Jérusalem, quartier arabe du vieux Jérusalem auprès de la porte de Damas grignoté par les colons israéliens - ici maison dite "de Sharon" (photo mission AFPS, 2015)
Inauguration de la place Jérusalem à Paris: Indignation et solidarité avec le peuple palestinien
Intervention de Pascal Torre pour le Parti communiste français
Seule le prononcé fait foi
Comme l'a souligné Pierre Laurent, sénateur de Paris et président du Conseil national du PCF, l'inauguration d'une place Jérusalem à Paris aurait pu être une belle idée si elle ne faisait pas abstraction du contexte, si elle permettait d'éclairer le sort des populations brisées par des décennies de violence et si elle frayait un chemin vers la paix. Malheureusement, les choix effectués par la maire de Paris, Mme Anne Hidalgo, ont délibérément tourné le dos à ces exigences.
Cette inauguration, qui résulte d'une demande du président du Consistoire des communautés juives a été conçue dans la perspective exclusive de conforter les liens qui unissent Paris avec l'État d'Israël. Il en a résulté une immédiate instrumentalisation politique puisque Joël Mergui s'est empressé de déclarer que Jérusalem est la "capitale d'Israël" en violation du droit international et de la position de la France. Or, Jérusalem est une ville importante pour toutes les confessions. L'invitation du maire de Jérusalem, notoirement connu pour ses positions extrémistes, et le fait que les autres religions n'aient pas été associées ont conforté ce choix partisan de Mme Hidalgo.
Cette inauguration a éludé la situation de Jérusalem, ville dont la partie orientale a été annexée et dont l'environnement fait l'objet d'une colonisation illégale, méthodique et implacable depuis 1967. Jérusalem n'est pas uniquement une ville israélienne. Les Palestiniens sont victimes d'une violence inouïe, subissent une politique de terreur et d'apartheid sur leur propre terre. La souffrance des populations de Gaza en témoigne quotidiennement. Cela Mme Hidalgo ne l'ignore pas.
Cette inauguration se déroule également dans un contexte international délétère. Benyamin Netanyahou et Donald Trump ont décidé conjointement de mettre un terme à toute idée de création d'un État palestinien. La reconnaissance de Jérusalem comme capitale de l'État hébreu, la remise en cause du statut des réfugiés, l'aval donné à l'annexion du Golan et de la Cisjordanie constituent une accélération d'une politique qui entend humilier et marginaliser les Palestiniens jusqu'à leur capitulation. Lors de la conférence de Manama à Bahreïn, Jared Kushner en écho aux revendications de l'extrême droite israélienne a piétiné la légalité internationale. Cela Mme Hidalgo ne l'ignore pas.
Cette inauguration aura été perçue dans ses objectifs et dans sa forme comme une caution à la politique d'Israël. Pas un mot n'a été prononcé contre la colonisation, la souffrance des populations et l'exigence d'un État palestinien. Il ne faut donc pas s'étonner de la polémique qui n'a pas cessé d'enfler. Le droit de chaque État à vivre en paix et en sécurité, la nécessité de combattre de toutes nos forces un antisémitisme croissant constituent des exigences légitimes. Cependant ces objectifs ne pourront être atteints qu'en faisant prévaloir la justice, le respect du droit afin de bâtir une paix juste et durable. Cette décision qui divise, qui transpose sur notre territoire ce conflit, exacerbe les tensions.
Le Parti communiste français (PCF) entend poursuivre et amplifier sa solidarité avec le peuple palestinien alors que les manoeuvres américaines, confortées par certains États arabes et encouragées par Israël, voudraient à jamais anéantir leurs droits inaliénables.
Pascal Torre
Non à la confiscation de Jérusalem!
Sur proposition de la Maire de Paris, Mme Anne Hidalgo, le Conseil de Paris a voté le 12 juin la création d’une place de Jérusalem.
Cela aurait pu être une bonne idée, pour éclairer la population sur la situation de cette ville martyre, fracturée, divisée, puis annexée; pour rappeler la nécessité absolue de mettre fin à la violation du droit international et du droit humanitaire que constitue l’annexion de Jérusalem par Israël, et pour condamner sans ambiguïté le fait accompli et la loi du plus fort.
Une bonne idée aussi s’il s’était agi d’en faire un symbole de paix, en rappelant que cette ville, que les Israéliens ont conquise par la force et qu’ils considèrent comme leur capitale, est aussi la capitale revendiquée par les Palestiniens, et un symbole particulièrement fort de leur identité nationale. Et, sur le plan religieux, en donnant toute leur place aux trois religions monothéistes pour lesquelles Jérusalem est une ville sainte.
Anne Hidalgo a choisi une autre voie, celle de céder aux réseaux d’influence pro-israéliens, en localisant cette place à côté du futur centre européen du judaïsme, et en invitant à l’inauguration le maire de Jérusalem, le maire d’une ville illégalement annexée à Israël, et l’artisan des plans d’urbanisme qui développent les colonies israéliennes et expulsent les habitants palestiniens de Jérusalem de leurs maisons.
