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27 mars 2020 5 27 /03 /mars /2020 14:25
Ces 17 années qui ont mis l’hôpital public à genou - L'Humanité, 27 mars 2020
Vendredi, 27 Mars, 2020
Ces 17 années qui ont mis l’hôpital public à genou

Le « plan d’investissement massif » du chef de l’État constitue un aveu d’échec des politiques d’austérité. La crise sanitaire révèle les failles du système hospitalier, sous pression depuis plus d’une décennie et sommé de se transformer en entreprise.

 

«   C’est dramatique, violent et douloureux qu’il ait fallu une crise de cette ampleur pour espérer un simple geste du président de la République. » En première ligne dans l’hôpital parisien de la Pitié-Salpêtrière, le neurologue David Grabli accueille avec amertume le discours d’Emmanuel Macron. Aux personnels essorés, lessivés, le chef de l’État a promis, mercredi, depuis l’hôpital militaire de Mulhouse, qu’ « à l’issue de cette crise, un plan massif d’investissement et de revalorisation de l’ensemble des carrières sera construit pour notre hôpital ». Sans préciser les contours et le montant, il s’est engagé à « majorer les heures supplémentaires sous forme d’une prime exceptionnelle ».

Des mesures à appliquer d’urgence pour affronter l’épidémie

À l’écoute de ces annonces, le corps médical oscille entre prudence et colère. « Nous n’avons pas besoin d’un beau discours compassionnel, il faut des actes, estime Christophe Prudhomme (CGT), porte-parole de l’Association des médecins urgentistes (Amuf). Or, les promesses sont floues, non chiffrées, elles ne sont pas à la hauteur de la crise. Le chef de l’État promet des primes alors que nous réclamons une hausse des salaires pour tous les personnels. » Hugo Huon, président du Collectif Inter-Urgences, nuance de son côté : « C’est positif. Mais après tous les plans que l’on nous a proposés et qui étaient en deçà de ce qui était nécessaire pour les soins, on attend de voir. » Tous martèlent leurs revendications : une augmentation des salaires des paramédicaux de 300 euros, des effectifs suffisants pour maintenir et rouvrir des lits. Soit une augmentation de 5 % du budget des hôpitaux correspondant à une enveloppe de 4 milliards d’euros.

Des mesures à appliquer d’urgence pour affronter l’épidémie, qui aggrave la situation des établissements devenus de vraies Cocotte-Minute. Depuis plus d’un an, le monde hospitalier est secoué par une crise sans précédent. Parties des services d’urgences, des grèves très suivies, d’une longévité historique, se sont ensuite diffusées à tous les étages des établissements. Pour la première fois, la colère a fédéré toutes les catégories de l’hôpital. Infirmières, aides-soignantes, médecins, psychiatres, chefs de service… tous ont alerté sur l’état catastrophique de l’hôpital public. En vain. Raison pour laquelle, en janvier dernier, 1 100 médecins ont démissionné de leurs responsabilités administratives pour ne plus participer à la gestion du manque de moyens. Silence radio du gouvernement Macron, toujours. Qui n’est d’ailleurs pas l’unique responsable des politiques de santé mortifères. Celles de ses prédécesseurs ont bien préparé le terrain.

La loi HPST de 2009 a été une catastrophe

Car le traitement de choc prescrit à l’hôpital remonte à plusieurs années. En 2009, la loi hôpital, patients, santé, territoire (HPST) a bousculé la gouvernance des établissements au détriment des soignants. Le directeur s’est alors retrouvé dans une position de patron. « C’était la première fois qu’il y avait des manifestations aussi importantes de médecins, rappelle Christophe Trivalle, chef de service de gériatrie à l’hôpital Paul-Brousse de Villejuif (Val-de-Marne), membre de la Commission médicale d’établissement (CME) centrale de l’AP-HP, l’instance où siègent les représentants élus des médecins. Cette loi a été catastrophique. Tous les pouvoirs ont été donnés au directeur. Son seul objectif, c’est d’assurer l’équilibre financier. Or, l’hôpital est d’abord là pour soigner. » Ce membre du Collectif inter-hôpitaux ajoute : « L’autre catastrophe, ce sont les regroupements en pôles, qui ont entraîné des destructions de services, une diminution des lits, donc des effectifs. Sans oublier une souffrance du personnel soignant et médical. »

Depuis des années, les budgets hospitaliers sont asphyxiés

Pris dans des plans d’économies, le secteur se transforme en hôpital-entreprise. C’est d’ailleurs l’esprit de la tarification à l’activité (T2A), votée fin 2003. Ce système obéit à une volonté de rationaliser les modes de financement des établissements. « La T2A a été un instrument pervers : les hôpitaux sont rémunérés en fonction des activités effectuées en leur sein, précise David Grabli, médecin. Ce qui incite à augmenter la productivité. Or, les tarifs hospitaliers baissent, notamment en raison d’un Ondam (Objectif national des dépenses d’assurance-maladie – NDLR) fermé », voté chaque année au Parlement. Frédéric Pierru, sociologue de la santé, relève qu’ « en 1990, la part hospitalière était de 46,6 % dans les dépenses courantes de santé, contre 38,3 % en 2017. On a perdu 8,3 %, quand l’Allemagne ne perd que 3 % » .

Alors que l’épidémie menace aujourd’hui de faire s’écrouler le système hospitalier, tous exigent un investissement massif dans l’hôpital. Comme l’assène le sociologue, « à force d’avoir réduit les capacités hospitalières, en particulier en soins intensifs, particulièrement coûteux, nous sommes désormais à la merci de la moindre pandémie ». Pour lui, « on voit le désastre de ces choix budgétaires à court terme devant nos yeux. Et de cela, nos élites devront rendre des comptes, une fois la pandémie passée. »

Lola Ruscio
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27 mars 2020 5 27 /03 /mars /2020 06:55

 

Notre pays, comme le reste du monde, fait face à une épreuve majeure. 

Le nombre de personnes mortes des suites du coronavirus augmente de jour en jour de manière exponentielle. 

Nous avons affaire à un défi historique, qui appelle la mobilisation de la nation tout entière.

 

 

C'est d'ailleurs dans cet esprit que le PCF a d'emblée proposé la création d'un comité d'urgence nationale, où se réuniraient des représentants du gouvernement, du comité scientifique, des partis politiques, des associations d'élus locaux, des organisations syndicales, du monde économique.

Quoi qu'ils subissent, les Français font face. Ceux qui travaillent dans nos services publics, souvent maltraités, sont aux avant-postes, dans les hôpitaux, dans les communes, dans les collectivités ou encore pour assurer la sécurité. Dans le privé aussi, ils sont nombreux à monter au front, dans les supermarchés, dans les Ephad, dans l'agriculture, dans les transports... Oui, de belles solidarités s'organisent dans tout le pays car le monde du travail est solidaire.

Les communistes et leurs élu·e·s, dans le même état d'esprit, se sont mis à la disposition du pays. Partout, ils s'emploient à construire les actions d'entraide et de solidarité que requiert la situation, à apporter l'aide indispensable aux personnes les plus fragiles comme aux professions en première ligne. 

Nos parlementaires ont demandé que tous les salariés au contact avec du public puissent bénéficier de tous les moyens de protection dont ils ont besoin : masques, gel, gants... Ce qui suppose que tout soit mis en oeuvre pour permettre à l'industrie de les produire en quantité suffisante.

Ils ont aussi appelé à un confinement général bien plus strict que celui mis en place par le gouvernement, puisque c'est le seul moyen, en l'état actuel, de lutter contre la propagation du virus, préconisé l'Organisation mondiale de la santé. Les entreprises qui ne sont pas indispensables à l'activité du pays doivent s'arrêter. Il n'est pas admissible que 45% des salariés continuent de travailler dans des secteurs non essentiels à la gestion de l'urgence sanitaire. 

L'état d'urgence sanitaire que le gouvernement vient de faire adopter par les assemblées ne répond pas à ces exigences d'intérêt général. C'est pourquoi nos parlementaires n'ont pas voté les projets de loi qui l'instauraient.

Non seulement notre appel à une mobilisation des forces vives du pays n'a pas été pris en compte, mais le gouvernement s'est arrogé tous les pouvoirs. Il s'est affranchi du contrôle du Parlement afin d'agir par ordonnances pour déréglementer le droit du travail. Les premières décisions viennent de tomber et elles sont édifiantes : les entreprises pourront faire travailler leur salariés jusqu'à 60 heures par semaine au lieu du seuil maximum légal de 48 heures !

