Une quarantaine de personnes se sont déjà inscrites dans ce collectif citoyen du Front de Gauche pour la circonscription de Morlaix. Cette première réunion du collectif citoyen du Front de Gauche nous a permis de débattre sur le contexte politique (les primaires socialistes, la crise du capitalisme financier), sur notre rapport avec le PS et sur nos ambitions pour les présidentielles et les législatives, sur les moyens de reconquérir l'électorat abstentionniste et de dynamiser notre campagne politique afin de hausser le niveau d'exigence sociale de la population, de critique vis à vis du système existant et de confiance vis à vis de notre capacité à le transformer.
Daniel Ravasio a commencé par rappeler quelles étaient les forces politiques constituant le Front de Gauche, quel était l'historique de ce mouvement, quelles avaient été les modalités de désignation de nos candidats communs aux présidentielles et législatives. Il a appelé chacun à s'exprimer sur ses motivations pour soutenir la campagne du Front de Gauche, sur le rôle qu'il voulait que le collectif citoyen joue et sur le fonctionnement qu'il devait avoir. Il a précisé que l'urgence pour nous était de rassembler, de faire connaître nos propositions, de mener une campagne de terrain en cherchant à convaincre ses proches, ses voisins, à organiser de micro-débats publics à l'image de ce qui s'était passé pour la campagne contre le Traité Constitutionnel Européen en 2005. Il faut aussi que nous cherchions à convaincre par capillarité, travail d'argumentation de proche en proche.
Françoise Wolinski-Pilate s'est interrogée sur le degré d'accord entre le Front de Gauche et les propositions un peu ternes se dégageant du débat Martine Aubry-Montebourg dans l'entre deux-tours des primaires socialistes.
Patrick a mis en avant le caractère inédit du contexte dans lequel s'inscrit cette campagne électorale pas comme les autres qui nous impose de sortir du capitalisme financier car on arrive à bout de ce moment historique.
Yvon Le Jallu a confirmé que, pour lui, cette crise était sans précédent dans l'histoire.
Arnaud Ranou a souligné que, dans le dernier débat socialiste du 12 octobre, il n'y avait pas eu un mot sur l'écologie, le développement de l'économie locale. Pour lui, il faut appeler à voter Front de Gauche, non seulement au 1er tour mais aussi au 2nd .
Hubert Peneau a déclaré pour sa part que, s'il allait s'investir dans la campagne, c'est parce qu'il pensait que le Front de Gauche pouvait être au second tour. Second tour que Le Pen avait atteint en 2002 avec 17%. Aux européennes de 2009 nous étions, en additionnant les voix du FDG et du NPA, à 12%: nous avons encore une marge de progression. Il est possible de faire 18% et d'être au second tour à condition de se concentrer sur les gens qui ne vont pas voter, sur les catégories populaires, d'aller les voir et de discuter.
