À l’abominable carnage du Hamas répond depuis plus d’un mois, au centuple, le carnage de l’armée d’occupation israélienne. Comble de la folie ! Elle transforme les hôpitaux en morgue, les écoles en lieux de terreur pour des enfants innocents placés au cœur de l’offensive guerrière du pouvoir d’extrême droite de Tel-Aviv. Les réalités sont glaçantes : destruction de plus de la moitié des habitations, contraction d’au moins 4 % en un mois des territoires palestiniens, arrestations de paysans et de travailleurs en Cisjordanie, répression féroce contre des travailleurs palestiniens employés en Israël, 11 000 civils tués dont la moitié est des enfants, déplacement de centaines de milliers d’habitants, économie étranglée par la pression israélienne. Et, le gouvernement radicalisé qui siège à Tel-Aviv n’a que faire des organisations internationales de solidarité telles que Médecins sans frontières, la Croix-Rouge ou des agences de l’Onu. Il n’hésite pas à tuer ses représentants et à les chasser de l’enclave car elles se font l’écho des massacres qu’interdit le droit à la guerre.
Ce sont les interventions et les révélations de ces Organisations non gouvernementales (ONG) qui, combinées au mouvement populaire de solidarité, digne, responsable, dans notre pays et en Europe ont conduit le président de la République à franchir le pas de la dénonciation de ces crimes et à exprimer pour la première fois, le 11 novembre, la demande d’un cessez-le-feu. Cette évolution est importante et peut constituer un point d’appui, bien au-delà de la France. Nous, nous en félicitons. Il est à cette heure le seul chef d’État des pays dit du « G7 » à parler ainsi. Le choix pour cette expression de La BBC n’est pas anodin.
Refusant absolument que d’autres chefs de gouvernement ou d’État de l’Occident capitaliste ne lui emboîtent le pas, Benjamin Netanyahu lui a brutalement répondu et, dès le lendemain, selon les services du président d’Israël, M. Herzog, Emmanuel Macron a cru bon de devoir tempérer en réaffirmant son « soutien sans équivoque » au gouvernement israélien.
Une course de vitesse est désormais engagée entre les partisans de la paix et de la solution à deux États, et le pouvoir colonialiste de Tel-Aviv. Cela se joue dans la mobilisation des peuples et des travailleurs par-delà les frontières ; car les intérêts en jeu sont immenses pour le grand capital international.
Pour sa part, en réitérant son opposition catégorique au cessez-le-feu, le président nord-américain encourage et soutient de toutes ses forces la puissance occupante israélienne. Le porte-parole de la Maison-Blanche pour la sécurité nationale a été jusqu’à confirmer que les États-Unis n’avaient pas de « ligne rouge » quant au nombre de victimes civiles à Gaza. C’est d’autant plus ignoble que cette stratégie n’a jusque-là aucunement permis de libérer les otages. Les seules libérations (d’otages binationaux étasuniens) intervenues ont été le fait de négociations par l’entremise probable du Qatar.
À l’hôpital Al-Shifa, refuge de milliers de citoyens palestiniens, il semblerait que, le 12 novembre, ce soit un missile expérimental lanceur de lames Hellfire R9X nord-américain qui a provoqué une mare de sang, tailladé et conduit à l’amputation de membres de nombreux blessés palestiniens, présents dans les locaux au moment du bombardement.
On peut désormais émettre l’hypothèse que les dirigeants israéliens et étasuniens poursuivent d’autres objectifs que la seule libération des otages et l’éradication du Hamas dont il est nécessaire de rappeler qu’il est leur « idiot utile » depuis plusieurs décennies.
