Higelin. Marchais. Krasucki. Concert de solidarité pour les 10 de Billancourt. Prestation gratuite d'un chanteur très engagé ! Photo Jean-Luc Villin
« Pourra-t-on un jour vive sur la Terre sans colère, sans mépris... » Des milliards d’étoiles pour Jacques Higelin.
JACQUES HIGELIN, L'ADIEU A UN AMI
Nous venons de perdre un ami, un grand ami de l'Humanité et de la Fête de l'Humanité, alors que la France, elle, perd une figure artistique cardinale. Nous sommes tous sous le choc et très attristés par la disparition de Jacques Higelin. Depuis les années 60, il a marqué le monde de la chanson et plus largement le champ artistique avec une créativité toujours renouvelée et sur le qui-vive, avec une audace rare, une liberté totale d'esprit au service de son art. De la chanson artisanale au rock français aux accents contestataires, il a été un immense inventeur de la création contemporaine engagée. Ses héritiers sont nombreux...
Jean-Emmanuel Ducoin, journaliste à l'Humanité
Le chanteur Jacques Higelin, un des pionniers du rock français, est décédé vendredi matin à Paris à l'âge de 77 ans, a annoncé sa famille.
Jacques Higelin, est l'auteur-compositeuir d'une vingtaine d'albums et quelques chansons inoubliables, parmi lesquelles "Pars", "Champagne" ou encore "Tombé du ciel". Il est le père de trois enfants artistes, le chanteur Arthur H, la chanteuse Izia Higelin, et le réalisateur Kên Higelin.
Artiste attachant aux airs d'éternel adolescent, cet "enchanteur", auteur, compositeur et interprète, a rassemblé un public de fidèles autour de ses chansons et de ses concerts incarnés, durant desquels il improvisait sans relâche, passait du piano à l'accordéon ou la guitare et apostrophait les spectateurs Homme de coups de gueule et de coups de coeur, toujours révolté, Higelin évoque dans certaines de ses chansons la société, les sans-papiers ou les difficultés économiques, et s'engage à plusieurs reprises aux côtés des sans domicile fixe. Alternant ballades aériennes, rock énergique et envolées lyriques, jonglant avec le texte en amoureux des mots. Né le 18 octobre 1940 à Brou-sur-Chantereine (Seine-et-Marne), d'une mère belge et d'un père alsacien, Jacques Higelin quitte l'école à 14 ans. Il grandit en écoutant du jazz et de la chanson, Léo Ferré ou Jacques Brel, et rencontre à la fin des années 50 Henri Crolla, guitariste d'Yves Montand, figure familière de son adolescence.
Mais c'est comme comédien qu'il commence sa carrière. Au début des années 60, il s'inscrit au Cours Simon. Il débute au théâtre en 1959 avec "Bon week-end, Monsieur Bennett", mis en scène par Michel Vitold, et se lance aussi au cinéma avec "Le bonheur est pour demain" d'Henri Fabiani (1961), "Bébert et l'Omnibus" d'Yves Robert (1963) ou "Elle court, elle court, la banlieue" de Gérard Pirès (1972). Il jouera au total dans une trentaine de films.
Son destin bascule avec une double rencontre décisive au milieu des années 60, celle des musiciens Areski et Brigitte Fontaine, avec lesquels il se produit en trio sous la houlette de Pierre Barouh. C'est l'époque de ses débuts dans la chanson, des communautés et des expériences. En 1965, il sort l'album "Douze chansons d'avant le déluge", enregistré en duo avec Brigitte Fontaine.
Lire aussi : Jacques Higelin, mémoires d’un libre chanteur
C’est avec une grande tristesse que nous apprenons la disparition de Jacques Higelin. Il disparait au moment du cinquantième anniversaire des mouvements de 1968 alors qu’il fut l’une des figures les plus marquantes de l’élan artistique né de la révolte de la société, de la jeunesse, des femmes. On se souvient de sa collaboration avec Brigitte Fontaine qui marqua l’avant-garde musicale au début des années 1970, tout comme de sa formidable capacité de réinvention pendant toute sa carrière, son talent hybride, sa passion si communicative et les liens intenses qu’il avait noué avec un public fidèle.
Jacques Higelin aura été l’un des fers de lance du renouvellement de la chanson populaire française dans le pas de Charles Trenet dont il avait perpétué l’allure du « fou chantant » ou de Boris Vian auquel il empruntait l’impertinence et l’humour. Sa chanson mettait en avant la poésie avec des textes qui empruntait à la tradition surréaliste alliés à une musique ouverte sur les nouvelles sonorités. Il était quelque part aussi beau poète que grand musicien, sans oublier ses talents d’acteurs prêtés à de nombreux rôles de cinéma.
Homme au grand cœur, engagé à gauche, mobilisé aux cotés de la fondation Abbé Pierre pour le droit au logement, dans les luttes ouvrières, antiracistes, internationalistes ou écologiques, il était en permanence concerné par le sort des plus humbles. Jacques Higelin aura enchanté le public fervent de la Fête de l’Humanité à cinq reprises, de 1975 à 1999. Il lègue un héritage musical riche et fécond aux nouvelles générations d’artistes. Il nous laisse une immense œuvre.
C’est une voix aussi populaire qu’exigeante que nous pleurons aujourd’hui en gardant en tête ses inépuisables mélodies qui appartiennent désormais au bel et grand patrimoine populaire.
COMMUNIQUE DE PRESSE du PCF
Higelin : "Les communistes perdent un ami, la France perd une figure artistique cardinale" (Pierre Laurent)
Je suis choqué et très attristé de la disparition de Jacques Higelin. Depuis les années 60 il a marqué profondément le monde de la chanson et plus largement le champ artistique avec une créativité toujours renouvelée et sur le qui-vive.
Promoteur d’une chanson artisanale, puis d’un rock français aux accents libertaires, inclassable inventeur de formes métissées et hybrides, il a nourri l’oreille de plusieurs générations et laisse une marque profonde et durable dans la création contemporaine. Sa descendance artistique est riche. Homme de cœur et d’engagement il a toujours conservé une grande proximité avec les gens ordinaires et a su rester attentif au monde qui l’entoure ce dont ont témoigné ses nombreuses participations à des concerts de solidarité avec le monde ouvrier, les sans-papiers ou de soutien aux causes de la justice, de l’écologie et de la liberté.
Les communistes perdent un ami, la France perd une figure artistique cardinale, une des belles incarnations de cet esprit français généreux et audacieux que nous célébrons en cette année anniversaire de mai 68, dont l’œuvre de Jacques Higelin garde à jamais l’irrévérence rieuse.
Je m’incline devant sa mémoire et adresse mes plus vives condoléances à ses proches et à ses enfants Arthur, Isïa et Kên.
Pierre Laurent, secrétaire national du PCF,
Paris, le 6 avril 2018.
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