Enfin, notre pays doit aussi faire appel à la mobilisation de toute la société, y compris les multinationales, les compagnies d'assurances, les géants du numérique ou les grandes fortunes. A ce jour, rien n'est prévu de ce côté-là. C'est pourtant là que nous trouverons les ressources nécessaires pour surmonter cette crise inédite. Si les forces du travail sont aujourd'hui mobilisées, celles du capital doivent l'être aussi !

La bataille des « jours d'après » commence maintenant. Faisons monter de toutes parts l'exigence que l'intérêt de l'humain et celui de la planète passent avant ceux de l'argent et des logiques de profit.

Fabien Roussel, secrétaire national du PCF.

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27 mars 2020 5 27 /03 /mars /2020 06:49

 

Jusqu'ici méconnue du grand public, la coopération médicale internationale cubaine se révèle, dans la lutte mondiale contre la pandémie du Covid-19, une actrice incontournable de la solidarité internationale.

 

 

Face aux replis nationaux et l'hétérogénéité de stratégies des pouvoirs publics qui caractérisent pour l'heure la situation et les actions des gouvernements des pays membres de l'Union européenne, plusieurs pays comme la Chine et Cuba font figure d'exception en s'engageant sur le plan international.

La coopération médicale internationale est un axe essentiel de la politique internationale de Cuba depuis les années 1960. Elle a permis de former à La Havane des milliers de praticiens de nombreux pays, de porter assistance aux populations de pays ravagés par la guerre ou privés d'infrastructures sanitaires. En 2016, Cuba comptait plus de médecins et personnels médicaux en mission dans le monde que la seule Organisation mondiale de la santé (OMS). Déployés au Brésil jusqu'à l'arrivée de Jaïr Bolsonaro qui les a expulsés, au Venezuela, au Nicaragua ou en Bolivie, là aussi jusqu'à la prise de pouvoir de l'extrême droite en novembre dernier, les missions médicales cubaines ont permis de renforcer la solidarité régionale latino-américaine sans pour autant délaisser les autres continents, l'Afrique notamment, et de sauver des millions de vie.

L'expertise médicale cubaine mais aussi ses équipes de recherche scientifique comptent aux premiers rangs internationaux et ont contribué à assurer au peuple cubain l'accès gratuit et universel à un système de soins performant. Cela a - au passage - permis à Cuba d'atteindre quelques-uns des Objectifs du millénaire pour le développement (OMD) énoncés par l'ONU dans la lutte mondiale contre les inégalités sociales et économiques entre les peuples. Longtemps cet état de fait a été minimisé en Occident; à présent il s'avère que ce choix de la santé pour tous était le bon... pour tous.

« La solidarité internationale, la situation l'illustre avec force, est indispensable »

Aujourd'hui et malgré le blocus américain imposé par Washington depuis 1962 qui entrave Cuba dans son développement, c'est en Italie que se sont déployés, à la demande des autorités italiennes, les personnels médicaux de l'Île afin d'aider les Italiens qui vivent un cauchemar.

À Cuba même, dont les frontières n'ont pas été fermées par les autorités, la situation est maîtrisée malgré l'embargo économique et commercial, et 10 cas étaient recensés au 18 mars et suivis (pour l'essentiel, des touristes ou des Cubains revenant d'Espagne ou des États-Unis), le pays déplorant son premier mort, un touriste italien. Tout en maintenant la priorité de sa politique à la protection de sa population, Cuba répond aux demandes de solidarité et aide internationales.

À côté de l'Italie, c'est encore la Grande-Bretagne, dont la stratégie du Premier ministre Boris Johnson a livré à eux-mêmes ses concitoyens pendant des semaines, qui appelle elle aussi à l'aide la coopération médicale cubaine. Ainsi, c'est Cuba qui, il y a quelques jours, a autorisé l'entrée au port d'un bateau de croisière de plus de 1000 passagers, et plusieurs cas de contaminés, alors qu'il avait été refoulé par La Barbade et les Bahamas.

Alors, combien de temps, encore, faudra-t-il attendre, combien et quelles épreuves pour le peuple cubain et les peuples du monde entier pour décider de lever immédiatement et définitivement le blocus contre Cuba qui répond présent à toutes les demandes d'aide, y compris des pays industrialisés. La solidarité internationale, la situation l'illustre avec force, est indispensable pour aider ici à produire ou pour acheminer masques, tests, appareils respirateurs, denrées de première nécessité à toutes les populations touchées par la pandémie.

La solidarité internationale est un engagement réciproque et c'est le moment de mettre fin au blocus de Cuba dont le rôle dans l'éradication du virus s'avère crucial. Il en est de même, dès aujourd'hui, quant aux sanctions économiques et embargos qui frappent des populations d'Iran ou du Venezuela comme pour les territoires palestiniens. Comme à l'échelle nationale, on ne sort pas d'une épidémie en sacrifiant froidement une part de la population. Nous ne sortirons pas de cette pandémie mondiale si des peuples entiers subissent la double peine des sanctions et du Covid-19.

Collectif Amérique latine

 

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26 mars 2020 4 26 /03 /mars /2020 06:45

 

En février 2020, 25 experts internationaux envoyés par l’OMS pour enquêter sur la situation en Chine ont déclaré dans leur rapport : « L’histoire de l’utilisation sans compromis et rigoureuse par la Chine de mesures non pharmaceutiques pour contenir la transmission du virus Covid-19 dans de multiples contextes fournit des leçons essentielles pour la réponse mondiale. Ce sont les seules mesures dont il est actuellement prouvé qu’elles interrompent ou minimisent la chaîne de transmission chez l’homme. »

 

 

Le gouvernement Macron a tardivement pris la mesure de l’ampleur de la crise sanitaire induite par le Covid-19 et a annoncé, en conséquence, des mesures de confinement indispensables pour ralentir la propagation du virus. Devant l’urgence de la situation, nous avons accompagné cette décision dont la logique est de diminuer le nombre de contaminé·e·s et la prolifération du virus. D’autres choix, comme le dépistage systématique et le confinement sélectif des contaminé·e·s ont été choisis par d’autres pays (Chine, Corée du Sud) avec des résultats encourageants. Cette autre stratégie de gestion de crise sanitaire ne peut se réaliser dans le cadre d’une politique néolibérale d’austérité vis-à-vis des besoins humains, dans le cas présent de la santé des populations, comme l’ont fait la majorité des gouvernements européens dont la France.

Afin d’éviter la saturation du système sanitaire, l’objectif est de diminuer les arrivées de flux de patient·e·s atteint·e·s par le Covid-19 pour ne pas déborder les capacités de prise en charge des hôpitaux. Tout cela va devoir se réaliser dans un contexte de forte dégradation de notre système public hospitalier, dénoncé unanimement par tous les acteurs de la santé depuis plus d’un an, mais aussi dans l’incapacité à répondre à la mise en sécurité des soignant·e·s et des patient·e·s par du matériel adapté. Hallucinant dans un pays qui se considère comme une des 7 plus grandes puissances avancées du monde ! Certes les professionnels de santé ont un devoir de soins, mais la société, l’État a un devoir de les protéger et d’adopter une politique adaptée pour fournir les médicaments et matériels (gants, masques, blouses, respirateurs…) nécessaires à leurs missions et à leur sécurité.

Si le confinement est aujourd’hui essentiel, il faut réunir d’urgence les conditions pour en sortir le plus rapidement possible ; cela passera par un dépistage intensif de tous les soignant·e·s, de toutes les personnes en contact avec du public, de tous les patient·e·s présentant des symptômes même atypiques. Encore faudrait-il qu’une mise à disposition massive de tests de dépistage soit réalisée, mais comme pour les masques on nous dit : « ça va arriver ! »

La saturation des moyens sanitaires, tant redoutée, déjà effective en Italie et dans certains de nos hôpitaux, va immanquablement orienter les choix des traitements. Les professionnel·le·s ne pourront plus prendre des décisions que sur des critères médicaux mais aussi sur des pratiques dégradées avec un nombre restreint des respirateurs en réanimation.

Déjà épuisés, confrontés à un manque intolérable de moyens, voilà qu’ils vont devoir faire des priorités d’accès à la guérison, à la vie. Alors, E. Macron peut toujours les nommer « les héros en blouse blanche », aujourd’hui les mots ne suffisent pas et le « quoiqu’il en coûte » non plus. Les personnes âgées dans les Ehpad vont être abandonnées à leur sort.

