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23 septembre 2022 5 23 /09 /septembre /2022 05:36
Jin - Jiyan - Azadî  Femme - Vie - Liberté #JinaMahsaAmini  #Mahsa_Amini     #IranProtests2022

Jin - Jiyan - Azadî Femme - Vie - Liberté #JinaMahsaAmini #Mahsa_Amini #IranProtests2022

Mahsa Amini - Iran. Les femmes relèvent le défi de la liberté (L'Humanité, Nadjib Touaibia - Pierre Barbancey)
Mahsa Amini - Iran. Les femmes relèvent le défi de la liberté (L'Humanité, Nadjib Touaibia - Pierre Barbancey)
Mahsa Amini - Iran. Les femmes relèvent le défi de la liberté (L'Humanité, Nadjib Touaibia - Pierre Barbancey)
Iran. Les femmes relèvent le défi de la liberté
Publié le Jeudi 22 Septembre 2022 - L'Humanité
 

Elles dansent, ôtent leur voile, le jettent dans le feu et chantent :  « N’ayez pas peur, n’ayez pas peur, nous sommes tous ensemble !  »  La scène a lieu dans la ville de Sari, au nord de l’Iran… Le décès de la jeune Mahsa Amini, la semaine dernière, après son arrestation et un coma de trois jours, n’a pas fini d’ébranler la société iranienne.

D’un bout à l’autre du pays, la colère monte et la contestation prend de l’ampleur. Les manifestations se sont poursuivies pour la cinquième nuit consécutive, rapporte mercredi l’agence officielle Irma. Des hommes et des femmes – beaucoup d’entre elles étaient débarrassées de leur foulard – se sont rassemblés à Téhéran et dans d’autres grandes villes du pays, notamment à Mashhad (Nord-Est), Tabriz (Nord-Ouest), Rasht (Nord), Ispahan (Centre) et Kish (Sud), ajoute l’agence.

Iran. « Les jeunes filles n’obéissent plus, c’est super ! »

Sept jours après la mort de Mahsa Amini, la population exprime toujours son rejet de la République islamique. Toutes les villes du pays sont touchées. Le régime organise la répression. Naghmeh, pianiste à Téhéran, se confie à l’Humanité.

Publié le Jeudi 22 Septembre 2022 - L'Humanité

Naghmeh, 44 ans, pianiste à Téhéran, n’en revient toujours pas. L’autre soir, dans la capitale, alors qu’un rassemblement se formait, un feu a été allumé. Des dizaines de femmes comme elle, certaines plus jeunes, d’autres plus âgées, ont jeté leur foulard dans les flammes, un crépitement de joie dans les yeux. Ce qui n’était pas sans rappeler le Tchaharchanbé-Souri, la fête du Feu célébrée par les Iraniens à la fin de l’année et qui date du zoroastrisme. Le feu symbolise l’espérance d’un éclaircissement et d’un bonheur radieux pour l’année à venir. Naghmeh n’a pas été en reste. Elle aussi a brûlé son voile. Depuis plus de six jours maintenant, elle marche dans la rue la tête nue.

Des manifestations ont éclaté en Iran lorsque, le 16 septembre, l’annonce de la mort d’une jeune femme de 22 ans, Mahsa Amini, après son arrestation pour « port de vêtements inappropriés » par la police des mœurs, s’est répandue dans le pays comme une traînée de poudre. Cette brigade de la morale chargée de faire respecter un code vestimentaire pour les femmes est détestée. « La forme qui convient au gouvernement est un manteau assez long qui couvre les fesses et descend préférablement jusqu’aux genoux », précise à l’Humanité Naghmeh jointe par téléphone. « Avec, bien sûr, un foulard qui soit assez sévère et qui ne laisse pas entrevoir les cheveux. » Notre pianiste rapporte que les gens n’appellent plus cette unité Gasht-e Ershad (littéralement patrouille d’orientation) mais Ghatl-e Ershad (orientation du meurtre).

