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3 février 2017 5 03 /02 /février /2017 14:25

 

L’HUMANITE DIMANCHE

LA CHRONIQUE DE JEAN-CHRISTOPHE LE DUIGOU (*)

 

LE LBO FINANCE LE RACHAT D'UNE ENTREPRISE PAR UN EMPRUNT REMBOURSÉ PAR LA SOCIÉTÉ ACHETÉE... ÇA NE VA PAS SANS CASSE SOCIALE.

 

 

 

 

 

Caroll, La Halle, Chevignon, Naf Naf, Kookaï... Le premier groupe français d'habillement et de chaussures Vivarte est dans la tourmente. Après plusieurs cessions de magasins et des menaces sur l'enseigne André, plusieurs syndicats redoutent un plan de licenciement massif. La crise de Vivarte nous ramène à la manière dont la firme est tombée dans les griffes d'investisseurs financiers qui se sont littéralement enrichis en pillant le groupe. Au premier rang desquels le fonds Atticus qui en avait pris le contrôle en 2000 avant de le céder au fonds PAI en 2004, puis à Charterhouse en 2006... En cause, la dangereuse technique de reprise par LBO.

Le cas Vivarte n'est pas exceptionnel. La liste est longue des entreprises passées sous LBO au cours des années récentes. On peut retenir pour la France les exemples de Numericable, Picard, B & B Hotels, Govoyages, PagesJaunes, Cegelec, Courtepaille, TDF, du Printemps, de Legrand, Yoplait... Et, derrière les opérations les plus médiatisées, se cache une longue liste d'entreprises de taille moyenne qui ont été reprises par des fonds d'investissement depuis dix ans. Selon l'organisation des investisseurs financiers, près d'un salarié sur dix dépendrait aujourd'hui d'une firme sous LBO. Que se cache-t-il derrière ce sigle ? Une technique financière d'achat d'entreprises qui est tout sauf neutre.

Le leverage buy out (LBO) est un terme anglais qui signifie « financement d'acquisitions par emprunt ». Une société holding finance tout ou partie du rachat d'une entreprise en ayant recours à l'endettement bancaire ou obligataire remboursable par la société achetée, ce qui permet d'augmenter artificiellement la rentabilité des capitaux propres. Ajoutons que l'attrait des LBO est renforcé par l'application d'un régime d'intégration fiscal favorable. Le « miracle » a bien sûr une contrepartie. La dette d'acquisition, bancaire ou non, est remboursée par une ponction plus importante sur les flux de trésorerie de la société achetée, qui s'en trouve appauvrie d'autant.

Première conséquence, une pression accrue sur la masse salariale, l'emploi et les salaires. Pour dégager de la trésorerie, il faut diminuer les coûts, réduire le fonds de roulement. D'où généralement un plan social pour dégraisser les effectifs qui accompagne la reprise de l'entreprise. Deuxième conséquence, la réduction des investissements. Si l'objectif pour le financier est de revendre ses titres au bout de cinq ans, pourquoi se préoccuper du long terme ? Pourquoi faire de la recherche, du développement ou des investissements qui ne donneront des résultats que dans sept ou dix ans ? Troisième conséquence, la perte de contrôle sur la stratégie de l'entreprise. Cette dernière se réduit à la plus simple expression. Pas question de s'interroger sur les produits et services à développer, les marchés à conquérir, les alliances à envisager.

Tous ces éléments n'ont pas de sens pour les financiers, qui se sont organisés pour que tous les pouvoirs essentiels soient transférés à la holding. En fait, c'est ce que les experts appellent « le pouvoir disciplinaire de la dette » qui est installé à tous les étages.

La compréhension de cette pratique désastreuse est indispensable pour esquisser des alternatives. Il est nécessaire de mettre sur pied de nouveaux instruments de financement des entreprises : pôle financier public, fonds régionaux pour le développement, institutions coopératives.

(*) Économiste et syndicaliste.

 

 

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