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8 juin 2011 3 08 /06 /juin /2011 11:27

 

 

Après avoir présenté les intervenants (Jean-Yves Guézenec et Alain Rebours) et la démarche de co-élaboration de notre programme dans le cadre de ces débats pour construire un programme partagé, celui-ci étant le troisième après ceux portant sur les services publics en janvier, puis la démocratie et les institutions en avril, Jean-Luc Le Calvez a rappelé que le maire, Agnès Le Brun, nous avait refusé sous des prétextes un peu douteux la salle de MAJ à la Boissière pour accueillir la réunion. Yves Abramovicz a fait remarqué qu'il était inacceptable qu'en nous imposant cette salle située au premier étage sans ascenseur, on accepte d'exclure d'emblée que des handicapés puissent assister à une réunion citoyenne. Hervé Penven (père) a rappelé ensuite que la salle du rez de chaussée prétendument réservée aux services techniques que la mairie nous a refusée trouvait en réalité couramment un usage pour des réunions de quartier. Christian, sympathisant du Front de Gauche, a donc émis la suggestion d'adresser un courrier au maire et à la presse émanant de toute l'assistance de cette réunion, et non pas seulement des trois organisations du Front de Gauche (PCF, GU, Pa rti de Gauche), qui serait signé par tous, et il s'est engagé à le rediger.

 

Exposé sur l'énergie de Jean-Yves Guézenec

(militant communiste des Côtes d'Armor, ancien ingénieur dans le nucléaire, membre de la commission nationale du PCF sur l'énergie).  

 

On est à l'aube d'un changement de civilisation. La facilité d'utiliser le pétrole, qui a permis un étalement des villes, touche à sa fin. Autant on a observé une transition douce, dans une forme de continuité dans le transmission de relais entre le bois et le charbon, puis entre le charbon et le pétrole, la source d'énergie la plus archaïque continuant à chaque fois à être utilisée, autant l'épuisement des réserves d'énergie fossile annonce une transition dure. En effet, aujourd'hui, les énergies consommées dans le monde sont essentiellement d'origine fossile: pétrole: 34%; charbon: 27%; gaz:21%. L'électricité dans le monde ne provient elle-même qu'à 14% du nucléaire, 21% du gaz, 42% du charbon, 16% de l'hydraulique.

Or, il va falloir d'ici quelques années, du fait de l'augmentation de la population, multiplier par 2 ou par 3 la consommation mondiale. Il faudra plus d'énergie pour les transports, l'agriculture et la pêche. Parallèlement, la lutte contre le dérèglement climatique lancée dans les institutions internationales aux sommets de Rio, Kyoto, Copenhague, impose de limiter les émissions de gaz à effet de serre de 3 gigatonnes par an afin de limiter le réchauffement climatique à moins de 2 degrés. Si l'on y regarde de près, la mise en œuvre de cet objectif impose de ne pas délaisser mais au contraire de développer le nucléaire: par exemple, 1kwh 'électricité produit en Allemagne est source de 7 fois plus d'émission de CO2 qu'1 kwh produit en France.

Les énergies de substitution sans carbone sont le nucléaire, l'hydraulique, l'éolien, le solaire, la biomasse, la géothermie.

Ne nous le cachons pas, le nucléaire est une industrie dangereuse: elle l'est d'abord du fait de son utilisation militaire, ensuite du fait du risque d'accidents graves sur les réacteurs dus pour Jean-Yves Guézéguel à Three Mile Island, Tchernobyl, Fukushima à des erreurs de conception sur les centrales et à une mauvaise organisation des autorités de sûreté que l'on peut éviter. Quant aux déchets nucléaires, pour JY Guézéguel, on surestime largement leurs dangers une fois enterrés: on devrait davantage parler à son sens des dangers des déchets de l'industrie chimique. Selon notre intervenant, la baisse des réserves d'uranium pourrait être conjurée et on pourrait produire quasiment pour 3000 ans d'électricité provenant du nucléaire si on mettait réellement en œuvre des réacteurs de la génération 4 (du type Superphénix, arrêté par le gouvernement Jospin) utilisant de l'uranium appauvri, résidu de l'activité des réacteurs classiques. J.Y Guézénec regrette qu'en ait arrêté de construire des centrales nucléaires pendant 15 ans, risquant ainsi de perdre un savoir-faire précieux. Il pense qu'à l'avenir, les pays développés ne pourront pas se passer de nucléaire et qu'il serait raisonnable de réserver le maximum d'énergie fossile aux pays pauvres.

Les autres énergies décarbonées alternatives au nucléaire présentent aussi certains inconvénients et ne peuvent se substituer totalement aux énergies fossiles. Le problème de l'éolien, c'est son intermittence. Les variations de puissance peuvent être très rapides. L'éolien peut mettre en cause la stabilité du réseau. J.Y Jézéguel regrette également l'espèce de « bulle spéculative » qui s'est créé avec les déductions fiscales et le rachat par EDF à prix surévalué de l'énergie émanant du photovoltaïque. La géothermie exigerait une mutualisation des puits et ne serait pas non plus sans dommage sur l'environnement car on fracture la roche.

Le problème de l'énergie nous place en face de chantiers économico-politiques:

 

  • créer un pôle public de l'énergie.

  • Quelles actions pour réduire les gaz à effet de serre? Résister à l'engouement pour le gaz?

  • Abrogation de la loi NOME qui impose à EDF de céder à bas prix l'énergie qu'elle produit à des opérateurs privés qui lui font concurrence et revendent l'électricité plus cher.

  • Créer un statut plus sécurisé pour les travailleurs du nucléaire.

  • Créer une traçabilité du carbone en Europe.

 

Alain Rebours (militant de la Gauche Unitaire du pays de Morlaix).

 

Je pense qu'au fond le débat sur « Quel type d'énergie? » pose au préalable la question de savoir quel type de société, quels types de conditions de production et de consommation nous voulons.

S'il ne nous reste que 30 ans de pétrole, les réserves d'uranium extractibles si le nucléaire tend à se développement en remplacement des énergies fossiles n'iront elles pas au-delà de 20 ans. La question qu'on doit se poser quand on a un débat sur l'énergie, c'est pas: quel type d'énergie? Mais: quel type de croissance, quel type de société voulons-nous?

Le débat est rendu difficile pour plusieurs raisons. D'abord, il n'y a pas de transparence sur ces questions qui impliquent l'existence de lobbies, d'intérêts financiers puissants. Les experts ne sont pas hors idéologie, hors pression des acteurs privés: leur indépendance est en général toute relative. L'énergie est un secteur où l'on utilise le secret au nom de l'intérêt national, de la compétition industrielle, de la question militaire.

Un des enjeux essentiels de la question de l'énergie, c'est la possibilité du débat démocratique. Or, quelles sont nos propositions communes, les propositions du Front de Gauche? Quelle politique mettrions-nous collectivement en œuvre si nous étions appelés à gouverner en 2012?

 

 

  • Il y a d'abord l'exigence d'une maîtrise publique du secteur de l'énergie dans la mesure où le système capitaliste et les logiques de marché servent des intérêts privés et non l'intérêt général. Cette maîtrise publique de l'énergie implique une renationalisation d'EDF, de GDF, d'Areva et de Total, condition pour mettre ces entreprises sous pilotage citoyen et démocratique, et une planification impliquant cadres contraignants et investissements de l'État pour entreprendre une conversion écologique.

  • Ensuite, nous créerons les conditions pour qu'ait lieu un grand débat public national sur la politique énergétique en France: quel type de croissance voulons-nous? Quel effort allons nous faire pour trouver des alternatives aux énergies fossiles et carbonées et comment allons-nous réduire nos consommations d'énergie? Faut-il faire le virage d'une sortie progressive du nucléaire? En France, il faut constater que depuis les années 50, on a tout miser sur le nucléaire et que si on ne dispose pas de technologie et d'ingénieurs pour les énergies renouvelables, ce qui nous oblige à importer le photovoltaïque de Chine, l'éolien d'Allemagne, c'est parce que les investissements considérables effectués dans la filière nucléaire ont bridé la recherche sur les énergies renouvelables. Il faut également explorer la piste très intéressante de la geothermie profonde, ce qui est particulièrement valable en région parisienne.

  • Il y a bien sûr une nécessité absolue de réduire la consommation d'énergie, mais il faut faire attention à ne pas pénaliser les plus pauvres, aujourd'hui très touchés par exemple par l'augmentation des prix du gaz et du carburant. Il faut définir une sorte de « code de conduite », de « registre des usages identiques » luttant en priorité contre les gaspillages ostentatoires d'énergie par les riches et facilitant la consommation d'énergie pour satisfaire les vrais besoins.

Sur la question du nucléaire, les forces du Front de Gauche sont divisées et ont trouvé le compromis du débat public suivi d'une consultation du peuple. Quand le précédent intervenant dit qu'on a eu tort d'arrêter Superphénix, cela m'apparaît absolument faux: en 12 ans, on a englouti 9,7 milliards dans ce projet, sans résultats probants. Il faut tout de même donner quelques arguments sur le nucléaire, qui sont une des raisons d'être de mon engagement en politique qui a commencé par la lutte contre les installations ou pour le démantèlement des réacteurs.

D'abord, on dit que le nucléaire serait une énergie propre. C'est valable si on met de côté les mines, les diffusions ordinaires de radioactivité autour des réacteurs, les déchets... Les mines d'uranium situées en Australie et au Canada principalement...

Elles sont hautement polluantes. Au Niger, rappellent deux intervenants anti-nucléaire dans la salle, les accords imposés par de Gaulle comme contrepartie à la décolonisation prévoyaient la possibilité pour la France d'acheter son uranium à très bas coût: résultat, en 50 ans d'extraction, plus de 20 milliards d'euros de manque à gagner pour ce pays qui est un des plus pauvres de la planète. Les communistes, qui se disent défenseurs de la solidarité internationale et du Tiers Monde, opposants au néo-colonialisme, devraient aussi prendre en compte cette réalité de la brutalité des rapports économiques internationaux sur laquelle est assise l'industrie nucléaire.

 

Ceux à quoi Yves Abramovitcz répond que ce ne sont pas les communistes qui ont extrait cet uranium et que c'est là leur faire un mauvais procès.  

 

Alain Rebours rappelle ensuite qu'on ne sait que faire des déchets nucléaires. Jusqu'à présent, on les enterre dans des fûts à 600 mètres sous terre. Or, il faut 170000 ans pour que le plutonium perde sa radioactivité et il n'y a pas d'autre façon de produire du nucléaire que de produire ces déchets là. Longtemps, les partisans du nucléaire ont placé toute leur confiance dans le progrès de la science en disant que pour l'instant, on ne savait pas faire, mais qu'immanquablement demain, on trouverait le truc qui résoudrait tous les problèmes... Mais le peut-être ne remplace pas une politique de prévention des risques.

Quant au risque de catastrophe nucléaire, il est d'une nature incomparable à celui de la catastrophe industrielle (telle AZF)... Pensons aux 800000 liquidateurs contaminés de Tchernobyl: 30 malades simplement selon l'AIEA... Pensons aux enfants nées avec malformation de Tchernobyl, ajoute Nicole Rizzoni.

Enfin, le développement du nucléaire civil est indissolublement lié à celui du nucléaire militaire: l'investissement dans le nucléaire militaire en France depuis les années 50 a représenté 230 milliards d'euros. Pensons à tout ce qu'on aurait pu faire avec cet argent... Aujourd'hui, 60% du fonds européen pour l'énergie est consacré au nucléaire. Ce n'est pas sérieux.

 

Hubert Peneau (Parti de Gauche) fait remarquer que le projet ITER dont le coût avait été sous-évalué est aujourd'hui évalué à 5 milliards d'euros supplémentaires.

 

Alain David: Il ne faut pas réduire cette question de l'énergie à un débat pour ou contre le nucléaire. Le problème de l'énergie est assez complexe pour qu'on évite les «il y a qu'à » et les « il faudrait que »....

La première urgence, c'est la réduction des gaz à effet de serre. La deuxième, c'est de trouver une réponse à des besoins en énergie qui croissent dans le monde du fait de l'augmentation de la population. C'est vrai que dans les sociétés développées, on peut faire des économies d'énergie, mais dans l'ensemble du monde, il y a beaucoup de besoins sociaux non satisfaits qui exige des productions nouvelles d'énergie. En troisième lieu, il faut s'interroger sur les moyens de trouver des alternatives aux énergies fossiles, fortement productrices de gaz à effet de serre et en voie d'extinction. Et il ne faut pas promouvoir n'importe quel type d'alternative, comme ces carburants de substitution que sont les agro-carburants et qui impliquent, pour produire de l'huile de palme ou de colza, déforestation et destruction de l'agriculture vivrière. Il y a une nécessité de trouver des équilibres. Il existe des substituts au pétrole qui produisent aussi des gaz à effet de serre. L'éolien et le solaire produisent une électricité qui ne se stocke pas. Ces sources d'énergie peuvent être utiles pour les heures de pointe mais elles posent un problème de continuité de la production. Le nucléaire a la contrainte inverse: une fois que cela produit, cela ne peut pas s'arrêter de produire, et il faut savoir que faire de l'électricité... Il nous faut donc un débat avec des experts libres, autant qu'ils puissent l'être, mais aussi un débat démocratique. Il ne faut toutefois pas évacuer la question de la critique du fonctionnement du capitalisme dans cette question de l'énergie et des défis environnementaux qu'elle soulève. Yves Cochet répondait il y a 15 jours à Morlaix à une de mes questions: le problème fondamental pour arriver à une sobriété énergétique et à un mode de vie durable, ce n'est pas le capitalisme mais le productivisme et vous êtes sur ce point (il le disait en croyant que j'étais socialiste) sur la même ligne que la droite, que l'UMP...

 

Michel Le Saint (EELV, groupe Idées):

Quelques remarques inspirées par les propos qui précèdent:

- Contrairement à ce que le premier intervenant a soutenu à l'aide d'une diapo représentant une courbe de corrélation, le niveau de consommation d'électricité n'est pas la cause de l'élévation de l'espérance de vie: il ne faut pas confondre corrélation et cause.

  • Certes, EDF est une entreprise publique mais il faut voir comment elle se comporte à l'étranger, avec quelles pratiques d'agressivité capitaliste pour prendre des marchés.

  • On ne soulignera jamais assez le lien indissociable entre le nucléaire civil et le nucléaire démocratique.

  • Ce n'est pas le statut public d'une entreprise qui garantit son fonctionnement démocratique.

  • L'estimation du coût du nucléaire en France est très largement sous-estimé: on ne prend pas en compte le coût des catastrophes possibles (non couvertes par les assurances), le coût de démantèlement des centrales nucléaires. Le nucléaire paraît peu cher mais c'est parce qu'on dissimule les coûts.

  • L'urgence pour nous, c'est la sobriété énergétique.

 

Jean-Yves Guézénec: c'est vrai qu'il n'y a pas de truc pour réduire les déchets nucléaires. Mais leur toxicité décroît dans le temps. Les déchets ultimes: on les enterre dans des conditions de sécurité satisfaisante. Les déchets radioactifs sont bien conditionnés: ils ne posent pas véritablement de problème technique mais un problème d'acceptation du public. Moi, j'ai davantage peur des déchets chimiques, mais on en parle très peu. Par rapport à la quantité d'uranium limitée, je réitère mes propos: la solution, c'était les surgénérateurs du type Phénix et Superphénix qui pouvait nous permettre de produire de l'électricité pendant des milliers d'années encore.

 

Un intervenant venant de Lannion (impliqué dans l'association Energicop de Bretagne): à EDF, GDF/Suez, qui sont des grosses entreprises: on ne fait pas grand chose pour les énergies renouvelables. Ce sont des petites et moyennes entreprises qui font du renouvelable. Comment concilier le soutien à ces petites entreprises dynamiques et innovantes qui préparent une reconversion industrielle vers une consommation et une production d'énergie plus durable avec les investissements nécessaires à la renationalisation des mastodontes de l'énergie que vous appelez de vos vœux (EDF, GDF Suez, Areva...).

