Donald Trump a ordonné le gel des biens aux États-Unis du gouvernement de Caracas pour limiter sa marge de manœuvre commerciale. Des négociations avec l’opposition sont en cours.
Trump rugit, ouvre la gueule et sort ses griffes, une fois de plus, contre le Venezuela. Il a ordonné un gel total des biens aux États-Unis du gouvernement vénézuélien. Ce qui signifie, économiquement, que toute entreprise commerçant avec les autorités de Caracas pourra être sanctionnée. Officiellement, cela exclut les transactions qui concernent des aliments, du matériel agricole, des médicaments, du matériel hospitalier et les vêtements. L’administration américaine prend bien garde de ne pas être accusée de décisions touchant à la situation humanitaire. Mais, en réalité, c’est un leurre. Le chef de la diplomatie vénézuélienne, Jorge Arreaza, prévoit des conséquences sur l’importation d’aliments et de matériel destiné au secteur électrique, contrôlé par l’État et victime ces dernières semaines de pannes fréquentes. « On ne pourrait pas payer » les prestataires de services, a-t-il admis. Les conséquences sont directes pour les centres de santé, les écoles et les universités. En revanche, pour préserver la bourgeoisie vénézuélienne dont une partie constitue le noyau actif de l’opposition, les particuliers vont pouvoir continuer à négocier avec des entreprises américaines. Ce qui ne concerne évidemment pas les habitants des barrios de Caracas, fidèles soutiens au gouvernement de Nicolas Maduro. Ce dernier a d’ailleurs qualifié de « terrorisme économique » les mesures prises par Washington. « Le gouvernement des États-Unis, frustré par le courage et la résistance de la révolution bolivarienne, a désormais recours, de manière lâche, à un gel des avoirs vénézuéliens. C’est un vol et un acharnement que nous ne pouvons pas tolérer. Nous sommes solidaires avec Nicolas Maduro et le peuple vénézuélien », a réagi le président cubain, Miguel Diaz-Canel, sur Twitter.
un aveu de faiblesse après des années d’acharnement
Parallèlement, le Groupe de Lima, composé d’une douzaine de pays latino-américains alignés sur les États-Unis et le Canada, s’est réuni, mardi au Pérou, pour « renouveler » son soutien au président autoproclamé Juan Guaido alors même que le désenchantement gagne ses partisans. Une réunion à laquelle participaient plusieurs pays européens dont la France mais à laquelle étaient absentes la Chine et la Russie, notamment, qui dénoncent les sanctions américaines.
Ce qui se voudrait une démonstration de force de Washington et ses alliés sonne plutôt comme un aveu de faiblesse après des années d’acharnement contre le Venezuela coupable, comme Cuba, d’emprunter un chemin non conforme aux intérêts des multi et des transnationales. Citgo, filiale de l’entreprise pétrolière publique PDVSA et principal actif de Caracas aux États-Unis, a fait l’objet d’un embargo pétrolier en avril. Les comptes bancaires et les représentations diplomatiques ont été saisis. Les précédentes sanctions visaient donc déjà le pétrole vénézuélien, quasiment la seule source de revenus pour l’État, et avaient écarté le pays du système financier américain. Le but : dresser la population contre le gouvernement et l’armée contre Nicolas Maduro. Las, l’opposition ne parvient ²plus à organiser des manifestations d’envergure. Elle comptait sur l’armée pour la porter au pouvoir : encore un échec. Les forces armées vénézuéliennes ont qualifié la nouvelle décision américaine d’« aberrante », ajoutant que, « devant le chantage et les contraintes qu’ils pensent nous imposer », elles se réaffirment « fermes et inébranlables » face aux « menaces impérialistes ». C’est dire si Juan Gaido doit être dans ses petits souliers, lui qui a remercié les participants à la conférence de Lima au moment où se mettaient en place « la pression et les soutiens nécessaires pour matérialiser le changement » dans son pays ! Or, on peut se demander si ces nouvelles sanctions décrétées par les États-Unis ne visent pas à réduire à néant les pourparlers en cours entre représentants du gouvernement et de l’opposition, qui se déroulent depuis début juillet à la Barbade sous médiation de la Norvège, où les deux parties se sont engagées à trouver une solution « constitutionnelle » à la crise vénézuélienne. John Bolton, le « monsieur Guerre » de Donald Trump, a déjà exprimé son scepticisme sur l’issue de ces négociations.
Pierre Barbancey
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