparties, d’engagements pour l’emploi et la formation ».
Dans le Pays de Morlaix, au moins 5 camarades du PCF feront le déplacement pour le souvenir des fusillés de Châteaubriant le dimanche 18 octobre 2020.
Il y a 79 ans avait lieu dans la France occupée une exécution massive qui eut un retentissement considérable jusqu’au-delà des frontières. Appliquée par le gouvernement vichyste selon le tout nouveau « Code des otages », elle touchait, "les indésirables", en majorité des communistes et des syndicalistes. Ils furent fusillés à Nantes, à Souge, au Mont-Valérien et à Châteaubriant. Le plus jeune, Guy Môquet, n’avait que 17 ans !
Dimanche 18 octobre 2020, à partir de 13 h 30, aura lieu la cérémonie d’hommage aux fusillés de Châteaubriant (44), sur le site de La Sablière, sous la présidence d'Odette Nilès, ancienne internée, et d'Alain Hunault, maire de Châteaubriant, président de la Communauté de Communes Châteaubriant-Derval, en présence de Ian Brossat, pour le Parti communiste français, ainsi que de nombreux élus locaux et nationaux et de syndicalistes.
En ces temps difficiles de pandémie virale où les associations souffrent dans leur vie collective, il est important de ne pas passer sous silence le combat de ces hommes pour une France libre, solidaire et fraternelle. La France du programme « les Jours heureux » et de la Sécurité sociale qui assurait l'accès à la santé pour tous. La santé c'est la vie.
Cette année, l’évocation artistique présentée par les Tréteaux de France, scène dramatique nationale, a pour thème "La fille aux planches", écrite par Evelyne Loew et interprétée par Marion Amiaud et Babette Largo. Le texte relate la rencontre entre l'esprit d'Esther Gaudin, jeune femme de 1941, et Lou, jeune femme d'aujourd'hui, pour parler du monde d'après !
L’Amicale et les services de la Préfecture et de la Mairie veillent à assurer une cérémonie dans le respect des gestes sanitaires. La sécurité est notre priorité à tous.
Son entrée est libre. Port du masque obligatoire.
Contact : Carine Picard-Nilès, secrétaire générale de l'Amicale
sg.amicale.chateaubriant@gmail.com
Page Facebook : https://www.facebook.com/amicalechateaubriant/
Site Internet : http://www.amicaledechateaubriant.fr/
La BD "Immortels" sur Châteaubriant de Camille Ledigarcher
et Gaëlle Richardeau (suivie d'un dossier pédagogique de Dominique Comelli) peut être commandée à comitesouvenir@orange.fr ou www.resistance-44.fr
Dessin d'Eric Appéré pour Rouge Finistère par rapport à la restriction des horaires d'ouverture en préfecture pour les demandeurs d'asile par l'ancien préfet Lelarge pendant l'été, restriction d'accueil en préfecture contre lesquelles avait protesté le PCF par la voix d'Yvonne Rainero, secrétaire de section PCF de Quimper et élue à Quimper
« L’étranger vole le travail des Français. » « L’étranger criminel. » Les fantasmes ont la vie dure. Ce dont on parle, c’est pourtant de femmes, d’hommes, d’enfants qui décident de quitter leur pays pour venir vivre en France. En contact quotidien avec les difficultés qu’ont une partie de ces personnes à se faire une place dans la société, les associations de solidarité ont décidé d’organiser, à Quimper (Finistère), une journée d’information et de débats, « Pour en finir avec les préjugés sur l’accueil des étrangers ».
Sept stands seront installés et huit discussions sont programmées. Ils s’adressent à tous ceux qui s’intéressent à la question mais aussi et surtout à ceux qui n’ont pas vraiment d’opinion. « Nous sommes des associations de terrain, nous sommes en contact avec ces gens et nous constatons que leurs droits sont bien souvent bafoués », explique David Torondel, représentant le collectif des associations.