La destruction des hôpitaux pour accélérer encore les déplacements des citoyens qui s’y abritent, ainsi que le personnel médical et les patients, la coupure en deux de l’enclave de Gaza accompagnée de la volonté de raser totalement Gaza-City, le faux-semblant des corridors dits « humanitaires » pour accélérer les mouvements de population et pousser les civils à la rue pour s’y entasser ou dans des abris de fortune au sud, sans eau, sans électricité, sans nourriture : toutes ces actions militaires sont conformes au document du ministère israélien du renseignement daté du 13 octobre dernier, révélé par le journal The Financial Times : préparer l’expulsion des Gazaouis hors de Gaza.
Ce que confirme le journal The Times of Israël qui présente ce document comme un appel « au transfert de la population civile dans des villes de tentes dans le nord du Sinaï et, dans un deuxième temps, à la construction de villes permanentes ». Le chercheur et spécialiste des enjeux du Moyen-Orient, Michael Young, membre du groupe de réflexions Carnegie Middle East Center, ajoute que l’ancien chef du Conseil national de sécurité israélien, Giora Eiland, a appelé, dans un article sur le site Ynet, à « créer des conditions pour que la vie à Gaza devienne insoutenable » et à provoquer « une crise humanitaire » pour que la « totalité de la population parte soit vers l’Égypte soit vers les pays du Golfe ».
Le Financial Times a également révélé que M. Netanyahu a « tenté de convaincre des dirigeants européens de faire pression sur l’Égypte pour qu’elle accepte d’accueillir des réfugiés de Gaza ». La France, l’Allemagne et le Royaume-Uni auraient repoussé cette demande. Ces informations permettent de mieux comprendre les visées du Premier ministre israélien lorsqu’il affirme que son pays doit reprendre pour un temps indéfini la sécurité de la bande de Gaza. Dès lors que ; en parallèle, la répression et la colonisation s’amplifient en Cisjordanie, c’est à la fois Gaza qu’on assassine et l’accélération par le pouvoir Israélien de l’enterrement du projet d’État palestinien.
Oui, une course de vitesse est donc engagée pour obtenir le cessez-le-feu, la libération des otages et amplifier les débats et les actions pour que le projet maintes fois réaffirmé par l’Onu et par de nombreux gouvernements soit mis en œuvre : un État israélien dont la sécurité est garantie, aux côtés d’un vrai État palestinien viable sur les bases définies en 1967.
Cela implique de penser pour la Palestine au chemin permettant au peuple de se doter d’institutions démocratiques et donc d’élections parlementaires et présidentielle. Celles-ci ne peuvent se tenir qu’avec la fin de l’occupation et de la décolonisation et la libération des prisonniers politiques au premier rang desquels Marwan Barghouti parce qu’il est capable de fédérer toutes les factions palestiniennes. C’est ce que refuse évidemment le pouvoir israélien.
Au nom même de la paix, de la sécurité pour le peuple israélien, de la liberté pour le peuple palestinien, il est d’intérêt général d’amplifier les mobilisations populaires et d’obtenir de nouveaux actes concrets de la part du président français et des services de la diplomatie européenne. Ainsi, et ainsi seulement, pourrons-nous nous réclamer à juste titre des principes de notre République : Liberté. Égalité. Fraternité.
Bien loin des salmigondis qu’on nous sert à longueur d’antennes et d’opérations politiciennes au moment même où droite, macronistes et extrême droite communient au Sénat dans la confection d’une loi d’essence raciste. Bien loin aussi de la saturation de l’espace public, toute la semaine dernière, au moyen de propos tendant à accréditer l’idée que tout immigrant serait un délinquant ou un terroriste. Bien loin donc desdits principes de la République brandis désormais comme un chiffon percé.
Cette offensive guerrière devra aussi être resituée dans le cadre des poly-crises qui secouent le monde dont les turbulences économiques à venir ne sont pas des moindres. Le projet du pouvoir israélien et des milieux d’affaires qui le soutiennent est bien de réaliser ce que l’on appelle le « grand Israël », afin d’étendre la sphère de domination et de rentabilité de leurs grandes entreprises en surexploitant les travailleurs israéliens et palestiniens. Ajoutons qu’au large de Gaza, se trouve l’une des plus importantes réserves gazières au monde.
