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25 décembre 2020 5 25 /12 /décembre /2020 10:16
Pêche. Sur les bateaux et à terre, « jusqu’à 30 000 emplois pourraient être détruits » par le Brexit
Lundi 21 Décembre 2020

Un Brexit sans accord risquerait de porter le « coup de grâce » à la filière après une année 2020 marquée par des difficultés d’écoulement des stocks, prévient Sylvie Roux, déléguée CFDT-FGTE en charge de la pêche. Entretien.

 

Alors que les négociations pour trouver un accord à la sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne, cristallisées depuis plusieurs mois autour des questions de pêche, devraient prendre fin au plus tard dimanche à minuit, les yeux des syndicats sont rivés vers Bruxelles. En cas de victoire de la position de Londres, les pêcheurs français pourraient se voir refuser l’accès aux eaux britanniques. Un scénario alarmant après une année catastrophique pour les marins.

Les bateaux ont été autorisés à prendre la mer pendant les deux confinements. Le coronavirus a-t-il tout de même eu un impact important sur les salariés de la pêche ?

Sylvie Roux La filière entière a été extrêmement fragilisée cette année, à commencer par les entreprises de pêche. Celles-ci ont en effet continuer à pêcher, mais encore fallait-il pouvoir vendre par la suite. Sur la première période de confinement, nous avons rencontré beaucoup de problèmes de commercialisation de nos produits, puisque l’essentiel de nos points de ventes, les poissonneries, les restaurants, et les entreprises de restaurations collectives pour les poissons moins nobles, étaient fermés. Les exportations ont aussi été mises à mal puisque les principaux pays vers lesquels partent nos poissons, l’Italie, l’Espagne, le Portugal, connaissaient des restrictions similaires. Lors du deuxième confinement, certaines entreprises déjà très fragilisées ont dû retarder le départ en mer de leurs bateaux à cause de cas de contamination au virus parmi les membres de leur équipage. Les pêcheurs sont capables de supporter cette situation quelques semaines, quelque mois, mais comme le virus perdure, il y a un vrai risque de voir les entreprises couler.

La possibilité d’une sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne sans accord vous inquiète-t-elle ?

Sylvie Roux Ça risque d’être le coup de grâce. Nous avons calculé qu’en six mois à un an, jusqu’à 30 000 emplois pourraient être détruits, en comptant les emplois induits. Dans les gros ports comme celui de Lorient (Morbihan), dont le sort va être éminemment soumis à la signature ou non d’un accord, des dizaines de bateaux se retrouveraient du jour au lendemain privés de leur pêche. Pour certaines entreprises, la pêche dans les eaux britanniques représente jusqu’à 100 % de leur chiffre d’affaires, ce serait donc vraiment catastrophique. D’autant plus que ces hauturiers ne pourront pas se rabattre sur les eaux nationales, qui sont déjà saturées, et où ils ne disposeront pas des licences et autorisations nécessaires. Si les entreprises de pêche ont plus ou moins réussi à se garder à flot après les restrictions sanitaires, le Brexit, ça sera une tout autre chanson.

Si ce scénario venait à se réaliser, quelles perspectives s’offriraient aux entreprises et salariés de la filière de la pêche ?

Sylvie Roux Par les temps qui courent, je vois mal comment des redéploiements des bateaux vers la Mauritanie, le Maroc, ou vers d’autres côtes africaines, comme cela s’est déjà vu par le passé, pourraient se faire. Donc les solutions restantes sont des plans de sortie de flotte, ce qui revient à détruire des entreprises en les indemnisant. Ce serait évidemment un très mauvais signe, parce que cela signifie détruire des savoir-faire, emmener à la casse des bateaux en état de navigation, voire presque neufs parfois, et supprimer des emplois de pêcheurs. Or, nous savons qu’à cause de leur espace et mode de travail très particuliers, il est dur de reconvertir un marin à terre.

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25 décembre 2020 5 25 /12 /décembre /2020 09:43
Bravo à nos camarades de Landerneau!!!

Bravo à nos camarades de Landerneau!!!

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25 décembre 2020 5 25 /12 /décembre /2020 09:19
Accord UE-Royaume Uni : un Brexit pour le business, pas pour les travailleurs, ni pour les peuples
 
Après deux élections législatives, trois crises gouvernementales en Grande-Bretagne et 4 ans et demi de tractations laborieuses et souvent opaques, la volonté majoritaire et souveraine du peuple britannique à quitter l'UE qui s'est exprimée en juin 2016 sera donc effective le 31 décembre prochain, date de la fin de la période de transition.
 
L'accord qui vient d'être annoncé évite une sortie sèche du Royaume-Uni de l'espace communautaire, ce qui aurait signifié une crise majeure, entre autres, pour la pêche et pour les accords de paix en Irlande. 
Mais ce même accord scelle un Brexit négocié entre les conservateurs anglais et les bourgeoisies européennes pour le plus grand bénéfice du libre-échange et du capital. Les faibles normes sociales et environnementales européennes, qui sont déjà trop élevées pour la bourgeoisie britannique, ne pèsent que peu de choses face aux dispositions de ce qui n'est ni plus, ni moins qu'un accord de libre-échange gigantesque entre la 6e puissance économique mondiale, qui a déjà signé de tels accords avec des états tiers et s'apprête à en signer d'autres, et l'Union Européenne, qui tout au long des
négociations a placé le maintien des règles du marché intérieur communautaire au-dessus de toute autre considération. D'après les éléments révélés ce matin par la presse britannique, le dispositif « d'équivalence » entre les règles européennes et britanniques est réduit à sa portion congrue et les règles qui vont dans ce sens sont soumises à un arbitrage « indépendant ». Il n'y a rien dans l'accord pour empêcher la transformation de la City en véritable paradis fiscal. 
 
