Les cours du blé de l’orge et du maïs restent anormalement bas du fait d’une offre mondiale abondante et mettent la trésorerie des exploitants dans le rouge. Alors que la France peine à vendre ses céréales, 25 000 tonnes de maïs toxique en provenance de Roumanie sont bloqués au port de Brest depuis près d’un mois. Ainsi fonctionne le libre échange au détriment de la santé des populations, y compris dans les pays membres de l’Union européenne.
En ce début de janvier 2017, les cours du blé tendre pour l’exportation restent aussi bas que durant l’année 2016. La semaine dernière on en était à 169 € la tonne de blé panifiable rendue au port de Rouen pour l’exportation. Avec un tel prix, les producteurs ne couvrent pas leurs coûts de production une fois déduit le coût de la logistique. La situation des céréaliers français s’est trouvée aggravée par une chute sensible des rendements en 2016 en raison de la trop grande humidité de la fin du printemps. En céréales à paille, la baisse moyenne des rendements a été de 30% en France mais de 40% dans certaines zones dont la Beauce.
Le prix dans les échanges physiques du blé ayant tendance depuis des années à s’aligner sur la cotation des salles de marché, les cours sont sous l’influence toujours spéculative de la loi de l’offre et de la demande. Les trois dernières récoltes, surtout celle de 2016, ont été abondantes dans de grands pays exportateurs comme la Russie, l’Ukraine, la Roumanie, l’Australie, le Canada, les Etats Unis et l’Argentine. La France, très tourné vers l’exportation, subit, durant la campagne en cours, la double peine des prix bas et des faibles volumes à vendre par rapport à 2015.
Dans sa note de conjoncture du 11 janvier, FranceAgrimer indique que les prévisions d’utilisation de blé tendre en France seront de 4,8 millions de tonnes pour la meunerie et de 5,5 millions de tonnes pour les aliments du bétail. Les aliments du bétail utilisent ainsi le blé de moindre qualité panifiable, abondant cette année à cause du mauvais temps à la fin du printemps 2016. Les ventes de blés panifiables vers les autres pays de l’Union européennes devraient atteindre 6,1 millions de tonnes sur douze mois et celles vers les pays tiers 4,8 millions de tonnes. Dans ce domaine la concurrence est rude. L’Egypte a acheté beaucoup de blé russe cette année tandis que l’Algérie a diversifié ses achats en important du blé argentin en plus grande quantité que l’an dernier.
« Il est urgent de tourner le dos à une agriculture intensive et polluante qui s’est développée sous la pression de la finance »
A la faveur de la remontée du dollar, la France espère un regain des exportations au milieu de l’hiver, époque de l’année ou la logistique est moins bien assurée que le reste de l’année à partir des ports de la Mer Noire. A ce propos, une cargaison de 25 000 tonnes de maïs partie de la Mer Noire demeure bloquée depuis la mi-décembre dans le port de Brest.L’Humanité lui avait consacré un article dans son édition du 23 décembre dernier. La cargaison était destinée à l’usine d’aliments du bétail de Plouisy, près de Guingamp dans les Côtes d’Armor. Mais au port de Brest on a décelé dans cette cargaison une importante concentration de phosphine. Ce produit de traitement des insectes et des acariens est hautement toxique pour les mammifères et donc pour les humains. Ce produit n’est plus autorisé en France. Mais il a été massivement utilisé en Roumanie un pays membre de l’Union européenne, sans que l’on sache si ce fut dans un silo de conservation du grain ou dans la mise en culture.
Près d’un mois après son arrivée à Brest, ce maïs dont le transport de Brest à Plouisy nécessiterait le chargement de plus de 800 camions est toujours bloqué au port. Dans un communiqué, la fédération communiste de Finistère et la section de Brest du PCF s’étonnent d’entendre dire par le représentant du préfet que « ce n’est pas un sujet de santé publique». Elles relèvent que selon les dockers du port de Brest « il aurait suffit de respirer le gaz au dessus de la cal pour partir en un quart d’heure » lors du déchargement de ce maïs toxique. Et le communiqué des communistes finistériens de tirer cette conclusion : « Il est urgent de tourner le dos à une agriculture intensive et polluante qui s’est développée sous la pression de la finance, et d’engager une transition écologique vers une agriculture paysanne relocalisée, permettant aux agriculteurs de vivre de leur travail et aux consommateurs d’accéder à une alimentation saine et de qualité ».
On pourrait avec cette affaire parler des dessous de la mondialisation. Sauf qu’il s’agit dans le cas qui nous occupe de commerce intra-communautaire avec des pays qui, au sein de l’Union européenne, n’appliquent pas les mêmes règles concernant la sécurité sanitaire des aliments pour les humains et le bétail. Et que dire des risques que l’on fait prendre aux travailleurs amenés à manipuler ces produits toxiques ?
Il faut aussi savoir que la France est un exportateur net de maïs grain. Et que le maïs français peut, en théorie, être livré par trains entiers en gare de Guingamp, à moins de dix kilomètres de l’usine d’aliments du bétail de Plouisy. Mais il est probable que le maïs toxique en provenance de Roumanie était bradé en raison de sa toxicité. Les dirigeants de la coopérative Triskalia ont cru pouvoir baisser le prix de revient de leurs aliments du bétail en achetant ce maïs de Roumanie dont ils ne pouvaient savoir qu’il était empoisonné. Néanmoins, ils n’ont pas joué collectif en faveur de l’intérêt général via cette importation à bas prix alors que les coopératives ont été créées pour mieux rémunérer les producteurs d’une façon générale.
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