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7 août 2022 7 07 /08 /août /2022 15:02

 

L’Incorruptible démontre comment la guerre contre les royaumes d’Europe qui enthousiasme les Girondins affairistes et la royauté revancharde est une entreprise contre-révolutionnaire. Il le dit et le répète à la tribune du club des Jacobins, le 18 décembre 1791, puis le 2 janvier 1792. C’est à cette occasion qu’il s’écrie : « Personne n’aime les missionnaires armés. »

Janvier 1792. Maximilien Robespierre à la tribune du Club des Jacobins. © API/Gamma-Rapho/Getty Images

À partir de l’automne 1791, la question de la guerre se pose de manière aiguë. La Révolution est confrontée aux menaces des puissances européennes et une partie des révolutionnaires voit dans le conflit une manière de résoudre la crise. Mais les partisans de la guerre forment en réalité une coalition bien plus vaste, dont les différents membres ont des objectifs différents avec une finalité commune : en finir avec la Révolution. La Fayette espère rétablir l’ordre dans l’armée, obtenir la neutralité de la Prusse, puis retourner les militaires contre Paris pour mater les Jacobins. 

 

Le roi et la Cour misent sur une défaite pour ­restaurer Louis XVI dans son pouvoir absolu. Le ­député Brissot et ses amis jugent qu’« elle (la guerre) renverse l’aristocratie, consomme la Révolution, cimente notre indépendance, ­ramène le crédit et la pros­périté ». « Consommer » la Révolution, c’est-à-dire l’arrêter et faire taire les revendications croissantes des « floués » de la révolution bourgeoise. Robespierre comprend que la guerre représente un grand danger pour la Révolution d’autant que les plus enragés se refusent à mettre en œuvre les moyens de la gagner. La guerre n’est qu’un piège tendu à la Révolution et une menace mortelle pour la liberté. Robespierre monte à la tribune des Jacobins pour le démontrer.

 

Extrait du discours

La guerre est toujours le premier vœu d’un gouvernement puissant qui veut devenir plus puissant encore. (…) C’est pendant la guerre que le pouvoir exécutif déploie la plus redoutable énergie, et qu’il exerce une espèce de dictature qui ne peut qu’effrayer la liberté naissante ; c’est pendant la guerre que le peuple oublie les délibérations qui intéressent essentiellement ses droits civils et politiques pour ne s’occuper que des événements extérieurs, qu’il détourne son attention de ses législateurs et de ses magistrats pour attacher tout son intérêt et toutes ses espérances à ses généraux et à ses ministres, ou plutôt aux généraux et aux ministres du pouvoir exécutif. C’est pour la guerre qu’ont été combinées, par des nobles et par des officiers militaires, les dispositions trop peu connues de ce code nouveau qui, dès que la France est censée être en état de guerre, livre la police de nos villes frontières aux commandants militaires et fait taire devant eux les lois qui protègent les droits des citoyens.

C'est pendant la guerre que le pouvoir exerce une dictature qui ne peut qu'effrayer la liberté naissante. Robespierre

C’est pendant la guerre que la même loi les investit du pouvoir de punir arbitrairement les soldats. C’est pendant la guerre que l’habitude d’une obéissance passive, et l’enthousiasme trop naturel pour les chefs heureux, fait des soldats de la patrie, les soldats du monarque ou de ses généraux. Dans les temps de troubles et de factions, les chefs des armées deviennent les arbitres du sort de leur pays et font pencher la balance en faveur du parti qu’ils ont embrassé. Si ce sont des César ou des Cromwell, ils s’emparent eux-mêmes de l’autorité. Si ce sont des courtisans sans caractère, nuls pour le bien mais dangereux lorsqu’ils veulent le mal, ils reviennent déposer leur puissance aux pieds de leur maître, et l’aident à reprendre un pouvoir arbitraire, à condition d’être ses premiers valets. (…)

La guerre, habilement provoquée et dirigée par un gouvernement perfide, fut l’écueil le plus ordinaire de tous les peuples libres. Ce n’est point ainsi que raisonnent ceux qui, impatients d’entreprendre la guerre, semblent la regarder comme la source de tous les biens, car il est bien plus facile de se livrer à l’enthousiasme que de consulter la raison. Aussi croit-on déjà voir le drapeau tricolore planté sur le palais des empereurs, des sultans, des papes et des rois : ce sont les propres expressions d’un écrivain patriote qui a adopté le système que je combats. D’autres assurent que nous n’aurons pas plutôt déclaré la guerre que nous verrons s’écrouler tous les trônes à la fois.

Pour moi, qui ne puis m’empêcher de m’apercevoir de la lenteur des progrès de la liberté en France, j’avoue que je ne crois point encore à celle des peuples abrutis et enchaînés par le despotisme. (…) Quand je fixe les yeux sur les circonstances réelles où nous sommes ; lorsque, à la place de ce peuple, je vois la Cour, et les serviteurs de la Cour ; lorsque je ne vois qu’un plan imaginé, préparé, conduit par des courtisans ; lorsque j’entends débiter avec emphase toutes ces déclamations sur la liberté universelle, à des hommes pourris dans la fange des cours, qui ne cessent de la calomnier, de la persécuter dans leur propre pays ; alors je demande au moins que l’on veuille bien réfléchir sur une question de cette importance. »

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