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28 août 2021 6 28 /08 /août /2021 06:01

À deux mois de la COP 26 qui se déroulera à Glasgow du 1 er au 12 novembre, l’évolution du climat fait reculer la souveraineté et la sécurité alimentaire des Français. Président national des Chambres d’agriculture, Sébastien Windsor y a consacré hier sa conférence de presse de rentrée.

Par Gérard Le Puill

Céréalier dans le département de Seine-Maritime, Sébastien Windsor fait partie de ceux qui, dans les parties ouest et nord du pays, n’ont pas encore terminé les moissons en cet été 2021. Avec la multiplication des jours de pluie depuis le mois de juillet, on a souvent moissonné entre deux averses. Cela a provoqué de multiples retards, dont certains provenaient de l’embourbement des moissonneuses-batteuses quand elles entraient des champs au sol détrempé.

Du coup, la qualité moyenne des grains est nettement moins bonne que les années précédentes, ce qui provoque des déclassements et des baisses de prix de 30€ par tonne voire plus, notamment pour cause de poids spécifique trop faible. Certes, du fait d’un risque de pénurie mondiale, le prix du blé, du maïs, de l’orge et de graines oléagineuses et protéagineuses comme le colza et le soja sont nettement plus élevés ces dernières semaines que les années précédentes. Rendue au port de Rouen, la tonne de blé tendre de bonne qualité tutoie désormais les 250€ et le maïs est à 290€, bien que destiné à la nourriture du bétail pour l’essentiel. Mais entre 2017 et 2020, le prix du blé fut souvent intérieur à 180€ la tonne, voire entre 160 et 150€ entre juillet 2017 et juin 2018. À ce prix, les coûts de production ne sont pas couverts, sans même parler de la rémunération des producteurs.

Possible hausse du prix de la baguette

Ce rappel est nécessaire pour comprendre que la situation des producteurs est plus compliquée que ne le laissent supposer les sujets traités hier par plusieurs journaux télévisés sur une possible hausse du prix de la baguette de pain dans les prochaines semaines. Sur le marché mondialisé des céréales, il suffit que l’offre globale des pays exportateurs dépasse de quelques points la demande des pays importateurs pour que les prix restent durablement orientés à la baisse. Inversement, dès qu’un risque de pénurie apparaît, les prix se mettent à flamber en raison des prises de position spéculatives dans les salles de marché en vue de ventes physiques ultérieures.

Cela pourrait s’intensifier encore cet automne suite à la diminution des récoltes dans de grands pays exportateurs comme le Canada, les États Unis, la Russie, la France et quelques autres. En attendant, comme ils achètent des aliments du bétail à base de céréales de tourteaux de soja et de colza, il est probable que nos producteurs de lait, d’œufs, de viandes de porcs et de volailles seront les premières victimes de cette spéculation mondiale sur les céréales. Car en dépit du vote de la loi EGAlim en 2018, la hausse des coûts de production que subissent les paysans n’est toujours pas intégrée dans les prix de vente de leurs produits, contrairement à la promesse faite par président Macron à Rungis le 11 octobre 2017.

Gelées, mildiou et grêle sur les vignobles

Il est déjà acquis que 2021 sera, de bout en bout, une année compliquée pour l’immense majorité des paysans. Hier, le président des Chambres d’agriculture a tenu à montrer à quel point les multiples conséquences du changement climatique compliquaient la vie dans les exploitations agricoles cette année. Il y eut d’abord les gelées du mois d’avril, qui, dans certaines régions, ont détruit 80 % de la production de cerises, entre 50 et 60 % de la production d’abricot et de poires et plus de 20 % des pommes dès la floraison.

Alors que la date des vendanges approche dans plusieurs régions, le ministère de l’Agriculture prévoit déjà que la récolte de 2021 sera inférieure de 24 à 30 % à celle de l’an dernier. Dans les vignes aussi, les gelées du printemps ont sensiblement réduit le nombre de grappes par cep et certaines régions comme la Champagne, l’Alsace, le Jura et la Bourgogne ont subi la double peine quand les dégâts causés par le mildiou sont encore venus amoindrir les perspectives de rendements. Dans le Var et le Vaucluse, quelque 1.200 hectares de vignobles ont été partiellement impactés par les incendies de la semaine dernière tandis que les orages de grêle d’hier dans la même région sont venus aggraver la situation.

Les effets pervers des accords de libre-échange

Pour toutes ces raisons et du fait que les Chambres d’agriculture sont aussi des organismes de conseil, la conférence de presse d’hier était surtout centrée sur la nécessité de protéger les paysans face à la multiplication des aléas climatiques. Cette année 2021 montre aussi que peu de paysans sont - du fait des faibles prix auxquels ils vendent leurs produits en capacité de financer une assurance permettant de compenser partiellement les pertes de récoltes imputables à des phénomènes climatiques comme les gelées tardives, les orages de grêle, les inondations, les sécheresses.

Le président des chambres a plaidé hier pour des aides plus conséquences du gouvernement. Il souhaite aussi des résultats concrets à l’issue du « Grenelle de l’eau » mis en place cette année par le ministre de l’Agriculture. Il a enfin évoqué la nécessité d’une diversification croissante des assolements qui se traduira par davantage de productions de protéines végétales en France et en Europe afin de moins dépendre du soja produit en Amérique du nord comme du sud.

Hélas, rien n’indique que le texte de la réforme de la Politique agricole commune (PAC) qui sera appliquée entre 2023 et 2027 favorisera une telle orientation. Elle sera difficile à mettre en œuvre avec autant de déclinaisons nationales possibles dans les 27 pays membres de l’Union européenne. Surtout que ces pays membres continuent de mandater la Commission pour négocier des accords de libre-échange avec l’Australie et la Nouvelle Zélande après ceux qu’elle a signés avec le Canada et les pays du Mercosur sur fond de dumping social, fiscal et environnemental.

Mais cette question n’a guère été évoquée lors de la conférence de presse de rentrée du président de Chambres d’agriculture qui se voulait consensuelle et ouverte au dialogue.

 

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