« J’ai été contrôlée plusieurs fois dans la rue, raconte Naghmeh. Soit ils viennent pour nous donner des “conseils” sur la façon de porter le foulard, soit ils nous embarquent. Il ne faut absolument pas monter dans leur voiture, sinon vous finissez au commissariat. » Une expérience qui lui est arrivée, il y a quelques années, et qui l’a marquée profondément. « C’est très, très violent quand on est là-bas. Soit on nous donne une amende très chère, soit on est enfermée pour une ou deux nuits. » Elle qualifie ça de « torture mentale ». Et d’expliquer : « Des policiers venaient nous menacer de nous agresser violemment, nous harceler physiquement. Ils ne le disaient pas directement mais leur regard et leurs paroles signifiaient “viol”. Une fois, je les ai vu battre une jeune femme avec une ceinture. Ils lui ont donné près de soixante-dix coups. »

Une vague de contestation inédite depuis 2019

Pas étonnant dans ces conditions que le décès d’Amini ait déclenché une énorme colère dans la population, les plus importantes manifestations de ce type en Iran depuis 2019. La plupart ont été concentrées dans les régions du nord-ouest du pays, peuplées de Kurdes, mais se sont étendues à la capitale et à au moins 50 villes et villages à travers le pays, la police utilisant la force pour disperser les manifestants. Dans le Nord-Est, ces derniers criaient : « Nous mourrons, nous mourrons, mais nous récupérerons l’Iran ! » près d’un poste de police incendié, comme l’a montré une vidéo publiée sur un compte Twitter. Les manifestants ont également exprimé leur colère contre le guide suprême, l’ayatollah Ali Khamenei. « Mojtaba, puissiez-vous mourir et ne pas devenir le guide suprême ! » a scandé un groupe à Téhéran, faisant référence au fils de Khamenei, qui, selon certains, pourrait succéder à son père au sommet de l’establishment politique iranien.

«J’ai vu la police des mœurs battre une femme avec une ceinture. Ils lui ont donné près de soixante-dix coups.» Naghmeh, pianiste à Téhéran

Le pouvoir a lancé la répression en tentant de tuer dans l’œuf les protestations. Sans VPN, impossible d’utiliser WhatsApp ou Instagram. Niloufar Hamedi, journaliste du journal progressiste Shargh, a été arrêtée jeudi pour avoir twitté que la grande mère de Mahsa Amini cherchait sa petite-fille en pleurant et psalmodiant en langue kurde. Selon une ONG, 31 personnes auraient déjà été tuées alors que le commandement des pasdarans (gardiens de la révolution) a publié une déclaration remerciant les forces de police qui répriment les manifestations ! Mais la colère est forte. Selon Hamshahri, le journal de la mairie de Téhéran, 3 bassidjis (miliciens prorégime) ont trouvé la mort à Tabriz, Qazvin et Mashhad.

Des personnalités publiques, connues en Iran, se sont exprimées en faveur des manifestations. Le musicien Homayoun Shajarian a écrit sur Instagram : « Aucun d’entre nous n’est heureux en ces jours amers. Y a-t-il une volonté de la part des autorités de répondre raisonnablement aux exigences d’une nation honorable et noble ? Si oui, alors pourquoi tant de retards ? » Mohsen Chavoshi, un chanteur pop, a publié un message sur la même plateforme : « J’annonce par la présente, en pleine conscience et en toute santé, qu’à partir d’aujourd’hui, je vais arrêter toute coopération avec le ministère de la Culture et de l’Orientation islamique… et continuerai à chanter pour le peuple. Le silence n’est plus acceptable. » Mehdi Mahdavikia, un ancien footballeur de l’équipe nationale iranienne qui officie maintenant à Hamburg, a dénoncé la violence des forces de sécurité : « Vous ferez en sorte que les gens vous haïssent davantage, a-t-il écrit. Battre les femmes ? Honte à vous. »

Grande actrice iranienne, Katayoun Riahi a publié une photo d’elle sur Instagram, sans foulard. Lors d’une manifestation, la comédienne Shabnam Farshadjo a enlevé son hidjab et s’est adressée aux dirigeants de la République islamique, en disant : « Je déteste vos actions et votre comportement  ! »

Fait assez rare, 200 universitaires en poste en Iran ont lancé un appel dans lequel ils affirment défendre « le droit des femmes de notre pays de choisir librement de s’habiller » et expriment leur « opposition au processus d’humiliation et de torture systématique des femmes par le port obligatoire du hidjab ».

