Compte-rendu réalisé par Daniel Ravasio
La compétitivité
Nicolas Sarkozy a présenté ses vœux au monde agricole. Lors de ses vœux à l’interpellation du monde agricole sur le manque de compétitivité de la « ferme France », il a annoncé un certain nombre de mesures et notamment des mesures visant à faciliter le regroupement des exploitations laitières.
Réponse d’André CHASSAIGNE
Je ne suis pas opposé par principe à des simplifications (regroupement).
Mais on apporte toujours des réponses aux difficultés du monde agricole uniquement en terme de compétitivité et on ne s’attaque pas à l’organisation agricole, en particulier à l’OMC.
Si on en reste à la recherche de compétitivité et rentabilité, dans ce cadre :
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On en reste à une véritable course à l’échalote qui ne permet pas de résoudre à long terme les problèmes.
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Cela peut donner une bouffée d’oxygène, assez dérisoire d’ailleurs, mais les problèmes de fond ne sont pas limités à la seule compétitivité : il faut prendre des mesures permettant de garantir des prix rémunérateurs aux producteurs.
La flambée des prix des matières premières agricoles
Avis d’André CHASSAIGNE
Il faut sortir l’agriculture de l’OMC : en étant dans l’OMC on est sur la spéculation ; on est avec des produits alimentaires qui sont considérés au même titre que les produits manufacturés.
Il faut une organisation mondiale de l’agriculture mais pas sur les mêmes créneaux que l’OMC, une organisation qui s’appuie sur des coopérations, qui préconise des mesures très strictes contre la spéculation, qui tienne compte de l’urgence alimentaire avant de tenir d’une approche de profits financiers.
Avis du syndicaliste agricole
Il y a nécessité d’une régulation. Il ne faut pas considérer les productions agricoles comme les autres marchandises
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Il faut rétablir un niveau de régulation faisant appel à des prix planchers, par la constitution de stocks notamment de stocks stratégiques.
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A l’échelle nationale il faut rentrer dans une ère de contractualisation (mise en adéquation de la production et de la demande des entreprises) permettant aux producteurs de pouvoir faire des prévisions et de pouvoir mieux anticiper.
Avis d’André CHASSAIGNE
Je suis dubitatif sur les résultats de la contractualisation.
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La contractualisation a pour objectif de garantir des prix et d’avoir, par le biais des interprofessions, des regroupements et une force de frappe qui serait censé rééquilibrer, dans les négociations commerciales, les rapports producteurs – grande distribution.
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La LME (loi de modernisation de l’économie) donne au contraire d’avantage de pouvoirs aux acheteurs.
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Je préférerais qu’il y ait des encadrements avec des prix planchers, tenant compte des coûts de production, intégrant un système de coefficients multiplicateurs de façon à ce que, s’il y a des augmentations de prix au niveau de la vente aux consommateurs il y a une répercussion pour les producteurs.
Il faut d’avantage de solidarité sur l’ensemble de la chaine.
Quelques chiffres : En 2005 les producteurs de lait touchaient 32% du prix contre 26% en 2009.
Pour les industriels on est passé de 34% à 52 % tandis que pour la grande distribution on est passé de 28,5% à 17% [Attention : il y a des mécanismes se traduisant par le fait que les prix de la grande distribution ne représentent pas tout à fait la réalité].
Il est nécessaire de s’attaquer à la fabrication des prix.
La grande distribution affirme que la hausse des prix vient de l’amont !
Avis du syndicaliste agricole
L’ère de la volatilité dans laquelle on nous a fait rentrer a des conséquences que personne ne sait gérer :
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Soit on fait ce choix et les conséquences doivent s’appliquer d’un bout à l’autre de la chaine.
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Soit on choisit d’encadrer et on sera dans un régime beaucoup plus stable.
La LME oblige à des négociations annuelles : il y a nécessité de négociations plusieurs fois par an.
Ce qu’on a fait de la LME ne fonctionne pas : les négociations sur les tarifs se tiennent effectivement mais les compensations prévues n’ont pas vu le jour.
Avis d’André CHASSAIGNE
Le gouvernement doit reconnaître que la LME est un échec.
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Il faut tout remettre à plat.
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Il faut des mesures plus strictes (ex = temps de paiement).
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Il s’attaquer à la domination de la grande distribution.
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Il faut étudier les marges des industriels.
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L’observatoire des prix et des marges doit faire son travail en allant au fond des choses [Ce n’est pas le cas aujourd’hui : il y a des blocages], obtenir tous les renseignements sur la réalité des prix et des coûts.
Le dumping social
Avis d’André Chassaigne
Quand la FNSEA propose, notamment en terme de charges sociales, de s’aligner sur ce qui se passe dans d’autres pays, il s’agit d’essayer de régler les problèmes en tirant vers le bas.
L’Europe doit, au contraire, tirer vers le haut : il faut une politique européenne plus exigeante au niveau du social, ne permettant pas d’avoir tant de distorsion de concurrence.
L’Europe, telle qu’elle est construite sur la base de la libre concurrence pour répondre aux impératifs du système économique, n’est pas à même de prendre ces décisions là. Il faut donc faire évoluer l’Europe vers une direction beaucoup plus sociale, tenant compte de l’humain avant de tenir compte du fric.
Avis du syndicaliste agricole
On ne peut pas avoir une Europe qui livre les marchés d’une manière très libérale sur des mécaniques d’encadrement qui sont nationales.
Si l’Europe décide de libéraliser, elle doit mettre en place une harmonisation d’un cadre social et d’un cadre économique.
Si on n’est pas capable de corriger les mécanismes actuels de distorsion de concurrence (ex : Allemagne) soit par un ajustement de la France soit par une harmonisation Européenne, on aura des problèmes (perte de parts de marché) avec des répercussions sur l’emploi.
Avis d’André Chassaigne
Une image :
Dans une maison qui prend l’eau, il y a 2 solutions : déplacer le lit et mettre un parapluie ou réparer le toit. Pour le moment on met en œuvre la 1ère solution.
Il faut donc transformer la maison Europe de façon à faire plus de social.
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