Ismaël Dupont rappelle que la création de ces collectifs citoyens du Front de Gauche a pour but de rompre avec le seul face à face entre les militants des 3 organisations fondatrices du Front de Gauche et de permettre aux citoyens engagés de s'approprier notre projet alternatif et de le défendre auprès de la population pour créer une véritable dynamique dans cette campagne. Il est d'autant plus urgent de nous mobiliser pour argumenter sur le terrain en faveur de nos propositions que les médias organisent un black-out sur notre mouvement et son programme, ne parlant du FDG que pour évoquer les mouvements d'humeur de Mélenchon et non pour décrypter notre projet. Avec les Primaires, il n'y en a que pour le PS et ses enjeux de pouvoir internes. Ce parti est présenté comme le seul pouvant placer son candidat au second tour des présidentielles et à ce titre, comme le représentant in fine de toute la gauche. La peur de voir le Front National à nouveau passer au second tour fait fermer les yeux sur la dérive centriste du PS qui s'accélère, avec l'acceptation des dogmes libéraux du Traité de Lisbonne, puis désormais du cadre du pacte européen de stabilité qui fait que l'on s'engage à réduire le déficit à 3% du PIB à l'horizon 2013 alors qu'il est aujourd'hui de 7%: avec quels prix en termes d'austérité, de réduction des services publics et de la protection sociale? Si le PS a certaines propositions de gauche en matière fiscale, il ne revient pas sur les suppressions de poste dans la fonction publique, l'allongement de la durée de cotisation pour bénéficier d'une retraite à taux plein, accepte la précarisation des contrats de travail. Surtout, il ne prévoit aucune réforme des institutions européennes ou françaises visant à les démocratiser: et pour cause, elles rendent inéluctables des politiques libérales qu'il approuve et un bipartisme qui l'avantage. Seul le Front de Gauche assume la nécessité d'établir un rapport de force avec les pouvoirs financiers tout en cherchant à rassembler pour mettre une gauche de conquête sociale au pouvoir. De la situation actuelle de crise financière d'une gravité inédite peut ressortir le pire comme le meilleur: une régression sociale généralisée en Europe pour recapitaliser les banques et éponger les conséquences de leurs bêtises dont sortiraient renforcées la droite et l'extrême-droite car la xénophobie et les logiques de ressentiment prospèrent dans les crises ou une remise en cause profonde du capitalisme financier et une réorientation de l'Union Européenne, si notre gauche est assez forte pour rendre à la France, cinquième puissance économique mondiale, un rôle d'éclaireur pour les peuples indignés d'Europe, en montrant que la domination d'une oligarchie et la dictature de la finance ne sont pas des fatalités.
Daniel Crassin a préféré que l'on insiste, plutôt que de se faire plaisir avec des projections optimistes, sur la nécessité de faire le meilleur score possible au 1er tour. Après tout, du temps où le PCF était très fort, Jacques Duclos n'a jamais fait plus de 20% aux présidentielles. Il est surtout important de créer une dynamique en vue des législatives qui décideront également du rapport de force à gauche. Il ne faut pas penser qu'en dehors d'une qualification au 2me tour des présidentielles, tout est perdu: ce n'est pas la même chose d'avoir un gouvernement de centre-gauche et un gouvernement de droite dure... On a jamais assisté à un tel détricotage des lois sociales. Si on pouvait avoir 50 ou 60 députés au gouvernement, on serait en mesure de peser sur un gouvernement social-démocrate. Il nous faudra surtout combattre la puissance de l'idée de vote utile dans la population. Il y a deux forces politiques qui ont été complètement occultées tout au long de ces primaires qui ont donné une force d'exposition maximale au PS: les Verts et nous.
Pour Christian Delannee, il sera d'autant plus facile de faire un bon score que l'on réussira à faire passer le message qu'il est possible de faire autre chose. Il ne faut pas partir trop triomphalistes malgré le contexte de crise du capitalisme financier: en 1936, on avait des mouvements sociaux forts, puissants: ce qu'on a pas aujourd'hui. Il ne faut pas non plus dire qu'entre l'UMP et le PS c'est blanc bonnet et bonnet blanc et s'asseoir au 2ème tour sur le droit de vote, conquis de haute lutte. La politique de l'UMP est une politique de droite ultra-dure, qui manifeste la captation de propositions et d'hommes venus de l'extrême-droite. Une partie de la droite traditionnelle en a conscience puisque les élections sénatoriales ont montré que des éléments de droite avaient voté pour le changement.
Pour Yvon Le Jallu, si l'on s'intéresse aux gens qui ne sont pas là avec nous malgré leur précarité et leurs problèmes sociaux et qui ne votent plus, il faut bien se dire que pendant longtemps, il y a eu chez nous trop de consensus avec les socialistes. Par ailleurs, les modes de scrutin uninominaux à deux tours sont pipés: il faut une représentation à la proportionnelle.
Pour Patrick, la réponse à la question « une autre politique est-elle possible? » doit être subordonnée au constat qu'une autre politique est absolument nécessaire car ce système capitaliste mondialisé, financiarisé et dérégulé, saccage la planète et les sociétés. Nous sommes vraiment dans une situation d'une gravité inédite qui nous impose l'obligation d'inventer autre chose.