Tout cela va avoir des conséquences graves à la fois pour les travailleurs et les peuples européens d'une part et pour les peuples du Royaume-Uni d'autre part, qu'ils aient ou non voté pour le Brexit, et qui sont frappés par une explosion de la pauvreté du fait des politiques austéritaires des gouvernements successifs. Il ne s'agit donc pas d'un « compromis », mais d'un accord entre les conservateurs britanniques en pleine dérive droitière et les classes dirigeantes européennes.
 
Cet accord a aussi des impacts négatifs pour les activités de pêche et cela touche notamment les régions de Bretagne, Normandie et Hauts-de-France. Le gouvernement français doit prendre toutes les mesures qui s'imposent pour que les pêcheurs ne paient pas le prix du Brexit. 
 
Le PCF réaffirme sa solidarité avec les forces de gauche politiques et syndicales britanniques qui luttent contre les nouvelles régressions sociales, environnementales et démocratiques que les conservateurs britanniques cherchent à imposer. Il réitère également au Sinn Féin irlandais qu'il se tient à ses côtés pour la défense des droits
nationaux du peuple irlandais et de l'intégralité des dispositions de l'Accord de paix de 1998.
 
Le Brexit marque la faillite de la construction capitaliste de l'UE.
 
Plus que jamais, il est urgent d'en finir avec les règles et les traités européens néolibéraux, pour aller vers une Europe à géométrie choisie respectant les souverainetés démocratiques des peuples et des nations et offrant un cadre à une association et une coopération mutuellement bénéfiques entre elles.
 
Parti Communiste Français,
 
Paris, le 24 décembre 2020
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24 décembre 2020 4 24 /12 /décembre /2020 13:53

L’immeuble de la direction nationale du PCF, place du Colonel-Fabien, fut tout un temps espionné par les services secrets américains. Un fonds d’archives l’atteste. Retour sur une affaire qui fit du bruit au milieu des années 70.

 

Gaston Plissonnier en avait déjà vu de toutes les couleurs dans sa longue vie de dirigeant. Pourtant le secrétaire national du PCF (les moqueurs l’avaient surnommé « le secrétaire perpétuel ») dut être plutôt surpris ce jour du printemps 1975 où un inconnu lui fait savoir que « la CIA m’a chargé de vous surveiller ». L’homme lui tendit un papier où étaient indiqués son nom, son adresse (Massy), son numéro de téléphone. Vérification faite, ces coordonnées étaient correctes. Il était marié, avait deux enfants et s’appelait Joseph Marchal, citoyen belge et espion américain. Ce quinqua avait une longue expérience et de soudains scrupules. À l’évidence, il ne s’agissait pas d’un mythomane mais bien d’un agent qui avait décidé de libérer sa conscience, de manger le morceau comme on dit. Par précaution, par pudeur aussi sans doute, Gaston Plissonnier se voyait mal en train de confesser le personnage. Il lui proposa de rencontrer le journaliste communiste Alain Guérin, et un jeune étudiant, Dominique Durand, pour poursuivre cet échange qui s’annonçait plutôt passionnant. Marchal accepta. Il accepta aussi que ses rencontres soient enregistrées sur magnétophone. Ainsi commença, au milieu de cette année 1975, une série d’entretiens secrets entre un espion américain et des « émissaires » communistes français.

Un mot sur le contexte : Giscard d’Estaing alors est au pouvoir depuis peu mais la contestation, politique et sociale, est forte. La gauche a le vent en poupe, elle vient de signer un « programme commun ». Le PCF pèse dans les 20 %, entame sa démarche « eurocommuniste » ; le nouveau PS se renforce, et tout le monde s’attend peu ou prou à ce que la coalition des gauches l’emporte bientôt. Beaucoup en rêvent, ici ; certains paniquent, ailleurs, du côté américain notamment. Et puis c’est à Paris que se tiennent les négociations sur la fin de la guerre au Vietnam. Washington veut suivre de près cette actualité. Dans ce but, la CIA va mettre de gros moyens pour comprendre (et entendre) ce qui se passe dans cette capitale et notamment du côté du Colonel-Fabien. Paris devient un « nid d’espions », comme dira l’écrivain Faligot. Mais la Centrale américaine va connaître un problème assez inédit, un imprévu, et c’est ici que commence notre histoire : un de ses espions a des états d’âme, des rancœurs, il est aussi pris de doute. Incroyable mais vrai, comme dit l’expression populaire.

Marchal va donc avoir six longs échanges avec ses deux correspondants communistes. Il va raconter avec beaucoup de précisions son parcours d’espion. Le premier entretien se passe dans une voiture, qui va rouler sur le périphérique pendant toute la discussion. Histoire d’éviter d’éventuels micros, enfin d’autres micros que ceux de Guérin et Durand. Les entretiens suivants se passeront dans un grand hôtel (Le Méridien de la porte Maillot). À chaque fois Marchal demandera si on avait bien vérifié l’état de la chambre, de la salle de bain, etc. Ces discussions se dérouleront notamment le 6 juin, le 25 juillet, le 8 décembre 1975 et courant janvier 1976. Pourquoi Marchal se mettait-il à table ? Disons qu’il agissait autant par aigreur à l’égard de son propre « Service » et de sa direction (des histoires de rémunérations…) que par bienveillance tardive à l’égard des communistes français. Dans sa jeunesse, il avait participé à la résistance antinazie en Belgique, il lui restait sans doute des traces de ses années de formation.

