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22 octobre 2012 1 22 /10 /octobre /2012 16:16

36 ème Congrès - Base commune proposée par le Conseil National du PCF

« Il est grand temps de rallumer les étoiles… » Guillaume Apollinaire

 

" Humanifeste du Parti communiste français à l’aube du siècle qui vient"

 

Nous voulons changer le monde ! Et la chose ne peut plus attendre. Les apprentis sorciers du capitalisme ne parviennent plus à faire face à leur propre crise et les prétendues solutions qu’ils mettent en oeuvre revêtent un caractère de plus en plus brutal et autoritaire.

Nous voulons vivre à pleins poumons, quand la violence de la société nous poursuit un peu partout jusqu’à l’asphyxie.

Un choix radical est devenu inévitable : suivre la pente de la compétition sauvage et de la barbarie ; ou bifurquer sur le chemin du partage, de la démocratie et de l’humain. Quelle humanité voulons-nous être ?

Notre parti pris est celui de l’émancipation humaine, celui de l’épanouissement de chacune et de chacun, celui du droit au bonheur. Cela nous conduit à promouvoir l’égale dignité de chaque être humain, quelle que soit l’étoile sous laquelle il est né, quel que soit son genre, quelle que soit la couleur de sa peau, quelle que soit sa religion s’il en a une, quelle que soit son orientation sexuelle...

C’est ce qui donne sens à notre projet de société et à la manière dont nous voulons le faire avancer : avec toutes et tous. Cela n’est pas compatible avec l’austérité dévastatrice qui est la cause et la conséquence de la crise profonde du système lui-même. Cela n’est pas compatible avec les plans du capitalisme, qui bâtit une société de la concurrence de tous contre tous, où se déchaînent les pulsions de domination et de haine.

Le capitalisme a atteint un stade sans précédent historique de sa crise. Le XXIème siècle peut être celui de son dépassement. C’est un immense défi. Nous pensons possible de le relever.

Nous, communistes de France, lançons un appel au peuple de notre pays, aux peuples d’Europe et du monde. Allons-nous laisser écrire la suite de l’histoire par la main de celles et ceux qui nous ont mené au désastre ? Aucun des obstacles qu’ils dressent n’est insurmontable.

Face aux urgences comme face aux grands enjeux, ne laissons pas notre destin se décider sans nous, au gré des humeurs du marché. Ensemble, soyons actrices et acteurs, décideurs et décideuses de l’avenir de l’humanité.

 

I- Face à la crise, le choix radical de l’humain

 

1- Nous voulons un nouveau monde

Il y a un nouveau monde à gagner. Un nouveau monde pour l’humanité. C’est cette conviction renouvelée qui nous rassemble. En quelques décennies, nous avons changé d’époque. Certains s’entêteront à vouloir classer notre rêve au chapitre des illusions. Ils ne veulent pas voir qu’une puissante aspiration au changement travaille l’humanité en son coeur.

Prendre confiance

En proie à la crise majeure qu’il a provoquée, le capitalisme n’en finit pas de convulser, épuisant la planète et étouffant l’humanité. C’est pourquoi ses promoteurs sont à son chevet pour essayer de le sauver, en même temps que leurs immenses privilèges acquis contre l’intérêt de l’immense majorité.

D’un côté, beaucoup a déjà changé, par la mise en cause de la domination occidentale et l’émergence d’un monde beaucoup plus contradictoire, par les bouleversements des modes de vie et de production liés à la révolution numérique et informationnelle, ou par l’essor de la prise de conscience écologique... D’un autre côté, rien ne change vraiment ; tout est capté, puis digéré, pour alimenter la même fuite éperdue vers nulle part.

Dans leurs vies quotidiennes, des millions de femmes et d’hommes n’en peuvent plus.

Dans notre pays, le chômage de masse continue de gagner du terrain, la précarité devient la norme particulièrement pour les femmes et les jeunes salarié-es, de plus en plus de retraité-es sont en butte à la pauvreté, trop d’étudiant-es s’endettent et cherchent des petits boulots pour financer leur formation, la santé devient un produit de luxe, les quartiers populaires concentrent tous les effets de la crise, le travail est de plus en plus vécu comme un traumatisme, la vie est de plus en plus chère, les minima sociaux ne suffisent pas à boucler les fins de mois, la violence monte dans toute la société... Tout cela alimente le sentiment d’impuissance savamment distillé dans les consciences.

Mais rien n’est écrit d’avance : le destin de l’humanité est entre ses propres mains. Il est temps, de par le monde, que les citoyennes et les citoyens reprennent confiance en leur pouvoir.

L’issue : rompre avec le capitalisme

Rompre avec le capitalisme en le dépassant est une urgente nécessité. La brutalité avec laquelle la crise est en train de précipiter l’humanité vers des abîmes exige la mise en oeuvre de solutions nouvelles qui s’attaquent aux causes réelles. La domination insensée des forces de l’argent doit être renversée pour laisser place à un mode de développement humain durable.

A celles et ceux qui parlent de moraliser le capitalisme pour mieux le conserver, nous disons que l’entreprise est vaine et que la manoeuvre ne prend pas. L’argent n’a pas de conscience. Le capitalisme est incapable d’offrir une autre perspective que l’asservissement de l’immense majorité des êtres humains.

A celles et ceux qui en appellent à la mesure et proposent de réguler le capitalisme, nous disons que c’est un objectif illusoire. Sans la volonté de prendre le pouvoir aux marchés financiers et aux grands possédants, l’expérience a montré qu’il n’y a aucun résultat signifiant.

Il y a une contradiction de plus en plus insoutenable entre le capitalisme et le progrès social, entre le capitalisme et la démocratie, entre le capitalisme et le développement culturel, entre le capitalisme et l’écologie. C’est pourquoi nous parlons de révolution. Une révolution citoyenne, pacifique, démocratique, et non pas la prise de pouvoir d’une minorité. Un processus de changement crédible et ambitieux, visant à transformer les logiques du système.

 

2- De la crise du capitalisme à la crise de civilisation

 

La crise, avec ses accalmies et ses soubresauts, les peuples du monde la subissent depuis plus de trente ans. Chaque jour s’approfondissent ses dégâts, jusqu’à remettre en cause les fondements de la civilisation.

 

La crise financière provoque l’explosion sociale et économique

En 2007, s’est déclenchée la plus grave crise financière depuis l'entre-deux guerres, suivie deux ans plus tard, de la première récession mondiale depuis 1945. Les véritables causes de cette crise majeure se trouvent dans la domination des forces de la finance. Les exigences de rentabilité des capitaux écrasent l’économie réelle et imposent

au monde du travail de multiples et insupportables saignées.

