15 millions de nos concitoyens sont menacés par la crise du logement et 4 millions en souffrent directement.
Comme nous le rappelle le 27ème rapport de la Fondation Abbé-Pierre sur le mal logement, près de 15 millions de nos concitoyens sont menacés par la crise du logement et 4 millions en souffrent directement.
Cette crise, déjà paroxystique, se conjugue aujourd’hui avec d’autres facteurs comme la hausse généralisée des prix et les conséquences d’un contexte sanitaire qui a conduit à la précarisation de nombre de nos concitoyens. Si l’inflation est galopante puisqu’elle est estimée par la commission européenne à hauteur de 6%, les salaires et les aides sociales (hors dispositifs particuliers et ponctuels liés à la crise COVID) stagnent, conduisant à une forte réduction du pouvoir d’achat de nos concitoyens.
Le logement, qui reste le premier poste de dépense des ménages et plus particulièrement de leurs dépenses pré-engagées, participe à cet étranglement financier des plus fragiles. France Stratégie, dans une note d’analyse récemment publiée1(*), a mis en évidence la hausse de cinq points de ces dépenses entre 2001 et 2017, passant de 27 à 32 % et le poids toujours plus important des dépenses de logement qui en représentent 68 %. Au-delà de ces chiffres, l’étude met en évidence l’inégalité croissante entre ménages pauvres et aisés (désormais l’écart est de 13 points : 41 %/28 %), entre ménages selon qu’ils sont locataires ou déjà propriétaires dégagés d’emprunts.
Dans le même esprit, le dernier rapport annuel de la Fondation Abbé-Pierre pointe une croissance des prix des logements de 154 % depuis 20 ans. Selon une étude de l’ordre des notaires d’avril 2020, le prix des terrains a presque triplé, avec une hausse de 200%. Il est ainsi de plus en plus difficile de se loger en France : 12,8 années de revenu disponible sont nécessaires pour acquérir un logement de 100 mètres carrés pour 7,8 années en 2000.
Cette tendance lourde du marché s’exprime notamment au travers de l’augmentation des loyers et des charges notamment celles dues aux fluides, l’augmentation des coûts de construction mais encore celle de la charge foncière dans les prix de l’immobilier.
Il ne saurait donc y avoir de politique sérieuse en faveur du pouvoir d’achat sans mesures immédiates pour alléger les dépenses de logement des ménages, mais aussi plus structurelles en faveur de la construction de logements abordables et sociaux réellement adaptés aux revenus des foyers, de régulation des prix en rompant avec les logiques de rente foncière et immobilière qui ne bénéficient qu’à une partie infime de la population tout en pénalisant son immense majorité.
Les politiques menées lors du dernier quinquennat n’ont permis ni de créer un bouclier social pour les plus fragiles ni d’engager une politique du logement qui réponde aux enjeux du droit au logement pour tous. Il s’agit pourtant d’un droit constitutionnellement reconnu mais qui pâtit toujours d’un arbitrage défavorable par rapport au droit à la propriété également garanti par la constitution.
Les seules logiques qui ont été mises en oeuvre ont été des logiques de rabot budgétaire au travers de la réduction drastique des aides à la personne avec une économie de 15 milliards d’euros sur les aides aux logements dont 4 milliards sur la seule année 2022. Selon l’Institut des politiques publiques (IPP), les mesures prises au cours du quinquennat ont ainsi abouti à diminuer le niveau de vie des 5 % les plus pauvres de 39 euros par an, mettant à mal les théories de ruissellement.
Cette baisse des aides à la personne s’est accompagnée d’une quasi-suppression des aides à la pierre avec la suppression du financement par l’État du Fonds National des Aides à la Pierre (FNAP).
Ainsi, les aides publiques au secteur du logement, exprimées en pourcentage de PIB, diminuent depuis 10 ans et n’ont jamais été aussi basses (1,6 % du PIB en 2020, soit 38,5 milliards d’euros) alors que les recettes fiscales que rapporte le logement à l’État ont plus que doublé en 20 ans (79 milliards d’euros).
Parallèlement, une offensive majeure a été menée contre le logement public au travers de la Réduction Loyer Solidarité (RLS), dont les effets délétères sur les capacités des organismes HLM ont largement été décriés par la Cour des Comptes dans un référé du 22 décembre 2020, publié le 4 mars 20212(*). La loi ELAN a par ailleurs ouvert la voie à la financiarisation de ce secteur et la privatisation massive du parc HLM.
Tout cela conduit à une réduction de la production de logements sociaux passant sous la barre des 100 000 logements annuellement mis en chantier depuis 2017. Pour l’année 2021, en prenant les logements réellement livrés, les chiffres dépassent à peine les 80 000 logements, alors même que la ministre déléguée au Logement, Emmanuelle Wargon, avait fixé début 2021 un objectif de 250.000 logements sociaux construits dans les deux ans.
Le choc de l’offre promis ne s’est donc pas produit. À l’inverse, la liste des demandeurs de logements sociaux s’est allongée et concerne aujourd’hui 2,2 millions de personnes.