Ceux qui l’ont connu parlent d’un Monsieur-tout-le-monde. Aucun signe particulier, pas même un accent belge. Né en 1923, près de Givet, résistant, il se retrouva dans les « services » belges après-guerre. Il mena diverses affaires en Afrique avant de travailler pour l’OTAN (il montra tous ses états de service). En 1971, il est sollicité par la CIA pour « travailler » à Paris. Un Américain, venu de Francfort, Allemagne (QG des forces US en Europe), le fit passer au détecteur de mensonges. À la suite de quoi, il est engagé. Washington a alors une obsession : le Vietnam. Les USA, qui croyaient ramener ce pays à l’âge de pierre comme avait dit un de ses militaires, étaient en échec sur le terrain, en échec aussi dans les têtes : un puissant mouvement anti-guerre les avait contraints à négocier. Ces négociations se passent à Paris. La CIA veut absolument connaître les intentions des diplomates vietnamiens. Aussi elle va traquer les résidences où ils séjournent, sonder les murs, poser des micros, tout écouter, traduire, informer autant que faire se peut, Kissinger, le négociateur US, des réflexions de Hanoï. Marchal fait partie de ces espions (il s’agissait chaque fois d’équipes importantes), il donne des dates, des adresses, des noms, il décrit dans le détail comment les services s’infiltrent dans les appartements visés (ils auraient placé un jour un micro dans un matelas), comment ils achètent, louent, occupent les lieux voisins des responsables vietnamiens ; comment l’Agence envoie des spécialistes (certains ont travaillé sur le Watergate), venus soit de Francfort, soit de Washington, pour des actions très ponctuelles. Leur job ? tester les outils d’écoute les plus sophistiqués du moment. Un jour, des collègues maladroits (il donne leurs prénoms) ont traversé complètement avec leur sonde le mur mitoyen donnant sur une des résidences vietnamiennes. Craignant que les « victimes » ne s’en rendent compte, on gèle l’opération, les « spécialistes » reprennent l’avion, les autres se mettent au vert, une semaine, deux semaines, le temps de voir. Mais leur « erreur » n’est pas repérée (genre quelques poussières de plâtre tombées dans l’appartement inspecté), tous se remettent au travail.

Gérard Streiff

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24 décembre 2020 4 24 /12 /décembre /2020 13:51
PCF - Pauvreté, chômage : Il n'y a pas de fatalité (Fabien Roussel)

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24 décembre 2020 4 24 /12 /décembre /2020 07:52
À l’issue du congrès du Parti communiste du Chili, entretien avec l’une de ses dirigeantes, Karol Cariola, qui porte au Parlement une loi d’imposition des plus riches.

À l’issue du congrès du Parti communiste du Chili, entretien avec l’une de ses dirigeantes, Karol Cariola, qui porte au Parlement une loi d’imposition des plus riches.

Chili. « Le gouvernement a opté pour que les travailleurs paient la crise »
Mardi 22 Décembre 2020 - L'Humanité

À l’issue du congrès du Parti communiste du Chili, entretien avec l’une de ses dirigeantes, Karol Cariola, qui porte au Parlement une loi d’imposition des plus riches.

 

Aujourd’hui âgée de 33 ans, ancienne responsable du secteur étudiant de la Jeunesse communiste chilienne et ancienne responsable syndicale lors du mouvement étudiant de 2010-2011, Karol Cariola a été élue députée du Parti communiste du Chili en 2013. Elle est représentative de cette nouvelle génération de communistes et féministes chiliens.

L’explosion sociale du 18 octobre 2019 a débouché, le 25 octobre, sur un référendum qui lance un processus constituant. Où en est la situation politique au Chili ?

Karol Cariola  Depuis l’explosion sociale, il est impossible d’analyser la situation politique au Chili sans regarder ce qu’il s’est passé ces trente dernières années. Je pense que l’explosion politique actuelle au Chili est très marquée par le processus historique de transition que notre pays a connu depuis que nous avons récupéré la démocratie en 1990. Ce n’est pas un hasard si le mouvement social, si le peuple chilien a décidé de se dresser avec une telle force contre toutes les inégalités sociales, fruits des politiques ultralibérales dont nous avons hérité de la dictature militaire. Le peuple chilien a poussé également avec une très grande force vers un processus constituant pour éliminer la Constitution que la dictature militaire a laissée comme l’un de ses principaux legs. Nous sommes aujourd’hui à un moment où ce qui détermine la position des forces politiques est l’axe autour de l’ultralibéralisme hérité de la dictature militaire. Il y a d’une part les forces antilibérales et d’autre part les forces néolibérales.

Ce mouvement social n’a pas de leader, il n’a pas non plus de direction collective ?

Karol Cariola Les révoltes dans le monde naissent des besoins collectifs. L’unité est fondamentalement l’unité du peuple, des exploités, des opprimés, des personnes dont les droits fondamentaux ont été violés. Même si nous ne pouvons pas reconnaître un seul parti dirigeant ou une seule figure de proue, ce que nous pouvons reconnaître dans ce processus, c’est que les différents participants à cette révolte convergent vers des objectifs communs. Ce qui est merveilleux, c’est aussi la force qui est derrière ce mouvement social, avec toutes les différences des acteurs et actrices qui se sont soulevés. Ainsi, il y a le mouvement féministe avec ses organisations respectives.

