Mouvement contre le racisme et pour l’amitié entre les peuples
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Coronavirus : le MRAP demande la fermeture d’urgence des centres de rétention et la fin de la répression au Mesnil Amelot
Le MRAP vient de recevoir deux appels particulièrement inquiétants du centre de rétention de Mesnil Amelot. Alors que les organisations de défense des droits humains demandent instamment la fermeture des centres de rétention, le gouvernement répond à la légitime inquiétude des sans papiers par la répression. Les policiers sont intervenus ce dimanche 12 avril au Mesnil Amelot, face à cette intervention, les sans papiers ont résisté pacifiquement aux matraques et au gaz ; les téléphones ont été saisis. La situation a dégénéré samedi soir lorsqu’un sans papiers qui avait gardé du pain en sortant du réfectoire a subi des violences de la part des gardiens. En solidarité, les sans papiers sont sortis dans la cour, le directeur du centre a alors fermé les bâtiments et les sans papiers ont dû passer la nuit dehors.
Les informations qui nous sont parvenues font état d’une situation particulièrement inquiétante : un sans papier a été relâché il y a quelques jours suite à une suspicion de covid-19.
Les détenus n’ont ni masques ni gel hydro-alcoolique, et les deux personnes qui font le ménage n'ont ni javel ni produits désinfectants. Le service médical est présent une heure par jour et la laverie ne fonctionne pas . La direction du centre interdit également aux policiers de porter des masques « pour ne pas effrayer les sans papiers ». Des policiers inquiets demandent également la fermeture du centre !
Scandalisé par cette situation, le MRAP demande une nouvelle fois la fermeture des centres de rétention et la régularisation des sans papiers comme cela a été fait au Portugal.
Paris le 12 avril 2020
Quarante-cinq sans-papiers retenus au Mesnil-Amelot ont occupé la cour de leur centre, dans la nuit de samedi à dimanche, pour réclamer leur libération. Le mouvement a pris fin dimanche matin par une répression violente de la police.
Ils demandent leur libération immédiate. En pleine crise sanitaire, environ 170 étrangers, sans titre de séjour et promis à l’expulsion, sont toujours retenus dans des centres de rétention administrative (CRA), sans aucune précaution sanitaire. « On vit dans des conditions ignobles. Rien n’est désinfecté, les policiers qui entrent et sortent n’ont pas de gel, pas de masque, nous non plus, rien. Franchement, on a peur de tous l’attraper et quand on dit quelque chose, les policiers nous frappent », s’alarme Karim (*), retenu depuis un mois au CRA du Mesnil-Amelot.
Samedi soir, dans ce centre de Seine-et-Marne, les 45 retenus ont occupé la cour aux cris de « Liberté ! », afin de demander la fermeture immédiate du CRA. « On a discuté avec le directeur du centre mais il nous a dit qu’il n’avait aucune solution à nous apporter, déplore l’un des retenus. On lui a dit qu’on resterait dans la cour jusqu’à ce qu’ils ferment et on a ramené nos matelas. » Mais le directeur du centre a ensuite fermé les grilles et réquisitionné les matelas des retenus, pour éviter l’incendie.
Dimanche matin, une centaine de policiers sont intervenus pour réprimer la révolte, non sans violences. « Ils nous ont tous regroupés dans un coin, plaqués au sol et pris nos téléphones. J’en ai vu quelques uns se prendre des coups de matraque, du gaz, alors qu’on ne bougeait plus », raconte Karim. Sept retenus, identifiés comme « leaders » ont été embarqués, les autres ont été enfermés dans leurs chambres. « Ils nous ont dit qu’on pourrait ressortir lundi si on était sages, poursuit-il. Mais que si on recommençait, ils allaient nous faire mal et on serait condamnés. »
Référé rejeté par le Conseil d’Etat
La peur des retenus a enflé, ces derniers jours, après l’annonce d’un cas de contamination au Covid-19 au CRA de Vincennes (Val-de-Marne), jeudi. Le parquet de Paris a été saisi pour demander l’ouverture d’une information judiciaire sur la situation sanitaire dans le CRA. A Vincennes, où 52 personnes sont encore retenues, et au Mesnil-Amelot, plusieurs prisonniers ont entamé ces dernières semaines des grèves de la faim, en vain.
Depuis le début du confinement, de nombreux avocats et associations réclament la fermeture de ces centres. Des demandes de mise en liberté pour tous les prisonniers ont été transmises aux juges des libertés et de la détention, en s’appuyant à la fois sur la fermeture des frontières (et donc l’impossibilité d’expulser) et les conditions sanitaires. Dans les dix premiers jours du confinement, plus de 1 300 prisonniers ont été libérés. Ils sont encore environ 700 à être retenus dans les CRA.
Fin mars, les associations ont déposé un reféré auprès du Conseil d’Etat pour demander « la fermeture temporaire des CRA », lequel a été rejeté le 27 mars, les magistrats jugeant que le maintien en rétention n’est pas un « facteur d’évolution de l’épidémie ». Depuis, de moins en moins de remises en liberté sont prononcées, « les juges considérant qu’il n’y a plus de risque de contamination dans les CRA parce qu’il y a moins de prisonniers enfermés », déplore Rafael Flichman, de la Cimade.
Les associations craignent une modification de la loi
En plus du risque sanitaire élevé auquel sont exposés les prisonniers des CRA, leurs conditions de vie se sont dégradées. « Les parloirs sont interdits ; quand on est malades, on nous dit qu’on ne peut rien faire pour nous, les cellules et les salles communes sont de plus en plus sales, les policiers de plus en plus violents », énumère Karim, retenu au centre du Mesnil-Amelot.
Les 700 étrangers toujours en rétention s’inquiètent également de leur avenir, alors qu’ils sont promis à l’expulsion. « On nous dit que les avions ne décolleront pas avant septembre. Ça veut dire qu’on va rester croupir ici jusque-là ? s’inquiète Karim. Physiquement et mentalement, j’en suis malade. Je n’ai plus de contact avec l’extérieur puisqu’il n’y a plus de parloir et qu’on nous a pris nos téléphones, et on ne sait même pas ce qu’on va devenir. »
Si les expulsions sont pour le moment impossibles, la loi limite cependant la rétention des étrangers sans titre de séjour à 90 jours. Qu’adviendra-t-il, alors, des personnes qui atteindront cette limite mais ne pourront être expulsées ? Les associations craignent une modification de la loi. Le ministre de l’Intérieur, Christophe Castaner, qui est revenu jeudi sur la situation dans les CRA, n’a apporté aucune réponse à cette question.
(*) Le prénom a été modifié.
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