Au coeur des emballements actuels, se trouve un antagonisme fondamental : le capital utilise les immenses possibilités de la révolution numérique et informationnelle pour nourrir son obsession de faire de l’argent pour l’argent. Cela entraîne un chômage de plus en plus massif, ainsi que l’accroissement des revenus du capital au détriment des revenus du travail. Résultat : la productivité augmente mais pas les débouchés. Cette situation conduit inexorablement au développement d’une concurrence de plus en plus déchaînée, d’une exploitation des salarié-es de plus en plus forcenée. Ce développement spasmodique s’est construit pendant plusieurs décennies sur le surendettement généralisé …qui a fini par exploser avec la crise des subprimes aux Etats-Unis.

Les forces de la finance se sont alors plus que jamais comportées comme une nuée de criquets. Pour éviter l’embrasement, de gigantesques liquidités ont été déversées par les pouvoirs publics et englouties dans la même logique. Ce sont les peuples qui en ont payé le prix par le recul continuel des droits sociaux, des services publics et du pouvoir d’achat : de quoi accentuer encore l’endettement, la faiblesse de la croissance et la relance de la

spéculation ravageuse. Une spirale infernale.

Ces enchaînements font particulièrement sentir leurs conséquences en Europe, au point de menacer la reprise mondiale. En Grèce, il a été imposé au peuple une injustifiable cure d’austérité, plongeant dans la misère et l’incertitude une large part de la population. Partout, la réduction drastique des dépenses publiques a été mise à l’ordre du jour pour nourrir plus encore le monstre insatiable de la finance.

La fameuse « crise de la dette » provient surtout de l’insuffisante des recettes publiques et sociales, du coût des intérêts versés aux banques sur les marchés financiers, de leur sauvetage et plus encore de l’appauvrissement généralisé de nos sociétés, vampirisées par les forces de la finance. Et le comble, c’est que cette spirale du déclin est utilisée par celles et ceux qui la causent pour culpabiliser les salarié-es et les populations, justifier les

privatisations. Avec l’appui d’une pensée technocratique autoritaire, les peuples européens ont été sommés

de se soumettre et d’abandonner toujours plus de leur souveraineté. Les forces financières et leurs relais ont défendu bec et ongles l’interdiction faite à la Banque Centrale Européenne de créer de la monnaie, afin de se servir de l’Euro pour sécuriser leurs créances. Ainsi, au lieu d’alléger le poids des dettes des Etats et d’engager des réponses

publiques face à la situation, ce sont donc les banques, sans cesse renflouées, qui sont encouragées à poursuivre leur oeuvre sans rien changer. Et la crise se poursuit…

Ailleurs, le Fonds Monétaire International et la Banque mondiale se font les instruments de la domination absolue des marchés financiers et s’attachent à leur faire place nette en conditionnant chacune de leurs interventions à des régressions sociales.

Dans les pays émergents, où l’industrialisation demeure toujours dominée par les multinationales, la croissance s’est réalisée à marche forcée. Provoquant un exode rural massif, elle s’est souvent construite sur la base de conditions de travail dignes de celles qu’avaient pu connaître les ouvriers européens du XIXème siècle. Dans de nombreuses

régions du globe, la misère a continué d’être le lot commun tandis que s’implantaient des paradis touristiques réservés à une minorité. D’immenses vagues d’expropriation des peuples de leurs terres et de leurs droits se sont produites.

L’ensemble de ces profonds bouleversements s’est opéré sur la base d’une mise en concurrence exacerbée, d’un gaspillage d’outils et de savoir-faire incroyable, et d’inégalités insupportables.

 

Une crise écologique croissante

La crise économique et sociale se mêle à une crise écologique croissante. Car la course effrénée au profit se nourrit également sans vergogne de la spoliation permanente des ressources naturelles

La pollution des océans, des rivières et fleuves provoque une disparition de la flore et de la faune aquatique ; l’exploitation sans retenue des forêts, conduit à leur disparition ; l’agriculture intensive entraîne l’appauvrissement des terres et des sous-sols tandis que la biodiversité s’effondre et que des espèces comme les insectes pollinisateurs disparaissent… Même habillé de vert le capitalisme se moque de la planète : les lobbies de la climato-économie libérale se repaissent allègrement des catastrophes écologiques, en faisant du profit sur les exigences de développement durable. Le réchauffement climatique tient une place de premier rang dans l’ordre des défis à surmonter : les tempêtes et les inondations sont le pendant de la sécheresse et de la désertification. Quant à la fonte de la banquise et des glaciers, elle engendre l’élévation du niveau des mers créant par millions une nouvelle catégorie d’êtres humains : les réfugiés climatiques…

La réduction des énergies carbonées à l’origine des gaz à effets de serre est donc une absolue nécessité planétaire. Comment accepter, de Copenhague au sommet de la terre de Rio, que des décisions de cette importance aient pu être remises en cause pour satisfaire des intérêts financiers ? Enfin, le respect des ressources en eau et leur partage nécessitent une prise de conscience plus vigoureuse encore, tant les besoins sont criants. Et l’heure est à un autre modèle d’agriculture, protégé de la spéculation, soucieux de la santé publique et de la lutte contre la faim. Or, malgré les alertes de la FAO, on a continué à développer des cultures qui privent une partie de la population mondiale de denrées de première nécessité. Les images insupportables d’enfants se nourrissant de galettes de boue, tandis que les spéculateurs continuaient impunément leurs basses oeuvres sont restées gravées dans nos mémoires. Pouvons-nous accepter d’être réduits à l’impuissance ?

 

La démocratie réduite à un théâtre d’ombres

Devant la pression du pouvoir considérable acquis par les marchés financiers, nous sommes entrés dans un cycle de régression démocratique. La capacité d’intervention des peuples a été rognée en permanence jusqu’à être cantonnée à la marge des grandes orientations qui régissent les sociétés, tandis que la puissance publique a été de plus en

plus accaparée au service des marchés financiers. A tous les niveaux a été organisé le dessaisissement progressif des citoyennes et des citoyens de leur pouvoir. On est passé de l’Etat-Providence à l’Etat de marché. Pour donner le change, on a ainsi inventé le concept particulièrement pervers de gouvernance, véhiculant l’idée que la conduite politique pouvait se contenter de compétences. Par une série de coups d’Etat déguisés, une petite oligarchie, relayée par ses innombrables lobbies, a pris le pouvoir de façon insidieuse, maintenant les apparences de la démocratie. Ainsi, plus les changements nécessaires paraissent immenses, moins l’action politique paraît être porteuse de solutions.

 

Des crises internationales à répétition

Depuis le bouleversement géopolitique lié à la chute du mur et à la mondialisation capitaliste, des crises internationales majeures s’enchaînent dans un monde présenté comme irrémédiablement instable et dangereux. Les réponses militaires et les stratégies de puissance seraient, nous dit-on, les seules possibles. Les dépenses liées à la guerre pèsent lourd dans les budgets publics. En Irak, en Afghanistan, en Libye, en Afrique… des logiques de guerre, au nom de prétendues valeurs occidentales, n’ont cessé d’exacerber les tensions, d’étendre les instabilités,

d’aggraver les crises. Cette escalade sans issue, dans le mépris des droits des peuples et l’instrumentalisation de l’ONU, est le fruit d’un néo-impérialisme dont la volonté de prédation est à l’oeuvre partout où des intérêts stratégiques sont en jeu.