D’autre part, il y a le mouvement ouvrier, où s’est développé tout un processus de convergence avec d’autres acteurs sociaux. Nous avons obtenu que l’expression des luttes contre l’inégalité dans tous les secteurs et tous les domaines génère enfin une convergence commune, une lutte à l’intersection des différentes luttes qui se sont produites ces dernières années.

Quelle peut être la place d’un parti comme le Parti communiste à un moment où l’on constate un rejet des partis ?

Karol Cariola Oui, le Chili est un pays très diversifié dans ses différentes expressions, et je pense qu’il ne fait aucun doute qu’il existe un rejet majoritaire de la manière traditionnelle de faire de la politique et du système institutionnel. Nous ne pouvons pas seulement en rester au constat. Je pense que l’origine du problème, plus que les partis politiques eux-mêmes, est le cadre institutionnel dans lequel ont évolué les partis politiques ces dernières années.

Il est devenu de plus en plus évident que le développement d’une véritable démocratie où le peuple est souverain, qui intègre la participation des citoyens n’est pas possible dans le contexte d’un modèle de développement libéral. Il y a une contradiction fondamentale dans la coexistence d’une démocratie complète avec le modèle de développement libéral qui a prévalu dans notre pays pendant toutes ces années. Tous ces partis politiques qui s’accrochent à cette logique institutionnelle, à cette construction conservatrice, à cette politique de consensus, à cette vieille politique, derrière le dos des citoyens, se mettent évidemment à distance du peuple chilien.

Pour notre part, nous avons joué un rôle en tant que parti, parfois plus en marge, parfois à l’intérieur. Mais, au moins, nous essayons de comprendre et de nous mettre au diapason aussi finement que possible avec ce que le mouvement social populaire exprime et demande. C’est là que réside notre différence. Nous avons toujours dit aussi que notre lutte au sein des institutions (Chambre des députés, etc.) ne peut être séparée de la lutte sociale.

Icon Quote Aujourd’hui ce qui détermine la position des forces politiques est l’axe autour de l’ultralibéralisme hérité de la dictature militaire. 

Il y a quelques mois, vous étiez à l’initiative d’un impôt sur les super-riches. Où en est-il ?

Karol CariolaÀ la suite de la pandémie, une des choses qui est devenue évidente est le manque de volonté du gouvernement de donner au peuple les ressources qui lui permettent de survivre. Loin de ça, le gouvernement a opté pour que les travailleurs paient la crise. C’est sur cela que repose cette initiative de taxation des super-riches. Nous disons qu’il ne peut pas être question que, pour faire face à la crise, les travailleurs doivent utiliser leurs propres fonds de chômage ou de pension.

La crise jusqu’à présent n’a été payée que par les plus pauvres, les travailleurs. Les super-riches représentent 0,1 % de la population chilienne, soit environ 1 500 individus, 1 500 personnes qui concentrent 34 % de la richesse de notre pays. Cela permettrait de collecter fiscalement plus de 6 milliards de dollars pour distribuer en pensions ou en salaires d’urgence pendant au moins trois mois à 80 % des familles les plus vulnérables. C’est ce que l’État aurait dû faire depuis le début et ne pas transférer encore plus de ressources aux grandes entreprises. Notre initiative a reçu un large soutien, un sondage a montré que 80 % de la population du Chili soutient cette proposition.

Depuis plus de six mois, les sondages pour la présidentielle placent le communiste Daniel Jadue en première position. Est-ce que le congrès qui vient de se tenir a pris position sur cette éventuelle candidature ?

Karol Cariola Nous avions pris la décision lors de notre avant-dernier congrès en 2016 de proposer une candidature communiste à la présidentielle. Nous avions envisagé différents candidats. Finalement, ce sont les Chiliens qui, à travers les sondages, ont désigné Daniel Jadue. Aujourd’hui, Daniel Jadue, comme maire, est engagé dans la campagne pour sa réélection. Nous ne l’avons pas encore déclaré comme candidat à la présidence. Il doit continuer à être maire de Recoleta. C’est ce qui lui a permis, en tant que dirigeant communiste, de montrer ce que nous sommes capables de faire lorsque nous parvenons à gouverner localement. À partir de là, nous évaluerons les positions des différentes forces d’opposition. L’objectif est que demain ces oppositions convergent en une seule candidature.

La candidature de Daniel Jadue est celle qui a le plus de force aujourd’hui. Mais nous ne prendrons pas à l’avance une décision qui n’est pas seulement la nôtre, simplement parce que nous, communistes, ne pouvons pas gagner seuls une élection présidentielle. Il faut créer les conditions d’alliances beaucoup plus larges. La meilleure façon de le faire sera par le biais de primaires dans lesquelles les citoyens choisiront entre les différentes options.

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24 décembre 2020 4 24 /12 /décembre /2020 07:42
Selahattin Demirtas

Selahattin Demirtas

La Selahattin Demirtas, le leader kurde du HDP, prisonnier politique en Turquie, est soutenu depuis le départ par le PCF. Le HDP principale opposition de gauche, laïque, multiculturel et progressiste, en Turquie. La Cour européenne des droits de l’homme exige la libération immédiate par la Turquie du leader de gauche Selahattin Demirtas!

