Besoin de communisme. Cent ans après le fameux congrès de Tours, qui entérina la scission de la Section française de l’Internationale ouvrière (SFIO) et la création, de fait, du PCF, l’affirmation garde toute sa pertinence. À l’époque, l’adhésion à la IIIe Internationale l’emporta face à la décomposition de socialistes qui s’étaient compromis dans la boucherie de 14-18. Un siècle plus tard, les boutefeux n’ont pas disparu. Et ce besoin de communisme encore moins. Aujourd’hui, d’autres guerres ont succédé aux conflits sanguinolents dans les tranchées boueuses. Un capitalisme exploiteur, prédateur et destructeur étend le domaine marchand, fait régner l’argent-roi, individualise les rapports humains, exacerbe les inégalités sociales, attise les démons nationalistes et nourrit, par son avidité, une crise environnementale aux conséquences incalculables.
Il y a urgence à résister, urgence à réfléchir à d’autres perspectives qui mettent en avant le bien commun, la solidarité, l’émancipation de chacun. Il y a urgence à comprendre que le communisme, contrairement à ce que certains s’échinent à répéter, n’est pas une vieille lune utopiste ou un modèle politique totalitaire. Il n’est pas une idée qui s’impose mais une visée dont on dispose. Et sans doute une partie de la réponse aux crises sociales et écologiques qui menacent le monde. C’est toute l’ambition de ce hors-série « Besoin de communisme » que publie l’Humanité à partir de ce vendredi. Une parution qui balaie le passé, le présent et l’avenir de cette idée « commune » dont on ne cesse de constater l’urgente nécessité.
Une visée universelle et d’espoir
Un premier chapitre revisite cette histoire tumultueuse. De quand date le communisme ? De Marx, répondront beaucoup. De toujours, pourraient rétorquer d’autres, tant les idées fondatrices de propriété partagée, de mutualisation, de lutte contre l’exploitation ont traversé les siècles. Dès la préhistoire, des formes d’organisations collectivistes, basées sur l’entraide, s’imposent face à l’adversité de la nature. L’idée communiste a irrigué autant qu’elle s’est nourrie du siècle des Lumières, pour finalement être élevée par Marx et Engels au rang de visée politique universelle et d’espoir inédit pour la classe ouvrière. Elle fut, au XXe siècle, à la fois une lueur pour des peuples opprimés, un combat contre le fascisme, une source de progrès sociaux, mais aussi un prétexte à des dérives dictatoriales qui ont marqué au fer le mot même de communisme.
D’aucuns aiment « dater » la fin du communisme en pointant 1989 et l’écroulement du régime soviétique. Mort le communisme ? Ben voyons. En vérité, l’idée communiste reste bien vivante. Elle a profondément marqué – et marque encore tous les jours – de son empreinte nos sociétés. Le deuxième chapitre de ce hors-série raconte ce « communisme en actes » qui inspire, parfois à l’insu de ceux qui les réalisent, de multiples initiatives et pratiques politiques. Il irrigue la lutte contre le capitalisme et l’écrasement des peuples que portent les mouvements altermondialistes depuis une vingtaine d’années. Il vit dans ces démarches d’élus qui municipalisent la gestion de l’eau, promeuvent la gratuité, entraînent leurs concitoyens dans la lutte contre les emprunts toxiques. Il prend sens avec ces paysans refusant le système consumériste, avec ces organisations d’entreprise basées sur le pouvoir des salariés. Il perdure dans la Sécurité sociale et ces autres conquis que les néolibéraux s’échinent à détruire.
Ce hors-série ouvre aussi des perspectives. Que pense la jeunesse du mot « communiste » ? Comment les militants du PCF vivent-ils leur engagement ? Le troisième chapitre explore, avec ses tables rondes, ses contributions et un texte inédit du philosophe Lucien Sève, l’avenir de l’idée communiste, sa capacité à représenter une solution face aux défis environnementaux, économiques et démocratiques. Un besoin, aussi pressant que présent.
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