De leur côté, les États-Unis considèrent Israël comme une base avancée de leurs intérêts au Proche et au Moyen-Orient. Ils soutiennent ardemment le gouvernement d’extrême droite israélienne, tout en essayant de refréner certaines de ses ardeurs militaristes face au mouvement de réprobation mondiale qui se développe et à la puissance des actions, aux États-Unis mêmes, contre l’injustice et le viol du droit international.
Ainsi, les dirigeants américains ont dû affirmer qu’ils étaient contre un nouveau blocus et une réduction du territoire de Gaza. Cependant, les USA font un retour en force au Proche-Orient avec notamment l’envoi de deux groupes de combat depuis leurs porte-avions et sous-marin nucléaire. Leur aviation de combat a bombardé, jeudi 9 novembre puis le 12 novembre des forces des corps des Gardiens de la révolution islamique d’Iran en Syrie. Le centre United State Naval Institute qualifie ce déploiement de « plus grande masse de navires américains dans la région depuis des décennies ».
Ces combats géopolitiques et géo-économiques replacent la Méditerranée au cœur de considérables enjeux mondiaux.
D’abord la cause palestinienne élargit encore les fractures entre l’Occident capitaliste emmené par les États-Unis et ce que l’on appelle désormais « le Sud global », en raison du constant « deux poids-deux mesures » dans l’application ou le non-respect du droit international.
Ensuite, à la guerre en Ukraine avec ses conséquences au Levant s’ajoutent les tensions entre la Turquie et la Grèce ainsi qu’avec Chypre, les effets des guerres en Irak, en Afghanistan et en Syrie, et les tensions à la frontière israélo-libanaise. L’Iran joue, depuis belle lurette, sa partition pour reconstituer son influence impériale, comme la Turquie d’Erdogan songe à l’Empire Ottoman ou la Russie de Poutine à l’Eurasie. Des tensions nouvelles et dramatiques extensions de la guerre doivent être empêchées par l’action unie des peuples et des gouvernements en soutien à L’Onu dont c’est la mission. La paix doit être inscrite à l’ordre du jour de l’agenda de grandes mobilisations internationales.
La cause palestinienne est donc une première grande question pour la sécurité d’Israël, une condition de la stabilisation de la région qui devrait être dénucléarisée, et pour la paix mondiale. Les forces de paix, les forces démocratiques et celles qui promeuvent le droit international doivent s’unir sur cet impérieux objectif.
Tous les peuples du monde, tous les travailleurs du monde en paient déjà un lourd prix. Les Palestiniens d’abord, les Israéliens dont l’économie risque d’être exsangue dans quelques semaines, le peuple nord-américain qui paie les efforts de guerre de son gouvernement en pression sur les rémunérations et remises en cause du projet de sécurité sociale, les peuples européens qui voient transférer de considérables sommes des budgets d’éducation et de santé vers l’armement alors que l’inflation les appauvrit chaque jour un peu plus.
Les peuples et les travailleurs du monde entier n’ont strictement rien à attendre de quelque visée impériale que ce soit, dont l’objectif est de permettre l’élargissement des sphères de domination des capitalismes nationaux. Ensemble, ils doivent s’unir, non pas derrière les droites et les extrêmes droits qui en sont les gardes du corps et les mandataires mais pour obtenir la justice et la paix.
Insistons ! Il ne s’agit pas ici d’une guerre de civilisation ni d’une guerre de religion, mais d’une guerre coloniale dont la victime est le peuple palestinien et, au-delà, notre humanité commune.
Tout être sensible, tout démocrate, tout citoyen du monde ne peut donc laisser assassiner les enfants de Gaza ni, donc, le projet national palestinien qui devra se réaliser en même temps que l’accès des Israéliens à une vie meilleure, plus sûre, dans un espace fraternel, solidaire et enfin en paix.
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