Ce gouvernement, malgré les initiatives sur le climat comme la convention citoyenne ou la création d’un Haut conseil pour le Climat, n’a pas plus répondu aux enjeux de transition écologique du secteur. Tant le soutien aux filières décarbonées que les aides à la rénovation des logements n’ont pas été suffisants pour atteindre les objectifs fixés. Pourtant, selon l’observatoire de l’immobilier durable dans une note parue cette année, le secteur du bâtiment représente en France près de 45% de la consommation d’énergie finale et génère plus de 25% des émissions de gaz à effets de serre, dont environ deux tiers proviennent des logements particuliers. La politique de lutte contre les passoires thermiques devrait ainsi constituer une priorité puisqu’aujourd’hui en France, près de 5 millions de logements sont mal isolés et 17 % des Français déclarent avoir froid chez eux.
La question de la maîtrise foncière est également fondamentale puisque l’application de l’objectif « Zéro Artificialisation Nette » (ZAN) sans régulation publique, et dans un contexte de rareté du foncier, va mécaniquement engager un renchérissement des prix et donc rendre l’accès au logement plus difficile. En ce sens, il convient non seulement d’engager une forme de blocage des prix mais également conforter l’utilité publique du foncier public disponible et les objectifs en termes de mixité sociale.
La construction de la ville, voire l’élaboration d’un véritable droit à la ville, suppose donc de donner les moyens à la puissance publique de maîtriser les conditions de la production urbaine et de garantir la préservation de l’intérêt public général.
Il y a parallèlement besoin de créer de nouveaux droits pour les locataires afin de réguler les prix et d’inventer de nouveaux outils. Plus les droits des locataires sont puissants et plus les possibilités de profits pour les propriétaires sont limitées. Il convient donc de non seulement renforcer les droits des locataires mais également de renforcer les outils existants notamment au travers de l’encadrement des loyers.
Pour faire face à l’ensemble de ces enjeux qui sont intrinsèquement liés et afin de garantir l’accès à des logements abordables, la présente proposition de loi présente toute une série de mesures à plus ou moins long terme afin de renforcer le pouvoir d’achat dans ce secteur et de favoriser l’accès au logement pour tous.
Pour ce faire, le titre premier propose des mesures d’urgence.
L’article premier propose une mesure de blocage des loyers tout en prévoyant une compensation par l’État auprès des bailleurs sociaux. Le coût pour le parc public d’une telle mesure est estimé à 200 millions d’euros. La question du blocage des loyers est une demande forte de la part des associations de défense des locataires afin de limiter l’envolée des loyers et de préserver la capacité financière des ménages.
L’article deux engage une révision immédiate des APL afin de tenir compte non seulement de l’évolution de l’indice de référence des loyers (IRL), mais également de l’inflation afin de donner un coup de pouce à ces aides au logement. En considérant que l’inflation se situe aux alentours de 5%, cumulée à l’IRL dont la hausse a été définie au premier trimestre 2022 à 2,48%, une telle mesure permettrait d’augmenter dès le mois d’octobre 2022 de près de 8% ces aides.
Par ailleurs, cet article revient sur la désindexation des APL qui a conduit à une perte importante de solvabilité pour ces bénéficiaires. D’autres mesures devront par la suite être prises. Elles relèvent principalement du pouvoir règlementaire. Il s’agit, premièrement, de supprimer la ponction aveugle et injuste de 5 euros de l’ensemble des aides au logement annoncée en septembre 2017 qui représente une économie par an de 400 millions d’euros. Il s’agit, enfin, de revenir sur la réforme de la contemporanéisation qui a permis aux pouvoirs publics de faire une économie d’un milliard d’euros sans que celle-ci ne soit redistribuée.
Bien entendu, si la présente proposition de loi ne devait être adoptée qu’après le 1er octobre 2022, le dispositif de cet article 2 impliquerait de procéder sans délai au calcul rétroactif des aides concernées et, après reconstitution des montants qu’ils auraient dû percevoir à compter de cette date, au versement aux bénéficiaires de la différence entre ces montants et ceux qui leurs auront été versés
Les articles trois et quatre permettent premièrement le doublement du plafond du chèque énergie aujourd’hui de 100 euros, somme qui ne correspond pas aux hausses massives des coûts de l’énergie et un doublement du « forfait charge » pour les locataires bénéficiaires des APL pour les mêmes raisons. Le doublement du chèque énergie représenterait un coût de 1.2 milliard d’euros.
Bien entendu, si la présente proposition ne devait être adoptée qu’après le 1er octobre 2022, le dispositif de ces articles impliquerait de procéder sans délai au calcul rétroactif des aides concernées et, après reconstitution des montants qu’ils auraient dû percevoir à compter de cette date, versement aux bénéficiaires de la différence entre ces montants et ceux qui leurs auront été versés.
Par ailleurs, les prochaines lois de finances devront permettre un rehaussement des crédits affectés par l’État aux fonds de solidarité logement afin de faire face aux conséquences de la crise sociale que traverse notre pays.
Le titre II de cette proposition de loi traite des aides d’accès au logement
Les aides au logement ont subi un traitement de choc durant le précédent quinquennat faisant l’objet de coupes drastiques. Pourtant, il s’agit d’un outil de solvabilisation essentiel et d’un amortisseur de crise, un outil précieux alors que nos sociétés semblent si fragiles face aux aléas planétaires.