Il s’agit aujourd’hui de faire des propositions concrètes et immédiates envers les hôpitaux en termes de moyens humains, matériels et financiers, afin de couvrir les besoins Covid-19, mais aussi les autres cas sévères ou urgents. Le PCF fait des propositions d’urgence :

  • Mettre à disposition immédiate du matériel en quantité nécessaire à la sécurité des soignant·e·s et des patient·e·s, des tests biologiques et des respirateurs en réanimation. Nous demandons une clarification des politiques de production de ces matériels et de la politique de réserve matérielle sanitaire en France.
  • Arrêt immédiat de toutes les restructurations hospitalières en cours, des fermetures de services et la réouverture de lits.
  • Paiement de toutes les heures supplémentaires des personnels hospitaliers qui se cumulent et s’amplifient dans la période et revalorisation immédiate du point d’indice dans la fonction publique hospitalière (pas question de primes catégorielles).
  • Lors d’un collectif budgétaire, rectifier l’ONDAM (objectif national des dépenses d’assurance maladie) à hauteur de 5 % avec au moins 4 milliards d’euros pour répondre aux besoins urgents de l’existant. La LFR (loi des finances rectificative) prévoit immédiatement 2 milliards d’euros pour l’hôpital (pour payer les arrêts maladie, l’achat de masques et le soutien au personnel soignant), c’est-à-dire le montant des rallonges budgétaires prévues sur le quinquennat. Tout laisse à croire que les sommes prévues pour les 3 prochaines années seront mobilisées en une seule fois. C’est d’autant plus probable que cette LFR n’inscrit aucun budget supplémentaire pour les dépenses publiques et les services publics. C’est une LFR qui s’inscrit dans les politiques d’austérité ! Des gens vont mourir, malades et personnels soignants, mais le gouvernement fait ses comptes pour rassurer les marchés !
  • Annulation de la dette des hôpitaux.
  • Plan d’embauche ambitieux immédiatement et 30 000 places supplémentaires dans les écoles d’infirmières dès la rentrée de septembre 2020.

Ne laissons pas la France et l’Union européenne continuer, malgré cette crise sanitaire sans précédent, à démanteler notre système public de santé et rappelons-leur qu’il est aujourd’hui urgent de penser à « l’humain d’abord ».

Maryse Montangon, membre du CEN.

 

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26 mars 2020 4 26 /03 /mars /2020 06:44

 

Ce texte a été publié sur le réseau Linkedin le 13 mars 2020. Nous le reproduisons avec l’autorisation de son auteur.

YVES BRÉCHET est membre de l'Académie des sciences et ancien haut-commissaire à l’énergie atomique.

La crise engendrée par un nouveau coronavirus nous rappelle quelques évidences de la rationalité politique qui dépassent largement les questions de santé publique.

Le bien individuel dépend du bien commun : la santé personnelle dépend de la santé publique  l’éducation des individus, indépendamment de leurs revenus, de la capacité de la société à entretenir un système éducatif robuste  la sécurité individuelle, de l’existence d’une police et d’une armée bien équipées, bien entraînées et soutenues par sa population. On pourrait allonger la liste, et il ne serait pas inutile de se donner comme grille de lecture des interventions d’un État les situations ou le bien individuel dépend du bien commun. C’est cette conscience qui « fait société », et qui distingue une assemblée d’êtres sociaux d’une horde d’animaux sauvages.

Ceci accepté, il en découle naturellement trois règles qui rendent possible la rationalité politique.

 

LES TROIS RÈGLES

La première est le sens du bien public : l’intérêt collectif ne doit pas être pensé comme une entrave à l’intérêt personnel mais comme sa condition d’existence. Il faut que l’on accepte de renoncer à une liberté totale (de déplacement, de réunion…) pour pouvoir avoir une liberté garantie. Sinon, pour reprendre le mot de Jaurès, c’est le « renard libre dans le poulailler libre ».

La seconde est le sens des priorités : en cas de crise, on ne peut agir qu’avec les outils déjà opérationnels. En cas de crise sanitaire, en l’absence de vaccin, il faut bien avoir recours aux mesures de confinement. En cas de crise climatique, on doit déployer les solutions qui effectivement décarbonent notre économie, même si d’autres moins matures auraient notre préférence. En cas de crise internationale, la diplomatie ou l’intervention militaire, si elles ne résolvent pas les problèmes de fond, permettent de « parer au plus pressé ».

La troisième est le sens de la durée : les mesures de confinement en cas de crise sanitaire permettent d’avoir le temps de rechercher un vaccin  les solutions énergétiques actuelles, en maintenant une économie décarbonée, permettent le temps de développer les modes de productions autres avec les techniques de stockage nécessaires  les interventions diplomatiques ou militaires contre des agressions terroristes ne dispensent pas de réfléchir à la racine du mal.

Le sens du bien public suppose une intégrité sans faille. Le sens des priorités suppose la lucidité technique. Le sens de la durée implique qu’on maintienne des compétences, des moyens, en particulier dans le domaine de la recherche, y compris dans les périodes où l’on croit ne pas en avoir besoin.

 

UNE DÉRIVE QUI FRAPPE LES SOCIÉTÉS OCCIDENTALES

On a vu, au moins dans les sociétés occidentales, une constante dérive éloignant de ces règles simples. Sans même parler de la règle d’intégrité, le sens des priorités et le sens de la durée ont progressivement disparu de l’horizon politique.

Les analyses techniques solides qui permettent d’évaluer la validité de solutions à déployer ou la nécessité de se mettre en état de les déployer dans un certain délai ont cédé le pas à une agitation désordonnée qui essaie de suivre les exigences de la communication (« ce qu’on veut dire ») plutôt que celles de l’action (« ce qu’on doit faire »). Le sens des priorités s’y perd.

La conscience de la temporalité des actions et du nécessaire développement de socles de connaissances, de compétences, d’investissements pour pouvoir développer dans le long terme les solutions de substitution, s’est progressivement dissoute dans l’obsession du court terme. On peut relire la transition du capitalisme patrimonial vers le capitalisme industriel, puis du capitalisme industriel vers le capitalisme financier, comme le triomphe du court terme sur le long terme. Les programmations excessives des activités de recherche relèvent de la même dérive. On croit voir ces fils de bonne famille des romans du xixe siècle qui flambaient l’argent à papa. Quand on achète le présent sans se préoccuper de préparer le futur, on est à peu près certain de faire deux mauvaises affaires.

 

FAIRE FACE À TROIS CRISES MAJEURES

Nous sommes face à trois crises majeures (au moins, car on pourrait ajouter la crise du système éducatif…) : la crise sanitaire, la crise climatique, et la crise sociale et politique. La crise sociale a conduit au mouvement des Gilets jaunes, la crise climatique nous apparaît comme de plus en plus présente dans ses manifestations les plus spectaculaires, et la crise sanitaire nous frappe de plein fouet avec le coronavirus. Dans ces trois cas, nous pouvons voir de façon limpide le caractère délétère de l’individualisme forcené qui nous est souvent donné comme modèle, comme fin ultime. Dans les trois cas, on voit à quel point la transition de la horde vers le groupe d’êtres sociaux – transition que ce sens du bien public a rendu possible – est fragile, à quel point la violence sauvage affleure quand le besoin de « faire ensemble » se dissout.

Mais la crise sociale se traduit d’abord par une lente dégradation des conditions de vie de ceux que les dirigeants ne voient jamais, dégradation que l’on pense soigner par des gadgets, des commissions et des rapports. Quant à la crise climatique, elle mine depuis des années notre écosystème, et les alertes répétés du monde scientifique n’y font rien : on se contente de mesures emblématiques dont on n’évalue jamais le réel impact, de décisions symboliques dont l’effet de communication est largement supérieur à leur efficacité réelle, comme si on ne savait pas que les symboles sont des courts-circuits de cervelle.

Et voilà que survient la crise sanitaire, majeure, l’épidémie, la situation où on ne peut plus se contenter de gadgets de communication parce que le problème est là, sous nos yeux. Situation amplifiée par la panique complaisamment entretenue par les médias, qui libère, quand elle ne les induit pas, les comportements hallucinants que nous avons pu voir. Et on ne peut plus se contenter de dire, il faut faire, parce que le résultat de vos actes est là, tout de suite. Parce que l’urgence exige d’agir et que s’agiter ne suffit plus. Et on est bien forcé de travailler avec les moyens existants : les mesures de confinement. Et on est bien obligé de constater que la préparation d’un vaccin prend du temps, et qu’elle n’est possible que si on a conservé un socle de compétences en recherche médicale. Et on voit bien que l’on n’en peut sortir que si le sens du bien public reprend le dessus.