Les tensions et les violences qui caractérisent le monde d’aujourd’hui, dans sa complexité, s’enracinent en particulier là où le sentiment existe que la politique des Etats-Unis, des pays de l’Union européenne, de l’OTAN... bafoue la dignité, la souveraineté des peuples.

Le non respect des droits de la Palestine, la succession de guerres, le soutien à des dictatures, les politiques néolibérales imposées par le FMI et l’Union européenne… Tout cela n’a cessé d’alimenter un rejet profond de la domination occidentale et de fournir des motifs de révolte et de mobilisation populaires puissantes.

 

L’humanité en panne de sens

La conjugaison de ces crises finit par plonger l’humanité dans une véritable crise de civilisation. Une crise du sens et de l’imaginaire. Une crise existentielle qui interroge les rapports entre les êtres humains et leurs rapports à la nature.

Le capitalisme est venu exacerber toutes les dominations existantes, à commencer par le patriarcat. Prospérant sur la concurrence et la peur de l’autre, il a sapé les fondements du vivre ensemble. Les savoirs et leur diffusion ont été placés au service de la rentabilité financière, et les êtres humains empêchés d’acquérir une maîtrise critique des

connaissances et une culture commune. La marchandisation de tout jusqu’au corps humain, la guerre de tous contre tous et l’explosion des inégalités, la domestication de la culture et de l’éducation se sont abattues sur les peuples. Les grandes puissances se sont attelées à fournir des motifs de justification à leurs guerres néo-coloniales.

Dans une humanité déboussolée, les résistances à cet ordre mondial insupportable se sont exprimées de façon contradictoire. La théorie du choc des civilisations, mise en pratique par des responsables politiques peu scrupuleux, pour servir les intérêts de leur cause, a fait grandir des affrontements dangereux et sans issue à l’échelle planétaire. Le terrorisme, qui pousse sur le terreau de la domination des peuples, est devenu le nouvel ennemi public. Dans ce contexte, le peu de prix accordé aux vies humaines constitue un traumatisme sérieux.

L’humanité se cherche. Elle ne trouvera réponse à ses questions que dans la quête commune de sens, que dans la mise en oeuvre d’un projet commun, que dans la fin des logiques de puissance et de prédation.

 

Fenêtre 1 : La crise et son issue en question

La crise, dans toutes ses dimensions, est dans toutes les têtes. Comment l’analyser et cerner ses contours ? Quelles contradictions provoque-t-elle au sein du système ? Quelles luttes se développent et quelles luttes développer ? Quelles sont les issues ? Quelles brèches ouvrir dans l’austérité ? Plus elle est comprise et interprétée, plus les solutions se dessinent et plus l’espoir pourra gagner du terrain.

 

3- Un nouvel âge de la lutte des classes dans une humanité fragmentée

 

Au coeur de ces difficultés les résistances et la créativité des hommes et des femmes peuvent ouvrir de nouveaux horizons. C’est ainsi que pourra se reconstruire une civilisation nouvelle de femmes et d’hommes, riches d’influences culturelles différentes, mais fondamentalement libres, égaux et associés.

 

Pour une nouvelle conscience de classe

La lutte des classes avait disparu. C’était une vue de l’esprit, un fantôme du passé que quelques individus inadaptés aux exigences de la modernité cherchaient à réveiller. Chacun était seul responsable de la situation dans laquelle il se trouvait. Voilà le discours hypnotisant qui nous a été servi des années durant. Et pourtant, jamais il n’y a eu de pause

dans cet affrontement.

La crise a commencé à faire tomber le masque, de par la violence de la tentative d’écrasement que mène la classe dominante. Nous avons vu défiler les marchés financiers et leur course à la compétitivité, les actionnaires et leurs dividendes, les banquiers et leurs escroqueries, les grands patrons et leur héroïsme... Nous avons entendu que « la guerre des classes existe » et que c’est leur classe, « celle des riches » qui est en train de la gagner. Pour que l’immense majorité, les « 99% », puisse faire valoir ses droits au changement, nous voulons qu’émerge une nouvelle conscience de classe, qui rassemblerait le monde du travail et de la création. Il est grand temps que se retrouvent tous ceux et celles, épris de justice, de paix et d’humanité, dont l’intérêt est d’unir leurs énergies pour ne plus laisser  quelques profiteurs décider à leur place. Il faut pour cela faire grandir une alternative commune.

Nous bataillerons pour faire échec à la division du salariat, et à la division sexuée du travail qui se fait au détriment des femmes. Ainsi, nous combattrons le fameux concept de « classe moyenne », modelé pour faire croire à toute une partie de la population qu’elle pourra s’en sortir mieux que les autres parce qu’elle le vaut bien. De même nous ne laisserons pas s’installer plus avant le terme pernicieux d’assistanat pour décrire le devoir qu’a la société de relever celles et ceux qui sont dans la difficulté et de les accompagner.

 

Des femmes et des hommes décidés à gagner

Profiteurs contre producteurs. Finance contre travail. Comment peut-on dans ce contexte, appeler à partager les efforts et proposer le match nul ? Les appels du gouvernement français à rechercher un « compromis historique » entre le patronat et les syndicats pour un « choc de compétitivité » sont inacceptables. Il s’agit d’une nouvelle tentative de « baisser le coût du travail », d’accentuer l’individualisation de la relation de travail, et d’imposer la flexibilité. Cette offensive n’a d’autre but que d’asservir plus encore les salarié-es, comme si les régressions de ces dernières années n’avaient pas suffi. Le patronat a fait le choix de la désindustrialisation, de la spéculation, de l’abandon de la recherche-développement et de la formation, de la mise en concurrence des salarié-es entre eux par le chômage et

la précarité… Il voudrait encore doubler la facture. S’il faut un choc, c’est pour baisser le coût du capital et non la rémunération du travail ; c’est pour baisser les charges financières et non pas les cotisations sociales ; c’est pour en finir avec la précarisation et non pas pour l’augmenter ! Voilà les issues à la crise !

Face aux offensives brutales d’actionnaires insatiables, les salarié-es, avec leurs organisations, ont cherché à établir des résistances solides. Dénonçant le mépris et l’incohérence, ils ont mis sur la table des projets alternatifs crédibles. Malgré les atteintes au droit de grève, malgré la criminalisation de l’action syndicale, malgré les chantages, malgré

l’abandon des pouvoirs publics, des luttes ont grandi, dont certaines ont pu ouvrir des brèches. Ces hommes et ces femmes, atteints dans leur dignité, défenseurs d’eux-mêmes autant que de l’intérêt général bafoué, tiennent tête aux puissants. Parmi eux, il y a ces ouvrières et ces ouvriers que les médias ont longtemps ignoré, caricaturé et dont ils ont

même décrété la disparition. C’est de leur côté que se trouvent les solutions.