De quoi réjouir Naghmeh. « Les jeunes générations ne se couvrent plus autant qu’on le faisait. Ça, c’est vraiment super. Elles n’obéissent plus ! » Sans son foulard, elle sait ce qu’elle risque. « Bien sûr, s’ils nous attrapent, ils nous arrêtent. Mais on est arrivées à un point où on s’en fout. » Il est des fois où les situations atteignent des points de non-retour.

« La rupture entre le régime et la population est totale »

Behrouz Farahany met en regard les manifestations qui se déroulent actuellement après la mort de Mahsa Amini et le mouvement revendicatif iranien.

Publié le Vendredi 23 Septembre 2022 - L'Humanité

La réaction de la population iranienne vous a-t-elle étonné ?

On s’y attendait. Cela fait plus de deux mois maintenant que cette police des mœurs s’en prend aux femmes de façon violente, notamment parce qu’il y a eu la Journée mondiale du hidjab islamique, décrétée par le pouvoir en Iran. La police des mœurs avait alors multiplié les rondes de nuit. On sentait donc qu’une pression sur les femmes était en train de monter. Et, étant donné la situation économique et sociale, on s’attendait à une explosion. La mort en détention de Mahsa Amini, la semaine dernière, est la goutte d’eau qui a fait déborder le vase. Toutes les villes d’Iran sont en ébullition. C’est une répétition de ce qui s’est passé en 2019.

Dans quel contexte économique et social ces protestations éclatent-elles ?

Il s’agit d’un des pires moments pour le régime islamique. Celui-ci avait commandé des sondages sur le regard des Iraniens sur le pouvoir en place. Ces résultats ont fuité. 13 % seulement de la population lui sont favorables. Tout le reste condamne le régime et, parmi eux, plus d’une moitié pense qu’il faut même le renverser ! Depuis son avènement, en 1979, la base sociale n’a jamais été aussi étroite. Chaque fois, ils ont réussi à encadrer le mécontentement par des manœuvres ou la mise en avant d’un camp dit réformateur comme avec le président Khatami. Ils avaient une assise sociale assez considérable. Mais là, la coupure est nette. Si vous regardez le nombre d’organes de répression et de propagande idéologique qui existent en Iran, ces 13 % sont les gens qui travaillent pour le régime et leur famille. En dehors de ceux-là, qui vont lui rester fidèles car il les nourrit, tout le reste est contre.

L’inflation est galopante, parfois à trois chiffres. Et cela touche les produits de première nécessité, ce que les gens doivent acheter tous les jours : le pain, le lait, les fruits, les légumes… La viande devient une denrée de luxe. La situation économique est terrible. L’Iran est un pays où les politiques néolibérales et les privatisations se poursuivent d’année en année, produisant fermetures d’usines, licenciements, chômage. Ces difficultés sont exacerbées par la continuation des sanctions américaines. Il y a peut-être 5 à 6 % de la population qui profitent de ce régime alors que les affaires de fraude et de corruption ne cessent pas. Les pasdarans (gardiens de la révolution) utilisent les canaux officiels pour faire de la contrebande. Au final, les Iraniens sont révoltés contre le régime. Il n’est pas étonnant que, depuis six jours, on entende des slogans comme « Liberté, pain, travail », « Mort à Khamenei »… La rupture entre le régime et la population est totale.

Ce mouvement peut-il aboutir à quelque chose ?

Il y a régulièrement en Iran des explosions comme celle à laquelle on assiste aujourd’hui. Mais, entre ces explosions, il y a un mouvement de revendication, de protestation, de grève des ouvriers et des salariés qui n’a jamais cessé. L’an dernier, on a dénombré 4 122 actions de protestation, de grève et de sit-in, ce qui est un record sur les quarante-trois années du régime islamique. En août 2020, on a assisté à un grand mouvement des ouvriers de la pétrochimie. Plus de 100 000 salariés ont participé aux arrêts de travail. Le mouvement revendicatif en Iran est un fleuve continu, ponctué d’explosions. Le fer de lance d’un mouvement contre le régime est le mouvement revendicatif des ouvriers et des salariés.

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