C’est ce que j’appelle l’« effet bénéfique de la douche froide » : la crise sanitaire nous remet brutalement face aux trois règles de la rationalité politique : le sens du bien public, le sens des priorités et le sens de la durée. Elle nous rappelle ce qui fait que nous ne sommes pas une horde de bêtes sauvages mais un groupe d’êtres sociaux. Elle nous montre à quel point il est facile de revenir à un comportement de horde de bêtes féroces dans ces situations de crises.

L’évidence immédiate de cette crise et des mesures nécessaires doit nous faire réfléchir sur les crises plus « distantes », celles où on a cru pouvoir se contenter de gadgets pour amuser la galerie et alimenter les services de communication.

Le discours du président Macron sur la crise sanitaire, justement motivé par l’urgence de la situation, et d’une haute tenue, doit aussi nous rappeler, à nous citoyens aussi bien qu’à la classe dirigeante, que ni la crise climatique, ni la crise sociale, ni les autres crises ne trouveront de solutions pérennes si on ne remet pas au centre du processus de décision le sens du bien public et l’exigence d’intégrité, le sens des priorités et l’exigence d’analyses techniquement solides, et le sens de la durée pour préparer l’avenir.

Revue Progressistes | 23 Mar 2020 à 11:09 | URL : https://wp.me/p3uI8L-1Xv

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26 mars 2020 4 26 /03 /mars /2020 06:41

 

Une crise financière et économique s’annonçait. Le coronavirus l’a accélérée et a révélé qu’il s’agit d’une crise de civilisation. La pandémie a disloqué les chaînes de production structurées par les multinationales au cours des vingt dernières années, mis au grand jour la suraccumulation consécutive au gonflement démesuré des capitaux relancé après la « grande récession » de 2009, et précipité le krach financier.

 

 

Sentant la situation leur échapper, les dirigeants occidentaux font mine de répudier le néolibéralisme. Les 27 gouvernements de l’UE ont suspendu les normes européennes de déficits budgétaires. Mais ils envisagent de financer ces dépenses, soit par le Mécanisme européen de solidarité qui ne les prête qu’en contrepartie de plans d’austérité meurtriers, soit par l’émission de Coronavirus Bonds, des obligations « européennes » placées sur les marchés : ce serait donner à la domination du capital financier le renfort d’un fédéralisme européen, aux dépens des services publics, de l’emploi et des salaires !

Pourtant, le moyen de se passer des marchés financiers est sous nos yeux. La Banque centrale européenne veut injecter 1 050 milliards sur les marchés d’ici à la fin de l’année. Mais les services publics, l’industrie du matériel médical verront-ils la couleur de cet argent ? En France, la loi de finances rectificative se contente de faire allusion à une « réserve » indigente de 2 milliards pour les dépenses de santé, alors qu’il en faudrait immédiatement au moins cinq fois plus ! Une gifle aux professionnels de la santé et aux salariés envoyés au front de la production pour préserver les profits.

Bien plus, nos dirigeants saisissent l’occasion pour allonger la durée du travail et pour préparer le terrain à une régression durable des droits sociaux. De bons esprits annoncent déjà que, la crise passée, il faudra redoubler d’austérité budgétaire pour éponger les déficits.

En un mot, au moment où la crise sanitaire fait éprouver à tous les habitants de la planète le besoin immédiat d’une tout autre mondialisation, le mot d’ordre reste le même : l’argent pour le profit, pas pour les êtres humains ! La domination du capital nous pousse au bord de la barbarie.

C’est pourquoi les mesures efficaces pour vaincre l’épidémie sont celles qui amorcent tout de suite une remise en cause radicale des logiques inspirées par la rentabilité financière, et leur remplacement par d’autres critères. Il faut :

  • Mobiliser les filières industrielles pour produire médicaments et matériels médicaux, ainsi que les biens et services indispensables à la population pendant la période de confinement. La protection des travailleurs de ces secteurs contre le virus est la première priorité. Cet effort doit être planifié et pouvoir passer par des réquisitions, des nationalisations ou la création d’entreprises publiques. Il devrait s’appuyer sur la mobilisation des moyens nécessaires à l’échelle européenne et intégrer de nouveaux accords de coopération internationaux, de partage des technologies.
  • Rendre effectif l’arrêt temporaire de la production dans les autres secteurs en en tirant les conséquences : interdire les licenciements et maintenir 100 % du salaire, y compris pour les plus précaires, première étape dans la construction progressive d’une sécurisation de l’emploi et de la formation pour toutes et tous.
  • Obliger les banques, les grandes entreprises et les propriétaires bailleurs à décaler le paiement, par les ménages qui le demandent, des charges d’emprunts bancaires et des factures pré-engagées et vitales (téléphonie, loyer, électricité…).
  • Mettre en place un dispositif de prêts bancaires de trésorerie à taux nul ou négatif, refinancés par la BCE, strictement réservés aux entreprises qui s’engageront à maintenir l’emploi et les salaires.
  • Démocratiser : en cas de non-respect des engagements pris par les entreprises ou les banques, les représentants des salariés (CSE) doivent avoir le pouvoir de saisir des comités régionaux de mobilisation constitués sous l’égide des conseils régionaux et des CESER.
  • Créer un fonds d’urgence sanitaire et de sécurisation pour le financement de ces différents dispositifs, alimenté par une contribution des grandes entreprises, des banques et des compagnies d’assurances, ainsi que par le rétablissement de l’impôt sur la fortune et l’abrogation du plafonnement à 30 % de l’impôt sur les revenus financiers (flat tax).
  • Mettre en place un programme de prêts à taux négatif de la Caisse des dépôts pour les investissements dans les hôpitaux et les services publics (embauches, formation, achats d’équipements, création de nouveaux établissements). La Banque de France déclarerait ces prêts éligibles au refinancement par la BCE au taux le plus faible pratiqué pour ses opérations (actuellement, -0,75 %), et le dispositif pourrait être étendu à l’ensemble des États membres de l’UE.

Nous pouvons vaincre l’épidémie : il faut pour cela s’attaquer tout de suite à la domination du capital. µ

Denis Durand, membre du CN.

 

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26 mars 2020 4 26 /03 /mars /2020 06:41

 

L’arrivée officielle du printemps a lieu ce vendredi 20 mars et le beau temps  succède depuis quelques jours  aux pluies  qui ont beaucoup arrosé le pays ces dernières semaines,  sans toutefois causer  de gros dégâts saufs en certains endroits limités  géographiquement.  Dimanche  22 mars, se déroule la journée mondiale de l’eau. Un sujet  que l’épidémie du coronavirus risque d’occulter cette année. Il reste que  l’accès à l’eau potable n’existe toujours pas  pour près d’un milliard  d’habitants sur terre. En France,  la quasi-totalité  des départements  ont été soumis à des restrictions d’eau  durant l’été  2019 du fait de la longue sécheresse  estivale. Avec le réchauffement  climatique, la gestion de l’eau  mérite  un débat national. Il faudra bien l’avoir un jour en France  afin de déboucher sur des mesures préventives

A  l’occasion de la journée mondiale de l’eau,  « Vision du monde », une association  de solidarité internationale  « tient à rappeler son engagement auprès des enfants les plus vulnérables au sein des contextes fragiles pour faire face à la crise de l‘eau» dans une déclaration  accompagnée d’un bilan chiffré de ses activités. L’association nous rappelle  qu’aujourd’hui dans le monde  « ce sont encore 844 millions de personnes  qui sont privées  d’accès à l’eau».

 Les populations  auxquelles « Vision du Monde » vient en aide par la coopération  « vivent souvent dans des zones rurales et doivent alors marcher en moyenne  6 kilomètres chaque jour pour se rendre à un point d’eau. Une eau souvent impropre à la consommation  et porteuse   de bactéries  qui rend les enfants malades   et les éloigne de l’école. Dans le monde, chaque jour, près de 1.000 enfants  de moins de cinq ans  meurent de maladies liées à l’eau. De nombreux ménages, centres de santé et écoles, ne disposent toujours pas  d’eau, ni de savon pour le lavage des mains, constituant  ainsi  un facteur aggravant quant à la propagation  d’épidémies», précise  cette association.