 

Alain Rebours: Quand on dit un pôle public, cela va avec des injonctions politiques, un contrôle citoyen pour veiller à ce que ces grandes entreprises soient gérées dans l'intérêt du plus grand nombre. Cela implique une politique industrielle que la France a abandonné depuis 25 ans en confiant, suivant les politiques néo-libérales définies au niveau de l'UE, au marché le soin de s'auto-réguler pour la production des biens et de l'énergie, les politiques d'acquisition et de vente, de concentration industrielle, et en délaissant les outils d'intervention économique qu'il avait avec les grandes entreprises publics à monopole. Ceci-ci, même s'il faut travailler sur le contrôle des entreprises par les salariés, l'auto-gestion dans l'entreprise, la société n'est pas prête pour multiplier les soviets et il faut continuer à soutenir la vitalité du secteur des petites et moyennes entreprises. En revanche, des renationalisations sans politique industrielle définie politiquement ne changeront pas grand chose à la prise en compte des défis énergétiques et environnementaux.

 

Ismaël Dupont: Dans le programme partagé du Front de Gauche, dont nous disposons maintenant d'une version assez complète et dense mais qui sera encore enrichie par co-élaboration avec les citoyens d'ici 2012, à l'intérieur par exemple de comités législatifs, il est également dit que la conversion écologique de l'économie s'opérera grâce à des investissements de l'État dans des plans de travaux pour réduire la consommation d'énergie des bâtiments qu'il possède (habitats collectifs, équipements publics) et les rendre plus auto-suffisants en décentralisant au maximum la production d'énergie. C'est donc en tant que client que l'État servira le dynamisme des petites et moyennes entreprises du secteur du développement durable. Ensuite, nous prévoyons aussi d'ouvrir de nouvelles formations et d'investir dans la recherche pour développer en France des technologies innovantes pour aller vers plus de sobriété dans la consommation d'énergie et plus de diversification des sources d'énergie. Un autre pilier de notre projet en matière de réduction de consommation d'énergie et de prise en compte de la raréfaction des énergies fossiles qui va à l'encontre des dogmes libre-échangistes et de la mondialisation libérale construire en particulier au niveau de l'Europe, c'est la relocalisation de l'économie pour réduire les transports de marchandises inutiles, ce qui est valable aussi bien pour l'agriculture que l'industrie, et ce qui implique qu'on continue à produire de l'énergie en quantité suffisante sur notre territoire.

 

Intervenant membre d'un collectif anti-nucléaire et de promotion de la simplicité volontaire:

Je suis d'accord avec le deuxième intervenant (Alain Rebours) pour dire que le modèle énergétique conditionne largement un type de société. En France, depuis 45, en ce qui concerne la partie électricité, on s'est jeté à corps perdu dans l'électronucléaire, et on a exporté cette technologie a tour de bras en étant également responsable de ce fait de la prolifération du nucléaire militaire. Les émissions de gaz à effet de serre deviennent un argument pour développer le nucléaire: mais les vrais responsables de ces émissions sont 60 ans de productivisme, de consumérisme, de gaspillage, qui sont inséparables de la promotion de l'industrie nucléaire en France comme du tout pétrole partout dans le monde. Aujourd'hui, je pense que le seul comportement responsable, c'est de revenir aux vélos, aux logements isolés et chauffés de manière écologique, mais je ne suis pas dupe, pendant que je trime sur mon vélo dans les Monts d'Arrés, il y a des Rafales de la base de Landivisiau qui filent au-dessus de mois, déversant des quantités incroyables de CO2 dans l'atmosphère. C'est pourquoi il faut changer les comportements individuels, mais aussi les structures sociales. L'armée, c'est la plus grosse productrice de gabegie en termes énergétiques. C'est tout un modèle de société qu'il faut revoir, basé sur la dilapidation de l'énergie. Quant à l'État, on ne peut pas dire qu'il fasse de très grands efforts pour isoler et équiper ses bâtiments publics, ses HLM pour qu'ils consomment moins d'énergie. Or, plus on isole, moins on gaspille. La solution: simplicité volontaire, diversification dans la production énergétique, relocalisation des activités.

 

Yves Abramovitcz: Je suis d'accord avec la fin de l'intervention précédante pour dire qu'il faut rompre la proximité unissant le capital et la tête de l'État. L'agressivité d'EDF dans la recherche de parts de marché vient de ce qu'on a contraint cette entreprise à se comporter comme une entreprise privée et à faire cette politique au service de ses actionnaires plus que des citoyens, ses usagers. Pensons à tous les réseaux installés par cette entreprise cédés à des entreprises concurrentes. EDF se comporte maintenant comme une entreprise privée comme une autre: recherche continuelle de marchés, concurrence, tarifs différenciés. Idem pour Gaz de France: il faut replacer le débat sur l'énergie et l'absence de prise en compte suffisante des défis de la raréfaction des énergies fossiles, des émissions de gaz à effet de serre, dans le contexte de la privatisation du patrimoine national et de la casse du service public. J'aurais aussi eu des choses à dire sur le nucléaire, mais il ne faut pas non plus réduire la question de l'énergie à cet enjeu et je ne veux pas continuer à envenimer un débat où chacun reste sur sa position.

 

Ismaël Dupont: Pour compléter l'intervention d'Yves, on peut dire aussi que la nouvelle gouvernance libérale de la SNCF (liée à l'obligation d'auto-financement et à son fonctionnement comme une entreprise privée) comme la fin du monopole public et l'ouverture à la concurrence dans le domaine du transport de marchandise et bientôt de voyageurs pèsent lourd dans la difficulté à développer un grand service public de transport en commun à bon marché et surtout de transport de marchandises suffisamment développé pour constituer une alternative au tout camion. Ainsi, alors que la SNCF avait commencé à construire puis abandonné il y a quelques années une plateforme de fret ferroviaire pour exporter les légumes du Léon à St Martin des Champs, c'est aujourd'hui une entreprise privée à capitaux allemands soutenue par la SICA, la très puissante coopérative léonarde, Combiwest, qui a soufflé à la filiale de la SNCF, Novatrans, cette activité de fret ferroviaire. Les politiques libérales menées au niveau de l'UE par les conseils des ministres et la commission ont une très lourde responsabilité dans la persistance de transports de marchandises basés sur le tout camion.

 

Hubert Peneau: Pour comprendre la virilité du débat de ce soir, il faut comprendre que ce qui a fédéré et créé les mouvements écologistes en France a été d'abord, dans les années 70, le combat contre le nucléaire. Le nucléaire est un gouffre financier et son coût est systématiquement sous-estimé tant l'industrie est opaque: on est passé de 5 à 15 milliards pour le projet ITER, de 3 à 5 milliards pour l'EPR de Flammanville dans le Cotentin. Il y a clairement incompatibilité entre une filière nucléaire très consommatrice d'argent et le développement d'énergies renouvelables alternative et de la recherche de technologies nouvelles pour économiser l'énergie. Ceci dit, je ne suis par contre la production d'électricité: je suis menuisier et toutes mes machines fonctionnent à l'électricité, et c'est très bien comme ça. Il faut aussi recentrer le débat sur les énergies fossiles, qui constituent 83% de la consommation d'énergie: il va bien falloir s'en passer. Comment économiser d'emblée? J'apporterais quelques idées au débat: d'abord si un gouvernement Front de Gauche arrivait au pouvoir en 2012, il pourrait limiter considérablement le survol du territoire par le transport aérien, en limitant l'usage pour des raisons médicales, scientifiques, diplomatiques... On a de très bonnes routes, des transports ferroviaires, des ports en France: pourquoi ne pas s'en servir? On pourrait aussi interdire les grands prix automobiles en France...

 

Nicole Rizzoni:Il est faux de dire que l'industrie nucléaire ne produit pas de gaz à effet de serre: elle en est émet pour extraire l'uranium, pour le transporter vers les centrales, le transporter pour le retraitement. On dit que le nucléaire favorise notre indépendance énergétique mais il n'y a pas pire dépendance que le nucléaire: on se conduit comme d'odieux colonisateurs au Niger, il faut le savoir. Parlons aussi du coût du démantèlement des centrales nucléaires: à Brennilis, on en a pas encore fini, loin de là - la centrale continue de tourner car on ne sait pas l'arrêter- et on a déjà englouti plus des sommes folles et des années de travail. Parlons aussi des territoires qui sont balayés de la carte, des milliers de personnes contaminés par les accidents, des enfants qui naissent difformes... A supposé même qu'il n'y ait sur une génération, avant qu'il n'y ait plus d'uranium, 3 ou 4 nouveaux accidents nucléaires dans le monde. Est-on prêt à courir ce risque de rendre invivable toute une partie de notre planète? Pour se passer de nucléaire et d'une trop grosse production d'énergie polluante, la solution, c'est la sobriété, la simplicité volontaire: il faut en finir avec la démesure. Quand on a une maison maintenant, elle est presque 10 fois plus grande qu'après-guerre. Ce n'est pas raisonnable.

 

Jean-Luc Le Calvez: EDF est malmené en tant que service public: l'entreprise n'est plus considérée que comme une source de profit. 70% de ses profits considérables cette année sont redistribués aux actionnaires. La création d'un pôle énergétique public aboutirait à ne pas mettre de côté l'investissement dans la diversification énergétique et les économies d'énergie. Par exemple, combien de canaux, en Bretagne et ailleurs, sont aujourd'hui abandonnés, alors que le transoprt fluvial pourrait être une alternative au routier? La France a un parc nucléaire très important, dont on est devenu dépendant. C'est sûr qu'il faut chercher à diversifier. Mais, la Bretagne, par exemple, est entièrement dépendante l'hiver de la centrale thermique de Cordemais, des centrales nucléaires de Chinon et de Flammanville: sans nucléaire, on se demande comment on pourrait faire.

 

Compte-rendu réalisé par Ismaël Dupont.

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7 juin 2011 2 07 /06 /juin /2011 09:31

La conférence du député de Paris et dirigeant EELV Yves Cochet il y a deux semaines à Morlaix a permis de mettre en avant un certain nombre de réalités qui doivent nous interroger. L'énergie est la base même de l'économie, de toute forme de production et de consommation. Or, 84% de l'énergie produite dans le monde provient des énergies fossiles (charbon: 23%, pétrole: 37%, gaz naturel: 21%), énergies qui font l'objet d'une demande mondiale de plus en plus forte depuis les années 50 alors que l'on sait que leurs stocks et leur productions commencent à décliner de manière irréversible (il nous resterait 45 ans de pétrole, 60 ans de gaz naturel, 130 de charbon à extraction économiquement soutenable selon André Chassaigne dans Pour une terre commune). On assiste donc « la fin de l'énergie abondante, facile et bon marché » selon Yves Cochet. Si l'on peut dans une certaine mesure s'en féliciter car les énergies fossiles, quand on les brûle, produisent des gaz à effet de serre responsables du dérèglement climatique, cet épuisement des ressources énergétiques traditionnelles n'est pas assez anticipé et risque d'entraîner avec lui des graves récessions économiques, des inégalités grandissantes dans l'accès aux énergies nécessaires à la vie courante, une multiplication des conflits internationaux pour le contrôle des stocks disponibles de part le monde. Une réduction immédiate de notre consommation d'énergie fossile serait souhaitable pour limiter l'élévation du niveau de la mer et les perturbations météorologiques liées au réchauffement climatique, phénomènes qui risquent d'avoir des répercussions dramatiques sur les conditions de pays de beaucoup de peuples du sud, et de créer de multiples inondations, sécheresses, famines, migrations, conflits armés. Néanmoins, les molécules de metane et de gaz carbonique émises dans l'atmosphère durent longtemps: il y a une inertie du changement climatique qui fait que les efforts que nous pouvons faire aujourd'hui pour réduire notre consommation d'énergie pour utiliser des énergies qui ne produisent pas de gaz à effet de serre n'auront pas des effets qui se feront sentir tout de suite.

Pour Yves Cochet, le nucléaire, qui ne représente que 6% de la consommation énergétique mondiale, ne saurait être considéré comme une énergie alternative aux énergies fossiles polluantes et en voie d'extinction dans la mesure où les stocks d'uranium ne sont pas eux-mêmes illimités et où il s'agit d'une énergie dangereuse, qui produit des déchets hautement radioactifs pendants des milliers d'années, et de surcroît d'une énergie extrêmement coûteuse quand on prend en compte le problème du renouvellement du parc nucléaire ( selon Yves Cochet, le ministère de l'industrie, Areva et EDF ont prévu d'investir entre 6 et 7 milliards d'euros pour construire 22 EPR entre 2015 et 2030) et du démantèlement des centrales nucléaire hors d'usage.

A l'heure actuelle, en France, le nucléaire avec plus de 58 réacteurs, fournit environ 77% de l'électricité (contre 29% en Allemagne, 27% au Royaume-Uni, 22% aux USA en 2000). Le reste est produit pour moitié par l'hydroélectricité, pour moitié par des centrales thermiques à gaz ou à fioul comme celle de Cordemais en Loire-Atlantique où celle que l'on veut installer à Guipavas aujourd'hui. L'énergie renouvelable (éolienne, photovoltaïque, biomasse, géothermie) ne représente actuellement qu'à peine 1% de l'énergie produite dans le monde.

 

Une fois posées ces quelques données chiffrées qui donnent des repères, quels objectifs peut-on se donner en matière énergétique et comment parvenir à les mettre en œuvre?

 

Le premier objectif serait d'encourager des modes de vie plus durables, moins gaspilleurs d'énergie et de ressources, moins polluants, sans pour autant négliger la satisfaction des besoins sociaux véritables, ni consentir à un renchérissement rapide et brutal des énergies (gaz, électricité, pétrole, énergies ou sources d'énergies dont la hausse des prix aura fatalement des répercussions sur le pouvoir d'achat des familles et l'augmentation des coûts des biens de première nécessité) ou à des fiscalités écologiques incitatives dont les classes populaires seraient les premières victimes. La sobriété énergétique est un objectif incontestable mais il ne doit pas être poursuivi sans prise en compte des besoins immédiats des classes moyennes et populaires, en pénalisant des modes de logement, de consommation, de transport qu'elles ont subis du fait de leur niveau de vie plutôt qu'elles ne les ont choisis. Par exemple, les familles qui pour pouvoir se loger dans le parc locatif ou accéder à la propriété ont été contraintes de s'installer à 40 ou 50 km des villes d'importance où les adultes travaillent ne doivent pas supporter une fiscalité écologique du type de la taxe carbone, dont les industriels seraient exemptés, en plus du renchérissement des carburants. Si les catégories populaires ont tendance à vivre dans des logements mal isolés, peu économes en énergie, l'État, par l'impôt, doit entreprendre des vastes plans de remises aux normes de ces logements et de financement de modes de chauffage plus économiques économiquement et écologiquement... Mieux encore, il faut tendre vers la fin de l'habitat résidentiel en zone péri-urbaine qui mord sur les surfaces agricoles cultivables, les espaces verts, et tend à rendre obligatoire l'usage d'une ou de deux  voitures et aller, autant que possible, vers la construction de logements collectifs à haute qualité environnementale.  Il en ressortira un bénéfice pour l'ensemble de la société et un gain de pouvoir d'achat pour les locataires et propriétaires concernés. En revanche, on peut s'interroger sur la légitimité de la multiplication des déductions fiscales pour mieux isoler les maisons, améliorer l'efficacité des modes de chauffage, investir dans les énergies renouvelables, quand elles concernent des familles à l'aise financièrement, propriétaires de leur logement, qui bénéficient ainsi d'un effet d'aubaine leur permettant de dépenser moins sur le long terme pour l'accès à l'énergie tout en échappant partiellement à l'impôt sur le revenu progressif. L'objectif d'efficacité écologique et l'objectif de justice sociale peuvent entrer ici dans une certaine forme de contradiction quand le soutien public à la transformation des modes de consommation énergétique est universel et non dépendant des revenus.

 

La consommation d'énergie en France se partage à part égale selon Yves Cochet entre le secteur industriel (150 milliards de KWH), le secteur tertiaire (150 milliards de KWH), et le secteur habitat (150 milliards de KWH).