Pierre Le Steun rappelle que ce qui sonner le signal du détricotage des lois sociales en France, c'est le tournant de la rigueur des socialistes en France en 1983. Par la suite, ils ont toujours accompagné ou impulsé les réformes libérales de privatisations, d'ouvertures à la concurrence, de fragilisation du secteur public et des contrats de travail.
Pour Serge Puil, il faut rappeler aux gens dans nos interventions publiques que ce sont les politiques ultra-libérales de tous les pays industrialisés depuis des décennies qui ont généré la crise. Le but de Sarkozy, cela a été d'abolir le code du travail. Le paradoxe, c'est que cette grave crise dans laquelle ils nous ont plongés peut leur faire prendre une grande crédibilité à toutes ces personnes libérales qui veulent revenir à un déficit à 3% du PIB.
Pour Guy, le score le plus inquiétant, c'est celui de l'abstention. Ce quinquennat sarkozien a complètement dénaturé la politique. Le meilleur défi pour nous serait de parvenir à faire voter au moins 80% de la population, indépendamment même du contenu de ces votes. Pour cela, il est urgent que le débat soit présent partout, et pas uniquement le débat partisan. N'en doutons pas, une abstention forte fera le jeu de la droite et de l'extrême droite.
Pour Jean-Luc Le Calvez, ce qui fait la force du Front de Gauche, c'est avant tout son programme qui ne résulte pas seulement d'un accord de sommet: ses propositions ont été travaillées à la base dans des réunions participatives et veulent répondre aux gens sans utopie. Cela fait bien longtemps qu'on ne s'est pas présenté aux électeurs avec un programme aussi solide, cohérent, en phase avec les enjeux du moment. Ceci dit, c'est vrai qu'il ne faut pas stigmatiser les gens qui ont été aux primaires et qui ont pu aussi manifester à travers cette démarche un désir de changement. Il faut avant tout s'atteler à gagner les gens à nos propositions à partant de problèmes concrets comme celui des postes et des heures d'ouverture de bureaux supprimés à La Poste. Quand les socialistes se disputaient sur la question de leur leadership, nous défendions dans la presse les salariés et les usagers de La Poste: cela se remarque... La crédibilité de nos propositions a progressé et la situation économique internationale et nationale nous offre un boulevard pour les défendre. Les gens savent que 400 milliards de cadeaux fiscaux ont été fait pour les plus riches pendant le quinquennat Sarkozy, que l'on a su trouver des milliards pour les banques en difficulté et non pour équilibrer les budgets de la Sécurité Sociale, des retraites ou financer les services publics...
Pour Yves Abramovicz, notre campagne doit associer présidentielles et législatives et elle peut être menée sereinement, sans angoisse excessive, car notre candidat Jean-Luc Mélenchon est le seul qui apporte des propositions concrètes pour combattre la crise, le diktat des marchés. Aujourd'hui, tout est prétexte à dire: ce n'est pas notre faute si on vous impose l'austérité, c'est l'Europe... On est les mieux placés pour faire un travail d'explication là dessus, nous qui avons permis le non au Traité Constitutionnel Européen en 2005, victoire volée avec la complicité des socialistes qui se sont abstenus lors de la ratification à Versailles du Traité de Lisbonne. Notre souci premier, ce doit être de reconquérir les électeurs qui ont cessé d'aller voter. On parle beaucoup de la progression du FN mais elle est largement surfaite: en réalité, si le FN a progressé en pourcentage aux dernières élections, c'est en raison du poids de l'abstention et non d'une augmentation arithmétique significative de ses électeurs. Il est faux de dire que les classes populaires votent maintenant majoritairement à l'extrême droite: elles s'abstiennent. Et c'est contre cela que nous devons lutter.
Pour Daniel Crassin, il faut s'inspirer de la campagne de 1981 et du succès de la distribution du Programme commun vendu à 1,5 millions d'exemplaires (essentiellement par des militants communistes). On peut faire du porte-à-porte avec le programme, aller sur les marchés pour le vendre. On peut faire comprendre simplement que la misère n'est pas inéluctable, que le fric existe: on a trouvé des dizaines de milliards pour sauver les banques et on n'en trouverait pas pour les systèmes sociaux... Il faut aller là où les gens ne votent plus: HLM, restos du cœur, dans les quartiers, sur les marchés...