Des puits en bon état 20 ans après leur construction

On imagine que les rencontres  et travaux prévus à l’occasion de cette journée  mondiale de l’eau vont être gravement perturbés par  les dispositions prises  un peu partout dans le monde  pour contenir le coronavirus. Mais, «Vision du Monde » insiste sur l’idée que « la crise de l’eau peut être résolue. En travaillant main dans la main avec les communautés locales », l’ONG humanitaire   développe  « des projets  « WASH » impliquant  eau  potable, assainissement  et hygiène  au sein de ses programmes de développement. Son approche basée sur les transferts   de compétences lui permet non seulement d’assurer la construction de puits  mais également  de former les populations pour qu’elles puissent à leur tour en prendre soin. Nous études prouvent  que les puits construits par Vision du Monde sont toujours en état de marche 20 ans après», indique le dossier de presse publié   à l’occasion de cette journée de l’eau.

Avec l’accélération d’un réchauffement climatique et ses multiples conséquences  observables aussi chez nous ces dernières années, une gestion rationnelle de l’eau doit aussi être débattue désormais en France. Au cours  de l’été  2019, des arrêtés préfectoraux ont imposé  des restrictions d’eau  dans au moins  87 département  métropolitains. Paradoxalement,  les départements  les plus épargnés par ces restrictions furent ceux de l’Ile-de-France  alors qu’ils concentrent  12 millions d’habitants  et une multitude d’activités   économiques sur une superficie relativement restreinte  par rapport à la plupart  des régions  de ce pays.

Quand l’Ile-de-France  échappe  presque seule aux restrictions  d’eau

 Il n’y a là aucun miracle.  Pour protéger Paris et sa banlieue des crues de la Seine,  des grands barrages de rétention ont été  édifiés voilà plus d’un demi-siècle sur les cours  des principaux affluents de la Seine  que  sont l’Aube, la Marne et l’Yonne.  Ils  permettent, en cas  de fortes  précipitations   prolongées dans le temps,  de stocker de l’eau  en nous évitant les inondations que provoquerait souvent  la Seine autour du goulot  d’étranglement  qu’est  l’agglomération parisienne.  Inversement,   les milliards  de m3 d’eau en stock  à la fin du printemps dans les barrages ont permis, durant  l’été 2019,  de soutenir le débit de la Seine à hauteur  de 60% , mais aussi de disposer ainsi d’un eau d’assez bonne qualité pour être purifiée par les usines de traitement qui nous fournissent l’eau potable au robinet.

La France  est un pays où le débat sur la gestion de l’eau  est trop passionnel  pour être positif depuis trop d’années, et plus encore depuis la mort de Remi Fraisse,  victime d’une grenade lancée par un policier le 26 octobre  2014, sur le chantier  du barrage de Sivens  dans le Tarn. Deux visions inconciliables  s’affrontent trop souvent : les partisans d’une agriculture  productiviste  et exportatrice veulent toujours plus d’eau pour irriguer le maïs,  les céréales à paille et des oléagineux comme le tournesol. Face à eux, des citoyens, majoritairement citadins  et se réclamant  de l’écologie, ne veulent rien changer dans le milieu naturel ce qui revient à mettre la nature sous cloche, fut-ce  au détriment de notre souveraineté  alimentaire.

En raison même des enjeux liés à une indispensable  gestion de l’eau  en lien  avec les conséquences du réchauffement climatique, il est temps de regarder la réalité en face. Le manque d’eau à certaines périodes de l’année  sera de nature à mettre en cause notre souveraineté  alimentaire. Trop de pluies  sans dispositifs de stockage  pour écrêter les crues dans des zones subitement inondables  feront de plus en plus de morts dans les villes et villages de France.

Cela ne veut pas dire  qu’il convient  de faire des grands barrages de la dimension du Lac de Der en Champagne, ou celui de Pannecière-Chaumard   dans le département   de la Nièvre sur le cours de l’Yonne. Mais posons-nous  cette simple question : comment   seraient  alimentés  en eau de nombreux habitants de la région PACA aujourd’hui  s’il n’y avait pas le lac de Serre-Ponçon  sur le cours de la rivière Vaucluse  dans les Alpes ? Posons-nous  cette autre question : combien de rivières seront à sec en été dans les prochaines années si, faute de réserves  de différents volumes mises en place quand il pleut beaucoup, les sécheresses  estivales seront de plus en plus fréquentes en France, comme c’est le cas  en Australie aujourd’hui ?

Débattons d’une politique  raisonnée du stockage de l’eau

Dans les prochaines décennies une politique raisonnée sur  stockage de l’eau va prendre beaucoup d’importance pour deux raisons aussi simples que vitales. Elle permettra de limiter les dégâts et le nombre de victimes lors des inondations que provoqueront  des pluies intenses de plus en plus fréquentes. Elle permettra aussi d’avoir de l’eau au robinet  et d’irriguer un certain nombre de cultures, maraîchères et arboricoles notamment,  permettant aussi d’assurer notre  souveraineté alimentaire.

 

______________________________________________________

 

Les chiffres clés de  Vision du Monde

 3 personnes sur 10 dans le monde n’ont pas accès à l’eau potable en toute sécurité

Près de la moitié  des personnes  qui puisent  leur eau directement dans les eaux de surface vit en Afrique  subsaharienne

6 personnes sur 10 n’ont pas accès à des installations sanitaires gérées en toute sécurité

4 milliards de personnes doivent faire face  à une grave pénurie d’eau   au moins un mois par an

En 2018, à travers son partenariat  avec World Vision, Vision du Monde  a fourni de l’eau potable à 4 millions de personnes, amélioré les installations sanitaires  pour 2, 8 millions de personnes, délivré des formations sur les bonnes pratiques d’hygiène  à 5 millions de personnes 

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25 mars 2020 3 25 /03 /mars /2020 13:20
Avec l'épidémie de coronavirus, nous sommes face à une situation inédite. Vous       trouverez ci-joint pour information mon dernier communiqué de presse à ce sujet.
 
L'occasion également de vous envoyer deux récents courriers adressés au Ministre     de la santé sur les manques de moyens de protection des professionnels de santé, des aides à domicile et des pompiers, et sur la situation spécifique des aiddes à domicile.


Christine PRUNAUD
Sénatrice des Côtes d'Armor

 
 
 
COMMUNIQUE DE PRESSE
 
Le Sénat a débattu ces derniers jours de la loi d'urgence sanitaire portant diverses dispositions de lutte contre le coronavirus.
 
Les Sénatrices et Sénateurs du Groupe CRCE se sont fortement mobilisés dans ces circonstances exceptionnelles pour rappeler leur exigence d'une réponse sanitaire adaptée à cette épidémie.
 
Les besoins sont immenses. Nous avons rappelé notre demande de financements supplémentaires pour les hôpitaux publics, les ehpad, les services d'aide à domicile en première ligne de la mobilisation face au virus.
 
Voilà des années que les personnels médicaux, paramédicaux, administratifs et techniques de la santé tirent la sonnette d’alarme sur les conséquences des politiques d’austérités menées par les gouvernements successifs.
 
Où sont les moyens d'urgence pour les hôpitaux et les personnels de santé ? Le Gouvernement annonce le déblocage de 2 milliards d'euros pour les hôpitaux. Mais il ne s'agit que d'un dégel de crédits. Nous demandions plutôt la restitution des 5 milliards d'euros confisqués à l’hôpital public lors du dernier budget.
 
Au-delà de la situation dans nos hôpitaux, nos craintes sur cette loi sont multiples : atteinte à la démocratie, aux rôle de contrôle du parlement et aux droits des salariés.
En effet, la loi prévoit dès à présent et pour une durée d'un an, des dérogations profondes sur le temps de travail, les congés payés ou le repos du dimanche. Je m'inquiète que ces dispositions puissent devenir pérennes.
 
Pour toutes ces raisons, le groupe communiste du Sénat a voté contre ce texte.
Je suis bien sûr aux côtés des malades, des familles, des salariés au travail bien souvent sans protection et du personnel hospitalier toujours debout avec des moyens si faibles !
 
 
 
Courrier à M. le Ministre de la santé
Copie à M. le Préfet des Côtes d'Armor
Mesures barrières contre le COVID-19 : l’appel à l’aide des soignants et autres professionnels en contact direct avec la population.
 
Fait à Lamballe le 25 mars 2020
N/Réf : CP/LT/2020-12
 
Monsieur le Ministre,
 
Vous avez affirmé ce samedi, vouloir effectuer une montée en charge de la production et de la distribution des masques de protection pour répondre à la consommation qui va s’accroître les jours à venir. Permettez moi de vous relater les besoins urgents de mon territoire par des exemples concrets.
 
