Dans un contexte de dénonciation grandissant, une mère a perdu la garde de ses deux enfants en raison de son athéisme déclaré.
En guise de cadeau de Noël, un tribunal des affaires familiales du Caire a décidé de retirer la garde de ses deux enfants à une mère qui se déclarait athée. Une première au pays du maréchal Al Sissi qui, en juillet 2013, avait renversé le leader des Frères musulmans Mohammed Morsi, aujourd’hui condamné à la prison à vie. Le régime militaro-islamiste aux prises au terrorisme islamiste, notamment dans le Sinaï et les régions éloignées des grandes villes, a décidé de lancer des signaux positifs aux défenseurs zélés de la charia. « L’extrémisme et l’athéisme sont les deux faces d’une même pièce », martèlent ainsi depuis plusieurs mois des imams sur les chaînes de télévision égyptiennes dans ce qui s’apparente à une campagne nationale contre la libre-pensée. Cette séquence réactionnaire a commencé après la publication d’un rapport de la très officielle Direction générale des fatwas, dont l’une d’elles décrète l’athéisme comme un mal qui se diffuse à grande vitesse auprès de la jeunesse.
La vie privée des citoyens surveillée en égypte
Dans la foulée, la commission des Affaires religieuses du Parlement a élaboré une loi contre l’athéisme. « Toute personne affirmant publiquement son athéisme ou sa sympathie pour les athées sera passible d’amende ou d’une peine de prison. » Ce durcissement soudain intervient dans un contexte nouveau. D’après le chercheur Houssame Bentabet, qui consacre une thèse à l’abandon de l’islam depuis 2014, l’athéisme progresserait fortement dans le monde musulman et le phénomène ne ferait que commencer. « Le problème, c’est la condamnation à mort des apostats inscrite dans le droit musulman classique, sur laquelle s’accordent les quatre écoles juridiques sunnites et reprise dans la Constitution de certains pays majoritairement musulmans », soulignait en août dernier le sociologue chez nos confrères de la Croix. Mais cette rage contre les athées ne touche pas que le monde musulman. « Les athées sont exécutés dans 13 pays musulmans mais sont discriminés partout dans le monde », rappelait en 2013 un rapport de l’Union internationale humaniste et éthique de 2013. En Inde, par exemple, les services de police répugnent à enquêter sur les meurtres d’athées par des fondamentalistes religieux. Aux États-Unis, dit le rapport, bien que la situation soit « plutôt satisfaisante », une série de lois et de pratiques fait « l’équation entre être croyant et être américain ». Pour ce qui concerne l’Égypte, le projet de loi prévoit une surveillance au cœur même de la vie privée des citoyens. Une police spéciale devrait être mise en place sur Internet pour vérifier tout glissement antireligieux. Une loi qui viole la Constitution égyptienne, qui jusqu’à présent garantissait la liberté de croyance.
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