Gad. « Un abattoir sinon rien ! »
400 salariés ont tenu à « accueillir » les deux ministres.
Hier à Lampaul-Guimi- liau, les ministres Michel Sapin et Guillaume Garot ont rappelé que l'État planchait sur une reconversion du site de l'abattoir Gad. Mais le personnel ne veut rien entendre. Il exige que le site reste destiné à l'abattage de porcs.
« Ce village était renommé pour son enclos paroissial. Il est désormais connu pour le crash provoqué par la fermeture de l'abattoir ». Voilà comment le maire de Lampaul-Guimiliau, Jean-Marc Puchois, a accueilli, hier matin, les ministres Michel Sapin (Travail) et Guillaume Garot (Agroalimentaire). À la mairie, les membres du gouvernement ont rencontré une trentaine d'acteurs de la région (*). Dehors, un cordon de gendarmes mobiles veillait face à 400 salariés de l'abattoir. « On veut voir ce qu'ils veulent faire du site », prévient Christophe, l'un des ouvriers.
519 emplois proposés
« Il ne faut pas qu'un seul salarié de Gad soit laissé au bord du chemin », a assuré Michel Sapin à l'issue de la réunion. Le ministre a aussitôt rappelé que chaque salarié licencié bénéficiera d'un CSP (Contrat de sécurisation professionnelle) renforcé avec trois volets : 97 % du salaire net pendant un an, un accompagnement renforcé avec un expert pour 20 salariés (contre un pour 50 habituellement) et un volet formation. « 519 emplois sont à la disposition de la cellule de reclassement », a annoncé Michel Sapin « Il y en aurait 290 dans le Finistère, dont la plupart seraient dans l'agroalimentaire, mais ils sont venus sans feuille de route. Nous voulons ainsi avoir une cartographie avec les types de contrat proposés : CDI, CDD... », riposte Olivier Le Bras, délégué FO chez Gad.
« Éviter la friche »
Le ministre du Travail a évoqué la reconversion du site lampaulais. Propriétaire de l'abattoir, la Cecab va-t-elle céder les bâtiments ? « Le site appartient à une entreprise (la Cecab), qui a la maîtrise et la propriété des bâtiments », répond le ministre. Michel Sapin a insisté sur le fait que les représentants de la Cecab, présents hier la réunion, ne souhaitent pas que l'abattage de porcs soit maintenu à Lampaul-Guimiliau. Et ce, pour ne pas concurrencer leur site de Josselin (56). Pour Guillaume Garot, « l'objectif est d'éviter que le site soit une friche industrielle. Les projets qui seront examinés devront d'abord trouver une viabilité économique. S'agissant de l'agroalimentaire, il faut faire en sorte que le nouveau projet ne vienne pas en concurrence au sein de la filière porcine, car elle est fragile ».
Échanges vifs et tendus
Durant une dizaine de minutes, les deux membres du gouvernement ont ensuite défendu leurs arguments auprès des 400 salariés ayant investi la salle de la Tannerie, mitoyenne de l'abattoir. Les échanges furent vifs et tendus. C'est ainsi que François Palud, éleveur de porcs à Plouvorn et président de l'Ameb (Association pour le maintien de l'élevage en Bretagne), a invectivé les deux ministres. « On est en train de couper les racines des abattoirs bretons. Il est prévu un plan de suppression de 50.000 truies dans les semaines et mois qui viennent. Il n'y aura plus d'abattage s'il n'y a plus d'animaux. Et ça, les élus ne l'ont pas compris ». De son côté, Olivier Le Bras a fustigé l'idée d'une reconversion du site. « Nous voulons que cet outil reste un abattoir. Des formations, on n'en veut pas. Notre métier, c'est ouvrier d'abattoir et ce n'est pas à notre âge qu'on va retourner à l'école ».
* Préfets de Région et du Finistère, sous-préfet de Morlaix, élus du pays de Morlaix, de la Région, du Département, de la CCI de Morlaix, représentants du monde du travail...
