22 février 2023
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Nostalgie - Nâzim HIKMET
Cela fait cent ans
que je n’ai pas vu ton visage
que je n’ai pas passé mon bras
autour de ta taille
que je ne vois plus mon visage dans tes yeux
cela fait cent ans que je ne pose plus de question
à la lumière de ton esprit
que je n’ai pas touché à la chaleur de ton ventre.
Cela fait cent ans
qu’une femme m’attend
dans une ville.
Nous étions penchés sur la même branche,
sur la même branche
nous en sommes tombés, nous nous sommes quittés
entre nous tout un siècle
dans le temps et dans l’espace.
Cela fait cent ans que dans la pénombre
je cours derrière toi.
Tu es mon ivresse
De toi je n’ai point dessoûlé
Je ne puis dessoûler
Je ne veux point dessoûler
Ma tête lourde
Mes genoux écorchés
Mes vêtements crottés
Je vais vers ta lumière qui brille et qui s’éteint
en titubant, tombant, me relevant
Nâzim HIKMET
Nâzim Hikmet (1901, Salonique -1963, Moscou)
Poète turc, né à Salonique (aujourd'hui en Grèce), dans une vieille famille de dignitaires ottomans, Nâzim Hikmet a longtemps été exilé à l'étranger pour avoir été militant du Parti communiste de Turquie. Il est l'une des plus importantes figures de la littérature turque du xxe siècle, et l'un des premiers poètes turcs à utiliser des vers libres.
Révolté par l'occupation d'Istanbul par les puissances alliées après la première guerre mondiale, exalté par la lutte des paysans turcs pour l'indépendance et enthousiasmé par la révolution d'Octobre, il multiplie les allers-retours avec la Russie.
En 1922, il est à Moscou, où il s’inscrit à l’université des Peuples d’Orient pour étudier le marxisme. Il y rencontre les futuristes, se lie d’amitié avec Maïakovski, qui aura une grande influence sur ses poèmes inspirés de l’industrialisation et de la construction du socialisme en URSS, monte la garde devant le catafalque de Lénine. De retour en Turquie, il milite dans les rangs du Parti communiste turc clandestin, séjourne de nouveau à Moscou (1925-1928) et profite d’une amnistie pour rentrer au pays, où il publiera, jusqu’en 1932, cinq recueils de poèmes qui connaîtront un grand succès. Arrêté pour « complot contre l’État », il sera emprisonné à Bursa, d’abord jusqu’en 1935, puis de 1938 à 1950 pour avoir « incité la marine à l’insurrection ». Cette condamnation, prononcée au terme d’un long procès monté de toutes pièces, lui permettra de renouer avec la littérature populaire d’Anatolie au travers des détenus paysans qu’il rencontrera en prison.
En 1950, il entame une grève de la faim soutenue par un comité d’organisation international pour sa libération et, une fois la liberté recouvrée, quitte clandestinement la Turquie, laissant derrière lui son fils nouveau-né et son épouse. Il s’installe à Moscou et écrit des pièces de théâtre ainsi que des poèmes nostalgiques imprégnés de l’angoisse de la mort. Il parcourt le monde, faisant de nombreux séjours dans des villes européennes, asiatiques, africaines mais aussi à La Havane, pour défendre la cause de la paix : « Au cours de ma trente-sixième année, j’ai parcouru en six mois quatre mètres carrés de béton / Dans ma cinquante-neuvième année, j’ai volé de Prague à La Havane en dix-huit heures. » Dans sa soixante et unième année, il meurt d’une crise cardiaque, laissant un poème testament : « Enterrez-moi en Anatolie, dans un cimetière de village / Et si possible, un platane au-dessus de moi suffit. »
Après une longue période d’interdiction, ses livres sont de nouveau publiés en Turquie, mais la démarche qui a été faite par sa famille pour rapatrier sa dépouille n’a toujours pas abouti. Par contre, le gouvernement turc, après l’avoir persécuté tout au long de sa vie, le réhabilita en lui rendant à titre posthume la nationalité dont il avait été déchu en 1950.
Nazim Hikmet fut avant tout un grand novateur de la poésie turque contemporaine. Il s’exprima en vers libre, en faisant table rase des formes fixes traditionnelles. Sous l’influence du futurisme russe et de son avatar, le constructivisme, il chanta la nouvelle société, mais aussi le combat des hommes épris de justice sociale et de liberté. Il évolua plus tard vers une synthèse moderne de la tradition épique en composant "l’Épopée du cheikh Bedreddine" et "Paysages humains". Dans le premier ouvrage, il utilisa à merveille les sonorités de la poésie ottomane pour décrire une révolte paysanne du XVe siècle à caractère religieux et à visée communautaire, prônant l’abolition de la propriété privée et des discriminations religieuses.
Je suis communiste - Nâzim Hikmet
Je suis communiste.
Parce que je ne vois pas une meilleure économie au monde que le communisme.
Je suis communiste.
Parce que je souffre de voir les gens souffrir.
Je suis communiste.
Parce que je crois en l’utopie d’une société juste.
Je suis communiste.
Parce que chacun doit avoir ce dont il a besoin et donner ce qu’il peut.
Je suis communiste.
Parce que je pense que le bonheur est la solidarité humaine.
Je suis communiste.
Parce que je pense que toutes les personnes ont droit au logement, à la santé, à l’éducation, à l’emploi décent, à la retraite.
Je suis communiste.
Parce que je ne crois en aucun Dieu.
Je suis communiste.
Parce que personne n’a encore trouvé une meilleure idée.
Je suis communiste.
Parce que je crois aux êtres humains.
Je suis communiste.
Parce que j’espère qu’un jour toute l’humanité sera communiste.
Je suis communiste.
Parce que bon nombre des meilleures personnes dans le monde ont été et sont communistes.
Je suis communiste.
Parce que je déteste l’hypocrisie et que j’aime la vérité.
Je suis communiste.
Parce qu’il n’y a pas de distinction entre moi et les autres.
Je suis communiste.
Parce que je suis contre le marché libre.
Je suis communiste.
Parce que je veux me battre toute ma vie pour le bien de l’humanité.
Je suis communiste.
Parce que le peuple uni ne sera jamais vaincu.
Je suis communiste.
Parce que vous pouvez faire des erreurs, mais pas au point d’être un capitaliste.
Je suis communiste.
Parce que j’aime la vie et je me bats à tes côtés.
Je suis communiste.
Parce que très peu de gens sont communistes.
Je suis communiste.
Parce que certains disent être communiste et ne le sont pas.
Je suis communiste.
Parce que l’exploitation de l’homme par l’homme existe parce qu’il n’y a pas de communisme.
Je suis communiste.
Parce que mon esprit et mon cœur sont communistes.
Je suis communiste.
Parce que je suis important tous les jours.
Je suis communiste.
Parce que la coopération entre les peuples est la seule voie vers la paix entre les hommes.
Je suis communiste.
Parce que la responsabilité de tant de misère de l’humanité est celle de tous ceux qui ne sont pas communistes.
Je suis communiste.
Parce que je ne veux pas le pouvoir personnel, mais le pouvoir du peuple.
Je suis communiste.
Parce que personne n’a réussi à me convaincre que ce n’est pas le cas.
Nazim Hikmet
Source: article de 2013 de Nedim Gursel dans L'Humanité: https://www.humanite.fr/.../nazim-hikmet-je-n-ai-pas-ete...
Published by Section du Parti communiste du Pays de Morlaix
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