Il s’agit également d’un outil de lutte contre la pauvreté qui concerne 20 % des ménages français, soit 6,6 millions de ménages. Parmi les bénéficiaires, 96 % des ménages disposent d’un revenu imposable brut inférieur à deux SMIC et 70 % inférieur à un SMIC. L’aide moyenne est de 218 euros par mois.
Dans son Rapport public annuel 2020, la Cour des Comptes souligne que les APL jouent un rôle central dans la redistribution monétaire au profit des plus modestes, nous faisons le choix au travers du présent titre de corriger cette grave faute économique et sociale et donc de les renforcer.
L’article cinq engage la suppression du mois de carence pour les bénéficiaires des aides au logement. Déjà proposée dans le cadre de la proposition de notre groupe examinée en 2020, le coût de cette mesure avait été évalué entre 240 et 260 millions d’euros en année pleine sur la base d’1,2 million de nouveaux bénéficiaires chaque année. La rapporteure avait indiqué que le gouvernement avait justifié ce mois de carence comme une disposition facilitant le travail des organismes payeurs en leur laissant plus de temps pour calculer et verser les APL. Pour autant, cette mesure apparaît essentiellement comme une économie budgétaire qui frappe les personnes les plus fragiles ; la rapporteure soulignait par ailleurs que la simplification invoquée était en réalité toute relative au regard des multiples exceptions.
L’article six engage une modification pérenne du calcul du « forfait charge » pour l’adosser, non à l’IRL mais directement à l’inflation afin de prendre en compte l’évolution réelle des coûts, notamment des fluides et des dépenses des ménages.
Les articles 7 et 8 traitent de l’accession sociale à la propriété.
L’article 7 engage le rétablissement des APL Accession puisqu’il s’agissait avant sa suppression dans la loi de finances pour 2018 de l’un des principaux outils en faveur de l’accession sociale à la propriété. Pour promouvoir une réelle mobilité dans les parcours résidentiels, il est nécessaire de réintroduire une telle aide.
L’article 8 généralise les primes à l’accession sociale afin d’aider concrètement les ménages pénalisés par les restrictions d’accès au crédit.
Le titre III renforce l’encadrement des loyers
L’encadrement des loyers est un outil utile pour limiter la flambée des loyers.
Ce dispositif répond à la volonté des collectivités de disposer d’une réglementation visant, d’une part, à contenir la hausse des loyers et éviter des augmentations excessives sur des territoires au marché locatif privé particulièrement tendu et, d’autre part, à préserver l’accès au logement des ménages de la classe moyenne afin de contribuer au maintien de la mixité sociale en zone tendue.
Après un destin tumultueux, instauré en 2014 puis censuré par un tribunal administratif avant d’être validé par le Conseil d’État puis réinstauré dans la loi ELAN sous la forme d’une expérimentation, ce dispositif a fait lors de son application la démonstration de son utilité.
La rente locative ne peut être sans limite et les locataires prisonniers de la volonté des bailleurs, souvent multipropriétaires, de tirer un maximum de profit de cette forme de captivité.
Pour autant, les auteurs de cette proposition de loi estiment que ce dispositif doit évoluer afin de se généraliser mais également d’être plus efficient par l’instauration de sanctions. Par ailleurs, ce dispositif ne saurait se contenter d’accompagner la hausse des loyers mais doit également engager un encadrement à la baisse puisqu’aujourd’hui les loyers sont bloqués à un niveau excessif qui ne permet pas de garantir le droit au logement dans des conditions économiquement acceptables.
Les articles 9 et 10 définissent des règles concernant les loyers à la relocation à la fois dans les zones où se pratique l’encadrement des loyers et dans le reste du territoire.
Là où n’existe pas d’encadrement des loyers, le loyer à la relocation ne devra pas être supérieur au loyer fixé par référence aux loyers habituellement constatés dans le voisinage.
Là où les collectivités auront fait le choix de l’encadrement des loyers, les loyers à la relocation ne pourront pas dépasser le loyer de référence.
Par ailleurs, l’article 10 prévoit également de pérenniser l’expérimentation actuellement prévue à l’article 140 de la loi du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique (dite loi ELAN). Le présent article tend également à majorer les sanctions. En effet, le montant de l’amende administrative, encourue en cas de non-respect des dispositions relatives à l’encadrement des loyers en cas de dépassement du loyer de référence majoré, doit être suffisamment dissuasif au regard du gain potentiel espéré par ce dernier sur des territoires au prix au m² à la location élevée.
En ce sens, il est proposé de doubler chacun des deux plafonds des amendes encourues, soit une évolution de 5 000 à 10 000 € pour les personnes physiques et de 15 000 à 30 000 € pour les personnes morales.
Couplée à des modalités de calcul des amendes définies localement proportionnées aux manquements constatés, l’augmentation des plafonds permettra de renforcer le caractère dissuasif au regard des sanctions encourues.
