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24 décembre 2017 7 24 /12 /décembre /2017 15:38

S'appuyant sur une base de 175 millions de données permettant de mesurer les différences de revenus et de patrimoine, les économistes de plus de 70 pays dénoncent une montée en flèche des disparités dans le monde depuis quarante ans.

Le travail des économistes compilé dans le Rapport sur les inégalités mondiales dessine un profil des inégalités qui, malgré les différences entre continents et pays, semble suivre la même trajectoire. Les économistes en ont identifié plusieurs causes.

 

1 - LES VAGUES DE PRIVATISATIONS

Tout commence par l'inégale répartition du capital entre privé et public. Si la richesse nationale a considérablement augmenté, dans le même temps, la privatisation des services et des entreprises s'est accélérée. « Ces dernières décennies, d'importants transferts du patrimoine public vers le privé se sont opérés dans la plupart des pays, riches comme émergents », expliquent les auteurs. Le patrimoine privé a doublé ­ passant de 200350 % du revenu national en 1970 à 400-700 % aujourd'hui ­, voire même triplé ou quadruplé en Russie et en Chine.

À l'inverse, le patrimoine public net (les actifs publics moins les dettes) a diminué partout, jusqu'à rester tout juste positif en Allemagne, en France ou au Japon, devenant négatif au Royaume-Uni et aux États-Unis. « Le fait que l'on observe des pays avec un patrimoine public négatif est un fait économique majeur et tout à fait particulier, alerte l'économiste Lucas Chancel. Cela veut dire que, si le gouvernement américain vendait l'ensemble de ses écoles, hôpitaux, infrastructures de transport et titres, il ne serait même pas en mesure de rembourser sa dette. » Ce qui « limite la capacité d'action des États contre les inégalités ». De plus, la hausse du capital privé a profité essentiellement aux plus riches, alors que les États, en vendant leurs actifs, se sont privés d'une rente régulière. Au final, « les détenteurs de patrimoine privé se sont enrichis, mais les États se sont appauvris », expliquent les auteurs, alors que richesse nationale a largement augmenté.

COMMENT LES INEGALITES SE CREUSENT (L’HUMANITE – VENDREDI 15 DECEMBRE 2017 – CLOTILDE MATHIEU)

 

2. - CHUTE DE LA FISCALITE POUR LES PLUS RICHES

« Entre 1970 et le milieu des années 2000, la progressivité de l'impôt a été fortement réduite dans les pays riches et dans certains pays émergents », annoncent les auteurs. « Notre rapport est un cri d'alarme contre cette lourde tendance inégalitaire. Car, chaque pays pris isolément a envie d'attirer chez lui les plus riches », note Thomas Piketty. Dans le même temps, l'impôt des classes moyennes augmente. Pour les auteurs, si la réduction des inégalités passe par la généralisation de l'impôt progressif, celle-ci ne pourra se faire qu'à condition de lutter contre l'évasion fiscale. « Les capitaux placés dans les paradis fiscaux ont considérablement augmenté depuis les années 1970 et représentent aujourd'hui plus de 10 % du PIB mondial », écrivent-ils.

Du fait d'un plus grand recours à ces artifices, « il est difficile de mesurer et d'imposer correctement le patrimoine et les revenus du capital à l'heure de la mondialisation », regrettent les économistes. Et de proposer la création d'« un registre mondial des titres financiers permettant d'identifier les détenteurs ».

COMMENT LES INEGALITES SE CREUSENT (L’HUMANITE – VENDREDI 15 DECEMBRE 2017 – CLOTILDE MATHIEU)
COMMENT LES INEGALITES SE CREUSENT (L’HUMANITE – VENDREDI 15 DECEMBRE 2017 – CLOTILDE MATHIEU)

3 - BAISSE DES DÉPENSES PUBLIQUES POUR LES PLUS PAUVRES

L'autre problème concerne les plus bas revenus. Les divergences « entre l'Europe de l'Ouest et les États-Unis, qui avaient des niveaux d'inégalité comparables en 1980, mais se trouvent aujourd'hui dans des situations radicalement différentes », s'expliquent, selon Thomas Piketty, par « une inégalité considérable en matière d'éducation ». « Cela montre que les politiques publiques ont un fort impact sur les inégalités », ajoute-t-il. Aux États-Unis, sur 100 enfants dont les parents appartiennent aux 10 % des revenus les plus bas, seuls 20 à 30 vont à l'université. Ce chiffre passe à 90 lorsque les parents appartiennent aux 10 % des plus hauts revenus. Or, rappellent les auteurs du rapport, « une démocratisation de l'accès à la formation est un puissant levier », même si « l'éducation ne suffira pas à réduire les inégalités ». Dans leur rapport, ils préconisent une « meilleure représentation des travailleurs dans les organes de direction des entreprises et des salaires minimaux corrects ».

Reste que les inégalités pourraient encore s'aggraver. Dans leur rapport, les auteurs anticipent une nouvelle hausse d'ici à 2050, sur la base des tendances actuelles. La part de patrimoine des plus riches passerait ainsi de 33 % à 39 %, tandis que « la classe moyenne mondiale » verrait sa part de patrimoine « comprimée », de 29 % à 27 %. Pour autant, « le but de ce rapport (n'est) pas de se lamenter », mais de voir « comment il est possible, au sein d'une même mondialisation, d'avoir différentes politiques nationales », a expliqué Thomas Piketty sur France Inter.

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