Et les situations sont parfois dramatiques. « Nous avons des familles qui sont insérées dans la société, avec des enfants scolarisés et qui n’ont pas pu renouveler leur titre de séjour. Ils ne représentent aucune menace, mais ils risquent de perdre leur logement. » Une situation bien réelle, dans le département du Finistère : la Cimade connaît « trois à quatre familles » dans cette situation, Droit d’asile « quatre »… Il y a aussi des jeunes, dont la minorité n’a pas été reconnue après souvent des mois de procédure, qui se retrouvent à la rue. « Ils n’ont plus aucun droit et ne peuvent même pas faire appel au 115. »
Pour ces associations, l’accueil inconditionnel « n’est pas une utopie. C’est un choix pragmatique : il n’y a que comme cela qu’ils s’inséreront dans la société ».
Résistante, devenue journaliste, la grand reporter de l’Humanité a couvert les guerres coloniales. Poète, écrivain, elle a été la première femme à repousser aussi loin les limites de l’investigation.
Lorsque Madeleine Riffaud devient journaliste, Elsa Triolet lui donne ce conseil : « Pour ce métier, pas besoin d’aller à l’école, mais il faut lire deux textes, Choses vues, de Victor Hugo, et le Nouveau Testament. » C’est la Libération. La fin de la clandestinité est douloureuse pour celle qui se faisait appeler Rainer au sein de la Résistance. En 1940, l’adolescente, fille unique d’un instituteur revenu amputé de la boucherie de 1914-18, se fait agresser par des soldats allemands. Un soudard aux gestes déplacés l’humilie en public. « C’était la première fois qu’un acte violent était commis sur moi par un soldat ennemi. Je ne l’ai pas admis. » Elle rejoint les FTP et écrit ses premiers poèmes. « En parachutage, on recevait des armes et, sur papier bible, des poèmes d’Éluard. La poésie de cette époque a su se rendre tellement persuasive qu’elle nous poussait en avant. »
Début 1944, elle entre en même temps au Parti communiste et dans la lutte armée. Elle apprend le massacre d’Oradour-sur-Glane, village de sa jeunesse. « Je pensais à cela quand je pédalais dans Paris, aux brûlés vifs que je connaissais. Éluard parlait des “armes de la douleur”. C’était exactement cela. J’ai roulé jusqu’à ce soldat allemand sur le pont de Solferino. J’ai voulu qu’il me regarde. Il a tourné son visage vers moi. À ce moment-là, je lui ai tiré deux balles dans la tempe gauche. » Le 23 juillet, ce visage d’ange qui n’a pas encore vingt ans exécute un officier SS en plein Paris. Un milicien la rattrape et la livre inconsciente à la Gestapo. Elle se réveille rue des Saussaies. « Un endroit dont on ne peut pas parler tranquillement », confie-t-elle encore aujourd’hui, et qui décidera du reste de son existence. Privée de sommeil, soumise à des décharges électriques, elle assiste aux tortures de ses camarades. Elle est promise au poteau, puis à la déportation, avant d’être libérée in extremis grâce à un échange d’otages. Sitôt libérée, elle participe à la libération de Paris.