L’article 11 tend à faire baisser le niveau des loyers. En effet, en accord avec l’esprit de la loi ALUR qui a initialement prévu ce dispositif, cet article supprime, sauf si la collectivité en fait la demande expresse et durant une période transitoire de cinq ans, la possibilité d’instaurer un loyer de référence majoré. L’encadrement des loyers, dans ce cadre, s’entend donc comme un encadrement à la baisse puisque faute de loyer de référence majoré, le niveau des loyers et donc la définition du loyer de référence se fera tendanciellement à la baisse.
Avec l’article 12, les auteurs de cette proposition proposent une définition du complément de loyer. Depuis la loi ALUR, ce complément a fait l’objet d’échanges nourris et de jurisprudences qui viennent pallier une définition imprécise tant pour les propriétaires que pour les locataires. Sur certains territoires, les commissions départementales de conciliation signalent une augmentation des saisines relatives à la contestation du complément de loyer, ce dernier pouvant être utilisé par les propriétaires pour atteindre un niveau de loyer supérieur à celui permis dans le cadre du dispositif d’encadrement des loyers, hors charges, tout en paraissant respecter le loyer de référence majoré.
Dans ce contexte, il est proposé de compléter la définition en s’inspirant d’exemples rencontrés sur le terrain notamment concernant l’existence d’équipements ou de matériaux luxueux, d’un extérieur (terrasse ou jardin), d’un espace complémentaire (parking, grande cave, sous-sol) et qui le distingue des logements de même catégorie situés dans le même secteur géographique.
La précision de la définition du complément de loyer permettra également d’accompagner les propriétaires de bonne foi ainsi que les locataires dans l’exercice de leurs droits. Les relations entre propriétaires et locataires sur ce sujet s’en trouveront apaisées.
L’article 13, enfin, propose la suppression de la possibilité de pratiquer des compléments de loyers lorsque le logement en question relève des logements de classe énergétique F et G. Lorsqu’il s’agit de tels logements, le présent article propose également de bloquer les loyers pratiqués au loyer médian minoré afin d’encourager les bailleurs à réaliser les travaux énergétiques permettant de sortir du statut de passoire thermique.
Le titre IV, par un article unique, prévoit la création d’un observatoire des prix et des marges dans le secteur de l’immobilier.
Les auteurs de cette proposition de loi considèrent ainsi qu’il convient d’agir efficacement pour que soit assurée la transparence des prix des matériaux, des coûts et marges sur l’ensemble de la chaîne du secteur du bâtiment afin de garantir un juste effort et d’éviter les éventuels excès dans la formation des prix des travaux. En effet, à l’image de ce qui se pratique dans le secteur de l’agriculture, la transparence doit se renforcer sur la formation des prix et coûts mais également sur les marges des acteurs de l’immobilier. Ces données seront des éléments utiles à la formation des politiques publiques en la matière. Les auteurs de cette proposition de loi renvoient la composition et le fonctionnement de cet observatoire à un décret.
Le titre V de la proposition de loi engage, sur un plus long terme, la lutte contre la spéculation et celle contre la rente foncière et immobilière.
L’investissement dans la pierre a toujours été considéré comme le plus rentable. La forte attractivité des investissements dans ce secteur conduit pourtant à une pression toujours plus forte sur les loyers ainsi que sur les prix de l’immobilier. La rareté du foncier disponible en zone tendue a renforcé ces phénomènes spéculatifs qui conduisent, en outre, à éloigner toujours plus loin du centre les personnes les plus modestes et les plus fragiles.
Par ailleurs, la sociologie des bailleurs et des propriétaires est intéressante à étudier pour voir à qui profite cette rente. Dans son étude « France portrait social », publiée en novembre 2021, l’Insee pointe la forte concentration du patrimoine immobilier dans notre pays. En France, en 2017, 24 % des multipropriétaires détenaient 68 % des logements possédés par des particuliers. Les ménages propriétaires de trois logements ou plus (11 % des ménages) possédaient quant à eux près de la moitié du parc (46 %). Ces chiffres traduisent le creusement des inégalités de patrimoine. Selon Alain Trannoy, directeur d’étude à l’École des hautes études en sciences sociales de Marseille, « ces chiffres prouvent que la richesse immobilière est très concentrée en France. Et que la hausse des prix de l’immobilier depuis trente ans a bénéficié aux ménages déjà propriétaires, qui ont pu continuer à investir, alors que la primo-accession est de plus en plus difficile ». Jean-Baptiste Eyraud, porte-parole du Droit au logement (DAL) conclut ainsi que « le mythe du petit propriétaire se lézarde ».
Au regard de ces données, les auteurs de cette proposition de loi ont considéré qu’il convenait d’agir non seulement contre les phénomènes spéculatifs mais également qu’il fallait revoir les dispositifs fiscaux qui encouragent la rente immobilière, véritable obstacle au droit au logement pour tous.