Certains écologistes pourraient avoir la tentation de se féliciter de la désindustrialisation de la France en y voyant un moyen de diminuer la pollution localement et de rendre possible une sortie rapide du nucléaire par une baisse de la consommation énergétique de l'industrie. En même temps, même s'il m'apparaît évident que ce capitalisme mondialisé qui multiplie les besoins artificiels, propose aux populations des pays développés un désir de consommation toujours plus forte, malgré la précarité et la stagnation des salaires, et grâce à l'omniprésence de la publicité, aux délocalisations et à l'exploitation par les multinationales des travailleurs des pays en voie de développement, est une impasse qui détruit la nature, le lien social, aliène les individus, et s'il faut donc envisager une forme de décroissance, de plus grande sobriété dans nos modes de vie occidentaux, on ne peut pas non plus être un écologiste conséquent et s'accommoder de la délocalisation des activités industrielles, de la délocalisation de la production énergétique ou du stockage et recyclage des déchets industriels ou énergétiques.

 

De manière générale, il nous faut nous arranger pour diminuer nos besoins d'énergie en gaspillant moins, en innovant technologiquement pour avoir des moteurs, des machines et bâtiments plus économes et performants, tout en relocalisant à chaque fois que c'est possible nos activités économiques afin d'atteindre une certaine auto-suffisance dans un esprit de lutte pour l'emploi et contre les délocalisations (qui augmentent les moyens de pression du capital sur le travail) et de réduction de la pollution liée aux multiples transports nécessaires pour la production des marchandises à l'ère de la division internationale du travail et de la mise en concurrence des salariés au niveau mondial. C'est valable aussi pour l'agriculture, qu'il faut sortir de l'OMC et relocaliser tout en garantissant des prix rémunérateurs aux agriculteurs afin de revenir à une agriculture durable, à taille humaine, de qualité, et de limiter les émissions de gaz à effet de serre liées aux importations et exportations, à la production et au transport des intrants chimiques.

 

Relocaliser l'activité productive exige de la production d'énergie. C'est en particulier pourquoi il me paraît difficile de sortir à court terme (par exemple, en 20 ans) du nucléaire, dont nous sommes actuellement bien plus dépendants que les Allemands, et qui a le mérite de produire de l'électricité peu émettrice de CO2 (or, nous nous sommes engagés à réduire les émissions de 80% d'ici 2050) dans un contexte où les énergies fossiles sont de plus plus rares, chères et nous rendent bien plus dépendants économiquement et stratégiquement des pays producteurs (Russie, monde arabe, Amérique du Nord et Amérique Latine). En même temps, il est indéniable que le nucléaire fait peser un risque impossible à abolir tout à fait de catastrophe mortifère sur nos sociétés et crée des déchets hautement toxiques pendant des centaines de milliers d'années dont on ne sait que faire: il s'appuie sur l'uranium, un minerais du sous-sol, que nous ne pourrons extraire pour des coûts soutenables économiquement que pendant quelques décennies (selon le hors série « Science et vie » de juin 2008, cité par André Chassaigne dans son essai, on ne disposerait que de 30 années de réserves d'uranium récupérables en dessous de 80 dollars le kilo). Le nucléaire n'est donc pas non plus réellement une énergie d'avenir et, de la même manière qu'il m'apparaît souhaitable de fermer les centrales vétustes en laissant fonctionner les autres pendant quelques dizaines d'années encore, il ne m'apparaît pas raisonnable d'investir autant d'argent dans le renouvellement du parc nucléaire français avec la construction de réacteur EPR de nouvelles générations alors qu'on pourrait investir dans la recherche, l'expérimentation, et l'incitation publique au développement des énergies renouvelables: éolienne, photovoltaïque, hydraulique, biomasse, géothermie. Ces sources d'énergie qui sont moins productives et qui ne sont pas malheureusement pas non plus sans nuisance ni effets pervers (pollution visuelle, sonore, chimique, perturbations pour la faune...etc) peuvent permettre la mise en place de bâtiments industriels et agricoles et de logements produisant leur propre énergie: elles auront néanmoins de la peine à se substituer complètement à l'énergie fossile et au nucléaire s'il l'on entreprend pas dès aujourd'hui des efforts planifiés considérables de réduction de la consommation d'énergie dans l'habitat, les transports, l'industrie, les équipements publics et privés.

 

Mais ne soyons pas naïfs. A l'échelle mondiale, des réponses aux défis sociaux de l'augmentation de la population, l'accès de tous à une alimentation correcte, à l'eau potable, à l'électricité, à des biens de consommation dépassant le strict nécessaire indispensables à une vie confortable, se pensent difficilement sans développer une capacité à continuer à produire de l'énergie et à produire tout court, dans les domaines agricoles et industriels. Mais si les Chinois, les Indiens, et d'autres peuples en voie d'expansion économique, sont conscients des menaces climatiques, énergétiques et environnementales en général que font peser sur la planète les modes d'existence des sociétés développées actuelles, ils ne se priveront pas par esprit de sacrifice héroïque de tous les bénéfices de la croissance économique, en tout cas pas avant que les occidentaux ne donnent l'exemple à s'assujettissant eux-mêmes à des contraintes véritables pour revenir à des modes de vie plus durables et surtout partageables. En 2008, disait Yves Cochet, les Chinois, 20 fois plus nombreux que les Français, avaient autant de voitures qu'eux: on peut imaginer qu'ils ne pourront jamais en avoir autant que nous du fait des contraintes écologiques et de la raréfaction des énergies, mais cela nous montre l'impossibilité à universaliser notre mode de vie occidental, et donc son caractère aberrant et profondément inégalitaire.

 

Quoiqu'il en soit, ce n'est pas le libéralisme et le marché qui vont nous permettre de polluer moins et d'adopter des modes de production et de consommation plus soutenables sur le long terme. D'abord parce que la recherche et l'expérimentation pour promouvoir des modes de production et de consommation plus écologiques n'est pas forcément immédiatement rentable et qu'elle a besoin d'investissement public, donc de ponction fiscale sur le capital. Ensuite parce que le libre-échange accentue les transports de marchandises et aligne naturellement les normes écologiques vers le bas sans régulation internationale contraignante. Enfin, parce qu'on ne peut attendre notre salut des « technologies vertes » dont les effets sont neutralisés quand elles engendrent ou s'accompagnent d'une plus grande consommation (par exemple la chute de la consommation moyenne des voitures de 37% en 30 ans en France s'associe à un doublement du parc automobile et d'un usage accru...) et qui produisent parfois, quand elles sont développées par le secteur public sous les seules auspices des exigences de rentabilité, des effets pervers terribles sur l'environnement et la qualité de vie des populations (ex. agrocarburants qu'on produit en masse en Amérique et en Indonésie en dévastant la forêt primaire, l'agriculture vivrière, en provoquant un renchérissement des denrées alimentaires de base augmentant la malnutrition dans le monde). L'ouverture à la concurrence des services publics de production et de distribution d'électricité (loi NOME), ou des services publics de transport, dans la mesure où elle les transforme en entreprises à capitaux publics fonctionnant dans un contexte concurrentiel comme des entreprises privés, ne favorise pas non plus la prise en compte prioritaire des besoins sociaux de la majorité des usagers, des impératifs de sécurité et des exigences écologiques. La SNCF s'est vue progressivement dépourvue des moyens de développer les transports en commun de voyageurs à bon marché en alternative aux modes de transports individuels comme des moyens de développer le fret ferroviaire, moins polluant que le tout camion. C'est inacceptable. De la même manière, EDF perd de l'argent aujourd'hui en devant vendre de l'électricité à bas prix à des opérateurs privés de distribution d'électricité qui la revendent plus cher, au détriment de sa capacité d'investissement, du pouvoir d'achat des usagers du service public, au détriment de la sécurité. Sa politique d'acquisition d'autres groupes à l'étranger n'est pas pour rien non plus dans le détournement de ses anciennes missions de service public... Que dire de la possibilité bientôt de confier à des entreprises privées la construction et la gestion des centrales nucléaires, ou de la tendance de plus en plus affirmée d'EDF, gérée comme une entreprise privée par l'ami de Sarkozy et compagnon de table du Fouquet's, Henri Proglio, d'employer des intérimaires sur les tâches les plus délicates et dangereuses en centrale nucléaire...

 

Ismaël Dupont.

 

 

 

 

 

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7 juin 2011 2 07 /06 /juin /2011 05:27

délégués à la conf

délégués de la conférence

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Emmanuel Dang Tran 

 

 

 

 

 

 

ça bosse dur chez les finistériensla tribune: dimanche matin

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Tout le monde attendait de savoir ce qu'allait dire Chassaigne...discours de clôture Pierre Laurent

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6 juin 2011 1 06 /06 /juin /2011 19:51

 Journée du vendredi.

 Devant Bercy

manif contre la vie chère devant Bercy

 

 

La conférence nationale s'est ouverte sur un acte militant symbolique.

On s'est d'abord retrouvés en début d'après-midi à plusieurs centaines devant le ministère des Finances de Bercy, le palais de Christine Lagarde pressentie pour prendre la tête du FMI à la place d'un autre ancien ministre des finances proche des milieux capitalistes, Strauss-Khan, pour déposer dans un caddie de supermarché 25000 pétitions contre la vie chère, pour la hausse des salaires, l'arrêt de la spéculation, le blocage des prix et des loyers, avant qu'une délégation conduite par Pierre Laurent, Marie-George Buffet et des élus communistes ne l'amène jusqu'au ministère sous un concert de casseroles rappelant les difficultés et l'impatience du peuple.

Résistance pour nos salaires, notre pouvoir d'achat 

 

deux premiers secrétaires à l'assaut de la finance

 

Discours d'introduction de Jacques Chabalier.

 

 

 

jacques chabalier discours d'intro

 

Un membre de l'équipe de la direction nationale, Jacques Chabalier, a prononcé un long discours d'introduction pour fixer le cadre des travaux des délégués lors de cette conférence nationale et fixer un cap pour l'avenir du Front de Gauche et son activité jusqu'aux élections présidentielles et législatives de 2012.

Il a rappelé que le programme partagé (proposé dans sa nouvelle version, intitulée « Ce que nous voulons:l'humain d'abord! » aux 800 délégués de la conférence nationale) n'était pas « un produit fini » mais avait « vocation à être enrichi par co-élaboration avec les citoyens à l'intérieur des collectifs de campagne du Front de Gauche ».

Ce programme partagé vise à desserrer les contraintes de l'Union Européenne pour mener une politique réellement progressiste, si urgente alors que progressent partout en Europe les plans d'austérité imposés à la faveur de la crise financière et de la crise de la dette, le déni de la politique et l'abstention, les scores de l'extrême droite. A ce titre, il nous faudra, nous militants communistes, mener une grande campagne d'explication pour mieux faire connaître le Pacte Euro plus qui franchit un nouveau seuil dans la mise sous tutelle des politiques économiques et sociales des États pour le profit du capital.

Les objectifs du Front de Gauche sont de faire revenir durablement la gauche au pouvoir, d'y déployer une autre politique que celle menée par le social-libéralisme depuis 30 ans, et d'y promouvoir une autre façon de faire de la politique. Pour cela, le Front de Gauche ne devra pas se limiter à une coalition électorale de forces constituées: il devra être un lieu d'implication populaire, de co-élaboration et d'appropriation des contenus de transformation sociale. Il faut mettre en place une dynamique de débats, d'ateliers thématiques ou législatifs, d'actions collectives. De toute manière, nous ne dissocierons pas le travail militant pour les présidentielles de la campagne des législatives. L'accord législatif prévu avec nos partenaires du Front de Gauche (PG, GU) ne prévoit pas d'association commune de financement et accorderait, sur les 539 circonscriptions métropolitaines 22% des circonscriptions à nos partenaires (93 au Parti de Gauche, 19 à la Gauche Unitaire, 8 à d'autres forces politiques de la gauche anti-libérale: 120 circonscriptions en tout). La mise en œuvre de cet accord et le renforcement du Front de Gauche implique la désignation par les communistes de Jean-Luc Mélenchon comme candidat du FDG aux présidentielles. Jacques Chabalier a précisé que le bulletin de vote devrait présenter la proposition de candidature retenue par la conférence nationale et de tous les candidats qui ne se reconnaitraient pas dans la proposition et voudraient maintenir leur candidature. Selon Jacques Chabalier, la lecture des centaines de procès verbaux remontés des AG de sections et des conférences départementales des mois d'avril et de mai permet de constater qu'une majorité de communistes estime nécessaire de soutenir la candidature de JL Mélenchon pour poursuivre sur la stratégie de rassemblement du FDG et le faire progresser.

Le discours s'est conclu sur l'idée que c'est quand les communistes sont utiles, offensifs, rassembleurs, qu'ils pèsent le plus sur l'évolution politique du pays.

 

Le débat

 

Une petite majorité des intervenants a soutenu vendredi l'option retenue par le Conseil National début avril de proposer la candidature Mélenchon aux présidentielles dans le cadre d'un accord prévoyant l'animation collective de la campagne, une forte représentation communiste aux législatives, et surtout un programme partagé co-élaboré avec nos partenaires du Front de Gauche et la population qui se place en rupture avec les politiques de renoncement à la conquête sociale et d'accompagnement du capitalisme mondialisé et financiarisé. Beaucoup d'entre eux (représentants du Val de Marne, de la Haute-Vienne) insistent sur l'idée qu'il faut à tout prix éviter de rééditer l'épreuve de 2007, celle de l'explosion en vol des collectifs anti-libéraux et de l'effondrement électoral du candidat du parti communiste dû à un refus de donner des gages de volonté de rassemblement et de refus de l'instrumentalisation de ce rassemblement. Certains ont mis en avant le fait que la candidature Mélenchon était préférable dans le contexte d'une élection médiatique même si la candidature Chassaigne était meilleure sur le fond (personnalité et manière de faire de la politique) et que Mélenchon était plus à même de créer une dynamique électorale pour les législatives. Un représentant de la Haute-Savoie est intervenu pour faire part de la tonalité des débats dans son département: « un certain nombre de camarades dubitatifs au départ sur la démarche du FDG s'y retrouvent désormais tout en précisant qu'ils ne veulent pas céder aux sirènes du présidentialisme, qu'ils veulent relativiser la place de l'élection présidentielle au profit du projet, du contenu de transformation sociale. Dans cette phase de crise politique très grave, le rôle du PCF doit être d'être la force utile pour ouvrir une perspective politique nouvelle, créer une dynamique qui bouleverse la situation. La démarche des ateliers législatifs du FDG dans laquelle nous plaçons beaucoup d'espoir consisterait ainsi à faire émerger dans le peuple des exigences politiques imparables qui remettraient le social et l'économique au cœur d'une campagne présidentielle dont les médias feront tout pour masquer les vrais enjeux au profit d'une politique spectacle traditionnelle ». Un représentant de l'Yonne, membre du Conseil National, a abondé dans le sens des soutiens à la candidature Mélenchon et à l'accord obtenu par la direction nationale comme moyen de faire franchir au FDG un nouveau cap: il a parlé de cette conférence nationale comme « d'une réunion fondamentale, essentielle pour l'avenir du PCF », précisant que le « Front de Gauche représente le rassemblement que les citoyens veulent et que vouloir pour quiconque dominer ce rassemblement, c'est le tuer avant qu'il ait pu véritablement se construire ». Un représentant des Alpes Maritimes (Nice) a affirmer que seul le Front de Gauche aujourd'hui était « en mesure d'apporter des solutions au doute, de créer de l'espoir ». Il a ajouté ensuite: « il ne faut pas continuer à se regarder le nombril et à regarder dans le rétroviseur. Le parti a été grand dans ce pays quand il a été à l'initiative du rassemblement. » Un délégué de Macon après avoir rappélé la réussite de l'initiative entreprise dans son département de créer des comités locaux pour un programme partagé, a mis en avant l'argument consistant à dire qu'accepter une candidature non-communiste aux présidentielles donnerait un signal clair de notre volonté de ne pas instrumentaliser le Front de Gauche et qu'il y avait là une condition pour renforcer la légitimité du Front de Gauche et les espoirs qu'il suscitait dans la société afin d'éviter le piège du vote utile. Un autre orateur a rappelé les responsabilités et les potentialités que le contexte européen de crise financière, de crise de la dette, et de réveil social des peuples nous offrait, en considérant que seule la candidature Mélenchon était en mesure de ne pas mettre en crise la dynamique ascendante du FDG, si utile pour le pays: « La domination capitaliste du monde est en crise. Il y a cette nouveauté formidable du mouvement des Indignés et parallèlement une crise profonde de la représentation politique. Notre projet de VIème République, le projet de campagne partagé peut facilier la rencontre du FDG et du mouvement social. Si je choisis de voter JL Mélenchon, c'est pour poursuivre l'appropriation populaire du Front de Gauche que nous avons entrepris de construire. Le Front de Gauche ne représente pas l'effacement du PCF: bien au contraire, c'est ce qui lui permet à nouveau d'être rassembleur et utile au pays et à la classe ouvrière ».  