Dans ces batailles, les femmes prennent très largement leur place, affrontant au passage un double mépris, tandis que chaque mesure de régression adoptée les frappe plus durement en raison de leur genre. Mais si le capitalisme se nourrit de cette oppression, nous savons qu’elle n’a pas besoin de lui pour exister. Pourquoi faut-il encore aujourd’hui mener la bataille pour le droit à disposer de son corps et contre les violences faites aux femmes ?

Combien, de par le monde, sont traitées comme des mineures, contraintes d’obéir, de se cacher, de se soumettre ? De la même manière, pourtant, aux femmes, on avait expliqué que le féminisme était un combat dépassé, balayant d’un revers de main les inégalités persistantes, le patriarcat encore vivace. Ce combat contre la domination et pour l’égalité doit se faire plus encore le combat de toute l’humanité.

 

Le grand piège de « l’affrontement identitaire »

Racisme, xénophobie, antisémitisme, islamophobie, sexisme, homophobie, lesbophobie, transphobie et autres avatars du rejet de l’autre n’ont pas attendu la naissance des marchés financiers pour sévir. Nous les combattons toutes avec vigueur, en tant que telles.

Nous savons aussi que les forces dominantes ont bien compris le parti qu’elles pouvaient en tirer : afin de détourner la colère sur d’autres têtes, elles s’attachent à diviser leurs victimes dans des affrontements qui laissent à l’abri leurs intérêts.

Pour déclarer l’ouverture de la chasse aux boucs-émissaires, tous les prétextes sont bons. La stigmatisation tous azimuts des jeunes des quartiers populaires, des agents de la fonction publique, des grévistes, ou encore des chômeurs et des pauvres établit une liste de prétendus profiteurs du système, en même temps que le portrait robot du prétendu méritant vertueux qui serait lésé par leur seule existence. Dès lors, lutter contre toutes les dominations,

travailler à gagner l’unité et la solidarité contre les divisions, c’est façonner cette nouvelle conscience de classe que nous recherchons. C’est plus que jamais une urgence.

En effet, à partir de l’insécurité sociale latente, tout est fait pour que l’être humain se sente plongé dans un climat d’insécurité existentielle, au point de se vivre comme un individu assiégé de toutes parts. Assiégé dans son être même, dans son identité... Le pas suivant est vite franchi. Ainsi donc, le tranquille autochtone, serait seul face aux barbaresques menaçants.

Il s’agirait donc pour lui de s’unir avec ses semblables face à l’ennemi désigné, accusé de « racisme anti-blancs ». Les mêmes qui critiquent le communautarisme l’installent de fait, dans une dimension profondément conflictuelle, allant jusqu’à usurper et dévoyer le principe républicain de laïcité.

Le déplacement du conflit social sur le terrain identitaire et communautariste est lié à l’héritage complexe et encore pesant d’une histoire nationale marquée par le fait colonial et relève d’une stratégie visant à fractionner les couches populaires et à masquer l’aggravation des inégalités sociales. C’est ce que l’on appelle l’ethnicisation des rapports sociaux, et c’est, dans le monde d’aujourd’hui, une arme de division massive.

S’appuyant sur la théorie du choc des civilisations, la diabolisation insupportable de l’islam et des musulmans, amalgamés en permanence à des étrangers intégristes et à des terroristes en puissance, a une fonction particulière dans ce dispositif. Voilà ainsi campé le personnage de l’étranger par excellence, celui qu’on incrimine et contre qui l’on veut fédérer.

A partir de là peuvent se déployer toutes les peurs, toutes les haines et toutes les jalousies, comme on le voit aussi particulièrement à l’endroit des Rroms ou des sans-papiers. Comme on le voit également à travers l’islamophobie et la résurgence de l’antisémitisme.

Le développement d’un nouveau type de racisme, de plus en plus décomplexé, ne saurait être compris sans mesurer la portée de cette offensive menée par la droite et l’extrême droite. Elle est susceptible d’alimenter bien des tensions au sein des peuples comme au plan international. En mettant cet affrontement identitaire à l’ordre du jour, elle porte un

grand danger de notre temps.

Communistes, nous affirmons l’inexistence des races, prônons l’universalisme et l’égalité de tous les êtres humains. Nous concevons la diversité des cultures, des héritages comme un patrimoine de toute l’humanité. Combattants contre toutes les aliénations, nous refusons les assignations identitaires imposées aux individus. Comme beaucoup

d’hommes et de femmes, nous ne reconnaissons pas la richesse de l’humanité dans ces identités étriquées, fantasmées, artificielles. La question est bonne : homme, femme, qui es-tu ? Mais la réponse ne peut consister à s’enfermer dans des cases pour se rassurer et se protéger. L’être humain est un être social, un être de relations, un être de culture. L’être humain est un producteur. Un être en chemin et en devenir. Chacune, chacun, nous

sommes des humains uniques et complexes, d’influences et d’appartenances multiples.

Ensemble, nous sommes l’humanité.

Que dire, alors, de la nation ? Nous en portons une conception qui se situe aux antipodes de la vision identitaire et ethno-culturelle qui teinte les discours de la droite, sous l’influence de son extrême. La nation est pour nous un lieu essentiel du faire peuple et de l’exercice de la démocratie. Un lieu essentiel de l’internationalisme. La nation française elle-même s’est forgée dans la Révolution. Elle peut être fière de sa diversité régionale, en particulier linguistique. Elle est habitée d’une culture ouverte et en mouvement dont le monde a besoin. Au même titre qu’il a besoin de l’apport des autres nations de l’Europe et du monde. Depuis l’aube de notre histoire, les échanges entre les peuples nourrissent les représentations qu’ils se font d’eux-mêmes, leurs cultures communes et leurs façons de  vivre. Partout, au coeur de la vie quotidienne dans les villes du monde, c’est cela qui se poursuit.

C’est pourquoi, l’idéologie xénophobe du nationalisme est une dangereuse fumisterie.

Convaincus qu’il est vain d’enfermer toute tentative de changement dans la seule nation, nous proposons d’en refonder le principe pour reconstruire de l’unité sur les valeurs de liberté,d’égalité et de fraternité. Dans le même mouvement, il sera possible d’inscrire cette refondation dans une quête de mondialité. C’est-à-dire un processus permanent d’humanisation de l’humanité capable de bousculer la mondialisation capitaliste et d’opposer aux

affrontements identitaires la force d’un monde interculturel. De tous les pays, unissonsnous.

 

Fenêtre 2 : La fragmentation de la société en question

Vivre ensemble, lutter ensemble. Nous voulons lutter contre toutes les dominations tandis que le capitalisme les utilise pour diviser les peuples. Comment faire face à la fragmentation de la société, lutter contre les divisions, combattre les visions ethnicisées du monde, affronter l’individualisation des rapports sociaux… ? Comment construire une conscience de classe de notre temps ? Comment lutter contre la montée de l’extrême droite et de ses idées ? Qui et comment rassembler pour un changement politique ?