L’article 15 permet l’instauration d’un prix plafond pour les transactions foncières et immobilières. Il prévoit ainsi que pour chacune des zones d’urbanisation continue de plus de 50 000 habitants où il existe un déséquilibre marqué entre l’offre et la demande de logements, entraînant des difficultés sérieuses d’accès au logement sur l’ensemble du parc résidentiel existant qui se caractérisent notamment par le niveau élevé des loyers, le niveau élevé des prix d’acquisition des logements anciens ou le nombre élevé de demandes de logement par rapport au nombre d’emménagements annuels dans le parc locatif social, un décret en Conseil d’État, pris après avis de la Commission nationale de concertation, fixe annuellement le montant maximum des prix d’acquisition foncière et immobilière exprimée par mètre carré. Ce mécanisme existe déjà pour les loyers, il est ici étendu aux transactions immobilières afin de mettre un coup d’arrêt à la hausse exponentielle du niveau des transactions et à la spéculation.
L’article 16 traite du droit de préemption, outil majeur, de maîtrise du développement urbain des collectivités. Afin de permettre aux élus d’assurer un développement harmonieux de leur territoire, il est ici prévu d’élargir les possibilités de recours au Droit de Préemption Urbain (DPU) à la lutte contre la spéculation foncière et immobilière, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui. Par cet article, les auteurs de cette proposition de loi souhaitent également élargir le recours au droit de préemption urbain pour lutter contre les marchands de sommeil en permettant d’y recourir sur les secteurs concernés afin de combattre la prolifération des passoires thermiques.
L’article 17 s’attache aux organismes sociaux afin de limiter le recours aux Ventes en l’état futur d’achèvement (VEFA) dans leurs programmes. En effet, les auteurs de cette proposition de loi considèrent que le recours massif aux VEFA a pour conséquence notable de majorer les coûts d’achat pour les organismes HLM.
L’article 18 reprend l’idée d’une contribution de solidarité urbaine. Le principe d’une contribution de solidarité urbaine a ainsi été proposé par la Fondation Abbeì-Pierre dans son « contrat social du logement ». Cette contribution permettrait, en prélevant une ressource assise sur les survalorisations immobilières des quartiers seìgreìgueìs en Île-de-France, de conforter les ressources de l’État affectées aÌ la production d’une offre de logements socialement accessibles au plus grand nombre. Cette fiscalité consiste aÌ utiliser la ségrégation par les prix pour mieux la combattre, aÌ taxer les mécanismes de ségrégation. Le seuil retenu est ici de 10 000 euros au mètre carré, sachant que la moyenne des transactions aÌ Paris en 2017 est de 8 450€/m². Ce dispositif a donc des effets fortement ciblés et revient aÌ taxer seulement les ventes les plus chères.
L’article 19 renforce la surtaxe sur les plus-values. Les auteurs de cette proposition de loi proposent ainsi que soit majorée la taxe sur les plus-values excessives telles que définies par le code général des impôts. Ils proposent que le taux de la majoration soit augmenté de 2% à partir de 150 000 euros de plus-value. Cette augmentation du prélèvement permettra ainsi, puisque le produit de cette taxe est affecté au Fonds National des Aides au Logement (FNAL), d’engager en parallèle le financement du rehaussement utile et attendu des aides au logement.
L’article 20 s’attaque au phénomène de la vacance des logements. En février 2021, les ministres chargées de la ville et du logement ont lancé un plan national pour inciter les propriétaires de logements vides en zone tendue à les louer. L’objectif poursuivi est de remettre sur le marché environ 200 000 logements, sur les plus de 3 millions de logements vides que compte notre pays. Pour les auteurs de cette proposition de loi, il est nécessaire, comme le suggère la Convention citoyenne pour le climat, d’une part, de faciliter la réquisition de ces logements et d’autre part, d’inciter plus fortement leurs propriétaires à les occuper, les vendre ou les louer. Les taux de la taxe sur les logements vacants sont à cet égard insuffisamment incitatifs. C’est pourquoi, cet article propose de porter le taux de la taxe à 50 % la première année d’imposition et à 100% de la valeur locative des logements la deuxième année.
L’article 21 prévoit un meilleur contrôle des aides fiscales à l’investissement locatif par l’instauration d’un mécanisme de contrôle systématique par les services fiscaux. Ces contrôles doivent permettre de vérifier que les conditions pour bénéficier des réductions fiscales sont bien réunies en faisant notamment l’inventaire des loyers pratiqués. Sur ce sujet, encore, il y a besoin de renforcer la transparence et garantir le bon usage de l’argent public alors que les niches fiscales pèsent pour plus de 2 milliards d’euros dans les finances publiques. Dès 2018, la Cour des Comptes avait alerté sur le mauvais usage de ces incitations fiscales. Elle estimait ainsi que « les avantages fiscaux allégeant l’impôt sur le revenu des particuliers qui achètent, construisent ou réhabilitent des logements et s’engagent en contrepartie à les louer représentaient 1,7 Md€ de dépenses fiscales en 2015, en hausse continue depuis 2009. L’impact économique de ces aides s’avère toutefois limité et leur efficacité en termes d’accroissement du nombre de logements locatifs accessibles est faible. La Cour appelle en conséquence à sortir progressivement et de manière sécurisée de ces dispositifs, récemment reconduits, et à renforcer la place des investisseurs institutionnels dans la construction et la location de logements privés. » Le contrôle que cet article propose d’instaurer constituerait ainsi un premier pas pour justifier l’abandon partiel de ces aides qui ne représentent qu’un intérêt limité et qui constituent par ailleurs un effet d’aubaine certain.