Une foule de manifestants attendue cet après-midi
Les représentants morlaisiens de l'intersyndicale qui organise la manifestation de cet après-midi, avec un départ de la place Puyo à 15 h : de gauche à droite, Roger Héré (CGT), Francis Landouar et Philippe Blache (Solidaires), Daniel Ravasio (FSU), Lydie Nicol et Loïc Guengant (CFDT)
Organisée par une intersyndicale très large, la manifestation départementale pour l'emploi devrait drainer plusieurs milliers de personnes, cet après-midi, à Morlaix. Du coup, le centre-ville sera fermé.
Alors, ils seront combien ? Tandis que la manifestation pour l'emploi s'élancera en milieu d'après-midi de la place Puyo, l'heure était aux pronostics, hier, au centre-ville. Difficile d'avancer un chiffre. Mais il semble bien que l'appel à la mobilisation initié par l'intersyndicale CFDT, CGT, CFTC, CGC-CFE, Solidaires, FSU et Unsa sera bien suivi. D'une part, parce que la région de Morlaix est le symbole de la crise qui secoue l'agroalimentaire. D'autre part, parce qu'une seule manifestation est organisée par département. « Je n'ai pas souvenir d'une telle unité pour l'emploi dans le Finistère sur un seul lieu », souligne d'ailleurs Loïc Guengant (CDFT).
« Un nombre important de manifestants attendu »
Alors, 3.000, 5.000, 10.000 ? « On attend un nombre important de manifestants », répondent simplement les syndicalistes du pays de Morlaix, convaincus d'une chose : « On sera bien au-delà du chiffre de Carhaix le 2 novembre ». Ce jour-là, en parallèle à la mobilisation des Bonnets rouges à Quimper, quelque 3.000 personnes s'étaient rassemblées dans la capitale du Poher à l'appel de la CGT, FSU et Solidaires. Une chose est sûre : dans le sillage de quelques leaders syndicaux et politiques nationaux (lire ci-contre), ils seront plusieurs milliers à défiler à partir de 15 h, cet après-midi, pour réclamer que « l'aspect social soit intégré au pacte d'avenir pour la Bretagne » actuellement en chantier. « On veut montrer au gouvernement et au patronat que les salariés doivent être associés aux discussions », indique l'intersyndicale, qui regrette que Force ouvrière ait refusé la main tendue. « Ils ont fait leur choix, on le respecte », note Roger Héré (CGT), qui précise qu'un dispositif de surveillance sera mis en place afin que le rassemblement se passe dans le calme.
« Pas l'intention de livrer bataille »
« On n'a pas l'intention de livrer bataille et on n'a pas demandé à la Ville de démonter les abribus », déclarent les représentants syndicaux, selon lesquels, après les 10.000 personnes qui avaient défilé à Morlaix le 19 octobre 2010 contre la réforme des retraites, la mobilisation de cet après-midi « fera sûrement date » dans la Cité du viaduc.
Lepaon, Coupé, Poutou, Front de gauche, coopérative citoyenne. ..
Plusieurs personnalités syndicales et politiques nationales seront présentes cet après-midi dans le cortège. Notamment Thierry Lepaon, secrétaire général de la CGT. Après avoir participé au rassemblement de Lorient ce matin, il rejoindra ses camarades pour le défilé dans la Cité du viaduc. Porte-parole de Solidaires, Annick Coupé foulera également le bitume morlaisien. Tout comme Philippe Poutou, le candidat du Nouveau parti anticapitaliste (NPA) lors de la présidentielle de 2012. Par ailleurs, les sections morlaisiennes de plusieurs partis politiques ont appelé à manifester. C'est le cas de la coopérative citoyenne, d'où est issu le candidat socialiste (Jean-Paul Vermot) aux prochaines municipales, mais aussi du Front de gauche, d'Europe Écologie - Les Verts et du NPA. Autres soutiens : les CGT de l'hôpital de Morlaix, de La Poste et de France Telecom, les CFDT défense, protection sociale et construction et bois, ou encore le comité de chômeurs morlaisien.
Le trafic des bus perturbé
En raison de la manifestation, le réseau de transports urbains Tim sera entièrement arrêté à partir de 13 h et pour tout l'après-midi. Les lignes autocar et les services de transport à la demande, au départ ou à destination de Morlaix, seront maintenus. À partir de 12 h 30, seul l'arrêt gare SNCF sera desservi.
« Il ne faut pas qu'un seul salarié de Gad soit laissé au bord du chemin ».
- Michel Sapin, ministre du Travail