 

Il y a eu aussi plusieurs voix discordantes: celles de partisans convaincus du FDG qui estiment qu'André Chassaigne incarne une manière de concevoir son travail collectif, son élargissement citoyen, et son positionnement au cœur de la gauche plus conforme à leurs attentes que la voie proposée par le style et les analyses politiques de JL Mélenchon, celle des opposants au FDG plutôt partisans d'accords avec le PS qui lui reprochent de trop nous déporter à la gauche de la gauche, celle des identitaires du parti partisans d'une candidature 100 % communiste et révolutionnaire qui reproche au Parti de Gauche et à Jean-Luc Mélenchon de réaliser une sorte d'OPA social-démocrate sur le PCF.

Les premiers ont mis en avant des arguments qui pouvaient être partagés par les partisans d'une plus grande efficacité ou du caractère indispensable de la candidature Mélenchon pour faire survivre et progresser le FDG: le fait, décevant, qu' « on en reste actuellement au niveau du cartel d'organisations. Or, ajoutait ce représentant de l'Hérault, les gens attendent des partis politiques une autre pratique ». Un délégué des Landes soulignait à la suite du précédent orateur: « le plus dur reste à faire. La politique, c'est autre chose que le déluge médiatique actuel. Il nous faut convaincre que le changement est possible. Nous avons ouvert une voie avec le FDG mais nous sommes encore loin du compte. Aujourd'hui, beaucoup de communistes considèrent être pris en étau et apprécient mal cet état de fait. Il nous faut travailler à définir ce que pourrait être une campagne collective du FDG pour les présidentielles. Nous ne réussirons que si nous pouvons réaliser l'unité chez nous. L'enjeu est aujourd'hui de réduire la distance entre le mouvement social et le mouvement politique. Le Front de Gauche doit changer de nature, ouvrir partout des collectifs. Loin de s'effacer dans les luttes unitaires, les communistes gagnent du terrain ».

 

Un délégué de Loire-Atlantique (département où les communistes sont partis avec le PS au 1er tour des régionales) a plaidé pour que les 4 candidats pour représenter le PCF aux présidentielles soient traités sur un pied d'égalité, sans que la conférence nationale marque son choix préférentiel pour tel ou tel, et sans qu'elle limite le choix pour les adhérents du 16 au 18 juin: « un parti qui a peur du choix de ses adhérents est un parti malade. Nous avons besoin que tous les communistes soient à l'aise dans leur parti ».

 

André Gérin, encore candidat déclaré du PCF se situant en dehors du FDG à ce moment, est intervenu pour dire en des termes fort peu nuancés qu'une rupture avec l'histoire du parti était engagée qu'il réprouvait: « Allons-nous imposer une candidature non-communiste que les communistes n'auront qu'à ratifier? Le Front de Gauche est un ovni politique, nous associant à des groupuscules issus du socialisme et du trotskisme. Le FDG est devenu la propriété du parti de Gauche. C'est l'effondrement du PCF: Mélenchon achève le travail de Mitterrand... Je refuse d'avoir les pieds et les mains liés avec le PS ».

 

les finistériens5 délégués du Finistère à la conférence

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 Vendredi soir, de 20h45 à 22h00, des intervenants et intervenantes franco-tunisiens, franco-palestiniens, syriens et égyptiens, sont venus nous rappeler les luttes courageuses des peuples pour la démocratie, la dignité et la justice sociale et faire le point des répressions et de l'état d'avancement des révolutions dans ces pays.

 

 

Débat général du samedi.

 

On a d'abord surtout entendu les opposants à la stratégie de la direction nationale et à la candidature Mélenchon aux présidentielles. René Chevalier, par exemple, un « orthodoxe » semble t-il de la section d'Arras: « Pour être vraiment démocratique, il faut que ce vote exprime un véritable choix entre les candidats et les stratégies. Sinon, cela s'apparente à un plébiscite... Tel qu'il nous est présenté, le programme partagé fruit des compromis d'appareil avec le parti de Gauche ressemble fort à un programme social-démocrate d'accompagnement du capitalisme ». Un partisan de Chassaigne, délégué de la fédé de l'Allier: « la démarche de Jean-Luc Mélenchon veut nous déporter à la gauche de la gauche tandis que Chassaigne nous réinstalle à notre vraie place, au cœur de la gauche. Dans l'Allier, on demande à ce que l'on laisse voter les communistes en toute indépendance, à ce qu'on n'ait pas peur de leur expression souveraine ».

 

Partisan de la proposition d'une candidature Mélenchon aux présidentielles (tout en exigeant une plus grande coordination de l'expression publique des différentes forces du FDG) dans le cadre de l' accord ambitieux et novateur réalisé avec nos partenaires et en voie de finalisation, une déléguée de la Vendée a rappelé que pour la première fois, dans son département, le PCF atteignait avec le FDG plus de 5% aux récentes cantonales. Elle a proposé que dans le cadre de la campagne pour les présidentielles et législatives, on crée des collectifs unitaires et citoyens de circonscriptions animés d'une part par les candidats, d'autre part par une ou deux personnes n'appartenant pas si possibles aux forces politiques structurées du FDG. Christian Favier, président du Conseil Général du Val de Marne a aussi fait savoir qu'il soutenait la proposition de Pierre Laurent et de la direction nationale: « L'enjeu, c'est de clarifier le positionnement stratégique du Front de Gauche. Nous ne devons pas rester dans un tête à tête avec le Parti de Gauche, auquel cas le Front de Gauche n'aurait pas d'avenir. Il faut que nous soyons au cœur d'une gauche alternative, en rupture avec le capitalisme, qui soit en mesure de repolitiser les citoyens à partir d'une démarche ouverte, s'appuyant sur des luttes et des valeurs. Il ne faut pas être frileux: la capacité à rassembler est au cœur de l'identité communiste ».  

 

 

 

Marie-George et l'accord sur les législatives

 

Marie-George Buffet, présente à la tribune aux côtés de Pierre Laurent, Patrice Beyssac, Jacques Chabalier, Patrick Le Hyaric, …etc., est ensuite intervenue pour dire que l'accord pour les élections législatives (dont elle animait la négociation avec Lydie Benoît pour le PCF), l'un des 4 points d'accord entre les partenaires du Front de Gauche (avec le programme, la manière d'animer la campagne, et le candidat du FDG aux présidentielles), était en voie de finalisation. « En soi, les législatives revêtent une extrême importance. La crise du capitalisme crée un besoin de réponses sociales et démocratiques à la hauteur des enjeux. Nous avons besoin d'une majorité politique capable de voter des lois répondant aux besoins sociaux. Il nous faut demain avoir un grand groupe du FDG avec un groupe nombre de députés communistes. L'objectif est de conquérir de nouvelles circonscriptions, et bien sûr de garder celles que nous avons déjà. Les candidats du FDG aux législatives devront être pendant des mois au cœur des luttes avec les propositions du programme populaire et partagé: ce seront des acteurs de la campagne présidentielle, des co-candidats avec notre candidat commun. Il faudra être présent dans les luttes pendant des mois pour crédibiliser nos candidatures. Sur l'ensemble des circonscriptions françaises, seules 93 n'ont pas encore trouvé d'accord entre les partenaires du FDG... C'est que nos camarades et amis du FDG veulent également pour bénéficier de financement pour garantir le fonctionnement et l'indépendance de leurs partis et retrouver leur nombre de sortants. On ne peut pas cantonner nos partenaires aux circonscriptions de -5%.

 

Samedi après-midi...

 

 

Patrick Le Hyaric réveille la salle

 

Un discours dynamique et exalté de Patrick Le Hyaric sur la nécessité du journal L'Humanité dans une presse française qui traverse une crise économique formidable qui l'amène à perdre de plus en plus son indépendance vis à vis des puissances d'argent, et par conséquent à être de plus en plus homogène idéologiquement. L'indépendance a un prix élevé et oblige à faire avec peu de moyens dans un contexte d'extrême fragilité: L'Humanité dimanche n'emploie plus que 17 journalistes professionnels (contre 150 au Nouvel Obs), 57 journalistes pour l'humanité quotidienne. Pourtant, les sympathisants communistes n'abandonnent pas L'Huma, sans quoi elle serait déjà morte: 60000 euros ont été récoltés par souscription en 15 jours récemment. Pour continuer à défendre ce journal qui est une caisse de résonance des luttes et des souffrances du monde du travail, de l'activité des partis qui préparent une véritable alternative à la dictature des marchés, il faudra vendre beaucoup de vignettes pour la fête de l'Huma tout l'été.

 

Après Patrick Le Hyaric, c'est le responsable de La revue du Projet et de la commission de rénovation du parti, Patrice Beyssac, qui a pris la parole, soulignant qu'en dépit de mouvement de réappropriation populaire de la politique et de la lutte sociale encourageants comme le mouvement de défense du système de retraites par répartition en France ou celui des Indignés en Espagne, la défiance face au système politique et financier profitait essentiellement à l'extrême-droite, qui avait l'avantage d'avoir des besoins simples et lisibles: immigration zéro, sortie de l'euro, repli sur soi... Néanmoins, face à la démagogie qui conduit à l'impasse, nous devons, selon Beyssac, assumer la complexité. P. Beyssac a aussi rappelé que le « problème du programme partagé n'était pas de faire quelques réunions et de mener la campagne après mais de continuer à co-élaborer avec notre population ». Selon lui, la campagne présidentielle se fera dans un climat assez délétère, marqué par le thème de la trahison des élites: le peuple a le sentiment que les élites s'accordent tous les droits. Il a rappelé que en dépit de son choix personnel pour la candidature Mélenchon, il était pour que les adhérents communistes disposent encore d'un vrai choix les 16,17,18 juin. Pour lui, le programme et la campagne collective pour l'expliquer le défendre seront des formidables armes anti-Le Pen et ce qui nous permettra de passer d'un pseudo vote utile motivé par la crainte de voir Marine Le Pen au second tour à un vote motivé par un espoir possible à gauche.

 

Le samedi après-midi toujours, entre plusieurs autres interventions qui ont fait suite à la restitution des travaux collectifs des délégués sur les moyens de lutter contre la vie chère, ce que devra être la la campagne partagée du Front de Gauche, et notre attitude face à l'Europe et au pacte pour l'Euro plus, un orateur de la région parisienne est intervenu pour nous rappeler la responsabilité de ne pas faire exploser en vol un FDG qui donne quelques chances pour que se réalisent les espoirs populaires d'une véritable politique de gauche: « Mesurons bien la profondeur de l'aspiration au rassemblement pour battre la droite. Cette démarche du FDG a renforcé le parti communiste français. Il faut avoir les yeux grands ouverts sur nos contradictions, les dangers possibles du style personnel de Mélenchon, mais nous n'avons pas à nous déterminer en fonction d'une situation idéale où nous voudrions être, mais en fonction d'un réel qu'il faut reconnaître pour le transformer. Ce que nous indique le principe de réalité, c'est qu'André Chassaigne ne peut incarner la logique unitaire du Front de Gauche, mais seulement une candidature de repli du PCF ».

 

Enfin, André Chassaigne s'est exprimé pour la première fois à la conférence nationale samedi après-midi vers 18h. Son discours a été très digne et serein. Il ne s'est pas posé en victime et il a rappelé que Mélenchon avait des qualités indéniables qui pouvaient en faire un bon candidat du Front de Gauche même s'il représentait quant à lui une manière différente de concevoir la stratégie et l'animation du Front de Gauche, et la manière qu'on y avait de pratiquer la politique. Chassaigne ne s'est pas opposé au principe que la conférence nationale émette une recommandation de vote pour le candidat aux présidentielles dans une résolution et sur le bulletin de vote, dans la mesure où les candidats non retenus par la conférence nationale pourraient aussi s'expliquer sur le sens de leur candidature dans un court texte envoyé à tous les adhérents communistes. Il a rappelé qu'il avait lui-même été un acteur essentiel de la réussite d'un FDG très rassembleur (comprenant le NPA) aux régionales dans la région du Limousin et qu'il ne voulait en aucun cas que l'on pense que sa candidature est dirigée contre la stratégie du Front de Gauche de la direction nationale au nom de la préservation de l'identité communiste, ni non plus qu'elle est instrumentalisée par la direction pour tenir Mélenchon en respect ou pour détourner les manœuvres des opposants au Front de Gauche. Sa candidature est une candidature de conviction, traduisant des valeurs politiques et sociales originales. A la fin de son intervention, Chassaigne a affirmé que les délégués communistes de la conférence nationale et tous les adhérents devaient répondre à 3 questions:

 

  • Qu'est-ce que nous pouvons faire avancer concrètement de façon visible comme propositions et exigences pour que la gauche, si elle revient au pouvoir, s'engage de manière incontournable dans une voie de transformation sociale véritable?

  • Comment les communistes seront les meilleurs artisans du FDG? Il y a un risque terrible que les communistes soient frustrés, humiliés, en croyant qu'ils n'ont pas été associés à la décision. Si certains camarades étaient blessés à l'issue de cette séquence, il y aurait risque de rupture. En même temps, Chassaigne a rappelé qu'il se situait dans la culture communiste et ne cherchait à créer des clivages artificiels pour maintenir à tout prix sa candidature au profit d'une croyance en son destin personnel. Il faudra quoiqu'il en soit le moment venu prendre acte du choix majoritaire: si les choses sont bien faites, on mouillera tous la chemise.

  • Comment maintenir l'unité du parti? Il est nécessaire d'avoir des discussions entre communistes pour libérer la parole, co-élaborer. On a tous la volonté commune de répondre aux attentes des gens qui sont en souffrance: il ne faut pas dramatiser nos points de désaccord.

     

 

Journée du dimanche 5 juin.

 

Le secrétaire fédéral des Bouches du Rhône, Pierre Dareville, a présenté les travaux de la commission chargée la veille au soir de peaufiner le projet de résolution soumis aux amendements des délégués et à leur vote un peu plus tard et il a rappelé que l'objectif de la direction qui avait inspiré la rédaction de cette résolution était que les communistes sortent rassemblés de cette séquence.

 

André Chassaigne, placé à la tribune, a ensuite approuvé le fait qu'il y ait une proposition de la conférence nationale- un grand texte cadre comprenant une recommandation pour un candidat aux présidentielles comme composante d'un accord global- et que le texte justifiant les autres candidatures possibles soit plus réduit. Nous ne sommes pas un parti social-démocrate pour étaler nos divisions et tout suspendre à des querelles d'ambitions personnelles: nous sommes un parti de tradition révolutionnaire qui préfère la cohérence idéologique à la concurrence des egos.

