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23 mars 2018 5 23 /03 /mars /2018 07:30
Communistes de Beuzec (Finistère Sud) dans les années 30 - photos archives Pierre Le Rose

Communistes de Beuzec (Finistère Sud) dans les années 30 - photos archives Pierre Le Rose

Manifestation du Front Populaire à Concarneau - photos archives Pierre Le Rose

Manifestation du Front Populaire à Concarneau - photos archives Pierre Le Rose

Conflit social de la fabrique de galoches à Rosporden - photo archives Pierre Le Rose

Conflit social de la fabrique de galoches à Rosporden - photo archives Pierre Le Rose

Le Parti communiste: de l'espoir au doute

En Bretagne, le Parti communiste a longtemps dû se contenter de la "portion congrue" à gauche. Sauf au lendemain de la Libération. Ces dernières années, il avait amorcé une remontée intéressante. Mais cet espoir a été détruit par la crise d'identité qui le traverse et a fait place au doute, y compris dans les fiefs anciens, comme les monts d'Arrée. 

Au moment du congrès de Tours, le socialisme commençait à connaître une implantation non négligeable en Bretagne, surtout dans les zones qu'André Siegfried avait déjà recensées comme favorables, dans sa remarquable autant que minutieuse étude publiée en 1913 ("Tableau politique de la France de l'Ouest sous la IIIe République"). 

Les socialistes dirigeaient alors les mairies de Brest, Lambézellec, Saint-Marc dans la banlieue brestoise, Morlaix, Douarnenez, Concarneau, Audierne dans le Finistère, Lanester dans le Morbihan et Trignac en Loire-Atlantique. 

Aux élections législatives de 1919 les socialistes avaient eu trois élus en Bretagne: Goude, le premier député socialiste breton élu dès 1910, et Masson dans le Finistère, Aubry en Illle-et-Vilaine. Tous les trois resteront à la SFIO après Tours. 

Plusieurs délégués bretons participent à ces débats de Tours. Marcel Cachin, le directeur de "L'Humanité" auteur de la motion d'adhésion de l'Internationale Communiste, avec Fossard, ne représentait pas sa Bretagne natale mais la Seine dont il était élu, le Lot et la ... Corse.

Le syndicaliste brestois Jean-Marie Guibant et le métallurgiste nantais René Gomichon se firent remarqués par leurs vigoureuses interventions en faveur de la Troisième Internationale au cours du Congrès. Guibant donnait aussi une précision intéressante, à savoir la création d'une section entièrement acquise à l'Internationale Communiste à La Feuillée, près de Huelgoat, dans les Monts d'Arrée, que Siegfried avait qualifiés de "démocratie radicale" . Radicale au sens étymologique et non partisan du terme. 

Douarnenez chantait rouge 

Dès 1921, le jeune Parti communiste, issu de la majorité du Congrès de Tours, mettait de nouvelles structures en place. Louise Bodin pour l'Ille-et-Vilaine, René Gomichon pour la Loire-Atlantique, le Treis pour le Finistère et Soufflet pour le Morbihan en furent les premiers secrétaires fédéraux. Par contre les débuts du parti furent plus difficiles dans les Côtes-du-Nord, alors assez fermées à l'influence révolutionnaire. 

Ce Parti communiste des premières années, on a quelques peines à l'imaginer. Tant par ses actions que ses querelles intestines, il se rapprochait plutôt des formations gauchistes de l'après mai 68 que du PC tel qu'on le connaît aujourd'hui. Les "nouveaux rouges" faisaient preuve d'un activisme sans borne, portant aux quatre coins de la péninsule bretonne la parole révolutionnaire et le grand espoir né d'octobre 1917. 

Charles Tillon a raconté comment le jeune syndicaliste et communiste rennais qu'il était participait alors aux grandes luttes des ports du Sud-Finistère de Douarnenez à Concarneau ("On chantait rouge", éd. Laffont, 1977). 