Loin des clichés sur l’euphorie de la liberté retrouvée, la sortie de la clandestinité s’avère douloureuse pour Madeleine Riffaud. Les souvenirs des geôles nazies la hantent. « Après ça, j’ai essayé de vivre comme tout le monde mais je n’ai pas pu », confie-t-elle au réalisateur Philippe Rostan, dans le documentaire qu’il lui a consacré en 2010. Durant ces mois difficiles, elle comprend que seules l’intéressent désormais « les situations limites et l’extrême danger ». Jusqu’à ce jour où on la présente à un certain Paul Éluard. « Il m’a soulevé le menton et m’a dit : “Tu veux bien me regarder ?” Ce qu’il a vu dans mes yeux, c’était une détresse sans borne. Il m’a tendu une carte de visite. Ma vie en a été changée. » Pour son premier recueil de poèmes, le Poing fermé, Picasso lui tire le portrait pour la couverture du livre. On lui suggère le journalisme, elle y voit l’occasion de partir au bout du monde. C’est lui qui vient à elle pour la conférence de Fontainebleau, en 1946. On la présente à Hô Chi Minh. C’est le début d’une longue histoire avec le Vietnam. Et l’Oncle Hô de lui dire : « Si tu viens dans mon pays, je te recevrai comme ma fille. » Ce qu’il fera. Devenue grand reporter pour l’Humanité, après avoir travaillé à la Vie ouvrière et Ce soir, elle couvre la fin de la guerre d’Indochine, puis du Vietnam. Elle est la première à dénoncer, dès 1955, un an après leur signature, la violation des accords de Genève par les États-Unis.
Car, à partir de 1964, Madeleine Riffaud devient Chi Tam, la 8e sœur. Elle est l’une des rares occidentales à être acceptée dans les maquis viêt-cong, et devient une combattante à part entière de la résistance vietnamienne. « Ce que j’ai vu au Sud-Vietnam » affiche la une de l’Humanité en novembre 1970, dont le reportage révèle au monde l’horreur de la répression. « Con Son, Tan Hiep, Thu Duc, Chi Hoa… Il nous faut retenir ces noms car, jadis, pour les résistants victimes des nazis, l’enfer a duré cinq ans. Or au Sud-Vietnam, le même enfer dure depuis quinze ans », écrit-elle en 1972, au cœur d’un papier qui dénonce les atrocités commises par l’administration américaine. « Voilà la démocratie de Nixon, conclut-elle. Voilà la paix que les vaincus, en s’en allant, voudraient accorder à des hommes, des femmes estropiés à vie par les tortures sans fin… » Et elle sait de quoi elle parle : « Le drame est d’être passée de la Résistance aux guerres coloniales. J’ai été correspondante de guerre pour dire mon horreur des conflits. » « On disait des Viêt-cong : ce sont des hommes sans visage. » Ces combattants de l’ombre retrouvent le sourire devant l’objectif de Madeleine Riffaud, qui s’attache à leur redonner une identité. Dans ces déluges de violences qu’elle décrit, la poésie n’est jamais loin, derrière une description des rizières vietnamiennes ou des images de typhons, autant de métaphores de la mort, omniprésente. La couverture de la guerre d’Algérie la ramène rue des Saussaies, où la police française torture les militants du FLN, là même où elle a connu l’enfer. Le 7 mars 1961, l’Humanité sort avec une page blanche, marquée en son centre de ce seul mot : « Censuré ». À l’origine de la saisie, un article de Madeleine Riffaud sur les tortures pratiquées à Paris, qui déclenche la fureur du préfet de police, Maurice Papon, qui porte plainte en diffamation et demande des dommages et intérêts. Elle réchappe de peu à un attentat de l’OAS et passe plusieurs mois à l’hôpital.
En 1973, Madeleine Riffaud emprunte une nouvelle identité et repousse toujours plus loin les limites de l’investigation. Elle devient Marthe, se fait embaucher dans un hôpital parisien comme aide-soignante. Elle récure les sols, prodigue les soins aux patients, veille la nuit des mourants anonymes. De cette expérience, elle en tire un récit lucide et tendre sur l’univers hospitalier, les Linges de la nuit, sur ce qui se joue sous les draps blancs, quand l’imminence de la mort rebat les cartes des rapports humains. Car comme le disait d’elle Jean Marcenac, « Madeleine Riffaud est un poète qui a pris résolument le parti de s’exprimer par le journal… Elle a toute seule créé ce qu’il faut bien nommer un genre et, finalement, elle a parfaitement réussi ».
NOS PRIORITÉS L’EMPLOI, LE CLIMAT ET LE POUVOIR D’ACHAT !