Pour Hubert, on peut faire des petites réunions-débats décentralisées à l'échelle d'un quartier, chez les uns et les autres, autour du programme partagé du Front de Gauche.
Pour Guy, si on veut aller rencontrer les gens qui ne vont plus voter, il ne faut pas avoir le programme comme seul support, programme que seuls les plus politisés et convaincus risqueront de vouloir acheter : il faut un tract, qui rappelle l'intérêt d'aller voter, la nécessité de s'opposer au bipartisme en cours d'installation et les idées fortes du programme.
Christian Hadouche propose que l'on se retrouve souvent tous ensemble ou à plusieurs sur le marché pour donner une visibilité au collectif citoyen du Front de Gauche.
Marie-Paul Kerebel propose de faire une soupe populaire place de la Commune pour discuter politique avec la population dans un contexte convivial et de don.
Ismaël Dupont propose une soupe populaire itinérante: un jour dans une commune, un autre dans une autre. Il serait très intéressant de se lancer dès le moins d'octobre dans la distribution de programmes partagés ou de tracts sur le programme et les réunions publiques thématiques, pas seulement à Morlaix mais partout dans la circonscription, pour montrer que notre visée n'est pas simplement électoraliste et faire grandir l'exigence chez citoyens d'une vraie rupture avec les politiques libérales menées jusque là au niveau français et européen.
Pour Daniel Crassin, il est également important de commencer tôt la campagne et de tenir la durée. Il faudrait établir un calendrier des marchés de la circonscription et inscrire trois-quatre personnes à chaque fois pour ceux où l'on veut être présent. Il faut consacrer une réunion spécifique pour avancer sur les questions d'organisation et la question du tract présentant notre programme avant la prochaine réunion publique du collectif citoyen du 26 octobre. Quant au porte à porte, c'est bien, mais cela demande une énergie très importante, et du monde...
Pour Marie Huon, il faut réfléchir aux lieux où l'on pourrait toucher les jeunes et ne pas se contenter de formes de campagnes politiques classiques, qui ne les touchent pas vraiment. Or, beaucoup de jeunes sont des indignés très critiques vis à vis du système mais en mal de repères politiques.
Arnaud Ranou rappelle à ce titre qu'Internet peut être un bon moyen pour mobiliser: il faut pousser les boîtes aux lettres électroniques.
On évoque alors l'intérêt qu'il y aurait à ce que chacun rebascule nos annonces Front de Gauche vers 3 ou 4 contacts sur internet, afin de faire grandir l'audience du collectif citoyen.
Hubert Peneau propose pour l'organisation de réaliser un tableau de tâches que l'on pourrait remplir sur internet et qui permettre d'établir les responsabilités pour l'envoi de mails, la présence sur les marchés, les distributions de tracts et les ventes de programmes partagés, les communiqués à la presse.
Daniel Crassin propose, avant que le piège des Primaires se referme tout à fait en excluant toute expression publique alternative par rapport à celle du PS ou de l'UMP, de mettre en place un calendrier pour une présence sur les marchés de la circonscription.
Christian Corre suggère la possibilité d'assurer une permanence toutes les semaines pour rencontrer la population, vendre le programme partagé.
Otilia Nunès demande à ce que l'on prévoit d'organiser des réunions publiques pendant les vacances pour permettre à des jeunes comme son fils, très intéressé par la démarche du FDG, de venir.
En fin de réunion, nous décidons d'organiser une réunion de travail le 18 octobre (18h) pour réaliser un tract et avancer sur les propositions d'actions militantes à faire en réunion publique plénière du collectif citoyen du Front de Gauche le 26 octobre 2011 à 18h au 2, petite rue de Callac à Morlaix.
Compte-rendu réalisé à partir de ses notes par Ismaël Dupont.