TEXTE COLLECTIF
Un fait illustre le scandale actuel : l’électricité a un coût bas en France grâce au nucléaire, or les factures flambent. C’est que tous les marchés, pétrolier et gazier, mais aussi électrique, sont désormais branchés sur les Bourses.
C’est le résultat de la déréglementation voulue par l’Union européenne (UE), avec l’accord constant des gouvernements français. La spéculation a été encouragée et elle fait rage avec de gigantesques surprofits encaissés par les firmes énergétiques, pétrolières et gazières qui dominent le marché mondial. La note de la nécessaire relance après les confinements est présentée aux usagers.
Voilà où mènent quarante années de néolibéralisme qui ont conduit au gigantesque gâchis des privatisations, tandis que les fonds ont manqué pour développer les infrastructures. Voila aussi où mènent les abandons de l’Union européenne, qui accepte durablement la dépendance aux énergies intermittentes, couplée aux importations d’énergie fossile. Cela pendant que les États-Unis, qui occupaient déjà la place de numéro un des consommateurs, sont maintenant, grâce au schiste nord-américain, le premier producteur d’hydrocarbures et font danser les marchés, sèment le chaos guerrier dans les zones de gisement, tout en faisant leurs courses en Europe avec des projets de centrales en Angleterre, en Europe de l’Est.
Il faut en finir avec la guerre froide énergétique, qui épouse la guerre froide tout court relancée par l’Otan, et s’engager véritablement dans la transition écologique, la décarbonation. Les conservateurs allemands enferment l’Europe dans l’impasse d’une transition exclusivement centrée sur le solaire et l’éolien, avec, durant cette mutation longue et incertaine, la persistance d’un fort courant d’importations d’hydrocarbures, dans une relation qui ne peut que nourrir les tensions avec les pays producteurs. Donc, la première nécessité est de promouvoir toutes les productions d’énergie non fossile, pour réduire cette dépendance. L’UE doit retrouver le chemin des contrats à long terme garantissant revenus et approvisionnement des parties, diversifier ces derniers et se doter d’une agence européenne de l’énergie régulant les échanges. Pour sortir du charbon et du pétrole, des pays se tournent vers le nucléaire.
L’UE doit développer ses potentiels en la matière, avec notamment les compétences françaises, pour sécuriser ces installations, contribuer à la réussite des transitions et aider à l’électrification et au développement pour répondre aux besoins humains. Il s’agit de sortir l’énergie de la logique marchande. L’ONU, la COP devraient être dotées de pouvoirs régulateurs en ce domaine, avec une agence internationale de l’énergie réformée et élargie, aux prérogatives étendues.
L’énergie est un bien commun mondial et, pour certaines de ses sources, menacé d’épuisement. Les instances mondiales doivent donc inciter au contrôle public et démocratique des entreprises et réseaux, éviter que sa rareté ne soit l’objet de spéculations spoliant les peuples, dégradant la planète. Immédiatement, la création d’une taxe internationale sur les superprofits des géants de l’énergie s’impose.
Signataires : Valérie Gonçalvès et Éric Le Lann, coauteurs de Énergie et communisme. Une vision d’avenir (Manifeste, 2021), et Didier Valette, conseiller en économie sociale et solidaire.
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