Mercredi 23 Décembre 2020 - L'Humanité
Constatant plusieurs violations de la Convention européenne des droits de l’homme par la Turquie, la Cour européenne des droits de l’homme a ordonné ce mardi la libération immédiate de Selahattin Demirtas, l’opposant politique kurde, leader du HDP, en détention provisoire depuis novembre 2016.
 

La décision vaut autant par l’ampleur des griefs retenus par les juges européens contre les décisions de la justice turque, que par le contexte de répression générale contre l’opposition politique en Turquie que dénonce l’arrêt de la Cour rendu ce mardi.

« C’est la première fois que la Cour européenne des droits de l’homme juge qu’une personne a été mise en prison par l’État turc pour des raisons politiques, et que les procédures judiciaires à l’encontre de Selahattin Demirtas étaient en fait des actes de répression politique contre un membre de l’opposition de gauche au régime d’Erdogan », réagit Fayik Yagizay, représentant du HDP auprès des institutions européennes, qui rappelle qu’il y a une semaine encore, le président turc continuait à soutenir que le leader kurde, ancien député et coprésident du HDP, ne serait jamais libéré.

Selahattin Demirtas a été arrêté le 4 novembre 2016 par les forces de sécurité turques en même temps que 12 autres députés du HDP (Parti démocratique des peuples, pro-kurde) dont l’immunité parlementaire avait été levée. Le leader kurde a été député à l’Assemblée nationale de Turquie de 2007 à 2018, et candidat aux élections présidentielles de 2007 (où il avait obtenu 9,76 % des voix), ainsi qu’en 2018 alors qu’il était toujours en détention provisoire. Bien que privé de tous les moyens de faire campagne, Selahattin Demirtas avait tout de même réussi à obtenir 8,32 % des voix, en s’exprimant depuis sa cellule.

À l’issue d’une modification constitutionnelle en mai 2016, le leader kurde avait été l’objet de 31 enquêtes pénales distinctes permettant d’alimenter un imbroglio judiciaire sans fin, destiné à justifier son maintien en détention.

« But inavoué »

Dans son arrêt, la Cour européenne des droits de l’homme considère que l’emprisonnement de Selahattin Demirtas, notamment pendant les « deux campagnes critiques », celles du référendum du 16 avril 2017 et de l’élection présidentielle du 24 juin 2018, « poursuivait un but inavoué, à savoir celui d’étouffer le pluralisme et de limiter le libre jeu du débat politique, qui se trouve au cœur même de la notion de société démocratique ».

La Cour rejette également les accusations de la justice turque cherchant à faire passer certains discours politiques du leader kurde pour des justifications du terrorisme, à seule fin de prolonger son maintien en prison. On ne peut pas assimiler « le droit à la liberté d’expression au fait d’appartenir à une organisation terroriste armée, ou de fonder, ou de diriger une telle organisation, en l’absence de tout élément concernant un tel lien », indique la CEDH dans son arrêt.

Au final, la Cour juge que dans le maintien en détention de leader de kurde, la Turquie viole à la fois l’article sur la liberté d’expression de la Convention européenne des droits de l’homme, celui sur le droit à la liberté et à la sûreté, le droit de statuer sur la légalité de la détention dans des délais raisonnables, le droit à des élections libres, la limitation de l’usage des restrictions aux droits, et elle exige la remise en liberté immédiate de Selahattin Demirtas.

La répression continue

La Turquie va-t-elle exécuter cette décision de la justice européenne et libérer Demirtas ? Fayik Agizay rappelle que l’Allemagne qui assure actuellement pour 6 mois la présidence du Conseil de l’Europe, s’est fixée comme priorité de faire appliquer les décisions de la Cour européenne des droits de l’homme. Si la Turquie ne respectait pas cette décision, le Conseil des ministres du Conseil de l’Europe serait saisi. « Il est très important que la justice turque libère Selahattin Demirtas, à la fois pour que la démocratie avance en Turquie et que l’on respecte les droits de l’opposition. Mais c’est aussi important pour qu’on puisse avancer vers une solution de la question kurde », estime le représentant du HDP. La décision de la Cour européenne des droits de l’homme constitue également un point d’appui pour la libération de tous les autres prisonniers politiques en Turquie, ajoute Fayik Agizay, dans un contexte ou la répression contre l’opposition par le régime d’Erdogan s’accentue. Ce mardi, une autre grande figure de l’opposition kurde, Leyla Guven, a été arrêtée à Diyarbakir. Elle vient d’être condamnée à 22 ans de prison.

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24 décembre 2020 4 24 /12 /décembre /2020 07:34
Centenaire du PCF - Congrès de Tours, 25 décembre 1920: L'ouverture du congrès prometteur (Jacques Girault, L'Humanité, 24 décembre 2020)
Centenaire du pcf. 25 décembre 1920, l’ouverture d’un congrès prometteur
Jeudi 24 Décembre 2020

À 9 heures, à Tours, ce jour de Noël, la salle du Manège accueille les délégués de la SFIO. Après plusieurs jours de débats intenses, le 30 décembre, à 2 h 45, la majorité vote l’adhésion à l’Internationale communiste. Retour sur ce huis clos décisif.

 

En France, dans le Parti socialiste SFIO, les minoritaires, avec Jean Longuet et Louis-Oscar Frossard, l’emportent en octobre 1918, mais le parti perd les élections l’année suivante. Dans la CGT, les grèves et les actions ouvrières qui ont continué pendant le conflit échouent en 1920. L’espoir vient du bolchevisme. Après un premier Parti communiste, un Comité de la IIIe Internationale naît en mai 1919. Les anciens opposants à l’Union sacrée décident de mener leur action dans ou en direction du parti socialiste SFIO. Ils lancent le Bulletin communiste, en mars 1920, pour faire connaître les idées bolcheviques.