L’article 22 interdit la location des logements bénéficiant du dispositif d’investissement locatif « Pinel » aux ascendants et descendants de l’acquéreur et limite les loyers plafonds à ceux des logements financés en prêt locatif social (PLS).
Le titre VI traite de la mobilisation du foncier public.
Dans un contexte de rareté du foncier et de fort besoin de construction sociale, il convient de s’assurer que le foncier public ou qui a bénéficié de soutien public soit socialement utile en répondant à des objectifs d’intérêt général. Les auteurs de cette proposition de loi considèrent ainsi que le foncier public doit être particulièrement mobilisé pour permettre d’atteindre des objectifs de construction de logements abordables. Les enjeux sont particulièrement aigus dans les espaces de fort renouvellement urbain où les opérations d’aménagement ou de réhabilitation ouvrent des perspectives de changement et de reconstruction de la ville sur la ville.
L’article 23 encadre les opérations d’aménagement qui bénéficient soit de subsides publics soit sont sises sur du foncier public. La lutte contre l’étalement urbain doit ainsi s’articuler avec le respect du droit au logement. L’objectif « zéro artificialisation nette » va augmenter les prix du foncier, ce qui risque de renforcer les logiques de relégation du logement social là où les terrains sont moins chers, de complexifier et diminuer les capacités à construire du logement social. Cela affectera nécessairement la répartition géographique et renforcera les inégalités territoriales. Afin de garantir le respect des obligations de mixité fixées par la loi SRU, il est donc nécessaire de prévoir que les opérations d’aménagement qui bénéficient soit de subsides publics (dont les « fonds friche » et les « fonds dépollution »), soit qui sont sis sur du foncier public doivent comprendre au moins 30 % de logements locatifs sociaux, hors PLS.
L’article 24 traite des friches urbaines et industrielles. Si l’aide de l’État en faveur d’opérations de réhabilitation des friches urbaines et industrielles dans le cadre du « fonds friche » initié par le plan de relance est bienvenue et indispensable, elle doit être mieux encadrée. Pour cette raison, les auteurs de cette proposition de loi tiennent à conditionner son versement, lorsque les terrains dépollués ont pour destination la construction de logements, à l’existence d’un pourcentage de logements sociaux ou de logements éligibles à l’accession sociale à la propriété. Une distinction est introduite selon le caractère plus ou moins tendu de la zone d’urbanisation considérée.
Le titre VII souhaite redonner de la souplesse aux organismes HLM pour la construction de logements accessibles et favoriser la mixité sociale
Les organismes HLM ont été durement éprouvés lors du dernier quinquennat. Dès la loi de Finances 2018 en son article 126, a été instituée une réduction de loyer de solidarité (RLS) applicable dans le parc social des organismes HLM et des SEM. Le coût de cette mesure pour le secteur HLM a été très lourd à supporter et représente aujourd’hui un manque à gagner annuel de 1,3 milliard d’euros, soit une perte cumulée de plus de 5 milliards sur le quinquennat. Par ailleurs, l’État s’est totalement désengagé des aides à la pierre faisant supporter le financement du Fonds National des Aides à la Pierre (FNAP) par les bailleurs eux-mêmes et par Action Logement.
Cumulée aux impacts des variations de TVA, la RLS a divisé par deux l’autofinancement des bailleurs sociaux.
Ces évolutions ont marqué une révision du modèle HLM, dévoyant sa finalité généraliste et ouvrant la voie à sa financiarisation.
Pourtant, plus de 4 millions de nos concitoyens souffrent du mal logement. 1,7 million de ménages sont en attente d’un logement social en France, et même 2,2 millions si l’on tient compte des demandeurs déjà logés dans le parc social : les besoins sont donc immenses en termes de production de logements socialement abordables. En ce sens, l’Union sociale pour l’habitat (USH) et les fédérations signataires se sont engagées pour la construction de 250 000 logements sociaux agréés sur la période 2021-2022, dont 90 000 PLAI.
Pourtant, sans marge de manoeuvre nouvelle, ces objectifs ne pourront être tenus.
L’article 25 engage donc la suppression de la RLS.
L’article 26 prévoit le rehaussement des plafonds pour l’accès au logement social confirmant notre vision généraliste du logement public. Il ne s’agit pas d’allonger inutilement la liste des demandeurs de logement (déjà bien trop longue), mais d’agir pour l’universalité du droit au logement et donc de l’accès au logement social. L’USH dit souvent que « le logement social est le patrimoine de ceux qui n’en ont pas ». C’est même le patrimoine commun de tous. Si le logement social est le patrimoine de tous, alors tous doivent pouvoir y prétendre.
Ce relèvement du plafond aurait trois conséquences positives :
La première, la plus fondamentale, serait de permettre à des personnes aux ressources trop faibles pour se loger dans le parc privé, de pouvoir accéder au parc public dans des conditions économiques réellement acceptables.