Aujourd’hui, des dizaines de milliards d’euros sont mis à disposition des grands groupes sans aucun critère
ni contrepartie. Les plans de licenciements et les délocalisations se poursuivent.
L’argent des banques, l’argent public, c’est notre argent ! Il ne doit pas servir à licencier mais à sécuriser nos emplois et en créer de nouveaux, avec de bons salaires, dans l’industrie, le commerce, les services publics et à former massivement avec un revenu maintenu.
C’est la clé pour la transition écologique et pour sortir de la crise.
ÉRADIQUER LE CHÔMAGE, c’est possible avec la sécurité d’emploi et de formation.
Le PCF propose de créer un système permettant d’alterner un emploi ou une formation bien
rémunérés tout au long de la vie professionnelle sans passer par le chômage. Pour y parvenir, il
faut faire baisser le coût du capital (dividendes et intérêts bancaires).
Sécurisons l’emploi et la formation pour toutes et tous !
A partir de ce mois d’octobre 2020, les communistes lancent une campagne pour changer fondamentalement les conditions d’existence, de revenus, de production dans notre pays.
Face à la crise sanitaire, face aux crises économique et sociale approfondies provoquées par la suraccumulation capitaliste, la financiarisation de l’économie, les communistes proposent une révolution du même niveau que la création de la Sécurité Sociale en 1945, à laquelle le PCF a largement participé avec Ambroise Croizat : la sécurité emploi formation (SEF).
1/ Pour les personnes, le droit à un emploi dans la sécurité, ou une formation, avec un bon revenu, et à une mobilité librement choisie entre emploi et formation
2/ Le salaire est payé par l’employeur, le revenu autre (comme l’allocation de formation) est payé sur des cotisations sociales mutualisées. Un fonds spécifique permet aux travaill.eurs.euses et aux habitant.e.s d’un territoire de contrôler l’utilisation de l’argent des entreprises (profits), des banques (crédit) et l’argent public.
3/ Conséquences : libération de la sujétion aux patrons et aux capitalistes guidés uniquement par les profits à court terme pour quelques actionnaires, modification des organisations de travail, les choix stratégiques de production sont dirigés démocratiquement (participation des salarié.e.s et des habitant.e.s d’un territoire) vers l’intérêt général, social et écologique.
4/ Les entreprises, changeant de gestion, continuent à créer des richesses à travers, des engagements de production, d’emploi de formation par les employeurs et les pouvoirs publics et des engagements de financement par les banques, avec incitation et pénalisation. Ces engagements sont conditionnels et suivis démocratiquement.
5/ Les gains en efficacité permettront de baisser massivement le temps de travail et de renforcer la logique vertueuse de créations d’emplois en dépassant le marché du travail et le capitalisme.
Ces logiques émancipatrices vont à l’encontre du plan de « relance » Macron/Castex qui donne des milliards et des milliards d’euros aux grandes entreprises, sans conditionnalité sociale ou écologique, provoquant délocalisations et licenciements boursiers. Par ailleurs le gouvernement n’aide pas suffisamment les PME, et particulièrement la branche restauration/hôtellerie, touchée de plein fouet par les restrictions sanitaires, dont les salariés sont menacés de perte d’emploi. Les aides à la culture restent largement insuffisantes. Aucun plan sérieux de soutien aux travailleurs les plus précaires n’est mis en place. Le secteur hospitalier et les EHPAD attendent toujours des dizaines de milliers de postes pour accueillir les patent.e.s et résident.e.s dans de bonnes conditions. Enfin, aucune volonté politique de réindustrialisation de la France qui permettrait de faire face aux enjeux sociaux et écologiques du 21e siècle. Au contraire, les grands groupes continuent de fermer les usines ou de licencier comme récemment chez Les Fonderies de Bretagne, Vallourec, Bridgestone, Verallia…