Douarnenez fut la première ville de France à se donner un maire communiste. Ce ne fut pas, comme on le croit à tort, le célèbre Daniel Le Flanchec, mais un tapissier nommé Sébastien Velly, qui succédait, après bien des palabres, au socialiste Fernand Le Goïc au mois de juillet 1921.

Velly mourait subitement le 9 juillet 1924. Il fut alors remplacé par le secrétaire fédéral du PC, Daniel Le Flanchec, une personnalité complexe, mais d'une popularité extraordinaire. Le Flanchec fut le héros de la longue et sanglante grève des pen-sardines douarnenistes, les ouvrières des conserveries de poisson, à la fin de l'année 1924. Il fut victime d'un attentat où il faillit laisser la vie. 

En 1936, Le Flanchec devait rompre avec le PC, mais il resta maire de Douarnenez jusqu'en 1940, avant de mourir en déportation. 

Le rôle des émigrés   

Mais, mis à part ces quelques zones d'influence, le PC n'avait encore qu'une audience limitée en Bretagne. En 1924, il ne réunissait que 13 000 voix aux législatives. 

Dans les années trente pourtant, le PC commença à "décoller", à la faveur du Front populaire. Le rôle de l'émigration fut important. Une grande partie de la classe ouvrière bretonne formait en effet les gros bataillons prolétariens dans la banlieue parisienne, notamment à Saint-Denis. 

Beaucoup de ces travailleurs, revenus au pays avec les congés payés, contribuèrent à faire connaître les idées communistes dans les campagnes bretonnes, certaines s'avérant trs réceptives, du côté d'Huelgoat et de Callac. 

Aux élections législatives de 1936, le PC dépassait 10% des voix dans trois circonscriptions bretonnes: Lannion, Guingamp et surtout Quimper, qui englobait alors Pont-l'Abbé et Concarneau. 

Pierre Guéguin, maire de Concarneau depuis 1935, futur martyr de Châteaubriant, obtenait 23% des voix au premier tour. Il manquait de peu le siège de député, le radical sortant se maintenant au second tour, contrairement aux accords du Front populaire. Dans la montagne huelgoataine, les scores communistes approchaient déjà les 20%. Mais à ces mêmes élections de 1936, la SFIO avait huit élus en Bretagne. 

Des lendemains qui chantent 

La Résistance, où son rôle fut considérable, permit au PC d'acquérir une implantation nouvelle en Bretagne. Charles Tillon devenait même ministre. 

 

Pierre Guéguin, élu maire communiste de Concarneau en 1935

Pierre Guéguin, élu maire communiste de Concarneau en 1935

Charles Tillon, ministre de l'Armée, à Carhaix à la libération (photo des archives Alain et Jean-Claude Cariou)

Charles Tillon, ministre de l'Armée, à Carhaix à la libération (photo des archives Alain et Jean-Claude Cariou)

Congrès du PCF - la délégation du PCF à Strasbourg en 47, photo Archives Pierre Le Rose (avec Daniel Trellu, Gabriel Paul, Pierre Le Rose, Marie Lambert)

Congrès du PCF - la délégation du PCF à Strasbourg en 47, photo Archives Pierre Le Rose (avec Daniel Trellu, Gabriel Paul, Pierre Le Rose, Marie Lambert)

Jeunes communistes à la Libération (archives Pierre Le Rose)

Jeunes communistes à la Libération (archives Pierre Le Rose)

Marcel Cachin dans le sud-Finistère, avec Pierre Le Rose, alors secrétaire départemental (archives Pierre Le Rose)

Marcel Cachin dans le sud-Finistère, avec Pierre Le Rose, alors secrétaire départemental (archives Pierre Le Rose)

Des lendemains qui chantent 

La Résistance, où son rôle fut considérable, permit au PC d'acquérir une implantation nouvelle en Bretagne. Charles Tillon devenait même ministre. La proportionnelle aidant, des députés communistes étaient élus dans les départements bretons pendant toute la IVe République. 

