Désintox. Bonne nouvelle en apparence, la décrue des chiffres du chômage marque en réalité une explosion de l’emploi précaire et des radiations.
Voilà de quoi ravir le gouvernement et son obsession du plein-emploi. Selon la Dares, 6 134 100 personnes étaient inscrites à Pôle emploi au quatrième trimestre 2022, chiffre au plus bas depuis 2014. « Le nombre de demandeurs d’emploi sans aucune activité baisse de 112 000 personnes au T4 2022. Le plein-emploi, c’est aussi le bon emploi. Nous poursuivons notre mobilisation », s’est réjoui le ministre du Travail, Olivier Dussopt, sur Twitter. Pourtant, à y regarder de plus près, les statistiques peinent à confirmer cette bonne nouvelle.
Explosion du nombre de chômeurs en catégorie B
Les données de la Dares montrent avant tout que la large baisse du nombre des chômeurs de la catégorie A (n’ayant pas du tout travaillé durant le mois) est compensée par un impressionnant bond des inscrits en catégorie B (moins de 78 heures dans le mois). Avec 2 834 000 privés d’emploi dans cette première catégorie au quatrième trimestre 2022, le nombre d’inscrits a ainsi diminué de 3,8 % en un trimestre, et de 9,4 % en un an.
Le nombre de chômeurs en catégorie B, occupant des emplois très précaires, a lui explosé : il a augmenté de 8,8 % en un an, et de plus de 30 % si l’on se concentre exclusivement sur les personnes ayant travaillé entre 1 et 20 heures dans le mois.
Un transfert qui pourrait être en partie expliqué par un bug informatique, explique la CGT : lors de la réactualisation de leurs droits, certains chômeurs ont été forcés de déclarer 1 heure travaillée au minimum, même sans activité. Mais pas que. « Il y a une vraie volonté de Pôle emploi de servir la soupe du gouvernement. Par exemple, de nombreuses personnes ont été désinscrites car en arrêt maladie, alors qu’elles auraient pu être transférées dans la catégorie D », explique Pierre Garnodier, du comité CGT chômeurs et précaires.
La réforme de l’assurance-chômage alourdira encore la tendance
Si le gouvernement se targue de la baisse du taux de chômage, les personnes ayant quitté les statistiques pour cause de reprise d’un emploi déclaré sont de moins en moins nombreuses : leur nombre a chuté de 30,1 % entre le quatrième trimestre 2021 et le dernier trimestre 2022. « Aujourd’hui, ce n’est pas parce qu’on sort de Pôle emploi qu’on retrouve un boulot. La majorité des sorties s’explique parce que les gens ne peuvent pas recharger leurs droits et se retrouvent au RSA », fustige Pierre Garnodier.
Selon lui, la nouvelle réforme de l’assurance-chômage, qui entre en vigueur le 1er février, alourdira encore la tendance. En raccourcissant la durée d’indemnisation de 25 %, nombreux seront les privés d’emploi à disparaître des statistiques sans reprendre une activité.
Selon l’institut statistique, enfin, 52 900 personnes ont été tout bonnement radiées des listes de Pôle emploi. Bien plus qu’un seul accroissement du nombre de radiations (+ 2,3 % par rapport au trimestre précédent et + 16,5 % par rapport au dernier trimestre 2019), il s’agit tout simplement d’un record depuis la naissance de ces statistiques en 1996. Une « volonté » politique, pour Pierre Garnodier. « On peut être radié dès lors qu’on rate un appel téléphonique, c’est considéré comme une absence à un entretien », explique-t-il.
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