Il y a 76 ans aujourd’hui ; le 15 août 1944 commençait le débarquement allié en Provence ayant pour nom « Anvil-Dragon. Il a mobilisé 900 000 hommes dont 250 000 sont sous l’uniforme français. Parmi ces derniers la moitié est issue de troupes issues des colonies (tirailleurs sénégalais et algériens, goumiers et tabors marocains, marsouins du Pacifique et des Antilles, etc.). Les villes de Marseille, Toulon, Fréjus, etc., et plus largement tout le Sud de l’hexagone sont libérées par ces soldats.
Ce n’était pas la première fois que des troupes « coloniales » étaient engagées dans des guerres menées par les puissances européennes.
On en trouve ainsi trace dans la guerre franco-prussienne de 1870 avec la participation de troupes algériennes puis lors de la première guerre mondiale où ils sont 180 000 soldats avec comme bilan 72 000 morts.
A partir de 1919 la conscription devient obligatoire dans les colonies. Il est donc erroné de présenter la participation à cette guerre comme issus d’un attachement à la France et du volontariat. En témoigne de multiples révoltes contre la conscription tant en Afrique subsaharienne qu’en Afrique du Nord. Ils sont ainsi près de 300 000 à être engagés dans le conflit (Ainsi, dès mars 1940, 10 000 soldats indochinois, 10 000 Malgaches, 68 500 soldats d’Afrique noire et plus de 200 000 d’Afrique du Nord participent à la « drôle de guerre »). Ces troupes indigènes jouèrent un rôle décisif dans la campagne d’Italie en mai 1944 puis dans la libération de la métropole en 1944-1945.
Dès l’automne 1944, une fois que la victoire est assurée, les tirailleurs coloniaux sont démobilisés. Le général De Gaulle évoque explicitement la nécessité du « blanchiment des forces françaises ». Les alliés états-uniens sont également de cet avis. Les troupes coloniales qui ont tant payées la libération de l’hexagone sont de ce fait absentes du défilé de la victoire à Paris. De surcroît les démobilisés ne reçoivent pas leurs arriérés de soldes et leurs primes de démobilisation. C’est ce qui conduira à la mutinerie de Thiaroye en novembre 1944. La répression fut sanglante avec un bilan de 35 morts et de nombreux blessés.
Comble de l’injustice, la loi dite de « cristallisation » adopté en 1959 gèle le montant des pensions de guerre pour les seuls soldats coloniaux (Cette cristallisation a consisté à figer à la fois la valeur du point, l’indice et les règles juridiques permettant de calculer le montant de la pension). Il faudra un combat de plus de plus de quatre décennies pour que la cristallisation soit abrogée en 2007. Entre temps la majorité d’entre eux étaient décédés.
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Une plaque commémorative a été posée sur la façade du bar associatif Aux Deux Rivières à Morlaix. C'est dans cet immeuble (ancienne corderie) que plus de cent tirailleurs sénégalais ont été hébergé, refusant d'embarquer pour leur retour au Sénégal dans l'attente de la solde qui leur était due.
Claude Bonnard