Ce manque de masques de protection créé des tensions sur mon territoire. Par exemple, sur ma commune de résidence, le directeur de l’hôpital de proximité déplore du manque crucial de masques de protection pour le personnel soignant. Il n’y a pas de masques ou très peu dans nos EHPAD. Les résidents testés positifs sont gardés en EHPAD, certains ne peuvent pas manger seuls : les soignants accompagnants sont alors mis en danger.
 
Les infirmières libérales, les aides à domicile, les médecins de ville, les ambulanciers et les pompiers sont également concernés. Livrés à eux mêmes pour la logistique, il comptent aujourd’hui sur la solidarité des uns et des autres pour se fournir des moyens de protection adaptés. Si cette solidarité se révèle forte sur nos territoires, vous le savez cela ne suffit pas en nombre, ni en qualité, les masques « artisanaux » ne sont pas conformes pour faire barrière au virus.
 
En cette période extrême de crise sanitaire, le Gouvernement doit prendre la mesure des réalités de nos territoires, de nos hôpitaux de proximité, de nos services d’aide à domicile et de nos soignants libéraux. Les soignants dont vous saluez l’engagement, travaillent aujourd’hui en première ligne, la peur au ventre et bien souvent tombent malades.
Pouvez-vous nous assurer que ces professionnels qui sont dans l’obligation d’exercer et qui sont en contact direct avec la population, vont pouvoir bénéficier de protections pérennes ?
 
Espérant que vous saurez répondre avec bienveillance à leurs attentes fortes, je vous prie de croire, Monsieur le Ministre, en l’assurance de mes sincères salutations.
 
Christine PRUNAUD
Sénatrice des Côtes d’Armor
 
Copie à Monsieur Thierry MOSIMANN, Préfet des Côtes d’Armor
 
 
Courrier à M. le Ministre de la Santé
Situation alarmante des aides à domicile
 
Fait à Lamballe le 25 mars 2020
N/Réf: CP/LT/2020-11
Monsieur le Ministre,
 
A juste titre nous tentons de répondre aux besoin urgents des soignants pour traverser cette crise sanitaire sans précédent. Je suis alertée par un autre corps de métier, tout aussi en contact avec des personnes susceptibles d’être infectées ou fragilisées. Il s’agit des aides à domicile.
 
Actuellement de nombreux services d’aide à domicile ont été recentrés sur les interventions pour les actes essentiels (repas, aide à la toilette ...). Cela permet aux aides à domicile de se concentrer sur les personnes les plus fragiles, mais aussi de se protéger et de protéger les personnes accompagnées. Les familles ne comprennent pas toujours que l’aide au ménage et aux courses soit relayée au second plan, il leur est également reproché de ne pas porter de masques de protection, qui sont en nombre insuffisants. Aujourd’hui, notre Préfet des Côtes d’Armor et la Région Bretagne vont réserver un stock de masques aux SAAD, SSIAD et SPASAD du Département, cela va répondre à l’urgence mais ne suffira pas dans le temps. Aussi, la notion de «gestes barrières» comme le conseille l’ARS aux aides à domicile, est difficilement applicable lors des soins et de la toilette. Comment se tenir à un mètre de distance lorsque l’on lave une personne?
 
Par ailleurs, les hôpitaux renvoient à domicile un certain nombre de patients atteints de diverses pathologies pour libérer des lits, ce qui induit davantage de soins à domicile, alors que des aides à domicile sont atteint.e.s par le Covid-19 ou sont en arrêt de travail pour diverses raisons. La crise que traverse le secteur de l’aide à domicile ne s’arrête pas, au contraire elle s’amplifie en cette période difficile. Certains intervenant.e.s exercent leur droit de retrait, mais la situation des personnes accompagnées est catastrophique.
 
Pour finir, comme dans d’autres Départements les aides à domiciles ont des difficultés à faire assurer les cours de l’éducation Nationale à leurs enfants ou les modes de garde en crèche pour leurs enfants en bas âge, souvent réservés aux soignants. Le domicile est le dernier rempart pour aider les plus fragiles et l’intervention des professionnel.le.s de l’aide à domicile est indispensable voir vitale en cette période de crise sanitaire. Au même titre que les soignants ils et elles méritent d’être considérés, aujourd’hui plus que jamais.
Espérant que vous saurez répondre avec bienveillance à leurs attentes pour faciliter leur travail au quotidien, je vous prie de croire, Monsieur le Ministre, en l’assurance de mes sincères salutations.
 
Christine PRUNAUD
Sénatrice des Côtes d’Armor
 
 
 
Christine PRUNAUD
Sénatrice des Côtes d'Armor
COVID- 19: lettre de Christine Prunaud, sénatrice communiste des Côtes d'Armor, au ministre de la santé et au préfet pour la protection des aides à domicile, des professionnels de santé et des patients et usagers
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25 mars 2020 3 25 /03 /mars /2020 07:15
Dépendance. Vers une hécatombe dans les Ehpad ? (Alexandra Chaignon, L'Humanité, 23 mars 2020)
Lundi, 23 Mars, 2020
Dépendance. Vers une hécatombe dans les Ehpad ?

L’accroissement des cas de coronavirus, dans les établissements accueillant des personnes âgées, fait craindre le pire aux soignants. Ils prédisent un désastre si rien n’est fait.

 

Douze décès dans un Ehpad du Doubs, plusieurs dans l’Hérault, des foyers infectieux un peu partout sur le territoire… Les établissements, tout comme les services hospitaliers, accueillant les personnes âgées dépendantes ne sont pas épargnés par le coronavirus, particulièrement virulent pour les plus fragiles. « On commence à avoir de plus en plus de cas », confirme Romain Gizolme, directeur de l’Association des directeurs au service des personnes âgées (AD-PA). De nombreux professionnels du secteur de la dépendance, exerçant notamment dans les zones de circulation du virus, restent alarmistes et tirent la sonnette d’alarme.

Le taux de contamination est exponentiel

Dans une lettre adressée au ministre de la Santé, ils font part de leur inquiétude, redoutant la mort de quelque 100 000 personnes sur les « plus d’un million de résidents » si rien n’est fait. « Cette population est assortie d’un taux de mortalité de 15 %, ce qui pourrait se traduire par plus de 100 000 décès dans l’éventualité d’une généralisation que nous n’osons imaginer », alertent les signataires. Ils rappellent que leurs patients, dont la moyenne d’âge est de 85 ans, cumulent en moyenne « près de huit maladies chroniques » et constituent « une cible à très haut niveau d’exposition au risque d’infection au coronavirus ».

En outre, cette population n’est jamais prioritaire en réanimation, déjà en temps normal. Ce que confirme Christophe Trivalle, gériatre et chef de service à l’hôpital Paul-Brousse, à Villejuif. « Compte tenu de leur comorbidité, on se pose toujours des questions en amont. C’est une pratique habituelle. On parle là de patients polypathologiques, très dépendants. Certains ne survivraient pas à un séjour en réanimation. Et ce serait de l’acharnement thérapeutique. Pour quelques malades, la question se pose mais, souvent, le Samu, les services de réanimation tentent de les récuser. Là, on ne pourra pas négocier. » Dans les services de gériatrie qu’ils gèrent, le nombre de cas a été multiplié par 13 en une semaine. « En soins de longue durée, on a secteur très infecté. Sur une unité de 34 patients, 9 au moins sont atteints. Le week-end dernier, ils n’étaient que 2. Au total, on doit avoir 26 cas », énumère-t-il, inquiet. À ce jour, il ne déplore qu’un décès d’une personne atteinte du Covid, « mais dont la mort n’est probablement pas liée », et deux malades « pas bien du tout ». « Au début, ils développent une forme pas trop grave, avec un peu de fièvre. Mais apparemment, au bout de 5, 6 jours, ça s’aggrave. On y arrive. »

La difficulté face à l’augmentation des cas, c’est aussi les moyens humains. « On essaye de renforcer les équipes, explique Christophe Trivalle. On rouvre des lits. On est en train de monter une unité “Covid” dans un couloir qui avait été fermé. Mais, de base, on manque de personnel. Et les boîtes d’intérim rechignent à venir dans les secteurs infectés. »

Pas assez de personnels ni de matériels

Mais cet isolement n’est pas forcément transposable dans les Ehpad. « Il faut trouver des moyens d’isolement. En résidence, les gens vivent dans leur logement. Et il est compliqué de demander aux vieux messieurs et vieilles dames de déménager », précise Romain Gizolme, qui reconnaît qu’on « fait avec les moyens, humain et matériel, du bord ». Mais à ce stade, et sans vouloir « minimiser la situation », ce dernier refuse de parler « d’hécatombe » : « La plus grande vigilance s’impose. Il faut que nous ayons des masques dans la durée et en nombre suffisant », assure-t-il. Pour éviter le désastre, les auteurs de la lettre au ministre de la Santé réclament sans délai la livraison de pas moins de « 500 000 masques par jour » à l’ensemble du personnel soignant. « Une mesure centrale » alors qu’il « est encore temps de limiter la propagation du virus au sein de ces structures ».

