Avant tout, il faut commencer par dire que la présidentielle est une élection très anti-démocratique, créant de la personnalisation à outrance, du pouvoir personnel, au détriment des programmes et du collectif. Nous serions plutôt pour que le Président soit élu par une Assemblée nationale élue à la proportionnelle. On est coincés par cette élection autoritaire. On donne tout pouvoir, autorité, à un homme. Même les députés n’ont plus leur mot à dire. A partir de là, qu’est-ce qu’on fait ? Cette élection marquée par l’autoritarisme, la personnalisation, tout ce qu’on rejette, est pour autant indispensable aujourd’hui pour nous pour exister, même si elle nous est défavorable.
Le contexte n’invite guère à l’optimisme et pourtant nous ne sommes pas résignés.
Nous avons conscience de l’immense danger d’un nouvel affrontement de second tour entre la droite libérale, macroniste ou LR, et l’extrême-droite des Le Pen, en 2022, des risques de marginalisation de la gauche si on devait en rester à cet éclatement des candidatures au 1er tour des présidentielles et à cette incapacité à travailler en commun un projet de majorité, de l’offensive idéologique de la droite et de l’extrême-droite partout dans le monde et en Europe, des risques pour les libertés, ce qu’il reste de notre système de protection sociale et des services publics, de nos solidarités, beaucoup de conquis sociaux et démocratiques qui doivent aux combats des communistes, notamment dans la Résistance, à la Libération, quand le parti était plus fort électoralement qu’il ne l’est actuellement.
Nous avons aussi conscience qu’une grande partie de l’électorat de gauche, du peuple de gauche, souhaite un effort de rassemblement pour donner de l’espoir, donner une chance de trouver une alternative au scénario du pire en 2022, d’autant plus qu’aujourd’hui une victoire du RN n’est plus tout à fait du domaine de l’impossible.
De nombreux précédents européens existent, et en même temps, la gestion calamiteuse de crise sanitaire par Macron, les dégâts politiques et psychologiques du confinement, de la crise économique et sociale et de l’absence ou la minoration du mouvement social et des échanges sociaux dans cette période renforcent cette crainte.
En même temps, quand nous regardons autour de nous, peu de forces politiques à gauche ou chez les écologistes ont l’air vraiment de vouloir construire des ponts, de rassembler, si ce n’est pas derrière eux. Pourquoi serions-nous les seuls à nous effacer ?
L’acte de candidature précoce et unilatéral de Mélenchon, le 3ème, a hypothéqué les possibles de rassemblement à gauche.
On nous met tout le temps dans les gencives : il ne faut pas que Marine Le Pen passe. Mais qui fait tout pour qu’il y ait un nouveau duel Macron-Le Pen ?
Par rapport à il y a cinq ans, en 2022, il y a de quoi s’inquiéter car ce n’est pas sûr que le front républicain fonctionne. On peut très bien se trouver avec une Marine Le Pen qui batte Macron.
Est-ce qu’il y a une bonne solution ? Pas sûr. Est-ce qu’il y a une moins mauvaise solution ? Oui, présenter un candidat communiste.
Il ne faut pas se leurrer : peu de chance que Mélenchon se retire pour personne, Jadot non plus. Dans ce cas, il faudrait être gonflé pour dire que c’est essentiellement les communistes qui minimisent les chances pour un candidat de gauche d’être au second tour.
Quel rassemblement à gauche, s’il n’y a pas EELV et Mélenchon ensemble
Si on veut un rassemblement, il faut un rassemblement très large. Si Fabien Roussel passe très bien dans les médias en ce moment, ou moins mal que les dirigeants et porte-paroles communistes à l’habitude, c’est sans doute parce qu’il est pressenti candidat à la présidentielle.
La situation économique, sociale, politique actuelle est grave et va probablement aller en s’aggravant. Cette situation est le résultat du renforcement des logiques mortifères du capitalisme financier et de sa domination politique. Notre adversaire, c’est le capital. C’est clairement dit. Il n’y a pas d’autre organisation politique qui mette en avant cette chose essentielle. C’est pourquoi il faut une candidature communiste. Il nous faut une campagne forte sur la réorientation de l’argent. Si on passe notre temps à ne jamais présenter de candidats aux présidentielles, on n’en représentera plus jamais.
Et la population nous dira : et bien, à quoi servez-vous ?
Nous avons le parti qui a le plus d’adhérents, qui a en plus un corpus idéologique et un projet de société cohérent, une histoire, des valeurs, non réductibles dans la social-démocratie, le social-libéralisme, le capitalisme. Nous sommes le Parti organisé qui peut continuer à combattre et à résister même si on continuait d’aller vers le pire.
Il est essentiel de retrouver une visibilité, une lisibilité, des électeurs qui se ré-habituent à se poser la question de voter pour nous, et des militants qui ne soient pas désarçonnés d’avoir à soutenir des candidats issus d’autres formations, comme Jean-Luc Mélenchon, à qui on ne fait plus aucune confiance.
Aujourd’hui, l’enjeu du renforcement organisationnel et numérique du parti semble essentiel. Les opportunités existent. D’autant que le capitalisme financier et mondialisé démontre chaque jour un peu plus, et tout particulièrement en ces temps de pandémie qui ne viennent pas de nulle part, sa nocivité. Le désir et l’espoir d’un autre monde habitent énormément de gens, et beaucoup de jeunes. Il faut y aller décomplexé sur notre volonté de rupture avec les logiques capitalistes, avec la monarchie présidentielle. Difficile d’exister si on n’est pas présent dans ces élections présidentielles.
La candidature annoncée de Fabien Roussel nous assure une bonne présence dans les médias, et il passe très bien : il a le parler vrai, clair, qui s’adresse aux gens. Les citoyens se retrouvent dans son langage. On a un peu l’impression qu’il parle simplement comme vous et moi. Il touche les cœurs.
Notre objectif ne doit-il pas être de faire avancer nos idées le plus loin possible, et notre programme ? Nous avons besoin d’un candidat communiste pour porter notre originalité. Il faudra de toute façon respecter la décision de la conférence nationale. Une fois que c’est décidé, c’est décidé, on va de l’avant. Fabien Roussel n’est pas clivant, il s’exprime sans acrimonie, avec classe, présente des choses qui peuvent rassembler la population. En fin de compte, c’est ça qui importe.
On a avec Fabien Roussel un candidat de la jeune génération qui n’est pas complexé par l’effondrement de l’URSS, des régimes se réclamant sans doute en partie indûment du communisme. C’est un nouveau visage pour notre parti. Le parti d’une histoire faite de complexité. C’est notre histoire. Notre histoire nous colle à la peau dans la société. Il parle très humblement et avec beaucoup de justice. Il a été élu et vient d’un département d’une grande pauvreté, avec une désindustrialisation forte, il sait de quoi on parle et combat avec cette volonté. Il reste près du terrain, trois jours dans sa circonscription, présent au côté des travailleurs.