 

4- L’ouverture de nouveaux champs du possible

 

Quand les peuples se mettent en mouvement

Partout dans le monde, des mouvements populaires se développent qui en attestent : l’humanité cherche des issues. En effet, comment ne pas trouver dans le mouvement d’occupation de Wall Street, le temple du capitalisme mondialisé, le signe éloquent d’un système en perte de légitimité ?

Dans les pays d’Europe, les peuples résistent et manifestent leur profond rejet de l’austérité.

Des forces politiques comme Syriza, en Grèce, opposées aux orientations européennes, commencent à gagner une place politique nouvelle. Sans oublier les « Indignés», qui portent une forte contestation du système, et bien souvent de la politique en tant que telle. En Amérique Latine, dans la diversité des histoires nationales, des forces politiques, ont

été portées au pouvoir pour s’opposer au pillage impérialiste de leurs richesses et de leur travail, pour fonder de nouvelles coopérations et solidarités, y compris avec Cuba, victime d’un blocus inacceptable. Il s’y mène des politiques nouvelles où l’on cherche des façons de rendre au peuple les droits qui sont les siens. Ces expériences nous intéressent, elles nourrissent nos espoirs, elles participent à rendre partout le changement possible. Nous

en sommes pleinement solidaires. Le Printemps arabe, s’il a débouché sur des situations contrastées, ne saurait être interprété autrement que comme une éruption trop longtemps contenue, d’aspirations profondes à des bouleversements dans la vie quotidienne et dans la vie démocratique des peuples. Le monde arabe n’en pouvait plus de cette domination néo-coloniale dont la misère, la famine et la privation de libertés étaient le prix. Au coeur de ces mouvements, les aspirations démocratiques et progressistes doivent prendre le dessus. Dans notre pays, enfin, se lèvent dans de nombreux champs de la société des mouvements de lutte qui portent des revendications et des propositions concrètes. C’est de là que naîtra le changement.

Nous souhaitons que se libèrent toutes ces forces qui veulent transformer nos sociétés, et celles qui ne trouvent pas encore à se manifester. Si elles sont encore éparses, s’il leur manque un projet commun, elles sont porteuses d’un souffle nouveau dont le monde a besoin.

 

Quand le progrès sert l’humanité

La révolution numérique et informationnelle bouleverse déjà les modes de production et d’échanges, comme les modes de vie. Elle prolonge l’intelligence humaine et change son rapport au monde, alors que jusqu’ici les outils, puis les machines de la révolution industrielle, avaient permis simplement de «prolonger la main», en instituant une séparation multi-séculaire entre celles et ceux qui décident et celles et ceux qui exécutent,. Les systèmes automatiques de traitement, de stockage et de transmission de l’information sont autant d’avancées ouvrant des possibilités inédites que le capital s’efforce de confisquer, avec les gains de productivité qu’elles génèrent. Pourtant, elles portent en elles la possibilité d’une autre civilisation, fondée sur la mise en commun et la coopération plutôt que sur la marchandisation du monde.

En tous domaines, les progrès considérables de la connaissance et des savoirs, accompagnés de progrès techniques et technologiques incessants, couplés à cette révolution sont une chance pour l’humanité. L’organisation du travail, sa conception et sa place dans la vie des êtres humains pourrait en être complètement changée.

Contrairement au projet d’une « économie de la connaissance » qui capte la recherche au service de la rentabilité et vise la refondation de la formation au service de la division du salariat, nous voulons nous appuyer sur la place croissante des savoirs dans la société pour construire une culture commune émancipatrice. Déjà, la place croissante des savoirs dans le travail, dans le débat démocratique et dans la vie quotidienne est à l’origine d’aspirations

nouvelles. Sous la crise du capitalisme émergent déjà les prémisses d’une troisième révolution industrielle avec l’impression 3D, les machines auto-réplicatives libres, l’open source hardware, les mouvements hackers et maker. Ainsi se créent et se développent des lieux de conception et de proximité en réseau, ouverts et gratuits, où l’on partage savoir et savoir-faire, où l’on crée plutôt qu’on ne consomme, où l’on expérimente et apprend collectivement, où le

producteur n’est plus dépossédé de sa création, tels les Fab Lab, qui sont les moteurs de ce mouvement.

Toutes ces avancées portent en elles des possibilités de mise en commun, de partage et de coopération inédites.

 

5- Un projet de société fondé sur l’humain

 

Alors, quel projet ? Cette question, nous ne souhaitons pas y répondre seuls. Nous voulons la poser en grand à la société. Nous voulons interroger les hommes et les femmes, pour donner de l’espace et de l’écho à leurs aspirations. Ouvrons grand les vannes : « et vous, quels changements de société voulez-vous ? » Voilà la grande campagne

d’échanges citoyens que nous souhaitons lancer dans tout le pays et au-delà. Nous ne saurions nous engager dans une telle initiative sans décrire nous-mêmes le projet de société que nous portons. Nous ne le concevons pas comme un modèle prêt-à-porter, mais une contribution forte dans la quête de l’humanité.

Rien de tout cela ne tombe du ciel. A la suite des Lumières et de la Révolution Française,

il y a les anticipations fondamentales issues de Marx, et des penseurs du socialisme, avec une mention particulière dans notre pays pour la contribution de Jean Jaurès, qui fonda ce journal au nom si emblématique : L’Humanité. Il y a ensuite les enseignements que nous avons tirés des échecs et de l’effondrement des premières tentatives de rupture avec le capitalisme du XXème siècle : sans démocratie, respect des libertés et des droits de l’homme particulièrement, il ne saurait y avoir d’émancipation humaine. Il y a encore les avancées produites par les communistes depuis un certain nombre d’années pour définir d’autres logiques à mettre en oeuvre. Il y a enfin tout ce qui se cherche et s’invente dans les luttes et le mouvement des idées pour faire grandir l’alternative.

Notre projet se nourrit de tout cela. Il est en construction permanente. Un projet alternatif au capitalisme et à toutes les formes de domination doit permettre la convergence des pensées qui leur résistent : celles qui prennent le contre-pied des politiques libérales sur le plan social et économique, celles qui renouvellent l’exigence écologique, celles qui vont

puiser dans les aspirations libertaires et l’humanisme, celles du féminisme, celles de la République face à sa décrépitude avancée, celle de l’altermondialisme... Il doit également se forger dans la vie, comme une réponse aux contradictions dans lesquelles les femmes et les hommes se débattent. C’est ce que nous nommons communisme : l’incessant mouvement démocratique d’appropriation citoyenne du monde et de partage des avoirs, des savoirs et des pouvoirs qui enverra peu à peu aux oubliettes l’ancien régime du capitalisme et fera grandir l’humain dans l’humanité.

 

La démocratie comme mode de vie

La démocratie doit être au coeur du vivre ensemble, par la reconnaissance d’une souveraineté populaire pleine et entière comme étant seule légitime. Aucun pouvoir, fut-il éclairé ou savant, ne saurait s’affranchir du peuple et gouverner sans lui. Nous proposons de démocratiser tous les espaces de la société, en recherchant partout à pousser les feux de l’intervention citoyenne et de la co-élaboration.