Un point de vue pas forcément partagé par tous. « C’est terrible, ils ont décidé de sacrifier les petits vieux », s’émeut ainsi Laurent Picon, aide-soignant à l’hôpital de Beaumont, dans l’Oise, et délégué syndical SUD. « L’hôpital de Beaumont est en train de monter une unité Covid gériatrie pour accueillir les patients de l’unité de gériatrie aiguë contaminés, où d’ailleurs les personnels, qui sont possiblement porteurs du virus, n’ont pas de masque. Mais on n’a pas de réanimation sur place. À Pontoise, on ne voudra pas d’eux. Ça veut dire qu’ils mourront là. C’est terrible… » témoigne-t-il, la voix entrecoupée de sanglots.

Alexandra Chaignon
 
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25 mars 2020 3 25 /03 /mars /2020 07:11
Pourquoi la colère monte face à la stratégie française de dépistage limité  du coronavirus - Alexandre Fache, Nadège Dubessay, L'Humanité, 23 mars 2020
Lundi, 23 Mars, 2020
Pourquoi la colère monte face à la stratégie française de dépistage « limité » du coronavirus

La France s’est distinguée de beaucoup d'autres pays devant affronter l’épidémie par le faible nombre de tests pratiqués. Le résultat d’un manque de « réactifs », expliquent les uns. D’une impréparation coupable, accusent d’autres. Explications.

 

« Testez, testez, testez. Nul ne peut combattre un incendie les yeux bandés. » En faisant le point, le 16 mars, sur la pandémie de Covid-19, le directeur général de l’Organisation mondiale de la santé, Tedros Adhanom Ghebreyesus, a convoqué répétition et métaphore pour tenter de se faire entendre. Un message que de nombreux pays (Corée du Sud, Allemagne…) n’ont pas attendu pour pratiquer un dépistage massif. D’autres, à commencer par la France, semblent avoir beaucoup de mal à en faire une priorité. Après des semaines de déni, le ministre de la Santé a fini par reconnaître, samedi, que la « doctrine » française en la matière devait « évoluer ». « L’OMS nous demande de tester, on doit désormais suivre cette voie », a déclaré Olivier Véran, promettant de « multiplier les tests », mais seulement « quand nous aurons levé le confinement ».

Suffisant ? Pas sûr. De nombreux scientifiques, comme le Pr Didier Raoult, infectiologue à Marseille et membre du comité scientifique chargé de conseiller l’État, plaident au contraire pour un dépistage aussi massif et précoce que possible. « Pour sauver des vies, nous devons réduire la transmission. Cela signifie qu’il faut trouver et isoler le plus grand nombre de cas possibles, et mettre en quarantaine leurs contacts les plus proches », indiquait déjà le patron de l’OMS, le 12 mars. « Même si vous ne pouvez pas arrêter la transmission, vous pouvez la ralentir et protéger les établissements de santé, les maisons de retraite et autres espaces vitaux – mais seulement si vous testez tous les cas suspects. » « L’identification plus systématique des sujets porteurs pourrait contribuer significativement à l’écrasement ou l’étirement du pic épidémique », écrivaient aussi, le 13 mars, dans le Quotidien du médecin, Laurent Lagrost (Inserm) et Didier Payen (ex-chef de la réanimation à l’hôpital Lariboisière). Las, malgré des objectifs affichés similaires, la France a choisi de ne pas procéder ainsi, et se retrouve face à une propagation invisible et plus large que les chiffres égrenés chaque jour. Il y aurait « entre 30 000 et 90 000 » personnes infectées en France, a d’ailleurs estimé samedi Olivier Véran. Soit bien plus que les 14 459 cas positifs relevés officiellement.

La France atteint péniblement les 5000 tests par jour, depuis peu

Pourtant, jusqu’à il y a quelques jours, l’idée de tester plus largement la population était écartée sans autre forme de procès. « En circulation active, le test n’a pas beaucoup d’intérêt, aucun pays ne l’a fait », assurait ainsi le directeur général de la santé, Jérôme Salomon, le 17 mars, au lendemain de l’injonction de l’OMS. « La France n’est pas visée » par cette déclaration, voulait croire le haut fonctionnaire, infectiologue de profession. Ah bon ? Mais qui cette supplique visait-elle alors, sinon les pays limitant encore drastiquement leur politique de dépistage ? Lors de la première semaine de mars, tandis qu’elle n’avait encore constaté aucun décès lié au Covid-19, l’Allemagne a testé 35 000 personnes, 100 000 la suivante, et peut désormais dépister 160 000 personnes chaque semaine, selon le président de l’Institut de santé publique Robert-Koch, Lothar Wieler. La France atteint péniblement les 5 000 tests par jour, depuis peu.

Et début mars, c’était pire. « Pour toute la Seine-Saint-Denis, nous avions une limite de 14 tests, 28 à partir du 9 mars, se souvient Christophe Prudhomme, porte-parole de l’Association des médecins urgentistes (Amuf). C’était totalement dérisoire ! Résultat : on ne testait que les cas ultra-prioritaires. Une erreur ! Cela laissait dans la nature de nombreux cas douteux. » Pour le médecin de l’hôpital Avicenne, à Bobigny, « le gouvernement a manqué à la fois de réactivité – en ne mettant pas la pression sur les labos pour produire massivement des tests – et de clarté – avec son discours invitant à “maintenir l’activité” tout prix ».

Cette stratégie de dépistage limité était-elle le résultat d’un manque de stocks ? C’est ce qu’affirme l’immunologiste Jean-François Delfraissy, qui préside le comité scientifique mis en place le 11 mars. « Nous sommes incapables (…) de tester à la même échelle que la Corée du Sud », a-t-il affirmé dans l e Monde ce week-end, du fait d’un « énorme problème (d’approvisionnement – NDLR) en réactifs », qui viennent « de Chine et des États-Unis ». Une explication qui ne satisfait pas la cofondatrice de l’Observatoire de la transparence dans les politiques du médicament, Pauline Londeix (lire entretien en p. 4). Dans un courrier envoyé jeudi à Édouard Philippe, elle rappelle avoir tiré la sonnette d’alarme, à l’automne, « sur les problèmes généraux du marché du diagnostic en France », auprès d’Olivier Véran, alors rapporteur du projet de loi sur la Sécurité sociale, et Agnès Buzyn. En vain : « Nous constatons que rien n’a été fait depuis », se désole-t-elle.

Seuls quelques laboratoires seraient opérationnels

La France, pourtant, compte sur son territoire de nombreux laboratoires, publics ou privés, en mesure de réaliser des tests (120 selon la DGS). Mais seuls quelques dizaines seraient opérationnels. Et un industriel français est spécialisé dans cette activité : BioMérieux et ses 2,4 milliards d’euros de chiffre d’affaires en 2018. Ont-ils été sollicités assez tôt par le gouvernement ? Le scénario actuel permet d’en douter. Convaincus que toutes les mesures n’ont pas été prises à temps, trois médecins, représentants d’un collectif de soignants, ont déjà porté plainte jeudi, devant la Cour de justice de la République, contre le premier ministre et l’ex-ministre de la Santé Agnès Buzyn. D’autres ont saisi en référé le Conseil d’État vendredi, réclamant un confinement plus strict. Le même jour, une tribune de cinquante soignants interrogeait : « Le gouvernement fait-il vraiment la guerre au coronavirus ? » Le signe d’une colère qui se propage presque aussi vite que le virus.

Alexandre Fache
Lundi, 23 Mars, 2020
Dépistage du Covid-19. «  L’anticipation de la crise n’a pas été à la hauteur  »

Olivier Véran a annoncé samedi un « changement dans la stratégie de dépistage ». Une évolution bien tardive, regrette la militante Pauline Londeix, cofondatrice de l’Observatoire de la transparence dans les politiques du médicament.
 