Le Parti socialiste décide, en février 1920, d’entreprendre des discussions exploratoires avec la IIIe Internationale, après la rupture décidée avec la IIe Internationale. En juin 1920, le secrétaire général Frossard et le directeur de l’Humanité Marcel Cachin partent en Russie pour négocier avec ­’Internationale communiste (IC).

Dans le même temps, la stratégie de cette dernière change d’orientation. Après l’échec de la révolution mondiale, il faut faire adhérer les partis socialistes à l’IC et les bolcheviser ensuite. Le congrès de l’IC insiste sur la rupture totale avec le réformisme. Les 21 conditions énoncent les principes de tout parti communiste de type nouveau, centralisé sur le plan national et dans sa structure internationale. Le choix de procéder à la constitution de partis communistes expurgés impose des scissions dans les partis socialistes. La France est un des champs d’application.

Les résultats du vote des fédérations confirment la scission

Le samedi 25 décembre 1920, à partir de 9 heures, la salle du Manège à Tours commence à se remplir de délégués au congrès national du Parti socialiste SFIO. L’harmonie la Lyre du peuple exécute l’Internationale, un chœur de fillettes du patronage laïc interprète le Chant des ouvriers, de Pierre Dupont. À 10 h 30, Louis-Oscar Frossard, secrétaire général du Parti socialiste SFIO, ouvre le congrès et procède à la mise en place des structures habituelles des congrès nationaux de la SFIO depuis la création du parti en 1905. Après quatre journées de débats, la séance de nuit s’ouvre le mercredi 29 décembre. On savait dès l’ouverture que l’adhésion à l’Internationale communiste l’emporterait. Après les explications de votes données par les représentants des fédérations, la tendance s’est confirmée. Après que Léon Blum eut annoncé le retrait de la motion du Comité de Résistance, les résultats du vote des fédérations confirment la scission à la suite de l’ultime tentative de maintenir l’unité du parti. À l’annonce de la poursuite du « congrès communiste », Frossard précise que « le socialisme français continue » et commente : « L’inévitable s’est accompli. » Il est 2 h 45. Cette séance a été marquée par des agitations, non signalées dans le compte rendu officiel, conséquence des négociations entre minoritaires.

Paul Vaillant-Couturier lit l’acte de naissance du nouveau parti

Le matin du 30 décembre, toujours dans la salle du Manège, le congrès communiste se déroule. Paul Vaillant-Couturier lit l’acte de naissance du Parti socialiste (section française de l’Internationale communiste). Après les réunions séparées des partisans de la Résistance autour de Blum et des Reconstructeurs autour de Longuet, les deux courants minoritaires se retrouvent, l’après-midi, pour réorganiser le Parti socialiste de l’Internationale ouvrière, la « vieille maison », selon l’expression de Léon Blum.

Les analyses propres au Parti communiste viennent de loin. Héritière de clivages anciens, résultant des analyses marquées par la radicalité sensible dans les couches sociales défavorisées depuis la Révolution française, relayées par des théoriciens de formes avancées se réclamant du socialisme, l’aspiration communiste dans la société se réveille avec la guerre et la révolution bolchevique. Le Parti socialiste SFIO en France et les partis constitutifs de l’Internationale socialiste n’ont pas poursuivi l’action de Jaurès pour maintenir la paix. La guerre s’est aggravée avec la participation des socialistes. Exploitant la faiblesse du pouvoir, les bolcheviques en Russie ont triomphé et s’engagent dans la constitution d’une Internationale communiste qui entend provoquer la révolution mondiale. La majorité des socialistes français choisissent cette voie. Reste à construire le parti défini dans les 21 conditions d’adhésion à l’Internationale communiste.

Jacques Girault

Historien

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24 décembre 2020 4 24 /12 /décembre /2020 07:25
Martha Desrumaux: la lutte chevillée au corps - Marie Toulgoat, L'Humanité - 23 décembre 2020
Martha Desrumaux, la lutte chevillée au corps
Mercredi 23 Décembre 2020 - L'Humanité

L’ouvrière et syndicaliste du Nord aura été de tous les combats : contre le fascisme, contre le capitalisme, contre le patriarcat. Une obstination dans l’engagement de tous les instants qui lui aura valu l’expérience sinistre de l’enfer concentrationnaire.

 

En 1943, dans l’atelier du camp de concentration de Ravensbrück, Martha Desrumaux est affectée à la couture. Neuf heures par jour, elle et ses camarades de souffrance doivent confectionner des habits aux soldats allemands. Secrètement, elle s’applique à bâtir les coutures les moins solides possible et y glisse des poux. Son acte de rébellion, percé à jour par ses tortionnaires nazis, lui vaudra une blessure au doigt, lui laissant sa paume à jamais insensible. Tout au long de son existence, et même plongée dans les heures les plus obscures de l’Histoire, la communiste n’aura rien cédé de son combat. Et aura toujours conjugué la résistance dans toutes ses déclinaisons possibles.