Cette démarche est particulièrement mal venue dans le contexte de la décision étasunienne de reconnaissance de Jérusalem comme capitale d'Israël et semble ainsi se situer en continuité. Comme cela a été rappelé en décembre 2017 par de nombreux États dont la France, le droit international ne reconnaît aucune souveraineté sur Jérusalem en l’absence d’accord entre les parties, et l’annexion de Jérusalem Est par Israël a été explicitement condamnée par l’ONU.
Nous refusons cette logique d’exclusion promue par Mme Anne Hidalgo dans la droite ligne de la politique israélienne d’apartheid consacrée par le vote de la loi de l’État-nation du peuple juif en juillet 2018. Nous demandons que la place de Jérusalem soit déplacée dans un lieu qui respecte pleinement la diversité culturelle et religieuse de Jérusalem, et que soit clairement marqué le projet d’en faire le symbole de la nécessaire reconnaissance du droit et de la recherche d’une paix juste et durable entre Palestiniens et Israéliens.
Nous appelons tous les habitants d’Île-de-France à se rassembler le dimanche 30 juin à 15h Place du maréchal Juin, pour protester contre la démarche scandaleuse de la maire de Paris, et porter l’exigence de la justice et du respect du droit international.
Le Collectif national pour une Paix juste et durable entre Palestiniens et Israéliens dont est membre le PCF.
Lors du conseil de Paris de juin dernier, a été soumise au vote des conseillers une délibération concernant la dénomination d’une place Jérusalem, en remplacement d’une rue ayant disparue.
Dans l’exposé des motifs aucune mention des objectifs de la Ville d’utiliser celle-ci dans le but de commémorer l’amitié qui unit la ville de Paris à l’État d’Israël comme l’écrit Mme Hidalgo dans cette même lettre.
Aux inquiétudes de nos groupes, a été répondu qu’en aucun cas cette dénomination ne serait utilisée à des fins « geo-politiques » comme Catherine Vieu-Charier l’a d’ailleurs souligné dans sa réponse au conseil, nous étions simplement dans la tradition parisienne de donner des noms de villes à nos rues. Nous avons émis des réserves, et nous nous sommes abstenus forts de ces assurances données.
Las, deux jours à peine après le conseil nous découvrons par un tweet de Joël Mergui, président du Consistoire central israélite de France, qu’en réalité, cette dénomination fait suite à une demande directe qu’il aurait faite à Anne Hidalgo lors de la visite du président israélien Reuven Rivlin à l’Hôtel de Ville.
Ce qui nous a étonnés c’est l’inauguration expresse de cette place et l’invitation du maire de Jérusalem connu pour ses prises de position et ses actions en faveur de la colonisation. Nous sommes choqués de voir qu’aucun des représentants des trois communautés religieuses creuset de Jérusalem n’y sont invités, et encore plus de l’absence de représentant de l’autorité palestinienne.
L’ensemble de ces faits, mis bout à bout, semble légitimer une confiscation de Jérusalem par l’État d’Israël alors que nous aurions pu en faire un symbole de la paix entre les peuples et les différentes communautés.
Pour toutes ces raisons, nous demandons à Mme Hidalgo de renoncer à cette inauguration vécue comme une provocation et qui ne respecte pas les positions prises par la diplomatie française sur le statut de Jérusalem.
Pour cela nos organisations seront présentes au rassemblement prévu par le « collectif national pour une paix juste et durable » pour protester de cette décision le jour même de l’inauguration, si celle-ci n’est pas annulée.
Communiqué des élus communistes de Paris, 25 juin 2019
[Sénat-Paris- Affaires étrangères]
L’inauguration d’une « Place de Jérusalem » en plein Paris aurait pu être une belle idée, l’occasion d’adresser un message de paix et une exigence de respect du droit international, au moment où l’une et l’autre sont gravement bafoués par les décisions conjuguées du gouvernement Nethanyaou et de l’administration Trump.
Le gouvernement Nethanyaou accélère chaque jour la colonisation de Jérusalem-est, foulant au pied les résolutions de l’ONU et tous les droits des Palestiniens, faisant de leur vie quotidienne un calvaire , enfreignant chaque jour le statu quo régissant la cohabitation des trois religions juive, chrétienne et musulmane dont le Consulat de France est le garant international. Et l’administration Trump appuie cette annexion pure et simple en déplaçant son ambassade à Jérusalem, en dépit d’une très large condamnation internationale, dont celle de la France.
Mais force est de constater que l’inauguration de cette place a pris un sens contraire aux messages qu’elle aurait dû permettre d’envoyer depuis Paris. Conçue à la demande du consistoire des communautés juives de Paris, n’associant à aucun moment ni la Mission de Palestine, ni les responsables des autres religions, n’invitant que le maire israélien, ardent défenseur de la colonisation, elle est présentée comme un acte de solidarité avec l’État d’Israël, au moment où son gouvernement nie tout autant la souveraineté partagée sur la ville que son caractère multiconfessionnel.
Loin de rassembler, cette inauguration va diviser Il est encore temps de revenir sur cette décision. Paris doit rester une ville qui porte haut et fort dans le monde le message d’une paix plus nécessaire que jamais, une paix que pourrait si magnifiquement symboliser une Jérusalem devenue capitale partagée de deux Etats.
Pierre Laurent
sénateur de Paris
vice président de la commission des affaires étrangères
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