 

MG Buffet a rappelé, pour rassurer ceux qui s'inquiètent des effets d'une candidature Mélenchon sur un effacement possible du parti que le PCF avait refusé l'association de financement commune demandée par le Parti de Gauche et la Gauche Unitaire afin de ne pas perdre son autonomie. « Nous ne sommes pas dans un chemin de dépassement du parti ». Ceci dit: les candidats aux législatives ne seront pas présentés aux électeurs comme des candidats du parti soutenant le FDG ou soutenus par lui mais comme des candidats du Front de Gauche, soit du PG, de la Gauche Unitaire, du PCF, et de toutes les autres organisations qui pourront nous soutenir localement ou nationalement. Un peu plus tard, face aux accusations que certains dans la salle ont fait à la stratégie unitaire de la direction nationale d'affaiblir la spécificité des parlementaires communistes, MG Buffet a rappelé qu'aujourd'hui le groupe parlementaire des élus communistes et républicains ne comptait que 11 communistes encartés, 4 communistes de conviction, 3 PG, 3 députés de gauche d'outre-mer et 4 députés Verts, et que le groupe parlementaire que nous chercherons à créer en 2012 sera un groupe Front de Gauche avec normalement plus de moyens de peser et une ligne idéologique encore plus cohérente, car lié à une sorte de contrat commun passé avec les électeurs. Marie-George a aussi rappelé qu'avec les conditions de l'accord entre les partenaires du FDG pour les législatives, qui prévoit que le PCF leur laisse entre 20 et 22% des circonscriptions, le parti aurait besoin simplement d'élever son score d'à peine 1% au niveau national (de 4,83% à 5,40%) par rapport à l'année difficile de 2007 pour retomber sur ses pieds financièrement. Cela sera donc a priori tout à fait dans nos cordes, à condition de bien respecter également la parité dans nos candidatures...

 

Pierre Laurent a rappelé l'esprit de la résolution: « Notre responsabilité ici, c'est d'exprimer l'opinion la plus commune possible et ensuite de définir les conditions de l'exercice de la démocratie pour départager ce qui fait problème ».  

 

Sur proposition d'un délégué de la fédération du Var, les membres de la direction ont accepté d'organiser deux votes séparés pour la résolution et le bulletin de vote. En revanche, la proposition de la fédération de l'Allier voulant que la conférence nationale n'appelle à choisir, non pas une, mais entre deux candidatures qui s'inscrivent également dans le cadre du Front de Gauche, celle de Chassaigne et de Mélenchon, a été rejetée.

 

Suite à cela, après les procès d'intention faits par les partisans de l'anti-Front de Gauche Emmanuel Dang Tran, à Mélenchon le social-démocrate partisan du traité de Maastricht et mitterrandolâtre, de dénaturer le parti et d'extraire sa substantifique moelle au profit du PS, André Gérin, très peu soutenu dans la salle, s'est accordé quelques instants de vedettariat en annonçant le retrait de sa candidature « dans le respect de l'esprit de rassemblement auquel appelait Pierre Laurent », plus sûrement pour se rallier à André Chassaigne afin que son éventuelle désignation par les adhérents du PCF les 16,17, 18 ait des chances de mettre en crise la logique unitaire du Front de Gauche et d'affaiblir la stratégie actuelle du parti. Dans un article du Journal du Dimanche lu avec incrédulité à notre table après cette annonce, nous voyons qu'il était déjà prévisible pour certains la veille au soir que Gérin et Dang Tran se rallient à Chassaigne en fin de conférence nationale mais Dang Tran a maintenu sa candidature pour lutter contre ce qu'il considère être l'aboutissement d'un processus d'effacement du parti.

 

Chassaigne, contrairement à ce qu'il avait laissé entendre il y a quelques jours, n'a pas annoncé qu'il suivrait la recommandation de la conférence nationale en cas d'approbation majoritaire de la résolution soutenant la candidature Mélenchon à la présidentielle. A travers ses propos d'hier relatés dans L'Humanité de ce lundi 6 juin, on peut avoir une idée de ses justifications: « Il existe chez les communistes une vraie crainte, un risque de rupture si on ne leur laisse pas le choix de décider »... « Il y a une aspiration très forte à la parole, à une démocratie qui ne soit pas faite d'en haut ». A la tribune devant la conférence nationale, sans doute pour lever les ambiguïtés nées du soutien de Gérin, Chassaigne a ensuite lu le texte qu'il associera au bulletin de vote pour justifier sa candidature et qui l'inscrit dans le cadre d'une adhésion sans réserve à la volonté de renforcer la dynamique unitaire du Front de Gauche.

 

Finalement, les 672 délégués de la conférence nationale ont voté:

 

  • 63,6% d'entre eux ont voté pour la Résolution qui mandate la direction pour parachever l'accord législatif avec les partenaires du Front de Gauche et définit le type de campagne participative, collective que nous voulons, ainsi le choix d'un programme partagé élaboré dans ses grandes lignes et du candidat: Jean-Luc Mélenchon.

  • 79,9% des délégués ont voté pour le bulletin de vote soumis aux adhérents les 16,17,18 juin actant le fait de la candidature Mélenchon, Chassaigne, Dang Tran et formulant la proposition de la conférence nationale pour la candidature Mélenchon dans le cadre d'un accord global du Front de Gauche.

 

Les cinq délégués du Finistère, dont moi-même, avons voté pour le résolution et le bulletin de vote.

 

Discours de clôture de la conférence nationale de Pierre Laurent

 

« Ceux qui nous dirigent croient nous avoir enterrés: ils se trompent par dessus tout sur ce que nous sauvons dans notre action quotidienne, celle qui consiste à impliquer dans la vie citoyenne les hommes et les femmes de notre pays.... Les décisions claires de la conférence nationale ont été prises selon une méthode transparente et démocratique: elles sont maintenant entre les mains de tous les communistes.

Le sens de notre proposition majoritairement acceptée est d'engager une bataille de titan pour débarrasser le pays de Sarkozy, pour écarter le danger de l'extrême-droite. En effet, une partie des classes dirigeantes a décidé d'en faire un instrument de division des français. Le danger est là: nous ne devons pas le laisser s'installer. Il faut pour cela démonter inlassablement tous les raccourcis démagogiques... Nous aurons aussi à faire un immense travail de rassemblement pour relever la gauche quand d'autres s'enfoncent dans les ambiguïtés, la résignation, l'impuissance...Jusqu'à quand va t-on accepter cette politique spectacle gommant les vrais enjeux politiques et sociaux, ce cirque des présidentiables qui ne correspond pas du tout à ce qu'attendent les français. Il ne faut plus tomber dans le piège de la mise en scène permanente des égos qui a pour but d'évacuer les enjeux... Le peuple doit sortir de son rôle de supporteur, de fan, de spectateur, pour prendre en charge son destin, en être l'acteur. Ce que nous voulons véritablement, c'est imposer l'ordre du jour des préoccupations et des propositions populaires, c'est à dire des débats qui parlent de l'école, de la santé, des salaires, de la RGPP, de l'avenir de l'industrie en France. Nous voulons rompre avec la dictature de la finance et des marchés. Et pour cela subvertir une mécanique présidentielle qui n'est conçue que pour être une essoreuse des aspirations populaires.

Pour cela, il faut tout faire pour ouvrir une alternative au cœur de la gauche en se rassemblant autour d'un geste unitaire. Mais bien sûr, les communistes auront le dernier mot, et c'est ce que nous avons décidé aujourd'hui d'acter. Le rassemblement n'est possible, en effet, que si chacun compte pour un.

Devant nous, sous nos yeux, c'est tout un système qui explose, un système assis sur le consentement à la domination des marchés. Mais, dans cette situation, rien ne débouche automatiquement sur des alternatives politiques progressistes....

L'originalité du PCF dans la gauche est de chercher à maintenir deux exigences de front: changer le monde et changer les choses ici et maintenant...

Le Front de Gauche et son programme partagé ont vocation à être des objets en construction permanente.

J'appelle tous les communistes à se rassembler dans la défense des idéaux de la résistance en cette période où le fascisme retrouve une force dans la population et surtout au plus haut niveau de l'État en participant à la commémoration exceptionnelle des exécutions des militants du PCF et de la CGT à Chateaubriant, le 23 octobre, en présence de Bernard Thibault et de moi-même ».

 

 

Compte-rendu réalisé par Ismaël Dupont.

    

 

 

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2 juin 2011 4 02 /06 /juin /2011 07:45

Pouvoir permettre à ses enfants d'apprendre la langue bretonne par imprégnation tout en ne les isolant pas des enfants scolarisés à l'école publique ordinaire est à mon sens une chance pour les parents et le signe d'un soutien des pouvoirs publics, dans le cadre d'une défense de la laïcité et du service public national,  à la survie d'une langue régionale plus vieille que le français, héritière de l'ancien gaulois et des dialectes celtiques parents des bretons de Grande Bretagne, qui fut pendant des siècles le véhicule d'une culture populaire extrêmement riche. Dans ce cadre, il était incompréhensible que les parents d'enfants de la filière bilingue du Poan Benn ne résidant pas à Morlaix mais devant y scolariser leurs enfants pour leur permettre d'apprendre très tôt le breton soient contraints, qu'ils soient à l'aise ou juste financièrement, de payer 5,48 € pour la cantine de leurs enfants, et presque autant pour la garderie. Ceux qui avaient deux enfants scolarisés en filière bilingue et qui étaient obligés pour une raison ou pour une autre de les laisser à la garderie le soir ou le matin pouvaient ainsi laisser plus de 20 euros chaque jour pour les frais scolaires annexes... La plupart des parents étaient d'ailleurs tenus de reprendre leur voiture le midi et de quitter la maison ou le travail pour récupérer les enfants afin de les faire déjeuner à bon marché, ce qui privait les enfants de toute une vie sociale, des animations de l'école et des jeux avec leurs camarades.

 

Pendant deux ans, plusieurs parents du Poan Benn  se sont organisés et battus pour abaisser les tarifs scolaires des enfants scolarisés en classe CLIS (classe d'intégration pour des élèves en difficulté scolaire) et des enfants de la filière bilingue mais, l'an passé, considérant sans doute que l'enseignement en breton dans le public a l'école primaire n'était pas un droit mais un luxe qu'il fallait payer, la mairie n'avait reconsidéré ses tarifs que pour les parents d'enfants scolarisés en CLIS, sachant que ces classes adaptées nécessaires pour intégrer des élèves légérèrement handicapés en milieu ordinaire ne pouvaient pas exister dans toutes les communes et qu'il n'y avait aucune raison de pénaliser les parents.  

 

Mais après une ultime médiation d'une délégation de parents de l'école bilingue la semaine dernière, qui a probablement menacé de rentrer dans un rapport de force plus musclé et de plaider pour un transfert de la filière bilingue à Saint Martin des Champs auprès de l'inspection académique, la mairie de Morlaix a accepté sous la pression de baisser d'un euro le prix de la cantine pour les enfants bretonnants des communes de la périphérie morlaisienne sans faire de concessions correspondantes pour les tarifs de garderie.

 

Je crois qu'on peut dire bravo aux parents du Poan Benn pour leur pugnacité et se féliciter que la mairie ait fait ce geste d'apaisement même s'il est vrai que, sur le fond, sa ligne de défense qui consistait à dire que les communes des enfants scolarisés en filière bilingue pouvaient aussi faire un geste pour permettre à des parents qui payaient leurs impôts chez elles d'accéder ailleurs à un service qu'elles n'offraient pas, avait une certaine logique. Seulement, là encore, le manque d'entente entre les élus de la ville-centre et ceux des communes voisines, leur intrinsigeances symétriques, conduisaient à sacrifier les intérêts des habitants du pays de Morlaix en général, qui, même quand ils résident et payent leurs impôts locaux dans une commune de la périphérie morlaisienne, vont souvent travailler et faire leurs achats à Morlaix, ce qui relativise le manque à gagner de la municipalité morlaisienne quand elle subventionne la cantine pour des enfants dont les parents n'habitent pas Morlaix.

 

Cette question soulève aussi plus généralement le problème du poids des tarifs scolaires de restauration scolaire et de garderie à Morlaix: le repas s'élève à 6,72 € pour les instituteurs, à 4,21€ pour les enfants de parents morlaisiens appartenant à la classe moyenne... Ce sont des tarifs beaucoup plus élevés que dans la plupart des autres communes, la municipalité ayant augmenté ces tarifs depuis l'entrée en fonction de la majorité municipale de droite et ayant parallèlement supprimé il y a deux ans le tarif "fréquentation régulière" plus avantageux pour la garderie. Or, dans un contexte où les salaires stagnent, où la précarité gagne du terrain, où le pouvoir d'achat de la majeure partie des français diminue avec la hausse des prix de l'alimentation, de l'énergie, du logement, on pourrait souhaiter une meilleure prise en compte des contraintes financières quotidiennes des morlaisiens.

 

Ismaël Dupont.  

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28 mai 2011 6 28 /05 /mai /2011 07:36

Lettre ouverte envoyée à la presse ce week-end.

 

 

Le 23 mai, le maire de Morlaix a refusé aux organisations du Front de Gauche (Parti communiste, Parti de Gauche, Gauche Unitaire) le prêt de la grande salle de Morlaix Animation Jeunesse à la Boissière pour y organiser le 7 ou le 8 juin une réunion publique sur la politique de l'énergie. Nos démarches pour lui faire revoir sa décision ont été vaines. Les douze derniers mois, nous avons pourtant déjà organisé trois réunions publiques à MAJ, et, il y a dix jours à peine, Europe-Écologie Les Verts a obtenu l'autorisation d'utiliser la salle de MAJ pour organiser une réunion-débat sur l'énergie avec Yves Cochet.

L'argument qui a été invoqué pour nous refuser la salle a été la convention signée par l'association MAJ avec la ville de Morlaix qui stipule que la salle est en priorité destinée aux loisirs des jeunes. Nous ne contestons pas que cela soit en effet sa destination première mais traditionnellement, comme d'ailleurs les locaux de la MJC, la salle de MAJ fait office le soir de maison de quartier où les partis politiques peuvent nourrir le débat public avec la population d'autant plus facilement que la salle est au cœur d'un quartier densément peuplé. La salle de réunion de l'ancien lycée Tristan Corbière à Kernégues, située à l'étage, que la mairie nous propose en échange, n'offre pas les mêmes conditions d'accessibilité aux handicapés et personnes âgées à mobilité réduite et est beaucoup moins attrayante et plus excentrée pour avoir des chances de faire venir les morlaisiens. Faut-il voir dans cette décision une discrimination particulière à l'égard du Front de Gauche, sachant que le parti communiste s'est déjà vu refusé le panneau électronique derrière la mairie pour annoncer la fête du Viaduc? Ou, plus sûrement, ne faut-il pas penser que le maire de Morlaix raisonne désormais essentiellement en tant que secrétaire départemental de l'UMP et candidate probable aux législatives de 2012, et cherche à ce titre, dans la perspective des prochaines élections, à bâillonner l'opposition de gauche, à lui compliquer ses rencontres avec la population pour lui présenter et construire avec elle ses propositions, afin de donner un avantage à son camp, qui s'accommode très bien de l'atonie du débat public et de la dépolitisation des gens?

Après MAJ, est-ce la MJC qui sera interdite aux organisations ou aux collectifs citoyens et politiques? Nous pensons au contraire que le rôle des élus de la République est de favoriser sans partialité partisane l'expression de la diversité des idées politiques et la vitalité du débat démocratique.

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27 mai 2011 5 27 /05 /mai /2011 19:36

On a longtemps seriné que la construction européenne, œuvre de visionnaires humanistes qui ont su renverser les montagnes des litiges historiques et des égoïsmes nationaux, aurait rendu possible la paix et la prospérité en Europe pendant cinquante ans, et qu'elle pourrait encore, à condition d'être approfondie, accorder aux peuples européens plus de moyens de défendre leurs systèmes sociaux protecteurs construits dans la compétition mondiale.

 

L'essai d'histoire politique de François Denord et Antoine Schwartz, L'Europe sociale n'aura pas lieu (Raisons d'agir, 2009. 7€), permet de rappeler que l'Europe a d'abord été conçue parfaitement consciemment par ses initiateurs (dont les fondations et les entreprises de propagande étaient financées par les américains) comme un moyen de combattre le communisme et de promouvoir le libéralisme en rendant inoffensives pour le capital et la préservation du libre-échange les revendications sociales des peuples. Nicolas Sarkozy, cité en introduction de l'ouvrage, l'exprimait d'ailleurs sans détours devant ses amis de l'UMP en juillet 2008, soit en pleine période de crise du capitalisme financier et de remise en cause de façade des préconisations économiques néo-libérales: « Imaginons un peu ce qu'il serait advenu de la France et de son débat politique, lorsque nous avions des ministres communistes et des dirigeants socialistes au gouvernement de la France. Heureusement qu'il y avait l'Europe pour empêcher ceux-ci d'aller jusqu'au bout de leur logique. C'est aussi cela l'Europe ».