- Nous voulons une nouvelle République, où l’exercice de la démocratie ne consistera pas à abdiquer son pouvoir de citoyenne ou de citoyen. Dans toutes les institutions, nous voulons rompre avec le présidentialisme, en finir avec le cumul des mandats en nombre et en durée, favoriser la délibération et l’exercice collectif des responsabilités, promouvoir la proportionnelle comme mode de scrutin à toutes les élections locales et nationales, trouver les voies d’une parité effective, ouvrir un droit d’initiative législative populaire et un droit de saisine des institutions. Nous proposons également pour faire vivre la démocratie et lutter contre la professionnalisation de la politique, la création d’un statut de l’élu-e.

Au sein de cette République, nous voulons une vraie démocratie locale, dont les communes doivent être le coeur battant. Elles devront y développer l’esprit coopératif à chaque fois que nécessaire en faisant respecter l’esprit décentralisateur et la souveraineté populaire. Nous sommes pour une citoyenneté de résidence et nous défendons le droit de vote des étrangers vivant dans notre pays.

Pour prendre le pouvoir, il faut comprendre le monde. Notre exigence de démocratie rend nécessaire l’accès de toutes et tous aux savoirs.

Nous proposons une véritable démocratie économique et sociale, qui instaurera l’exercice de nouveaux pouvoirs pour les salarié-es dans les entreprises et transformera les structures juridiques qui fondent aujourd’hui la propriété du capital et son pouvoir absolu, en s’appuyant sur des formes diverses de propriété publique et sociale. La citoyenneté ne doit pas s’arrêter à la porte des lieux de travail. Sans attendre, nous voulons que les salarié-es et leurs représentant-es disposent de droits et pouvoirs d’intervention sur les choix qui président à l’organisation du travail, aux investissements, aux stratégies des entreprises et à leur financement. Nous voulons permettre aux organisations syndicales de tenir la place essentielle qui leur revient dans la démocratie sociale. Il en est de même pour les

élus locaux et les élues locales, de par leur rôle décisif dans l’aménagement du territoire.

Nous proposons une administration démocratisée des services publics et leur expansion coopérative jusqu’à la gestion des biens communs de l’humanité. Nous voulons libérer des griffes du marché l’eau, l’énergie, et plus largement des secteurs essentiels à la vie de l’humanité, y compris la monnaie... Nous voulons ouvrir des droits garantis par des services publics dans les domaines du logement, de l’information, de la communication, des

transports, de la santé, ou du crédit. Nous voulons développer la gratuité de ceux qui sont essentiels à la vie de chacune et chacun.

- La fuite en avant libérale opérée par l’Union européenne n’a cessé de s’exacerber, au point de la plonger dans une crise existentielle qui appelle des transformations fondamentales. Ainsi, la finalité même de la construction européenne doit être redéfinie. L’Europe doit devenir un grand projet humain, capable de peser pour un monde de coopération. A l’opposé des forces nationalistes qui opposent entre eux des peuples qui souffrent du

même mal, nous voulons refonder la construction européenne pour bâtir une Europe des peuples, dont le but sera le progrès humain, social et écologique, et non plus la concurrence acharnée et la grande compétition des humains. Aussi, sa première ambition devra être de s’émanciper des marchés financiers. Par la coopération, elle devra permettre de mobiliser démocratiquement tous les atouts disponibles au service de la promotion des capacités

humaines et d’assurer la gestion solidaire des biens communs. Parmi les changements majeurs, il est urgent de mettre fin à l’indépendance de la Banque Centrale Européenne, qui doit être placée sous contrôle démocratique et citoyen. Elle devra être enfin autorisée à battre monnaie pour financer les dépenses publiques et les investissements

s'inscrivant dans les nouvelles priorités, aux conditions les plus favorables et dans une logique de long terme et contribuer à un essor concerté des services publics.

Elle devra également favoriser la réduction des inégalités de développement entre pays membres. Parallèlement, un audit citoyen de la dette, devra permettre aux Etats de se libérer des charges illégitimes que les financiers veulent leur extorquer.

Nous voulons repenser la démocratie européenne. La gestion commune des biens, intérêts et projets communs doit résulter de choix souverains, faits en pleine connaissance de cause après information et consultation des citoyennes et des citoyens. Il faut donc créer les conditions -politiques, institutionnelles, culturelles- favorisant leur implication dans l'élaboration des politiques européennes, le contrôle de leur mise en oeuvre et l'évaluation de leurs effets. L’Europe refondée ne saurait altérer la souveraineté populaire ou nier les nations qui la composent, mais doit s’imposer le devoir de pousser les feux de la démocratie représentative, participative et citoyenne.

Enfin, ses principes doivent respecter ceux de la Charte des Nations Unies. Elle devra se montrer exemplaire dans l'engagement solidaire et responsable face aux enjeux vitaux de notre temps : environnement, paix, développement... Il lui faudra ainsi rechercher tous azimuts des partenaires pour coopérer à la transformation du monde.

- Nous voulons un monde de paix, de partage et de solidarités. La paix ne saurait être garantie que par la justice, le respect du droit et de la souveraineté des peuples. C’est ce qui fonde notre soutien à la lutte légitime des peuples de Palestine, du Kurdistan, du Sahara occidental en particulier. Nous nous opposons à l’impérialisme et à ses guerres. Partout, les relations entre les peuples doivent se bâtir sur les coopérations et la sécurité, dans la quête d’un nouvel ordre mondial. Face aux nouveaux enjeux de la sécurité internationale, comme face à la gravité de la situation, en particulier au Moyen-Orient, il est urgent de mettre à l’ordre du jour, avec l’exigence du règlement politique des conflits, le désarmement multilatéral, en matière nucléaire et bien au-delà.

C’est sur cette base, de solidarité et de responsabilité collective, que nous proposons de refonder les institutions internationales, d’agir pour sortir de l’OTAN et la dissoudre. Nous sommes également convaincus qu’il faut en finir avec les orientations des institutions financières internationales telles le FMI et la Banque mondiale, qui conditionnent toute forme d'aide à nombre de pays du Sud, et même aujourd'hui d'Europe, aux politiques néolibérales

d'austérité et de régression sociale. Une véritable révolution monétaire doit voir le jour pour mettre fin à la domination du dollar, pour mettre en oeuvre progressivement une monnaie commune mondiale visant à répondre aux besoins de coopération et de co-développement en mobilisant les moyens existants et nécessaires et en favorisant le développement des services publics. C'est l'ensemble des organisations internationales, y compris l'ONU, qui doivent être transformées et démocratisées afin de pouvoir répondre aux exigences du multilatéralisme, de la coopération et du développement humain durable. Il y a urgence à mettre en discussion un manifeste pour un développement humain durable à l’échelle mondiale, afin d’engager une discussion sur la satisfaction des besoins essentiels

de tous les êtres humains et sur la gestion des ressources communes de l’humanité.