Même au plus profond de l’horreur des camps, sa solidarité n’a pas failli

Résistance d’abord au patronat, premier combat de la militante. Née en 1897 à Comines dans le Nord, la jeune Martha Desrumaux est précipitée dans le monde du travail au décès brutal de son père alors qu’elle n’a que 9 ans. Aussitôt, l’enfant est dépêchée comme bonne dans une riche famille de la banlieue bourgeoise de Lille. Rapidement, celle-ci se tourne vers le vacarme incessant de l’usine textile Cousins Frères de sa ville natale. Le travail y est si pénible, les conditions si déplorables que la jeune ouvrière se syndique à la CGT à ses 13 ans. Un signe imparable d’émancipation, alors même que les femmes, surtout à un si jeune âge, n’étaient guère nombreuses dans les rangs du syndicat.

Femme, pauvre, analphabète jusqu’à l’âge adulte… Face à sa ténacité et sa détermination, aucun obstacle ne résiste sur le chemin de la travailleuse. Alors qu’elle n’a que 20 ans, la « pasionaria du Nord » mène à la victoire sa toute première grève dans les usines Hasbroucq à Lyon. Encore incapable d’écrire, elle s’entraîne toute la nuit pour ne pas se priver de la satisfaction d’apposer sa signature à côté de celle du patron. Dix ans plus tard, elle devient la première femme élue au comité central du Parti communiste, balayant d’un revers de main les contestations. « Ça gênait beaucoup qu’une femme puisse prendre des responsabilités dans le Parti. Elle a dû subir des remarques machistes et malgré tout, elle est restée fidèle à ses valeurs », relève Pierre Outteryck, professeur agrégé d’histoire et biographe de Martha Desrumaux. En 1936, seule femme parmi la délégation du Front populaire, elle arrache les accords de Matignon, agitant sous le nez du patronat les fiches de paie des ouvrières du textile.

Alors que la France entre en guerre, la résistance prend dans la vie de la communiste un sens tout nouveau : celui de la lutte contre le fascisme. À peine l’occupation allemande installée, Martha Desrumaux s’érige comme la figure de proue d’un réseau de sabotage et prend à bras-le-corps la réorganisation du PCF depuis la ­Belgique. Une nuit, elle détruit le réservoir d’essence d’un champ d’aviation ennemi, clouant au sol la flotte nazie. Elle est arrêtée alors qu’elle rend visite à Louis, son tout jeune fils, confié à un couple d’amis militants. La suite de la guerre, elle la passera à Ravensbrück. Mais, même au plus profond de l’horreur, sa solidarité n’a pas failli une seule seconde. « Je me souviens qu’à Noël 1943, quand nous sommes arrivés, Martha s’était débrouillée pour nous procurer quelques biscuits, et c’était déjà énorme pour nous », se remémore Lili Leignel, déportée avec ses deux frères alors qu’elle n’avait que 11 ans. Quelques années plus tard, alors qu’elle foule le sol français pour la première fois depuis quatre ans, la militante prononce, comme un pied de nez à l’inhumain : « Je suis Martha Desrumaux, les nazis ne m’ont pas eue. » Peu de mots formeront meilleur témoignage de son obstination.

À son retour d’Allemagne, souffrante du typhus et alors que le droit de vote des femmes est tout récent, la militante se fait élire conseillère municipale à Lille et devient en 1944 l’une des douze premières femmes à siéger à ­l’Assemblée nationale. Affaiblie par la maladie, elle ne tire pas pour autant un trait sur son combat syndical, et renoue aussitôt avec la lutte ouvrière. Un engagement de toute une vie qui lui vaudra ces quelques mots de la bouche de l’ancienne députée européenne communiste Danielle de March : « Martha, on dit que c’était une grande, mais le mot est petit. C’était une géante. » Une géante qui aurait toute sa place au Panthéon.

 

Lire aussi:

Martha Desrumeaux: syndicaliste et communiste résistante et déportée. Pour que la classe ouvrière rentre au Panthéon!

Martha Desrumaux - la solidarité populaire au cœur - Conférences de l'historien Pierre Outteryck à Brest le lundi 4 février et à Morlaix le mardi 5 février, 18h

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24 décembre 2020 4 24 /12 /décembre /2020 07:16
Actualité du combat communiste - entretien de Julia Hamlaoui avec Guillaume Roubaud Quashie, animateur du centenaire du Parti communiste et membre de la direction du PCF (L'Humanité, 23 décembre)
Guillaume Roubaud-Quashie : « Une rupture possible et nécessaire »
Mercredi 23 Décembre 2020

Dirigeant du PCF en charge de coordonner son centenaire, Guillaume Roubaud-Quashie met en perspective un siècle d’histoire de la formation née du congrès de Tours avec l’actualité du combat communiste.

 

Guillaume Roubaud-Quashie Historien, membre de la direction du PCF

Les communistes soufflent cette année les cent bougies du congrès de Tours. Face à la crise historique que nous vivons, comment leur combat prend-il une nouvelle actualité ?

Guillaume Roubaud-Quashie L’une des dimensions du congrès de Tours est l’ambition d’un changement de civilisation. Dans la période que nous vivons, cette volonté de rupture rencontre une possibilité plus importante que cent ans en arrière du fait des connaissances accumulées par l’humanité. Mais aussi une nécessité plus grande due aux ravages du capitalisme. Le lamentable épisode mercantile des vaccins, où certains sont davantage préoccupés par les profits à engranger que par les vies à sauver, l’illustre parfaitement.

Révolution ou réformisme, ce débat trouve-t-il encore une résonance aujourd’hui ? Quelle forme prend aujourd’hui la révolution dont rêvent les communistes ?

