LES GRANDS ENJEUX POUR NOTRE PLANÈTE, PAR GÉRARD LE PUILL
Alors que l'on débattra de l'avenir des paysans français et du contenu de notre assiette jusqu'à décembre dans les 14 ateliers des états généraux de l'alimentation, les organisateurs n'ont pas prévu d'évoquer la mon dialisation libérale de l'agriculture, ni des accords de libre-échange que ne cesse de négocier la Commission européenne... avec l'aval de la France. Comment alors « rendre les prix d'achat des produits agricoles plus rémunérateurs pour les agri culteurs », comme le suggère un atelier, si demain, comme aujourd'hui, il va suffir d'importer un peu plus de tomates du Maroc, un peu plus de melons d'Espagne pour faire chuter les prix de ces mêmes produits cultivés en France ?
PLUS DE TOMATES DU MAROC !
Comment pourra-t-on « améliorer les relations commerciales et con tractuelles entre producteurs, trans formateurs et distributeurs », comme l'annonce un autre atelier, s'il suffit aux derniers nommés d'im porter plus de lait de vache, plus d'animaux de boucherie, plus de viande de porc et de charcuterie pour obliger leurs fournisseurs hexagonaux, que sont les industriels de l'agroalimentaire, à baisser leurs prix de vente et à moins payer la matière première aux paysans ? Aux bonnes volontés retenues pour travailler dans ces deux ateliers, nous conseillons de lire ou de relire le rapport de la commission Attali. Ce rapport date de l'année 2008 et il a inspiré la loi de modernisation économique (LME) que souhaitait le président Sarkozy pour faire plai sir à Michel Édouard Leclerc, le champion autoproclamé des prix bas... dès lors qu'ils sont obtenus en ruinant les paysans.
Inspirée par un rapport de 2008, la loi de modernisation économique est surtout celle du plus fort.
Parlant du rôle positif qu'il attri buait à Leclerc, Carrefour, Au chan, Casino et quelques autres prédateurs, le rapporteur de la commission Attali voulait leur donner plus de pouvoir en écrivant ceci : « Les réglementations ac tuelles réduisent considérablement le potentiel de ce secteur en termes de pouvoir d'achat, de croissance et d'emploi. Plus précisément, les lois Galland et RoyerRaffarin ont eu pour effet d'empêcher, ou de rendre plus coûteuse, l'implantation de nouvelles entreprises de distribu tion et ont considérablement réduit la concurrence entre les enseignes existantes. »
LARBIN DU PATRONAT
Bref, plus de concurrence et toujours plus de mètres carrés de sur face de vente devaient on se de mande comment réduire le prix de revient du panier de la ménagère, selon le rapporteur qui avait mis beaucoup de zèle à rendre logiques les revendications égoïstes avancées par des grands patrons et des économistes libéraux au sein de la commission Attali.
Dans un autre passage du même rapport, il écrivait aussi qu'il fallait « réduire le coût du travail pour toutes les entreprises en transférant une partie des cotisations sociales vers la contribution sociale généra lisée (CSG) et la TVA ». Ce qui nous est annoncé aujourd'hui en légifé rant par ordonnances sur exigence du président de la République.
Signalons enfin que le rapporteur qui servit de larbin au patronat en rédigeant un texte esclavagiste de 250 pages pour Nicolas Sarkozy en 2008 était moins connu à l'époque qu'il ne l'est aujourd'hui... Mais c'était déjà Emmanuel Macron.
glepuill@humanite.fr
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