La deuxième, qui se vérifie dans la pratique, serait de permettre aux maires bâtisseurs de répondre à un panel plus large de demandeurs et donc de faciliter les opérations de construction. Il arrive ainsi que des logements neufs restent vides faute de locataires aux ressources suffisantes pour assumer un loyer certes relevant du logement social, mais déjà largement inaccessible pour le plus grand nombre.
La troisième est que ce relèvement du plafond répond à notre vision généraliste du droit au logement et donc à notre volonté de renforcer la mixité sociale et urbaine. Le renouvellement urbain en oeuvre dans les zones les plus denses doit être une chance pour construire plus de mixité et donc une société plus apaisée.
L’article 27 propose d’augmenter les obligations liées à la loi SRU à 30% en zone tendue. Depuis sa création, la loi SRU a permis de dynamiser la production de logements sociaux avec 1,8 million de logements sociaux produits depuis 2001. Aujourd’hui, près de la moitié des logements sociaux financés chaque année le sont dans les communes soumises à la loi SRU. Pour autant, la chute continue de la production de logements sociaux enregistrée ces dernières années aura de fortes répercussions dans un avenir proche pour l’accès au logement du plus grand nombre. L’objectif de cet article est donc de relever l’ambition au moment même où la loi dite 3DS a ouvert de nouvelles souplesses pour les communes soumises à ce dispositif. Ces « souplesses » sont en réalité autant d’échappatoires possibles pour certaines communes qui rechignaient déjà à accroître leur taux de logements sociaux et dont les élus continuent de développer un discours stigmatisant sur le logement social et ses habitants. La mixité sociale étant le ciment de notre République, cet article propose donc de renforcer les obligations de mixité en zone tendue.
Le titre VIII prétend renforcer la lutte contre les passoires thermiques
Le « logement qui tue » n’est pas une fiction, c’est la réalité de beaucoup de trop nos concitoyens. Comme le souligne Manuel Domergue de la Fondation Abbé-Pierre, si on rénovait toutes les passoires énergétiques à la location, on sauverait 10 000 vies en quelques années.
Si des avancées ont été obtenues avec le projet de loi Climat/Résilience ainsi qu’avec la mise en oeuvre de « Ma Prime Rénov », elles sont trop timides. Les enjeux restent immenses notamment pour les locataires captifs de marchands de sommeil ou pour les bailleurs pour lesquels le reste à charge demeure bien trop important pour s’engager dans la rénovation de leur logement et particulièrement dans le cadre d’une rénovation globale dont on sait pourtant qu’elle est plus efficace.
L’article 28 rend ainsi obligatoire l’instauration de permis de louer pour le parc de logement constitué de passoires thermiques en attendant leur interdiction totale de mise en location.
L’article 29 permet premièrement de limiter à zéro euro le reste à charge dans le cadre du dispositif « Ma Prime Rénov ». Il prévoit également un « Prêt avance Mutation » pour financer les travaux de rénovation énergétique à taux zéro pour les ménages modestes. Ces dispositifs semblent essentiels alors que l’on sait que le reste à charge moyen, avec « Ma Prime Rénov », est de 39 % pour les ménages « très modestes ».
Le titre X composé d’un article unique propose de réintroduire la Garantie Universelle des Loyers (GUL).
La garantie universelle des loyers (GUL) avait été initialement proposée dans la loi du 24 mars 2014 pour l’accès au logement et un urbanisme rénové (ALUR). Faute de financements identifiés, ce mécanisme a été abandonné au profit de la garantie Visale initialement réservée aux jeunes de moins de 30 ans.
Alors que le Président nouvellement réélu propose une simple refonte de la garantie Visale, les auteurs de cette proposition de loi considèrent que la multiplicité des dispositifs existants ainsi que leur périmètre restreint ne peuvent être satisfaisants. Pour cette raison, ils souhaitent revenir à un dispositif obligatoire et universel qui soit protecteur à la fois des bailleurs mais également des locataires en permettant, dans certains cas, des effacements de dettes locatives.
Afin de pourvoir au financement de cette garantie, dont les coûts importants ont déjà été soulignés, il conviendrait de faire participer très fortement non seulement l’État au titre de son devoir de solidarité mais également les profiteurs de crise que sont les banques et les assurances. Un exemple permet d’illustrer ce propos : l’assureur Axa a annoncé avoir dégagé un bénéfice net record au titre de l’année 2021 et être bien positionné pour atteindre les objectifs financiers de son plan stratégique à horizon 2023. Au cours de l’année 2021, le bénéfice net du groupe s’est inscrit en hausse de 135%, à 7,3 milliards d’euros, contre 3,16 milliards d’euros en 2020. Les moyens existent donc pour le financement de cette garantie universelle des loyers.
Enfin, le titre XI acte de nouveaux droits pour les locataires.