Guillaume Roubaud-Quashie Ce vocabulaire est ancien mais a encore un usage aujourd’hui : dans une partie du monde syndical, par exemple, certains évoquent parfois la constitution d’un pôle réformiste. Nous nous définissons toujours comme révolutionnaires. Évidemment, ce mot a une histoire et peut évoquer la brutalité, la brièveté, éventuellement l’idée d’insurrection barricadière. Si ce n’est pas notre stratégie, nous pensons en revanche que les changements à impulser sont globaux. En l’occurrence, sortir d’une logique fondée sur la seule rentabilité quitte à broyer les êtres humains et la planète, pour miser sur le libre et plein développement de chacun. Malheureusement, les forces qui ne portent pas clairement l’ambition d’affronter les logiques du capital sont nombreuses à gauche, peut-être même plus qu’au cours du siècle passé. Ce qui ne doit pas être tout à fait étranger à l’état de la gauche. Est-ce qu’avec des mesures qui laissent le cœur du réacteur intact, on sauvera le million d’espèces menacées ? Beaucoup de gens se rendent comptent que ça ne tient pas.

L’histoire du PCF est aussi celle des conquêtes sociales rendues possibles par de puissants mouvements populaires et le rassemblement de la gauche. Quelles leçons en tirer ?

Guillaume Roubaud-Quashie Les enjeux institutionnels et électoraux ont une grande importance. Mais une grande illusion consiste à penser que les changements révolutionnaires ne pourraient advenir que par une logique délégataire. Ce à quoi les communistes appellent, c’est à la mise en mouvement la plus large et de toute nature. Je sais bien que, dans la période, certains cherchent des sauveurs suprêmes, mais, sur ce point, l’Internationale n’a pas pris une ride. En outre, ce sont ces cercles vertueux fondés sur des perspectives de victoires qui ont donné leur force au mouvement populaire en 1936 ou à la Libération. Aujourd’hui, la résignation n’est pas seulement le fruit de la bataille idéologique, mais aussi de déceptions politiques objectives et de difficultés du mouvement social. Cependant, il faut aussi mesurer les points marqués, comme les concessions, malgré toutes leurs limites, que le pouvoir a été obligé de consentir au monde de la santé… La direction actuelle du PCF fait aussi montre de volontarisme pour structurer les communistes sur les lieux de travail et de création de plus-value, parce que le combat de classe y prend sa source. C’est une tâche difficile mais qui n’a rien perdu de sa pertinence.

Sur les questions dites de société comme le féminisme ou l’antiracisme, les positions à gauche ont fluctué, quelles ont été les évolutions du PCF sur ces sujets au cours de son histoire ?

Guillaume Roubaud-Quashie C’est plus compliqué que ce que l’on dit toujours : avant, les luttes étaient hiérarchisées, maintenant elles ne le sont plus. La logique multidimensionnelle des changements à opérer a été l’objet de fluctuations, parfois de conflits pendant tout ce siècle. Les années 1920 sont celles de l’accentuation de la question de classe, mais aussi d’affirmation du combat des femmes, avec des candidates aux élections municipales, par exemple. Cela est atténué lors du Front populaire parce que ces questions ne font pas l’objet d’un accord unanime dans la société française et que le rassemblement prime face à la menace fasciste. Avec la Libération, viennent les combats pour le droit de vote et d’éligibilité des femmes ou encore la création de l’Union des femmes françaises. Pendant les années 1950, des oppositions avec le mouvement féministe naissent sur la question du « birth control », suivies d’autres ratés en 1968 et dans les années 1970 avec une hostilité réciproque assez forte. Mais, dans la décennie 1990, un rapprochement s’opère à nouveau sous l’impulsion de personnalités comme Marie-George Buffet qui affirment très clairement qu’il n’y a pas à penser de hiérarchie dans les combats émancipateurs. Sur l’antiracisme, les combats contre l’antisémitisme des années 1930, la lutte contre le fascisme, contre la colonisation, ou encore la création du Mouvement national contre le racisme, qui deviendra ensuite le Mrap, ont marqué l’histoire du PCF. Tout cela est abîmé à la fin des années 1970 et début 1980 par un moment de flottement sur des questions de politique migratoire, encore l’objet aujourd’hui d’instrumentalisation de l’extrême droite. Mais on ne peut pas résumer le Parti communiste ni même Georges Marchais, puisque c’est de lui qu’il est question, à ce flottement de quelques années.

Courant majoritaire à gauche après-guerre, l’influence du PCF a reflué à partir de 1978. Quelles sont aujourd’hui ses forces et ses faiblesses ?

Guillaume Roubaud-Quashie La mémoire du pays est assez sensible aux années 1970. Or ces années sont effectivement un moment d’apogée, très loin de représenter les cent ans du PCF. Si on se place en regard de l’histoire générale du mouvement ouvrier, on peut mesurer que le Parti communiste d’aujourd’hui par rapport à celui du début des années 1930, par exemple, compte un nombre tout à fait significatif d’adhérents, de cotisants, de municipalités… La période des années 1980-1990 a été extrêmement difficile, avec un déclin qui semblait impossible à arrêter. Depuis une quinzaine d’années, le PCF a réussi à en sortir. L’image de l’URSS continue de jouer négativement, mais elle est moins significative pour les plus jeunes générations. Et cette dynamique est aussi liée à la crise du capitalisme : nombreux sont ceux qui cherchent une alternative. Les succès d’éditions autour de Marx le donnent à voir.

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