Carte postale de Morlaix (église Ste Mélaine et place Thiers) datant du début du XXe siècle (collection particulière Ismaël Dupont)
Le Finistère est à la fin du XIX ème siècle le 10ème département français par la densité de population et le 7ème département français par sa quantité d'habitants.
A l'époque, Brest (sans les communes de Saint-Marc, du Gouesnou, de Lambézellec) compte 18 173 habitants.
Quimper ne compte que 13 879 habitants.
Et Morlaix compte 15 183 habitants, ce qui en fait la deuxième ville du Finistère (sans Ploujean, 3 000 habitants, Plourin, 3000 habitants, et St Martin des Champs, 1 500 habitants), loin devant Douarnenez (8 637 habitants), Landerneau (8 195 habitants), Saint Pol de Léon (7 000 habitants), Pont Labbé (4 991 habitants), Plouigneau (4 982 habitants), Concarneau (4 745 habitants), Roscoff (4 000 habitants), Châteaulin (3 400 habitants), Lesneven (2 900 habitants).
Par rapport au reste des villes bretonnes, Morlaix compte presque autant d'habitants que St Brieux (16 000 habitants), bien plus que Dinan (8 000 habitants), Guingamp (8 000 habitants), Lannion (6 200 habitants), Saint-Malo (10 000 habitants), Redon (6 446 habitants), Vitré (5 132 habitants).
Voici comment V.A Malte-Brun décrit Morlaix il y a 130 ans :
« Morlaix, station de la grande ligne du chemin de fer de Paris à Brest par Rennes (réseau de l'Ouest), est une ancienne et jolie ville maritime de 15,183 habitants, agréablement située au pied de deux collines, au confluent des rivières de Jarlot et de Queffleut, dont les eaux réunies forment son port, distant de 7 kilomètres de la mer.
C'est un chef-lieu d'arrondissement et d'un canton, avec tribunal de première instance et de commerce, société d'agriculture, collège communal et école d'hydrographie ; elle formait autrefois un gouvernement particulier, avec une amirauté et une sénéchaussée, et dépendait du diocèse et de la recette de Tréguier, du parlement et de l'intendance de Rennes.
Morlaix, une des jolies villes du Finistère, est fort ancienne, puisqu'elle paraît avoir emprunté son nom de Mons Relaxus, Mont Relais, Morlaix, à une ancienne station romaine.
Prise et reprise pendant les guerres de Bretagne, ravagée au XVIe siècle par la guerre civile, elle se rendit, en 1594, à Henri IV.
Les navires de 400 tonneaux pénètrent dans son port ; les quais en sont beaux. Les deux rivières réunies passent sous la place au moyen d'une voûte très hardie.
Morlaix possédait il y a quelques années, une tour dite d'argent, où les ducs de Bretagne faisaient battre monnaie, et qui a été démolie.
La manufacture des tabacs, l'école de navigation, l'hôpital, la salle de spectacle sont de beaux bâtiments.
C'est à Morlaix que débarquait, en 1548, Marie stuart, reine d'Ecosse, se rendant à Paris pour épouser le Dauphin ; elle y fut reçue par le seigneur de Rohan, entouré de toute la noblesse bretonne.
Les Ecossais de la Reine, un instant séparés du cortège, s'étant mis à crier : « Trahison ! Trahison ! », le sire de rohan se retourna vivement et cria de toute la force de ses poumons : « De par Dieu ! Jamais Breton ne fit trahison ! » ce qui suffit pour ramener l'ordre et la confiance.
Au temps des troubles religieux, Morlaix se déclara pour la Ligue, mais il fut réduit, en 1594, en l'obéissance du roi.
Le quartier Saint-Martin est le plus moderne ; il domine toute la ville, et doit son nom à une jolie église moderne, entourée de beaux jardins. Sur la nouvelle tour de cette église, on a élevé une statue de la vierge Marie, ayant le pied sur la tête du serpent et l'enfant Jésus dans ses bras.
Les autres églises de la ville sont Sainte-Mélaine, reconstruite au XVe siècle, et curieuse à visiter, et l'église Saint-Matthieu, qui n'a conservé d'ancien qu'une tour carrée et massive chargée d'ornements de la Renaissance.
Dans les rues des Nobles, de Bourret, de Sainte-Mélaine et la Grand'Rue, on voit des maisons en bois ouvragé qui datent du XVe, du XVIe et du XVIIe siècle.
L'hôtel de ville est moderne. Morlaix possède deux musées qui y ont été recemment créés : l'un des Beaux-arts, l'autre de curiosités ethnographiques de la région. Elle possède aussi depuis peu une société savante, sous l'impulsion de laquelle des fouilles faites aux environs de la ville ont amené la découverte de sépultures et d'antiquités gallo-romaines.
Morlaix fait un très grand commerce maritime ; à l'intérieur, elle commerce en beurre, grains, graines olégineuses, suifs, miels, cire, cuirs, toiles, fils, lin, chanvre, etc. Elle fabrique de la toile, de l'huile, des chandelles, et possède une importante manufacture des tabacs, des brasseries, des papeteries, une filature, des fabriques de pipes.
C'est la patrie du général Moreau, qu'un boulet français n'aurait pas dû rencontrer dans les rangs ennemis.
En venant de Rennes, on traverse la rivière sur un magnifique viaduc de 285 mètres de longueur, qui est élevé de 58 mètres au-dessus des quais. Il est divisé en deux étages, l'un de 9 arches, l'autre de 14 ; c'est un des ouvrages d'art les plus considérables qu'on ait construit en France.
(…) A l'embouchure de la rivière de Morlaix, sur un roc isolé, au milieu de la rade, s'élève le château du Taureau, forteresse massive construite sous le règne de François 1er, en 1525, pour garantir l'entrée de Morlaix contre les Anglais. Les fortifications de ce château furent augmentées en 1742. Il a servi de prison d’État ».
(La Bretagne au XIXe siècle, réédition de l'ouvrage de V-A Malte-Brun aux éditions Gisserot)
Lire aussi sur le "Chiffon Rouge":
Morlaix: de la fondation de la ville au 17e siècle. Une histoire de Morlaix, première partie
Morlaix au XVIIIe siècle: Une histoire de Morlaix, deuxième partie
Morlaix pendant la Révolution (I), Une histoire de Morlaix, troisième partie
Morlaix pendant la Révolution (II), Une histoire de Morlaix, troisième partie
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