 

Cette opposition entre l'Europe intégrée en voie de construction et la démocratie sociale ne date pas d'hier, et pour s'en convaincre, suivons un peu l'émergence du projet de construction européenne. Dès mai 1948, des hommes politiques de premier plan et des hauts fonctionnaires démocrates-chrétiens, libéraux, se réunirent sous la présidence d'honneur de Winston Churchill dans le château de La Haye pour affirmer leur conviction qu'il était urgent de créer par des cessions de souveraineté des États-nations une union économique et politique en Europe pour assurer la sécurité (contre la contagion communiste ou le réveil nationaliste) et le progrès social. La résolution fondatrice du Mouvement européen créé à La Haye en 1948 invite les gouvernements à adopter la libre convertibilité des monnaies, à rétablir la liberté intégrale du commerce et claironne que « l'Union européenne devra par la suite assurer dans toute son étendue la liberté de capitaux, l'unification monétaire, l'assainissement concerté des politiques budgétaire et de crédit, l'union douanière complète et l'harmonisation des législations sociales ». Le programme économique du Mouvement européen écarte d'emblée le socialisme.

A la suite de ce congrès de La Haye, les européistes se réunissent au sein de plusieurs groupes de discussion et de pression associant des chefs d'entreprise et des hommes politiques: d'abord le Mouvement européen, puis à partir de 1955, le groupe de Bilderberg (forum de discussion réunissant le gratin de l'élite européenne et américaine: Guy Mollet, Denis de Rougemont, Antoine Pinay, René Pléven, Paul-Henri Spaak, les néo-libéraux Jacques Rueff, Robert Marjolin...). Dans un article lucide de la revue Esprit daté de novembre 1948, Jean-Marie Domenach constatait que le centre de gravité des croisés de l'idée européenne penchait nettement à droite: « la fédération des peuples d'Europe, l'abandon des souverainetés nationales était jusqu'à présent le rêve le plus hardi des hommes de gauche » mais « aujourd'hui, les États-Unis d'Europe ont pour eux toute la réaction...En réalité, ils ont tous d'abord en commun la haine du communisme, qui est haine intellectuelle du marxisme chez les uns et simple haine de classe chez les autres ».  

 

Le projet fédéral européen est soutenu financièrement au début des années 50 par la CIA sous les auspices d'Allen Dulles via un organisme appelé American Committe on United Europe (ACUE). « L'ACUE (par le biais des fondations Ford ou Shepard Stone) finance entre la moitié et les deux tiers des dépenses du Mouvement européen. Au total, les sommes allouées approcheraient les 4 millions de dollars sur la période 1949-1960 » (L'Europe sociale n'aura pas lieu. p.24) En 1950, c'est le socialiste belge de droite Paul Henri de Spaak, qui, nommé premier ministre en 1938, avait été le zélateur d'une politique d'apaisement et de conciliation à l'égard des puissances fascistes, et que l'hostilité viscérale contre le bolchévisme, habillée rhétoriquement en défense de l'Occident, recommande aux Américains, qui prend les rênes du Mouvement européen. L'ennemi de l'heure des européistes qu'il s'agit de discréditer, c'est le gouvernement travailliste anglais.

 

En effet, le gouvernement travailliste anglais très progressiste de Clément Attlee refuse en 1950 de s'engager dans le projet de construction européenne en anticipant bien ce qu'il allait devenir, du fait des motivations libérales de la plupart de ses initiateurs. Une brochure officielle du Labour Party, datée de mai 1950, insiste déjà sur l'incompatibilité entre la mise en œuvre d'une politique de transformation sociale structurelle au service du monde du travail et le renforcement de l'intégration européenne sous l'égide des dogmes libéraux: « le Parti travailliste ne pourrait accepter tout engagement qui limiterait sa liberté ou celle des autres de rechercher le socialisme démocratique, et d'appliquer le contrôle de l'économie nécessaire à sa réalisation...aucun parti socialiste ne peut accepter un système dans lequel des domaines importants de la politique européenne seraient livrés à une autorité européenne de nature supra-nationale étant donné qu'une telle autorité serait en permanence dominée par une majorité antisocialiste et souleverait l'hostilité des travailleurs européens ».  

 

Pour les États-Unis, la construction politique et économique de l' union européenne doit permettre de prendre le relais du plan Marshall (1948) visant à relever économiquement l'Europe de l'ouest et éviter que les communistes (en France et en Italie notamment) n'exploitent politiquement la misère sociale consécutive à la guerre. Elle doit aussi permettre aussi « permettre au Vieux continent d'assumer une part croissante du coût de la Guerre froide et de limiter l'engagement économique des États-Unis; surtout, le gouvernement américain souhaite la réalisation d'une union douanière entre ses partenaires européens et exige d'eux l'ouverture de leurs marchés afin d'y écouler ses marchandises et d'y faire fructifier ses capitaux. C'est la contrepartie de l'aide apportée par le tuteur américain . A sa demande, l'Organisation européenne de coopération économique (OECE), l'ancêtre de l'OCDE, fait ses premiers pas en avril 1948 » (idem, p.28). Le soutien aux défenseurs du projet de construction européenne est l'autre volet d'une politique d'élaboration d'une « Communauté atlantique » dressée contre l'URSS qui s'associe avec la création de l'alliance militaire de l'OTAN (Organisation du traité de l'Atlantique Nord) suite au traité de Bruxelles de mars 1948. Les pères fondateurs de l'Europe – Churchill, De Gasperi, Monnet, Spaak, Adenauer – ont passé sous silence cet activisme des Américains pour soutenir les propagateurs de l'idée européenne: pourtant, Paul-Henri Spaak, Paul Van Zeland, Robert Schuman, Guy Mollet, Konrad Adenauer, ont généreusement été reçus en leur temps aux États-Unis pour faire des tournées de promotion du fédéralisme européen auprès des élites américaines. D'emblée, loin que l'intégration européenne soit le moyen de trouver une indépendance stratégique et économique par rapport à la puissance impériale américaine, l'oncle Sam est en réalité le parrain du projet européen qui accroît son influence sur l'Europe de l'ouest et préserve ses intérêts dans le cadre de la guerre froide. Le plan Marshall visait à relever économiquement et financièrement l'Europe, l'Alliance Atlantique et l'intégration européenne visent à accroître les forces du monde libre. Ainsi, soutenus par les européistes, les américains plaident en 1950 pour voir se reconstituer une armée en Allemagne de l'Ouest intégrée à une armée commune européenne. Malgré la pression américaine et l'activisme des européistes socialistes et conservateurs, le projet de CED (Communauté Européenne de Défense), associé à la première ébauche d'une Constitution européenne supranationale, avorte après avoir été rejeté en France en 1952 par les parlementaires communistes et gaullistes. En 1963, au moment où il s'opposait à l'adhésion de la Grande-Bretagne, présentée comme un cheval de Troie des intérêts américains censé réduire l'Europe à une vaste zone de libre-échange privée de toute autonomie politique vis à vis des Etats-Unis, de Gaulle dénonçait une Europe intégrée échappant au domaine de la politique dont le le fédérateur était les États-Unis, dont les États européens eux-mêmes.

 

En 1950, la tournure prise par la construction européenne en devenir se précise avec le plan Monnet, le projet d'un marché commun qui serait la première étape vers une fédération européenne. Les réalisations concrètes des effets de premières formes d'intégration, de coopération et d'harmonisation économique entre les États européens, sont censées donner du crédit et de la popularité au projet fédéral européen dans le plan Monnet. Sa déclaration de 1950 propose la création d'une « Haute Autorité » composée de « personnalités indépendantes » chargées de chapeauter la mise en commun de la production du charbon et de l'acier. François Denord et Antoine Schwartz constatent que, d'emblée, « un parfum d'antidémocratique imprègne le projet » Monnet: « Ne s'inspire-t-il pas d'une sorte de despotisme éclairé lorsqu'il entend confier la gestion d'un secteur clé de l'économie aux bons soins d'une institution de caractère supranational dirigée par des experts non élus et « indépendants », c'est à dire politiquement irresponsables, mais dont les décisions engageront pourtant les États? Une telle perspective fait dire au Premier ministre anglais Attlee que « la démocratie ne peut abdiquer entre les mains de quelques personnes censées compétentes, et dont les décisions peuvent comporter des conséquences sortant du cadre de leurs attributions et débordant largement sur le plan politique. » » (L'Europe sociale n'aura pas lieu, p. 36). Le journal Le Monde ne s'y est pas trompé qui estime en décembre 1951 que les abandons de souveraineté liés à l'instauration du pool charbon-acier conduit à « bâtir la première place forte d'une nouvelle technocratie ».

 

Dans la note qu'il adresse le 3 mai 1950 à Robert Schuman et au président du conseil George Bidault, Monnet justifie son plan, non seulement comme un moyen de préserver la paix entre la France et l'Allemagne, mais comme un moyen de renforcer les pays d'Europe de l'Ouest dans l'horizon de la guerre Froide, la prospérité censée nous protéger du communisme étant assurée par une modernisation économique garantie par le libre jeu d'une concurrence réglée aux effets bénéfiques et un rejet du protectionnisme. Autour de Jean Monnet, l'économiste Pierre Uri et le juriste Paul Reuter, anciens hauts fonctionnaires de Vichy, dessinent avec l'ingénieur Étienne Hirsch, les contours de la future communauté européenne. Le parcours personnel de Monnet le prédestinait à être le père de cette Europe atlantiste des marchands et des banquiers. Jean Monnet est l'héritier d'une dynastie de négociants en cognac (de Gaulle dira au Président Eisenhower qui ne tarissait pas d'éloge sur lui: Jean Monnet? « Il fait un très bon cognac. Malheureusement, cette occupation ne lui suffit pas) et il s'initie dans sa jeunesse aux affaires de son père. Pendant la première guerre mondiale, il rencontre Viviani et se fait nommer à un poste de responsabilité dans la coordinnation auprès des Alliés. Dans les années 1920, après avoir démissionné de son poste d'adjoint du secrétaire général de la SDN pour gérer la fortune et les activités commerciales de sa famille, il intègre Blair and Co, une firme d'investissement américaine. A partir de 1929, il devient une autorité à Wall Street: vice-président du holding Transamerica et de la Bancamerica Blair à San Francisco. Il abandonne ensuite cette activité pour se muer en conseiller de Tchang Kaï-chek, puis pour rejoindre Londres pour soutenir de Gaulle et superviser auprès des Américains la question clé des fournitures de guerre. De Gaulle, à la Libération, nomme commissaire au plan de modernisation et d'équipement celui qui, dès 1943, considérait que dans la future Europe, il serait « essentiel que soit empêchée dès l'origine la reconstitution des souverainetés économiques » (L'Europe sociale n'aura pas lieu. p.34).

 

Le 25 mars 1957, sous l'influence des champions de la construction économique et politique de l'Europe, soutenus par les Américains, est signé le traité de Rome qui donne naissance à la CEE (qui se compose à l'origine de 6 pays: Belgique, France, Italie, Luxembourg, Pays-Bas, RFA) et à des formes inédites de coopération dans les domaines de l'agriculture et des transports. A aucun moment, il n'a été question pour ses initiateurs de concevoir un nouveau bloc protectionniste pour protéger spécifiquement les intérêts de l'industrie et des salariés européens. Au contraire, le marché commun européen est conçu comme un premier pas et un levier pour l'instauration de la libre circulation des capitaux et des marchandises dans le monde, la suppression des entraves politiques et étatiques au libre-échange. Ainsi, l'article 110 du traité de Rome précise qu' « en établissant une union douanière entre eux, les États membres entendent contribuer, conformément à l'intérêt commun, au développement harmonieux du commerce mondial, à la suppression progressive des restrictions aux échanges internationaux et à la réduction des barrières douanières ». Le patronat allemand joue un rôle décisif dans les négociations préparatoires au Traité de Rome et les ministres allemands écartent toutes les velléités françaises d'exiger une harmonisation sociale comme contrepartie au libre-échange. Le traité de Rome inscrit déjà dans le marbre l'objectif d'une « concurrence non faussée » et, pour le mettre en œuvre, il contient des articles qui fonctionneront comme des bombes à retardement contre les monopoles publics et les aides d'État à l'industrie, soit contre des politiques d'intérêt général par la promotion des services publics et la défense de l'emploi: l'encadrement très strict des aides d'État (article 90, 92 à 94), la surveillance contre les abus de position dominante.

 

 

Dès 1957, Jean Duret, directeur du Centre d'études économiques de la CGT, prévoit lucidement les suites du traité de Rome (cf. L'Europe sociale n'aura pas lieu, p.65): « Le Marché commun, écrit-il, conduit infailliblement, à plus ou moins brève échéance, à la disparition des solidarités nationales, à la création d'un super-Etat européen » dominé par la puissante économie allemande. La philosophie du projet de traité, qui repose entièrement sur « l'action bienfaisante de la libre concurrence » ainsi que les modalités de sa mise en œuvre permettent d'affirmer que « les intérêts du monde du travail, dans une série de pays et de régions, seront sérieusement menacés...On invoquera les dures lois de la compétition internationale pour démontrer qu'un niveau d'emploi élevé ne pourra être assuré que si les travailleurs se montrent « raisonnables » ».

 

Pour le patronat, qui accepte les contraintes de la libre concurrence si elle renforce le statut quo social, le traité de Rome peut être perçu comme un moyen de contenir l'augmentation des « charges » et des salaires. Selon le néo-libéral Jacques Rueff, proche d'Hayek et de Milton Friedman, le traité de Rome, qui donne naissance au marché commun en 1968, a marqué « l'aboutissement et le couronnement de l'effort de rénonvation de la pensée libérale » en construisant politiquement la toute-puissance d'un marché s'auto-régulant indépendamment des décisions politiques et des contraintes étatiques.

 

Ainsi, rappellent François Denord et Antoine Schwartz, « Pierre Mendès France souligne dès 1957 que la seule solution « correcte et logique » aurait été d'exiger fermement à Rome « l'égalisation des charges et la généralisation rapide des avantages sociaux à l'intérieur de tous les pays du marché commun ». Y renoncer et remettre entre les mains d'une autorité internationale le pouvoir d'imposer à une nation sa politique économique, ce n'est ni plus ni moins, selon Pierre Mendès France, que de déclarer « l'abdication » de la démocratie: « Car au nom d'une saine économie, on en vient aisément à dicter une politique monétaire, budgétaire, sociale, et finalement une « politique », au sens le plus large du mot, nationale et internationale ».

 

« L'Europe est une machine à reformer la France malgré elle » (Denis Kessler, La Tribune, décembre 2000).  

 

Dans les années 1960-1970, les dispositions libre-échangistes et hostiles aux aides d'État constituant des entorses à la concurrence contenues dans le Traité de Rome, sont contrées par une certaine tolérance de la CEE qui laisse les États protéger leurs champions nationaux en subventionnant leurs industries et en définissant des règles de sécurité et viabilité des produits qui leur permettent de limiter les importations d'industries concurrentes. Mais en 1979, « l'arrêt Cassis de Dijon » (qui donne raison à un importateur allemand de liqueurs de cassis françaises qui s'était vu refuser l'accès au marché des alcools du land de Hesse pour cause de non-conformité de ses produits français au titrage en alcool standard en Allemagne) donne des armes à tous ceux qui en Europe rejette totalement le protectionnisme. Cet arrêt « limite la capacité des États à opposer des normes techniques nationales aux productions venues de pays concurrents » et « il laisse imaginer une construction communautaire qui ne procède pas par l'imposition de lois générales mais par la mise en concurrence des droits nationaux » (l'Europe sociale n'aura pas lieu, p.83).

 

Au début des années 1980, la construction économique libérale de l'Europe à la sauce monétariste allemande va se préciser avec les renoncements à la transformation sociale des socialistes français.

