Les postiers dénoncent une dégradation de leurs conditions de travail et demandent une plus grande reconnaissance. Ils devraient participer à une action nationale.
Les syndicats de La Poste n’avaient pas été rassemblés depuis longtemps. Mais, lundi, la CGT, SUD, FO, l’Unsa, la CFDT et la CFTC ont lancé un appel national à la mobilisation des postiers dès le 1er mai, avant une journée d’action commune dans la deuxième quinzaine du mois. Car les témoignages des travailleurs, qui font face à des conditions de travail dégradées, sont de plus en plus alarmants. « On n’a jamais eu un climat comme ça », résume Eddy Talbot, représentant SUD PTT qui travaille depuis plusieurs années à La Poste.
"Dumping social"
Face à des réorganisations subies, des luttes intersyndicales inédites se sont déjà multipliées sur tout le territoire : en Normandie, dans les Hauts-de-Seine ou encore en Loire-Atlantique, la semaine dernière. Au total, des mobilisations auraient émergé dans une cinquantaine de départements, selon la CGT. « Les principales revendications portent donc sur la rémunération, les conditions de travail et l’emploi », résume Sébastien Chaigneau, délégué de la CGT Fapt.
Les facteurs sont les premiers touchés, alors que 1 000 réorganisations ont été annoncées pour cette année. S’appuyant sur la baisse du volume de courrier, la direction pousse à un allongement des tournées de distribution. « Ils veulent transposer le modèle des colis au courrier, déplore Sébastien Chaigneau. Du coup, ils font du dumping social en transférant des activités dans les filiales. En région parisienne, 90 % du transport de colis sont effectués par des prestataires. »
100 000 emplois supprimés depuis une dizaine d’années
Au contraire, faisant le compte des 100 000 emplois supprimés depuis une dizaine d’années dans le groupe, SUD préconise des embauches massives. La CGT dénonce, de son côté, un plan social déguisé, constatant que de nombreux départs en retraite ne sont pas remplacés et que de plus en plus de salariés sont poussés vers des filiales du groupe. « À l’avenir, la direction veut mettre en place des équipes autonomes de production avec des primes à la performance. On va mettre les salariés en concurrence. La direction met en place une vraie logique de lean management », fait valoir Sébastien Chaigneau.
Alors même que les conditions de travail se dégradent, les salariés de La Poste déplorent une absence totale de reconnaissance. « La première prime Covid n’a été touchée que par la moitié des postiers, souligne Eddy Talbot. Et il n’y a eu aucune prime d’intéressement, alors que l’entreprise a enregistré un bénéfice de 2,1 milliards d’euros. » Côté revalorisation salariale, seule une hausse de 2,70 euros du salaire des employés contractuels a été mise à l’ordre du jour. La CGT a fait le calcul, avec la disparition des primes, un postier perdra en moyenne 1 000 euros pour cette année.
Un service public en danger
Pourtant, les travailleurs ont dû faire face à des réorganisations constantes dès le début de la crise sanitaire. « Il y a eu 15 000 suppressions de CDD lors du premier confinement. L’organisation du travail est passée sur trois, quatre, puis cinq jours, et n’a cessé de changer. Le traitement et l’acheminement du courrier ont repris le vendredi soir dès le mois de septembre », énumère Sébastien Chaigneau. Quant à la protection sanitaire, elle n’a pas toujours été respectée pour le personnel qui ne pouvait pas télétravailler. Cette réorganisation du traitement et de la distribution s’ajoute à des fermetures de bureaux de poste qui se multiplient. « Il y a une disparition graduelle et accélérée des guichets. Ce sont pourtant nos points d’ancrage », rappelle Yann Le Merrer, de SUD PTT.
Localement, citoyens et collectivités territoriales prennent position pour le maintien de ces bureaux et la sauvegarde d’un service public de qualité. D’autant que cette dégradation du service intervient alors que la mission de distribution de courrier à J + 1 est mise en péril par les différentes réorganisations. « Avec l’allongement des tournées, on ne garantit plus toujours la distribution du courrier à J + 1 », déplore Sébastien Chaigneau. Et pour que La Poste continue d’honorer ses missions, la CFDT plaide pour que l’État compense les pertes et participe au financement des impératifs de service public qui incombent à l’entreprise.
En 2020, La Poste a dégagé un bénéfice de 2,1 milliards d’euros, contre 800 millions en 2019. Mais la hausse de la distribution de colis n’a pas suffi à compenser la chute du volume de courrier transporté, évaluée à près de 25 %. C’est en réalité la prise de contrôle de la compagnie CNP Assurances, intervenue en mars 2020, qui permet de contrebalancer les pertes. La firme a dégagé 3,6 milliards d’euros de résultats nets l’année dernière. Sans elle, La Poste aurait perdu 1,8 milliard d’euros sur l’année.
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Le PDG de La Poste, Philippe Walh, veut renégocier avec les maires le contrat de présence postale territoriale 2020-2022 avant son échéance. La proposition de Philippe Wahl d’y inclure « les conditions de distribution du courrier et des colis », inquiète les élus locaux. « Ce ne sont pas aux collectivités de compenser les missions confiées à La Poste par l’État », prévient Xavier Cadoret, qui représente l’Association des maires de France (AMF) au sein de l’Observatoire national de présence postale. La Poste qui prépare son plan stratégique 2030 étudie plusieurs scénarios. Première piste évoquée par Philippe Wahl: l’abandon du timbre rouge à J + 1. La fin de la distribution du courrier le samedi est une autre piste, même si elle ne ferait économiser que 100 millions d’euros par an.
A Brest, nos camarades élus du PCF ont porté avec le groupe majoritaire de gauche tout récemment un vœu pour le maintien du service public postal de proximité et de qualité sur la métropole brestoise au Conseil de Brest Métropole il y a 15 jours, le 29 mars dernier:
ci-après la vidéo de l’intervention de Jacqueline Héré, élue communiste, qui a rapporté le vœu avec sa collègue Nathalie Chaline :
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