Il existe un lien intrinsèque entre hausse des prix et insécurité juridique relative des locataires. Pour réguler les prix de l’immobilier, il convient donc prioritairement d’octroyer de nouveaux droits aux locataires. Quand on réalise que la valeur de marché d’un bien « libre d’occupation » s’établit, en Île-de-France et dans les grandes métropoles, très généralement au double de sa « valeur locative de long terme » (valeur d’acquisition évaluée par un bailleur institutionnel, capitalisant les loyers sur trente ans ou plus ), on comprend que des acteurs privés indélicats soient tentés par des actions d’évictions spéculatives « systématisées » comme les opérations de « vente à la découpe », ou des actions ciblées de rétorsion dès que les locataires s’expriment pour faire valoir leurs droits contre des bailleurs fautifs d’abandon d’entretien ou d’inaction pour rénover les passoires thermiques ou résorber l’insalubrité ou l’indignité de groupes de logements.
La volonté du bailleur de maximiser son profit (ou sa rente) repose en effet sur sa facilité à changer de locataires et donc sur la précarité des droits notamment dans le cadre du congé vente ou du congé reprise, devenant des congés « représailles » contre les locataires réclamant leurs droits, ou même de congés pour « travaux lourds » comme mesure de rétorsion contre la demande de sortie du logement de l’insalubrité.
Pour réguler les prix, l’encadrement des loyers n’est pas suffisant et il convient législativement de consacrer des droits nouveaux pour les locataires.
L’article 31 propose dans ce cadre d’interdire les coupures d’énergie en dehors de la trêve hivernale où elles sont déjà interdites. Alors qu’aujourd’hui seul EDF a pris l’engagement de ne pas couper l’accès mais simplement d’en réduire la puissance, l’ensemble des entreprises du secteur doivent s’engager à ce droit minimal qui pourrait être élargi par la suite par un véritable droit d’accès permanent aux biens communs que sont l’eau et l’énergie.
Sur la vente à la découpe :
L’article 32 propose de rétablir l’ensemble des protections votées lors de la loi ALUR et remises en cause ou limitées par la loi « Macron » de 2015.
Il s’agit de rétablir une prorogation supplémentaire de 3 ans des baux en cours du fait de la mise en copropriété d’un immeuble, en zone tendue.
Il s’agit aussi, en rétablissant l’article 15 de la loi ALUR, d’interdire au nouveau propriétaire, en cas d’une mutation d’un logement occupé, de recourir à un congé vente ou congé reprise avant une période de protection d’au moins un bail complet.
L’article 33 interdit spécifiquement le recours au congé vente pour toute personne morale, ainsi que pour toute personne physique agissant comme « marchand de biens », ou étant propriétaire de plus de deux logements en sus de sa résidence principale. Dans l’esprit des auteurs de la présente proposition de loi, ce seuil de deux logements doit s’apprécier en « équivalent logement plein », ce qui supposera, dans le cas des biens détenus en indivision, de procéder à une adaptation au prorata selon des modalités que, le cas échéant, un décret pourra préciser.
L’article 34 propose d’instituer un « permis de diviser », soit une autorisation municipale et préfectorale préalable à la mise en copropriété d’un immeuble comportant trois logements ou plus, conditionnée notamment à des engagements sur le maintien de la fonction locative et la préservation des droits des locataires et occupants de bonne foi.
Sur la protection des locataires demandant des travaux de mise aux normes de décence, la résorption d’une insalubrité ou la rénovation d’une passoire thermique :
L’article 35 constitue une réécriture de l’article 20-1 de la loi de 1989, pour en faire une arme enfin efficace en cas de non-respect des obligations de logement décent de l’article 6, et l’associer à une mesure de protection contre les congés-représailles : la « prise d’effet différée du bail ».
La rédaction clarifie le caractère d’ordre public tout à la fois des obligations de l’article 6 et des sanctions concomitantes aux obligations de travaux posées par l’article 20-1. Près de vingt ans après la mise en oeuvre du décret de décence, les bailleurs encore fautifs ne peuvent, en effet, encore invoquer l’ignorance des obligations fixées par la loi et il est essentiel de rendre la voie de recours du locataire efficace dans tous les cas de non-décence et particulièrement en ce qui concerne les passoires thermiques.
Il s’agit notamment de sanctionner un bailleur qui ne respecte pas le décret décence avant de louer, et de garantir le locataire contre les effets de « congé-représailles », alors que la loi lui demande d’être l’instigateur principal de la lutte contre la non-décence du logement. Les juristes ont une longue pratique de la « prise d’effet différée des baux » dans les années 1970 à 1980, prévue par le décret 78-924 (22/08/1978, art.4) quand les baux ne respectaient pas les normes de confort donnant droit à « loyers libres ». Cet article tend ainsi à assurer à la fois la bonne information du locataire sur l’état sanitaire de son logement et, en cas de problème à cet égard, de renforcer l’égalité des armes à son profit.
L’article 36 institue des sanctions pénales pour les dissimulations frauduleuses des contrats de location par paiement du loyer « de la main à la main », sans délivrance de quittances. On sait que les marchands de sommeil, surtout dans les immeubles insalubres et les passoires thermiques, maintiennent des ménages dans cette situation de non-droit inacceptable, qu’il faut poursuivre et sanctionner. Par ailleurs, conformément aux principes généraux du droit pénal, les personnes morales seront également passibles de sanction, à hauteur du quintuple de la peine d’amende prévue (donc à hauteur de 100 000 €).
L’article 37 constitue le gage financier.
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