En février 1983, lorsque la lutte contre l'inflation qui passe par le blocage des salaires et l'austérité budgétaire devient une priorité, Mitterrand confie: « Je suis partagé entre deux ambitions: celle de la construction de l'Europe et celle de la justice sociale ». L'alternative est ainsi clairement formulée. Alain Touraine, le sociologue préféré de la « deuxième gauche »  tire toutes les conclusions du choix mitterrandien le 22 janvier 1984 sur RTL quand il déclare sans détour: « le mérite essentiel du gouvernement de gauche est de nous avoir débarrassés de l'idéologie socialiste » puis quand, quinze ans plus tard, il reconnaît que le rêve européen à servi d'alibi à la conversion libérale du PS: « En France, le mot libéralisme était imprononçable, alors on en a trouvé un autre l'Europe » (revue Cultures en mouvement n°17, mai 1999). Ce choix des socialistes et de Mitterrand a été clairement une trahison du Programme commun, cosigné par le PCF et les radicaux, puisque celui-ci n'éludait pas du tout la question de la compatibilité entre des politiques sociales ambitieuses et le renforcement de la communauté européenne. Il appelait en effet à défendre un double objectif à l'égard de la Communauté européenne: d'une part, « participer à la construction de la CEE, à ses institutions, à ses politiques communes, avec la volonté d'agir en vue de la libérer de la domination du grand capital, de démocratiser les institutions, de soutenir les revendications des travailleurs et d'orienter dans le sens de leurs intérêts les réalisations communautaires »; d'autre part, « préserver au sein du Marché commun sa liberté d'action pour la réalisation de son programme politique, économique et social ». Sur le plan monétaire, le Projet socialiste indiquait que le PS n'entendait pas « cautionner le système monétaire européen actuel, c'est à dire l'alignement des monnaies les plus faibles sur le Deutschemark », indiquait que pour lui, « la liberté des échanges n'était pas un dogme », insistant au contraire sur la « reconquête du marché intérieur » et les « mesures n »cessaires pour que la reprise de la demande soit satisfaite par la production interne ».

 

Ministre des finances de la gauche en 1981, déjà partisan d'un recentrage, d'une politique de rigueur et d'une pause rapide dans les réformes sociales, Jacques Delors va incarner pendant 10 ans, de 1985 à 1995, en tant que président de la commission européenne, cette Europe à finalité libérale, libre-échangiste et dérégulatrice qui déçoit toutes les attentes de la gauche en termes d'harmonisation sociale et fiscale par le haut et de protection des emplois et des systèmes sociaux construits dans l'après-guerre dans le cadre d'une mondialisation caractérisée de plus en plus par une concurrence féroce. Dans L'Unité d'un homme. Entretiens rédigé en 1994, Delors avoue a posteriori avec franchise que ses ambitions premières possibles de construire une Europe sociale ont fait long feu dans une commission dominée par les libéraux: « J'ai dû me rabattre sur un objectif pragmatique correspondant aussi à l'air du temps, puisque à l'époque il n'était question que de dérégulation, de suppression de tous les obstacles à la compétition et au jeu du marché ».

 

Ainsi, Delors va endosser le projet de marché unique élaboré par le lobby patronal, European Round Table of Industrialists (ERT), lancé par les commissaires européens Etienne Davignon et François Xavier Ortoli (futur président d'honneur du MEDEF international), et comptant dans ses rangs les patrons de Volvo, de Fiat, de Nestlé, de Philips, de Siemens, de Shell, de Saint Gobain, de Lafarge, Danone, tout comme Lagardère... Au conseil européen de juin 1985, le Livre blanc sur l'achèvement du marché intérieur dénonce la persistance d'État des aides à l'industrie dans les pays européens et les attitudes de protection des marchés nationaux. En 1986, l'Acte Unique, qui fixe l'échéance 1992 pour la création du marché unique, entérinne les préconisations du Livre Blanc. Et augmente les pouvoirs de la Conseil des Ministres européens comme gardien des dogmes économiques libéraux du Traité de Rome en mettant en avant la règle de la majorité qualifiée, au détriment de l'unanimité qui permettait à des pays aux intérêts sociaux divergents de bloquer la progression des politiques d'harmonisation libérales. En revanche, « pour satisfaire les desiderata britanniques, l'unanimité reste requise dans le domaine de l'harmonisation fiscale, de la libre circulation des personnes et des droits et intérêts des travailleurs. Dans la philosophie du nouveau traité (l'Acte unique), la dimension sociale fait office de pièce rapportée » (F.Denord et A.Schwartz., p.97). Or, laisser les capitaux circuler librement sans harmonisation fiscale préalable, équivaut  à laisser aux marchés le soin de réaliser cette harmonisation vers le bas:« L'instauration d'une compétition fiscale entre les États aboutit non seulement à réduire considérablement leurs marges de manœuvre budgétaires, mais menace aussi les systèmes de redistribution et de protection sociale ».

 

Cette libéralisation du marché intérieur n'est pas non plus là pour protéger les économies européennes contre la compétition internationale, mais davantage pour les adapter, selon le principe darwinien de la survie des plus aptes, qui ne prend pas en compte les intérêts humains et sociaux mais la seule rentabilité économique, à une compétition internationale féroce. « J'ai toujours pensé, disait Delors en 1986, qu'en France, il n'y avait pas assez de marché et que l'État était, pour des raisons historiques, omniprésent et trop souvent étouffant et dominant. La plupart des Français n'ont pas encore acquis cette mentalité d'ouverture au monde sans laquelle nous ne pouvons pas édifier une nouvelle économie ». De fait, en 1988, le Conseil européen de Rhodes définit la finalité du marché unique – libéraliser l'économie mondiale: « Le marché intérieur ne se fermera pas sur lui-même. L'Europe de 1992 sera un partenaire et non pas une « Europe forteresse ». Le marché intérieur sera un facteur décisif contribuant à une plus grande libéralisation du commerce international ». De fait, c'est le bras droit (directeur adjoint des finances) de Jacques Delors en 1981, et son directeur de cabinet chargé d'organiser les G7 à la commission européenne, le camarade Pascal Lamy, qui va négocier l'Accord Général sur le Commerce et les Services (AGCS) au sein de l'OMC au début des années 2000, et c'est grâce à lui que l'Union Européenne va devenir l'acteur international le plus agressif dans le domaine de la libéralisation des services à l'échelle mondiale (service de l'eau, de la gestion des déchets, de production d'électricité, de transports publics et de marchandises...). L'OMC, machine, non à réguler l'économie mondiale, mais à déréguler autoritairement les économies nationales, a été créée en 1994 à l'initiative des Européens et du lobby patronal très écouté de la Commission européenne, l'ERT (European Round Table), regroupant les 45 multinationales les plus importantes ayant un siège en Europe et pesant, en 2003, un chiffre d'affaires de mille milliards d'euros.

 

Le traité de Maastricht que Mitterrand et Delors vont vendre au peuple de gauche en France comme une avancée civilisationnelle vers une ère de paix, de tolérance et d'échanges multi-culturels, sera lui-même une traduction des désirs et des intérêts de ce lobby patronal. Les fameux critères de convergence impliquant la maîtrise des déficits (pas plus de 3% du PIB annuellement) et du poids de la dette publique (pas plus de 60% du revenu national) sous peine d'amendes et d'admonestations visent clairement, comme le refus de toute forme d'inflation et la politique des taux d'intérêt et des taux directeurs élevés, à préserver la rente et le capital contre les conséquences de politiques économiques keynésiennes trop inspirées par des préoccupations sociales. La conséquence des politiques monétaristes et de rigueur imposées, sous l'influence du néo-libéralisme allemand notamment, à tous les États européens en route pour l'Euro par le traité de Maastricht en 1992, cela a été le marasme économique et l'acceptation du chômage élevé, faute de relance par l'investissement public et les facilités d'accès au crédit. Citons encore François Denord et Antoine Schwartz: « Les partisans du traité de Maastricht ont beaucoup menacé: en cas de refus, le ciel s'abattrait sur le village gaulois. Ils ont également beaucoup promis: « que la monnaie unique, ce sera moins de chômeurs et plus de prospérité » (Michel Rocard), que « ce sera plus d'emplois, plus de protection sociale, moins d'exclusion » (Martine Aubry), et même qu' « on rira beaucoup plus » (Bernard Kouchner). Pourtant, les injonctions libérales du traité et le choix de la monnaie pèsent très lourd sur les salaires et l'emploi en déprimant l'investissement. Elles ne créent pas, à proprement parler, le marasme économique du début des années 1990: la Réunification allemande avait déjà occasionné un choc profond du fait d'un manque de coopération entre les pays membres du Système monétaire européen. Mais les critères de convergence contribuent à pérenniser cette situation de crise. Les peuples européens payent un tribut d'autant plus lourd que la rigueur rend les critères difficilement atteignables. Au moins est-on sûr ainsi que les États ne se lanceront pas dans des dépenses inconsidérées: leurs marges de manœuvre se réduisent à peau de chagrin. Le « Oui » à Maastricht n'impliquait pas seulement l'abandon de souverainetés démocratiques: l'Europe sonnait l'heure de la revanche sociale » (p.106-107).

 

Avec l'ordre institutionnel créé  par le traité de Maastricht -indépendance de la banque centrale gardienne de la monnaie unique, discrédit sur toute forme de politique de relance et d'investissement public- gouvernements de droite et de gauche paraissent étonnement substituables: « le traité de Maastricht, constatait Alain Madelin, agit comme une assurance-vie contre le retour à l'expérience socialiste pure et dure ». L'économiste Jean Pisani-Ferry écrit lui en 2005 que « L'Europe a été notre programme d'ajustement structurel... De l'ouverture des frontières à l'ouverture des marchés de services à la concurrence, en passant par la désinflation et la réduction des déficits budgétaires, la France a fait joué à l'intégration européenne le rôle que les pays mal gouvernés confient au FMI ou à la Banque mondiale ». En faisant croire que les politiques de dérégulation, de suppression des protections sociales et de rigueur venaient des technocrates de Bruxelles, et non des décisions non assumées à 100% des hommes politiques français, de droite et de gauche...

 

A la fin des années 90, la gauche à été majoritaire dans les États européens et au Parlement européen, mais c'était déjà une gauche séduite par le social-libéralisme, qui est un véritable néo-libéralisme, de Tony Blair et Gerard Schröder, une gauche qui pensait avant tout flexibilité et compétitivité accrues, détaxation du capital, de l'actionnariat salarié, du travail, lutte contre l'assistanat, et qui n'a réorienté d'aucune manière les politiques économiques et sociales européennes.

 

L'introduction de l'euro en 1999 et le choix d'accepter l'adhésion dans l'union de pays aux systèmes sociaux moins développés et protecteurs que ceux d'Europe de l'ouest (en 2004, adhésion, après la Finlande, la Suède et l'Autriche, en 1995, des Pays Baltes, de plusieurs pays de l'est, de la Chypre et de Malte, suivis par la Bulgarie et la Roumanie en 2007) ont vidé de tout contenu social et démocratique la construction européenne, celle-ci se réduisant à un vaste marché concurrentiel organisé pour servir les intérêts des grandes entreprises en mettant en concurrence les salariés et à un système de découragement de toute politique de reprise en main démocratique de l'économie et de la finance verrouillé par les Traités, la Commission, la BCE indépendante, et le Conseil des ministres européen dominé par la droite.

 

Comme l'écrit Patrick Le Hyaric dans son récent essai consacré à décrypter et dénoncer le Pacte euro plus, « le Traité de Maastricht, puis celui du « Pacte de stabilité » (traité d'Amsterdam en 1997) imposant des politiques macroéconomiques identiques à tous les pays qui ont des situations différentes, aggravent les différences de croissance entre les pays. La rigidité monétaire et budgétaire fait porter le poids de l'ajustement sur le travail avec l'incitation à la flexibilité et à la précarité, la pression à la baisse des salaires, la réduction de la part des salaires dans les richesses créés ». Dans cette course au moins disant social, l'Allemagne écrase ses voisins et les lois sur le travail négociées en Allemagne de concert par le SPD et la CDU qui diminuent les rémunérations, augmentent la flexibilité et la précarité, joints aux performances de l'appareil industriel allemand, confèrent un avantage commercial énorme à cette plus grande puissance économique et démographique de l'Europe, d'autant que plus de 80% des importations des États européens viennent d'autres États européens.

 

Depuis 2005, les gouvernants européens ont utilisé les intérêts de l'intégration européenne comme une justification inattaquable pour piétiner la démocratie et les droits sociaux des peuples. Le Traité Constitutionnel Européen a été rejeté par une majorité des électeurs en France, en Irlande, en Hollande: qu'importe, ce n'est pas à ces petits peuples grincheux mal éclairés par leurs élites sur la nécessité d'en finir une fois pour toute avec les vieilles lunes de l'étatisme et du socialisme qui vont paralyser cette Europe libérale que l'on nous présente comme la fin de l'histoire... Dans les autres pays, on s'est dispensé de référendum, ce qui limitait les risques de rejet du Traité. Néanmoins, comme l'unanimité était requise, on maquille le traité constitutionnel rejeté là où on l'avait présenté à la population (sauf en Espagne, si je me souviens bien) en traité de Lisbonne qui met tout autant l'accent sur les valeurs de concurrence libre, de refus des monopoles publics dans les services, et sur la nécessité d'alléger les charges et les contraintes légales pesant sur le marché du travail pour rendre les économies européennes plus compétitives.

 

Crise financière de 2008: on accepte en 2009, 2010, 2011, de prêter plusieurs dizaine de milliards aux Grecs, aux Portugais, aux Irlandais, aux Islandais car il faut bien qu'ils puissent rembourser les banques britanniques, françaises et allemandes à qui ces États, par mauvaise gestion ou trop grande confiance dans les vertus de la dérégulation et de la financiarisation de l'économie pour gonfler artificiellement la croissance, doivent de l'argent... Mais en échange, on leur impose des véritables purges qui vont laisser ces pays à terre pendant des années: privatisations, hausse des frais de scolarité, suppressions massives de postes dans la fonction publique, élévation de la durée du travail, diminution des allocations chômage et des allocations familiales, des pensions de retraite, des salaires, du salaire minimum. Cela ressemble étrangement aux plans d'ajustement structurel imposés par le FMI aux pays d'Amérique Latine dans les années 1980-1990-2000 ou encore à l'Asie du Sud-Est après la crise financière de la fin des années 1990. Mais Sarkozy à grand renfort de rodomontades expliquait en 2009 qu'il avait réussi à obtenir de l'Allemagne et des autres pays européens la création d'un mécanisme de solidarité européen qui pourrait financer, comme le FMI, l'aide d'urgence à un pays attaqué par les agences de notation qui, en jugeant mal de sa capacité à rembourser sa dette, l'empêche d'emprunter à des taux acceptables.

 

Qu'à cela ne tienne: pour bénéficier de ce mécanisme de solidarité, il faut d'abord signer le pacte pour l'euro plus « qui est équivalent à une mise sous tutelle des budgets et des politiques des Etats en difficulté: politiques d'austérité, relèvement de l'âge de départ à la retraite, flexibilisation du marché du travail, ouverture des professions protégées, freins de dettes dans les constitutions et les cadres budgétaires » (Patrick Le Hyaric, Le Pacte des Rapaces)... Voilà comment on nie purement et simplement la souveraineté des peuples dans la définition des politiques économiques et sociales dont dépendent nos vies quotidiennes.

 

C'est tout bonnement l'avènement de la dictature de la finance en Europe! Nous ne pouvons accepter cela.

 

 

Ismaël Dupont.

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26 mai 2011 4 26 /05 /mai /2011 08:50

 

Les poursuites dont Dominique Strauss-Kahn est l’objet aux USA, extrêmement graves si les faits sont avérés, ont relancé le grand bal des supputations sondagères en France. Avec comme seule préoccupation : savoir à qui va profiter le potentiel électoral dont il était crédité.