En novembre 1946, les listes communistes recueillaient 341 793 voix dans les cinq départements bretons. En pourcentage, cela faisait 22,34% des suffrages exprimés avec des pointes à 31,5% dans les Côtes-du-Nord et 27,8% dans le Finistère. Scores supérieurs à ceux de la SFIO, jamais retrouvés par le PC en Bretagne. 

En 1951 et en 1956, le PC se maintenait à un excellent niveau électoral. Dans la dernière législature de la IVe République, les députés communistes bretons étaient au nombre de cinq: Marcel Hamon et Guillaume Le Caroff dans les Côtes-du-Nord, Gabriel Paul et Alphonse Penven, le maire de Huelgoat, dans le Finistère, Gravoille en Loire-Atlantique, auxquels il faut ajouter Emmanuel d'Astier de la Vigerie, élu en Ille-et-Vilaine sur une liste commune progressiste communiste. 

Fer de lance de l'union 

Malgré la "guerre froide", le PC maintenait de fortes positions en Bretagne et gardait tout son pouvoir d'attraction politique et culturelle. Son pouvoir d'attraction sociale aussi comme en témoignent les luttes de l'époque, notamment à Brest en 1950. De même, l'opposition du PC aux guerres coloniales, en Indochine et en Algérie, lui valait le soutien d'éléments jeunes et combatifs. 

L'arrivée du général de Gaulle au pouvoir en 1958 portait un coup sévère au PC. Le nouveau mode de scrutin mis en place par la Ve République naissante (majoritaire à deux tours et non plus la représentation proportionnelle) écartait pour vingt ans les communistes bretons du Parlement. 

Politiquement ce fut la période de rapprochement avec les socialistes, c'est-à-dire avec le PSU surtout. Le PC contribua largement aux victoires municipales de la gauche à Saint-Brieuc en 1962 et à Lorient en 1965. 

Fer de lance de l'unité des forces de gauche le PC conservait en Bretagne de solides positions dans ses bastions traditionnels: les Monts d'Arrée, bien sûr, la Montagne Noire, le sud du pays Bigouden, le Trégor rouge, la région de Guingamp, Hennebont, Lanester, Trignac... 

Douarnenez, perdue en 1951, lui faisait certes défaut, mais en 1971, le communiste Michel Mazéas retrouvait un fauteuil de maire qui a valeur historique pour son parti.

C'était alors une période assez exaltante pour les communistes. Sous l'impulsion de Waldeck-Rochet, le PC s'efforçait de se dégager des pesanteurs thoréziennes. Aux élections présidentielles de juin 1969, Jacques Duclos obtenait un excellent score, y compris en Bretagne. Avec 257 818 voix, et 15,75%, le candidat du PC devançait largement, dans les cinq départements bretons, le PSU de Michel Rocard (4,19%) et le socialisme de Gaston Defferre (3,98%). 

C'était voici treize ans à peine! 

Cette nouvelle progression communiste allait pourtant piétiner à partir de 1972. Le nouveau Parti socialiste occupait rapidement un terrain sociologiquement favorable et laminait le centrisme en Bretagne. 

Pour l'heure, le PC recueillait quand même les fruits de l'unité avec les socialistes, lors des cantonales de 1976 et surtout des municipales de mars 1977. Le PC gagnait de nouvelles mairies (Concarneau qu'il avait perdu en 1947, Carhaix, Guingamp..) et entrait dans les conseils municipaux de plusieurs grandes villes bretonnes. 

 

- A suivre   

Rentrée scolaire catastrophique - tract du PCF en 1962 (archives Pierre Le Rose)

Rentrée scolaire catastrophique - tract du PCF en 1962 (archives Pierre Le Rose)

Les candidats du Parti Communiste aux cantonales dans le Finistère en septembre 1967 (Bretagne Nouvelle)

Les candidats du Parti Communiste aux cantonales dans le Finistère en septembre 1967 (Bretagne Nouvelle)

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