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4 juillet 2020 6 04 /07 /juillet /2020 06:09
Édouard Philippe, un bilan de droite et de droite (Diego Chauvet, L'Humanité, 3 juillet 2020)
Vendredi, 3 Juillet, 2020
Édouard Philippe, un bilan de droite et de droite

L’ex premier ministre venu de LR a conduit des réformes ultralibérales, usé de fermeté face aux contestations, et tiré son épingle du jeu durant la crise sanitaire… Il sera donc maire du Havre… Du moins pour le moment.

 

Après trois ans à Matignon, Édouard Philippe a donc démissionné. En 2017, après la victoire d’Emmanuel Macron à la présidentielle, celui qui est alors maire du Havre est appelé à former un gouvernement. Le nouveau président de la République, ex-ministre de François Hollande et chantre du « de gauche et de droite » nomme un chef de gouvernement issu de LR pour chasser sur les terres électorales de la droite. En réalité, la politique que mène Édouard Philippe se révèle être, au fil des mois, de droite et seulement de droite.

En effet, c’est lui qui conduit les réformes voulues par le chef de l’État, et qui seront toutes d’inspirations très libérales. Dès le début de son mandat, il mène la bataille pour casser le droit du travail à coups d’ordonnances. Au printemps 2018, il affronte son premier grand mouvement social avec la grève des cheminots, en lutte contre sa réforme ferroviaire, qui met fin à leur statut et ouvre la voie à la privatisation. Dans la lignée de ses prédécesseurs, il se montre inflexible. Ce même été 2018, il met en place la limitation à 80 km/h sur les routes départementales, puis quelques semaines plus tard, instaure une taxe sur les carburants et annonce la suppression de l’ISF : la combinaison de ces réformes sur fond de creusement des inégalités sociales forme un cocktail explosif. Au mois de novembre, démarre un mouvement social inédit et particulièrement dur, celui des gilets jaunes. Son gouvernement répond par la répression policière violente, alors qu’en décembre 2018 il semble vaciller sous le coup des mobilisations. Le mouvement perdure ensuite, durant des mois, avec une intensité moins forte.

Cette crise n’empêche pas Édouard Philippe de poursuivre la politique pour laquelle Emmanuel Macron l’a nommé à Matignon. D’abord avec une réforme de l’assurance chômage qui instaure un durcissement des règles d’indemnisation pour 850 000 personnes dès le 1er novembre 2019. Tout au long de cette même année, il peaufine une réforme des retraites, allant encore plus loin sur le plan libéral que les précédentes, avec l’aide de Jean-Paul Delevoye, nommé Haut Commissaire. Édouard Philippe organise des consultations avec les « partenaires sociaux », mais sans tenir compte des propositions des syndicats. Un an après les gilets jaunes, le contenu de cette « retraite à points » déclenche le plus long mouvement social interprofessionnel depuis mai 1968 : les transports se retrouvent à l’arrêt durant un mois entier dans tout le pays. Le Haut-commissaire, rattrapé par une affaire de conflit d’intérêts, est exfiltré de l’exécutif. Mais rien n’y fait. Là encore, le gouvernement Philippe choisit le passage en force. Face à la bataille parlementaire menée par la gauche, il finit par dégainer le 49-3. Lors d’un Conseil des ministres consacré à l’épidémie de coronavirus qui menace de plus en plus la France, le 29 février, l’hôte de Matignon annonce le recours à ce procédé pour imposer sa réforme sans débat parlementaire.

Quinze jours plus tard, tout bascule : alors que le scrutin du premier tour des municipales s’est tenu malgré la menace sanitaire, le président de la République décrète le confinement et suspend la réforme des retraites. Édouard Philippe endosse alors les habits de capitaine dans la tempête de la crise sanitaire. Il fait adopter une loi proclamant l’État d’urgence sanitaire, ouvre les robinets financiers pour soutenir les entreprises contraintes de cesser ou réduire leur activité… mais refuse en même temps d’interdire les licenciements, de nationaliser les grandes entreprises menacées par la crise, tout en étendant les dérogations au code du travail. Il reste bien de droite. Paradoxalement, alors que cette crise et les polémiques qu’elle suscite sont coûteuses politiquement pour le pouvoir, et particulièrement pour Emmanuel Macron, Édouard Philippe en recueille les fruits. Sa cote de popularité grimpe au fil des semaines, et malgré les critiques quant à la démarche même de sa candidature aux municipales, il est réélu maire du Havre le 28 juin dernier. Mais un premier ministre plus populaire qu’un président, risque de lui faire de l’ombre même sous la Ve République. Emmanuel Macron, plus abîmé par les trois premières années de son quinquennat, se passera donc de ses services pour tenter de se relancer.

Libéré des contraintes de Matignon et de son accord politique avec le chef de l’État, il pourra donc être maire du Havre à temps plein. Et à droite à temps plein également. Peut-être que des perspectives nouvelles s’ouvriront pour lui cette fois dans son camp politique d’origine…

Diego Chauvet
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