 

Comme à l’accoutumée, le questionnement porte uniquement sur les candidat(e)s. « A qui va votre préférence ? » - « A qui faites-vous le plus confiance ? » - « Pour qui envisagez-vous de voter ? » …

 

Les débats et les « réflexions » dans les médias écrits ou audio-visuels sont du même tonneau. A aucun moment les contenus, les programmes, leur adéquation ou non avec les conditions de vie de la population, ses attentes, ses exigences ne sont mis en discussion. Seule compte la STRATEGIE ( autre façon de nommer l’approche strictement politicienne ).

 

En même temps la promotion de Marine Le Pen et du Front National continue. Avec à la fois la banalisation d’un mouvement qui serait devenu « respectable », « républicain » et son utilisation comme épouvantail et repoussoir pour renforcer le « vote utile » et le bipartisme.

 

C’est dans ce contexte qu’il faut examiner « l’information ?» parue le 18 mai dans Le Figaro. Sous la plume de Sophie de Ravinel, on y lit que « la crise liée à l’affaire DSK, suivie d’un possible affaiblissement du PS, provoque tout de même une certaine inquiétude au PCF. Au point d’envisager possible un soutien du Front de Gauche au candidat socialiste dès le 1er tour ».

 

Attribuées à Lydie Benoist, responsable des élections au PCF, on trouve, entre guillemets, les phrases suivantes qu’elle a formellement démenties :

Elle est convaincue « que le Front de Gauche ira u 1er tour avec un programme »

Mais « s’il était annoncé assez fort, avec évidence dans les sondages, que la gauche ne devait pas passer au second tour, nous prendrions nos responsabilités »

Tout doit être envisagé pour bloquer Marine Le Pen et éviter un autre 21 avril.

Comme quoi certains ne reculent devant rien !!

 

Tout cela appelle quelques remarques :

1 - Ce qu’attendent les françaises et les Français c’est des propositions pour changer leur vie, pour briser la dictature de l’argent, pour ouvrir le chemin de l’avenir et non des manœuvres politiciennes de reprise du pouvoir.

C’est ce que le Front de Gauche a mis en chantier dans l’élaboration d’un programme populaire partagé dont le peuple sera co-auteur.

 

2 –L’échec de 2002 n’est pas dû au nombre de candidats de Gauche mais à l’inadéquation des politiques menées et des propositions avec les attentes et les exigences du peuple … Ce qui est encore le cas du programme socialiste aujourd’hui malgré un langage « gauchi » qui ne suffit pas à masquer la timidité des propositions.

 

 

3 – Dans ces conditions, sauf à se résigner à un bipartisme qui sonnerait le glas de toute transformation sociale réelle, il n’est pas possible de s’aligner au 1er tour derrière une candidature sociale-démocrate.

 

4 – Outre que ce ralliement n’aurait à l’évidence aucun fondement politique il aurait pour effet immédiat d’enlever au Front de Gauche toute crédibilité et de ruiner tout ce que nous avons entrepris de construire et qui a commencé à porter ses fruits lors des récents rendez-vous électoraux.

 

5 – Qu’il y ait dans nos rangs des partisans de l’allégeance au P.S., c’est leur droit.

Mais la majorité du parti n’a ce point de vue ni dans les instances de direction, ni à la base. D’ailleurs, lors de la dernière Assemblée Générale départementale, aucun participant n’a fait cette proposition. L’orientation, très majoritaire des communistes est d’élaborer et de promouvoir des propositions d’un contenu élevé de transformation sociale et de bâtir les rassemblements qui le permettent.

 

C’est l’objectif que se fixe le Front de Gauche dont le renforcement et l’élargissement deviennent de plus en plus nécessaires.

 

 Alain DAVID

 

 

 

En annexe:  Démenti de Lydie Benoist, responsable national aux élections du PCF.

 

 

 

 

 

 

 

 

« Jamais il n'a été question de se désister au premier tour en faveur du candidat socialiste » (Lydie Benoist - PCF)

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Le Figaro de ce jour prête au PCF et à moi même, responsable nationale, l'intention de se désister au premier tour de la présidentielle en faveur du candidat socialiste. Je démens catégoriquement tout cela. Jamais au PCF nous n'avons évoqué une telle possibilité, jamais nous n'en avons discuté. Que les choses soient claires : le combat contre le FN est une priorité absolue mais nous ne pouvons le combattre qu'en redonnant de l'espoir à notre peuple.

Lydie Benoist, responsable aux élections pour le PCF

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26 mai 2011 4 26 /05 /mai /2011 07:25

Choc des coïncidences...

 

A Deauville, on discute de l'identité du nouvel apôtre des marchés qui remplacera l'ancien directeur du FMI sali par des soupçons de viol sur une femme de chambre. 

Les tenants de la dictature du capital en Europe - Barroso, Merkel, Sarkozy - font peser toute leur poids dans la balance pour que l'avocate d'affaires Christine Lagarde, celle qui, à l'été 2007, à peine entrée dans ses fonctions de ministre des finances, pleurait sans honte sur le triste sort des cols blancs français, brillants rejetons de la bourgeoisie diplômés d'économie, contraints à l'exil à Londres pour accéder à des rémunérations décentes à la City et échapper au poids écrasant de l'impôt républicain, soit nommée à la tête du FMI. Une ancienne directrice d'un fonds d'investissement américain et que tout le monde présente, après Strauss-Khan, brutalement démonétisé, comme une de nos plus brillantes économistes. Seule petite épine dans le pied de notre nouvelle dame de fer, qui ne la fait pas trop souffrir heureusement, car la justice a su se montrer complaisante en d'autres temps pour de tels arrangements entre amis: on soupçonne Madame Lagarde d'avoir pesé de tout son poids, là encore, pour que l'escroc Bernard Tapie soit remboursé par l'Etat de la coquette somme de 300 millions d'euros... Il est vrai que nanard avait tourné sa veste en 2007 en soutenant Nicolas le petit après avoir été au début des années 90 le produit d'appel du mitterrandisme agonisant. Est-il resté de cette période quelques dettes "d'honneur", réglées en tout bien, tout honneur? Ou le PS renvoie t-il à Sarkozy l'amabilité du soutien à la candidature Strauss-Khan à la présidence du FMI? Toujours est-il que Martine Aubry a trouvé opportun d'affirmer publiquement qu'elle soutenait la candidature Lagarde.

 

Pendant ce temps, en Espagne et en Grèce, et bientôt dans d'autres pays européens, les révolutions citoyennes arabes font des émules chez les jeunes, qui campent sur les grandes places des villes pour dire leur indignation devant l'emprise de la finance sur une classe politique inféodée, l'acceptation trans-partisane, dans les partis de gouvernement de droite et de gauche, de plans d'hyper-austérité qui font peser le poids de la crise née de la dérégulation de l'économité et de la spéculation débridée sur les classes moyennes et populaires et qui privent d'avenir les jeunes.

 

Dans un très bel article en dernière page du Ouest France  paru ce jeudi 26 mai 2011 sur le mouvement des Indignés de la Puerta del Sol à Madrid, le journaliste Marc Pennec écrit: "Tous ces jeunes, étudiants, travailleurs précaires, chômeurs, continuent évidemment à vivre chez papa-maman, dans une capitale où les loyers et les garanties exigées par les propriétaires deviennent délirants.... Au terme d'un  reportage que nous avions effectué il y a trois mois en Espagne, nous nous étonnions que la jeunesse de ce pays garde encore son calme. Près de cinq millions de chômeurs, 43% des jeunes sans emploi, record européen. L'âge de la retraite qui passe à 67 ans, l'aide de 426 € aux chômeurs en fin de droitd supprimées. A la mi-mai, les digues ont fini par tomber en poussière."  

 

A l'occasion des élections municipales, cette énorme mobilisation populaire de la Puerta del Sol a été pour des gens de tous les âges un moment de réappropriation de la politique et de dénonciation du vide démocratique créé par l'absence d'alternative proposé aux plans de saignées sociales, par le peu de représentativité et d'écoute de la classe politique.  Ce mouvement est parti de la plate-forme de discussion et de riposte DEMOCRATIA REAL YA!, "Une vraie démocratie maintenant!" (ou "Une démocratie réelle maintenant!'), lancée sur internet il y a 3 mois, et vite rejointe par des collectifs de chômeurs, de précaires, de familles indettés, et d'internautes hostiles à une régulation du téléchargement en ligne, qui a abouti sur 170 campements urbains en Espagne la semaine dernière, et à la mobilisation d'au moins 80000 manifestants le 15 mai dans 50 villes espagnoles. Pour la France, ce niveau de mobilisation ne serait ni inédit, ni très impressionnant: en Espagne, marquée par le silence des passions politiques et le consensus centriste pour la croissance après le franquisme, si...  

 

Le mouvement DEMOCRATIA REAL YA! s'organise autour de deux axes de revendications: régénération démocratique du système politique et défense d'une politique sociale. Il s'agit d'une véritable mobilisation citoyenne, indépendante des partis politiques et des syndicats, comme les mobilisations arabes, et autogérée. Elle vise à rendre à nouveau les citoyens ordinaires, grâce à la force de l'indignation face à l'inacceptable de la confiscation de la démocratie au service des puissances d'argent, acteurs du changement. Rappelons que le pamphlet inspiré de Stephane Hessel, Indignez-vous!, c'est aussi vendu à des centaines de milliers d'exemplaires en Espagne, et qu'il fait maintenant le tour de l'Europe. Si l'on y associe le boom des ventes du Capital depuis la crise financière de 2007-2008, on peut se dire qu'il y a en ce moment des signes encourageants de retour de la question sociale et de prise de conscience de la dérive oligarchique des démocraties occidentales.   

 

Ainsi, suivant l'exemple des Indignés de la Puerta del Sol, des milliers de Grecs ont envahi hier la place Syntagma à Athènes pour protester contre les nouvelles mesures d'austérité imposés par les créanciers de la Grèce, l'Allemagne, le France et la commission européenne qui défendent les banques allemandes et françaises contre la menace d'une restructuration de la dette, et acceptées par le docile gouvernement social-démocrate de Papandréou, aussi combattif contre les exigences indécentes du capital que son homologue espagnol dirigé par Zapatero. Nouveaux remèdes de cheval pour le patient grec qui risquent bien de lui interdire tout rétablissement à moyen terme: non-renouvellement de 150000 fonctionnaires partant à la retraite, hausses d'impôt (les plus injustes, évidemment), privatisations à marche forcée (aéroport d'Athènes, ports et marinas, compagnie d'électricité, loterie...).

 

En France, François Hollande nous promettait il y a quelques mois "du sang et des larmes" si les socialistes, bon gestionnaires affolés par le poids des déficits publics creusés par les plans de réduction d'impôt et de charges patronales, revenaient au pouvoir à l'issue des présidentielles et des législatives.

 

On ne peut laisser sans rien faire la souveraineté populaire être ainsi confisquée par avance par l'absence d'alternative imposée par les convergences libérales des partis "à vocation majoritaire" que les médias dissimulent derrière la mise en scène des égos et des micro-polémiques politiciennes. D'autant que, comme le signale un Appel à la mobilisation du mouvement ATTAC, "le désastre social en cours partout en Europe va être aggravé par les nouvelles réformes, discutées au Parlement européen en juin, qui permettront à la Commission européenne d'imposer autoritairement la réduction des dépenses publiques et des salaires" (le Pacte Euro plus)... Comme le disait Philippe Seguin en 2003, la présence ferait du bien à la droite aujourd'hui: "les politiques n'aiment pas reconnaître que là où la démocratie existe, on décide de moins en moins et qu'à l'inverse, là où on décide de plus en plus, il n'y a pas de démocratie. Certaines décisions fondamentales sont prises à l'échelle européenne ou planétaire, sans que les peuples aient voix au chapitre".

 

Hier, des rassemblements ont été organisés sur le mot d'ordre espagnol "Démocratie réelle, maintenant!" dans une dizaine de villes françaises et, dimanche prochain, le 29 mai, deux grandes manifestations sit-in auront lieu à Marseille et à Paris, Place de la Bastille, à 14h. En tant que communistes scandalisés par le nouveau degré de mainmise du pouvoir de l'argent sur la politique pris à la faveur de  l'intégration européenne et de la dérégulation libérale de l'économie, nous ne pouvons qu'être enthousiasmés par ce réveil des peuples européens qui prend forme, et d'autant plus quand on songe que ce sont les peuples et les jeunesses arabes, que les théoriciens de l'impérialisme américain et du choc des civilisations, nous disaient immatures pour la démocratie, qui nous ont montré la voie.

 

Ismaël Dupont.    

 

 

   

      

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25 mai 2011 3 25 /05 /mai /2011 06:21

C'est bien connu, l'Etat est un bien mauvais employeur qui abuse depuis les années 1980, l'entrée dans la période du chômage de masse et des prescriptions d'austérité budgétaire, parfois sous prétexte d'insertion sociale ou de dispositif de lutte contre le chômage, des contrats précaires pour répondre à des besoins sociaux réels en termes de service public au mépris des droits à une rémunération décente des salariés.

On en a une nouvelle illustration avec les dispositions prises pour changer le contrat des Auxiliaires de vie scolaire du département: à l'école Jean Jaurès de Morlaix, 5 femmes, auxiliaires de vie scolaire, sont concernées.

Hier, elles ont exprimé dans le Télégramme et le Ouest France leur écoeurement devant le courrier qu'elles ont reçu de la part du lycée Thépot de Quimper, sous-traitant la gestion des AVS pour le compte de l'Education Nationale, qui les sommait avant aujourd'hui d'accepter un renouvellement de contrat et une réduction de travail de 26h/semaine à 20h/semaine (alors que les 26h avaient été créditées au commencement de leur contrat en 2009), ce qui représentait pour elles une perte de 200 euros par mois sur des salaires qui étaient déjà très faibles (1012€ brut par mois, qui passeraient à 779 € brut...). Si elles n'acceptaient pas cet ultimatum, nous imaginons qu'elles renonçaient de fait à leur fonction.

Est-ce acceptable que l'Etat fabrique des travailleurs pauvres et précaires faute de se donner les moyens, par le biais de l'impôt et de la redistribution des richesses, de servir avec de vrais métiers valorisés par des formations adéquates (les AVS ne reçoivent en pratique aucune formation théorique sur les handicaps mentaux, psychologiques ou physiques et la manière de se comporter pratiquement avec les enfants qui en sont victimes, devant tout apprendre sur le tas, et parfois dans des relations tendues et épuisantes avec les enfants et les familles...) et des statuts protecteurs des missions d'intérêt général qu'il doit remplir? Est-ce acceptable que l'on se soucie comme d'une guigne de l'intérêt des enfants atteints de ces troubles mentaux et physiques qui ont parfois du mal à accorder leur confiance et à s'adapter à un AVS, et qui en verront maintenant deux ou trois dans la semaine, du fait des restrictions budgétaires à l'Education Nationale? 

Comme l'ont dit les AVS à la journaliste de Ouest France, Françoise Le Borgne, le mardi 24 mai: il y a une limite "à nous demander de travailler moins pour gagner moins, là où la loi handicap 2005 a prévu de donner la possibilité aux enfants souffrant de handicap d'être scolarisés dans leur quartier".

Dans un courriel adressé à une liste de diffusion aux destinataires impliquées dans la défense de l'école, Antoine Gauchard, le directeur de l'école Jean Jaurès, rappelait que les prudhommes, saisis par le syndicat SNUIPP, avaient donné raison contre l'Education Nationale à des AVS se plaignant de leur changement de contrat inattendu et désavantageux, obligeant l'Education nationale à leur verser  des indemnités allant parfois jusqu'à 10000 euros par AVS et à leur fournir une vraie formation professionnalisante. En République, même abîmée par les pratiques actuelles, l'Etat ne peut pas tout: mépriser ses salariés, revenir sur la parole donnée et les contrats signés.   

La justice et le droit du travail sont du côté des AVS de l'école Jean Jaurès et du Finistère et la section PCF de Morlaix exprime donc son soutien à leur combat pour la reconnaissance de la valeur de leur travail et de leur droit à des salaires dignes, ainsi qu'à celui du collectif qui cherchera à défendre leurs droits.  

 

 

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