 
Pourquoi la France n’a-t-elle pas dépisté plus massivement, comme la Corée du Sud ? Y a-t-il eu une erreur de stratégie ?

PAULINE LONDEIX C’est évident. La gestion, l’anticipation de la crise n’ont pas été à la hauteur. Les confidences d’Agnès Buzyn le montrent. Il y a eu un pilotage à vue, le gouvernement ne s’est pas posé les bonnes questions au bon moment. Notamment sur le dépistage. Le comité scientifique n’a été installé par Olivier Véran que le 11 mars. Ça veut dire que, pendant toute la phase ascendante de l’épidémie, il n’y en avait pas. Autre problème, ce comité a rendu trois avis entre le 12 et le 16 mars : rien, pas un mot sur la question du dépistage. C’est étonnant. Certes, il n’était pas évident de prédire l’ampleur de cette crise. Mais si, en janvier, le gouvernement avait réfléchi à une stratégie de dépistage plus importante s’appuyant sur des producteurs locaux publics, peut-être aurait-on pu freiner l’épidémie. Plus tard, on aurait aussi dû tirer des leçons plus rapides de ce qu’ont fait la Corée du Sud ou l’Allemagne.

Olivier Véran assure que des tests ont été menés largement en Haute-Savoie ou dans l’Oise, mais que, après la vaste dissémination de cas depuis Mulhouse, ce n’était plus possible. Cette explication tient-elle ?

PAULINE LONDEIX Pas vraiment. Le gouvernement nous dit qu’il n’a pas assez de tests pour dépister massivement, mais quand nous appelons les hôpitaux, on s’aperçoit que les stocks de réactifs ne sont pas épuisés… Deuxième point : l’exécutif aurait pu faire pression sur les producteurs pour obtenir plus de tests, plus vite. Mais on n’a jamais eu l’impression que c’était une priorité. Vendredi, Jean-François Delfraissy a affirmé que nous manquions de certains composants fabriqués en Chine ou aux États-Unis. Mais nous avons appelé des producteurs français : ils n’importent rien de ces pays, mais plutôt d’Allemagne et du Royaume-Uni. Le ministre de la Santé a annoncé samedi soir que la France allait revoir sa stratégie. C’est bien, mais tardif.

La France, prétend-il, se contente de suivre les recommandations de l’Union européenne et de l’Organisation mondiale de la santé (OMS)…

PAULINE LONDEIX Le problème date d’il y a environ un mois. Les épidémiologistes alertent sur le fait que la France va faire face à une vague très importante de l’épidémie. Pourtant, les mesures restent très modestes. L’OMS a certes un peu tardé, mais désormais, elle l’affirme clairement : la priorité, c’est de dépister. La France, elle, donne le sentiment de réagir après tout le monde. Jusqu’à vendredi matin, Édouard Philippe affirmait que si on ne dépistait pas massivement, c’était en application d’une prétendue « doctrine médicale ». Mais de quelle doctrine parle-t-il ? Il essaye de faire passer pour un choix scientifique la conséquence du sous-investissement dans la santé et une certaine forme d’improvisation. Cela fait douze jours que nous demandons au gouvernement de publier la liste des tests utilisés, l’origine des réactifs, leur prix, qui sont les producteurs mobilisés, publics ou privés, quels sont les volumes attendus, pour quand. Aucune réponse.

Que révèle cette crise sur nos fragilités dans l’accès aux produits de santé essentiels ?

PAULINE LONDEIX On a laissé le secteur du médicament, des produits médicaux et de diagnostic aux seuls industriels du secteur privé, ce qui est une très mauvaise idée. Or, en cas de pandémie, ils ne sont pas en première ligne. Ce qui nous sauve dans l’urgence actuelle, ce sont les infrastructures publiques : les hôpitaux, la recherche… Pas le privé. Cela montre bien qu’il faut sortir ce secteur des logiques de marché.

C’est ce qu’a promis le président de la République le 12 mars. Vous y croyez ?

PAULINE LONDEIX Il nous a déjà habitués à ce type de décalage entre le discours et les actes. Cynthia Fleury appelle ça la falsification du langage. En mai dernier, devant l’Organisation internationale du travail (OIT), Emmanuel Macron avait vertement critiqué le libéralisme. On voit ce que ça a donné depuis… Le résultat, c’est qu’on est dans la pire situation possible pour faire face à une pandémie comme celle du Covid-19. Ce n’est pas la faute de ce seul gouvernement. Mais il a sa part de responsabilité.

Vous comprenez les médecins qui ont porté plainte devant la Cour de justice de la République ou le Conseil d’État ?

PAULINE LONDEIX Oui, parce qu’il y a eu trop de dysfonctionnements. Agnès Buzyn dit avoir alerté le premier ministre dès janvier. Sans résultat. Malgré cette conscience du danger, elle décide de quitter son ministère, en pleine crise… Et alors que celle-ci s’aiguise, début mars, qu’annonce Édouard Philippe ? Le 49.3 pour la réforme des retraites ! Si on ajoute à ce tableau l’absence de dépistage systématique, le manque de masques ou les ruptures en gel hydro­alcoolique, on voit qu’il y a eu des problèmes à tous les niveaux. C’est grave.

Entretien réalisé par Alexandre Fache
Lundi, 23 Mars, 2020
« Pas de test, malgré la prescription de mon médecin »

Jean-Jacques Michot a contracté le Covid-19 dans un bureau de vote, à Saint-Ouen. Alors qu’il cumule les facteurs à risque et malgré l’ordonnance de son généraliste, il n’a pu être dépisté.

 

C’est une toux sèche et persistante qui alerta la femme de Jean-Jacques Michot, mardi 17 mars. Le lendemain matin, la fièvre s’était installée. Latifa n’hésite plus, elle appelle le médecin traitant. « En téléconsultation, il nous a expliqué comment évaluer ma fréquence respiratoire », explique Jean-Jacques. Il le sait aujourd’hui, il a été contaminé alors qu’il tenait un bureau de vote de Saint-Ouen (Seine-Saint-Denis).

À 72 ans, avec un traitement pour l’hypertension et un autre contre le psoriasis, il cumule ce que l’on nomme les facteurs à risque. Le même jour, Latifa récupère l’ordonnance au cabinet médical. « Il fallait absolument que mon mari soit sous surveillance », explique-t-elle. L’ordonnance destinée aux urgences indique « forte suspection de Covid-19 » et décrit les pathologies, les antécédents – notamment un cancer de la peau – du patient. « En même temps qu’il me parlait, le médecin a essayé d’appeler le 15, raconte Latifa. Sans succès. Il a aussi contacté un service ambulancier. Mais ce dernier a répondu qu’il ne faisait pas le trajet des urgences… » De son côté, Latifa appelle une compagnie de taxis. Même refus. « On a laissé tomber, des voisins pourront amener Jean-Jacques si vraiment son état s’aggrave, mais il ne fera pas le test. On ne va pas engorger les urgences alors que le médecin m’a dit que de toute façon, les tests, il n’y en a plus. »

De nombreux scientifiques préconisent un dépistage massif

Pourtant, tout comme l’Organisation mondiale de la santé (OMS), de nombreux scientifiques préconisent un dépistage massif afin de mieux mesurer l’évolution de la pandémie. « En France, l’estimation du nombre de cas est basée uniquement sur les malades testés », déplore le docteur Henri Partouche, le médecin généraliste de Jean-Jacques Michot. Il espère que le réseau Sentinelles, qui assure le suivi des épidémies en médecine de ville, adapté au Covid-19 depuis le 16 mars, « permettra de tester le nombre exact de cas à partir d’un réseau de médecins généralistes ». Habiliter les médecins de ville à tester leurs patients, c’est pouvoir « mieux affiner le diagnostic » et aussi « améliorer plus tôt les comportements de confinement », assure le Dr Partouche. En attendant, il a expliqué à son patient comment surveiller sa fréquence respiratoire, sa température. Et il l’appelle régulièrement. « Nous sommes passés brutalement d’une médecine sociale, de relation, à une médecine de guerre », soupire-t-il. Malgré la fatigue, Jean-Jacques tient à garder le moral : « Je sais que j’en ai pour un moment, mais ça va passer. » Surtout, le couple sait qu’il peut compter sur la formidable solidarité des voisins de leur résidence.

Nadège Dubessay
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