 

Produire, consommer et partager autrement les richesses

Le capitalisme abime les liens des êtres humains avec la nature et des êtres humains entre eux. Avec lui, tout est devenu marchandise, tout est devenu source potentielle de profit pour quelques uns. Nous voulons faire grandir la conscience que l’humanité a d’elle-même et lui permettre d’organiser la façon dont elle subvient à ses besoins et crée les moyens de son épanouissement.

- La question du travail et des rapports d’exploitation est centrale. Les vagues de suicides qui ont frappé de grandes entreprises ont dramatiquement mis le projecteur sur l’augmentation de la souffrance au travail, due à la pression permanente et à la perte de sens. La course insensée à la compétitivité ne saurait qu’aggraver cette situation. Le travail doit être garanti comme le droit de chacune et chacun à se réaliser, à participer à l’effort commun au service de la collectivité en fonction de ses moyens, en contrepartie d’un revenu lui permettant de se nourrir, se vêtir, se loger, se cultiver, se détendre, voyager... Pris dans toute sa dimension, le travail doit être un lieu de créativité, d’épanouissement et de vie sociale. Il faut donc le réorganiser et le repenser en mettant au placard les techniques de management inhumaines et le recours à la précarité. La place des femmes à tous les niveaux de responsabilité dans l’entreprise, le refus du temps partiel imposé et la rémunération de leur travail à égalité avec les hommes doivent être des normes respectées.

Les potentialités actuelles doivent permettre de réduire le temps de travail dans une vie, mais aussi de construire un système de sécurisation de l’emploi et de la formation pour éradiquer le chômage, démarchandiser le travail, et répondre aux besoins de formation, pour la société dans son ensemble et pour chacun de ses membres.

Les attaques violentes contre le droit à la retraite, à la santé, à l’assurance chômage, aux prestations sociales ont rencontré de grandes résistances. Nous réaffirmons notre choix fondamental en faveur d’une protection sociale solidaire de haut niveau. Pour répondre aux aspirations de la société, nous voulons sortir de la défensive en portant,

à partir des luttes sur l’hôpital, l’école ou encore la recherche, une expansion des services publics à l’échelle européenne. Leur développement est à la fois une nécessité économique de relance et une question de justice.

- Nous ne cèderons pas au MEDEF qui entend passer commande de la main d’oeuvre dont il a besoin en enfermant les étudiant-es dans l’acquisition de compétences restreintes et en en dédouanant les entreprises de leur propre rôle de formation. L’éducation et la formation doivent permettre l’élévation générale du niveau des connaissances et des capacités dont la société a besoin, et fournir aux êtres humains de quoi se construire comme individus libres et responsables. Ces périodes doivent être reconnues comme partie intégrante du travail que chacune et chacun fournit dans une vie au service de la collectivité. Il convient également de libérer le développement de la recherche, avec une forte impulsion publique et dans un esprit de mise en commun des découvertes pour faire avancer l’humanité

et lui permettre de résoudre sans attendre les grands problèmes qui lui sont posés.

Une nouvelle culture de partage et d’intercréativité de tous les êtres humains, en germe dans la révolution numérique et informationnelle devra être promue.

- La crise a accéléré la destruction de sites de production entiers et l’abandon de savoir-faire industriels laissant des centaines de milliers d’ouvrières et d’ouvriers sur le carreau. C’est insupportable ! Nous voulons continuer à produire, dans le respect de l’environnement.

Nous n’acceptons pas ce gâchis humain, social, écologique et économique que veulent imposer les grandes multinationales dans leur course à la concurrence. Vivre et travailler au pays, le slogan n’est pas d’aujourd’hui. Nous voulons mettre en oeuvre d’autres modèles de gestion que ceux du capitalisme financiarisé. Nous voulons gagner une politique industrielle et de services, reposant sur des pouvoirs d’intervention des salarié-es, un nouveau crédit sélectif et des filières stratégiques cohérentes,. Nous voulons organiser la coopération entre les sites de production comme le proposent souvent les organisations syndicales, et favoriser les circuits courts qui économisent la planète. Nous voulons instaurer un droit de préemption pour les salarié-es sur leur outil de travail, développer l’économie sociale et solidaire. Des nationalisations doivent être opérées dans plusieurs secteurs stratégiques et pour reconquérir la gestion de biens communs. Nous voulons, sous de multiples formes, engager un grand mouvement d’appropriation sociale.

- La planification écologique doit devenir l’outil du débat démocratique, afin de maîtriser les enjeux de production, d’éviter les gaspillages de ressources, les atteintes à la biodiversité et d’organiser la véritable réponse aux besoins. Ainsi, dans un contexte d’expansion des besoins énergétiques mondiaux, il faudra juguler le réchauffement

climatique à l’échelle de la planète par une réduction progressivement massive du recours aux énergies carbonées qui sont responsables des émissions de gaz à effet de serre. De ce fait, la transition énergétique française, pour rendre effectif le droit à une énergie pour tous devra passer par un important effort de sobriété et d’économie d’énergie dans l’habitat et les transports, ainsi que par un mix énergétique entièrement public, portant des exigences accrues de sûreté sur le nucléaire et de plus en plus marqué par les énergies renouvelables. La recherche devra être déployée dans tous ces domaines.

Il est grand temps de sortir du cycle infernal productivisme-consumérisme, qui n’a d’autre finalité que les profits de quelques uns. Il faut donner un tout autre contenu à la croissance, imposer des exigences qui ne peuvent être que celles d’un développement humain durable. Il faudra traquer, par exemple, l’un des choix stratégiques les plus symboliques de l’absurdité du système : l’obsolescence programmée, qui voit des entreprises produire des biens à durée de vie volontairement déterminée pour fidéliser, en quelque sorte, leur clientèle…

L’eau devra être reconnue comme un bien commun de l’humanité, garantie comme un droit pour les populations et partagée jusque dans la gestion publique et coopérative des ressources. Il faut également anticiper les moyens de relever le défi alimentaire, en quantité comme en qualité, en refusant la mainmise des multinationales sur la production agricole avec ses organismes génétiquement modifiées et son modèle autant intensif qu’extensif

qui constitue la négation de la souveraineté alimentaire et de l’agriculture paysanne comme de la pêche artisanale. En refusant également de laisser la grande distribution venir spéculer, ponctionner et orienter à sa guise, privant les producteurs d’une juste rémunération.

Il faut changer de logique en imposant les exigences d’un développement humain durable. Notre croissance est celle du développement social et écologique, pas celle de l’accumulation du capital.

- Le but du travail ne saurait être de produire toujours plus d’objets de consommation rentables et jetables, mais de permettre à l’humanité de vivre bien. Les inégalités de revenus exorbitantes sont une insulte à la dignité humaine, elles méritent qu’on s’y attaque en définissant des revenus minimum et maximum. Nous voulons repenser l’impôt, taxer l’argent du capital augmenter sa puissance redistributive et sa capacité à orienter les grands choix des entreprises. Les richesses produites, aujourd’hui usurpées et gaspillées, devront échapper à la mainmise de la finance et des spéculateurs. Nous voulons réorienter fondamentalement l’argent des profits, l’argent des banques et l’argent public vers les salaires, la garantie de droits sociaux, l’investissement productif écologique, la recherche, l’expansion des services publics. Les nouveaux pouvoirs des salarié-es devront les placer au service des objectifs sociaux qui expriment notre ambition : l’humain d’abord ! Dans cet esprit, la réorientation du crédit bancaire est une priorité stratégique pour mettre en cause le pouvoir des marchés financiers. Déjà, des luttes sociales et politiques se mènent pour traduire cette exigence dans des dispositifs institutionnels concrets comme la constitution d’un pôle

financier public et le déploiement de fonds régionaux pour l’emploi et la formation.

 

Le choix résolu de la dignité humaine

Chaque vie humaine est essentielle à l’humanité. Pour nous, le libre développement de chacune et chacun est la condition du libre développement de toutes et tous. Naître, c’est accéder à la liberté, à l’égalité et à la fraternité. Ces valeurs toujours révolutionnaires ne peuvent vivre que si elles avancent du même pas. Il faut pour les garantir, que la souveraineté populaire s’exerce pleinement, dans un esprit de laïcité. Nul ne peut imposer aux autres ses convictions, qu’elles soient religieuses, politiques ou philosophiques. De même, nul ne peut être discriminé en raison de ses origines, de son sexe, de son handicap, de tout prétexte que l’on pourrait utiliser pour abaisser celui qui est différent de soi, ou celle que l’on ne comprend pas. L’égalité entre femmes et hommes doit maintenant devenir une réalité et les violences faites aux femmes être éradiquées. Réformer le mariage, comme l’adoption,en en faisant un droit pour toutes et pour tous, serait au passage une belle manière de reléguer dans le passé l’esprit de domination dans lequel il a été bien souvent utilisé dans l’histoire de nos sociétés.

- L’exercice concret de la démocratie, dans un quartier populaire, dans une commune, est un geste essentiel au service de la rencontre. La République doit mettre en dialogue toutes les représentations du monde, dans la mesure où elles ne contestent pas son principe.

Ainsi, nous refusons la conception qui ferait de la laïcité un principe de stigmatisation et d’exclusion. Nous refusons aussi cette conception qui ferait de l’espace public un lieu aseptisé, où l’on s’efforcerait de n’être que semblable aux autres, les convictions des individus étant refoulées dans une «sphère privée». C’est là qu’elle doit tisser la toile des valeurs communes qu’il faut sans cesse continuer. Nous voulons porter une vision restaurée de la laïcité, qui garantisse la liberté de conscience et l’égalité de droits et l’indépendance de l’Etat à l’égard de toute religion et de toute autorité hormis la souveraineté populaire.

Aussi, nous nous opposons à tous les intégrismes qui instrumentalisent les religions à des fins politiques, en portant atteinte aux libertés et à la dignité des femmes.

- Nous voulons développer l’accès à la culture, à l’information et aux connaissances, mais aussi leur appropriation sociale, en élargissant ce que les êtres humains ont en commun ou peuvent partager et qui construit leur humanité. Il s’agit de dépasser les querelles identitaires dé

pourvues de sens et de permettre à chacune et chacun d’être maître de son destin individuel en participant au destin collectif. Nous imaginons une information subtilisée aux mains des financiers et démocratisée. Nous voulons en finir avec une éducation mise au service de la rentabilité et des intérêts du capitalisme. Construire une culture commune exige un grand service public de l’éducation pour toutes et pour tous. Nous voulons sortir de la marchandisation des oeuvres de l’esprit, de l’avilissement de la culture, réduite au rang de passe-temps chargée de produire du temps de cerveau disponible. La culture peut donner dans la gravité ou dans la légèreté, mobiliser l’intelligence ou les émotions, prétendre à de grands bouleversements ou n’avoir aucune prétention, mais elle ne saurait être le résultat d’une production industrielle passée au tamis du marketing pour abaisser le peuple et le rendre docile. L’art, la culture, l’imaginaire sont des vecteurs essentiels des créations humaines, des moteurs de transformation sociale, des révélateurs de citoyenneté et d’humanité. Vecteur d’accomplissement de soi et de relations humaines, le sport doit être libéré de la domination de l’argent : la libre association et le bénévolat sont des facteurs essentiels pour y porter l’exigence de partage et de démocratie.

- La République ne se fige pas dans une image d’Epinal surannée en brandissant le drapeau français. Ce que porte le drapeau français, ce sont les valeurs généreuses de la Révolution, celle de « Ma France » de Jean Ferrat et nulle haine recuite. Nous ne nous sentons pas menacés par l’immigration. Elle est un drame pour celles et ceux qui en viennent

à quitter leur pays pour fuir la misère, dont bien souvent le pillage colonial est l’origine. Nous voulons résorber les inégalités planétaires. Mais il faut également lutter contre les marchands d’illusions, les passeurs et trafiquants qui rançonnent les migrants. Pour celles et ceux qui n’ont d’autre choix que de partir, le départ est une déchirure. L’arrivée ne doit pas en être une seconde. Nous voulons accueillir celles et ceux qui sont là, qui travaillent, leur donner des papiers et les mêmes droits. Notre patrie, c’est celle des droits de l’homme et de la femme.

- Nous combattons la misère qui détruit les vies humaines, et nous entendons faire admettre le droit essentiel de tout être humain à vivre pleinement et le droit d’être secouru par la solidarité nationale en cas de difficulté. Contre les politiques de seuil qui concentrent de faibles deniers publics sur la population la plus paupérisée, nous voulons retrouver le chemin d’une vraie protection sociale. Nous voulons permettre au travail social de renouer profondément avec sa raison d’être. Nous défendons un véritable droit au logement, soutenu par des politiques publiques volontaires.

- La dignité humaine est un droit qui doit être garanti jusqu’au bout de la vie. C’est pourquoi nous voulons refonder la protection sociale mise à mal par les directives européennes, les réformes régressives et les attaques des assurances privées. La protection sociale doit prendre en charge toutes les situations de handicap. Elle doit également prendre en charge la perte d’autonomie. Nous défendons l’obligation de combattre la douleur, cela demande de véritables moyens. Le développement des soins palliatifs est une exigence d’humanité, qui n’est pas compatible avec l’acharnement thérapeutique en fin de vie. Nous combattons enfin la marchandisation des corps sous toutes ses formes.

- Le respect de la dignité humaine s’impose même pour ceux qui enfreignent les lois. Opposants résolus à la peine de mort et à toute logique de vengeance, nous voulons sortir du tout carcéral, nous voulons des peines qui protègent mais aussi des peines qui permettent la réinsertion. Nous refusons de voir des hommes et des femmes enfermés dans leurs crimes ou leurs délits sans jamais pouvoir retrouver leur place dans la société. Nous savons que cela demande de la part de la société un accompagnement exigeant, mais nous savons aussi que cette attitude peut transformer des individus.

 

 

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